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Afficher et télécharger le PDF : Sommaire et principales recommandations

ISBN: 978-1-4868-5830-9 (Imprimé)
ISBN: 978-1-4868-5831-6 (HTML)
ISBN: 978-1-4868-5832-3 (PDF)
Approuvé par la CODP : le 27 janvier 2022

 

AVERTISSEMENT : Certains sujets abordés dans ce sommaire peuvent être des déclencheurs pour certains lecteurs, notamment les références à l’intimidation, aux sévices émotionnels et physiques, aux troubles mentaux, ainsi qu’à l’automutilation et au suicide. Veuillez prendre soin de vous-même en lisant ce matériel. Plusieurs ressources sont à votre disposition si vous avez besoin de soutien, notamment dans le site Web de la CODP, à l’adresse www.ohrc.on.ca/fr, dans la liste de soutiens.

 

Introduction

Le droit à l’égalité en matière d’éducation inclut le droit de lire.

Le 9 novembre 2012, la Cour suprême du Canada a rendu publique une décision unanime qui reconnaissait que l’apprentissage de la lecture n’est pas un privilège, mais un droit de la personne fondamental et essentiel. La Cour a établi que Jeffrey Moore, un élève de la Colombie-Britannique ayant la dyslexie, avait le droit d’accès aux mesures de soutien et d’intervention intensives dont il avait besoin pour apprendre à lire. En omettant de fournir à Jeffrey Moore les programmes et services d’éducation de l’enfance en difficulté requis, y compris des mesures d’intervention intensives, le conseil avait bloqué l’accès véritable de l’élève à l’éducation, ce qui constituait de la discrimination aux termes du code des droits de la personne de la Colombie-Britannique. De dire la CSC :

Des services d’éducation spécialisée adéquats ne sont […] pas un luxe dont la société peut se passer. Dans le cas des personnes atteintes de troubles d’apprentissage sévères, de tels services servent de rampe permettant de concrétiser l’engagement pris dans la loi envers tous les enfants […] à savoir l’accès à l’éducation.

La décision Moore c. Colombie-Britannique (Éducation) (Moore) a confirmé qu’au Canada, les lois régissant les droits de la personne protègent le droit de tous les élèves aux mêmes chances d’apprendre à lire. Cette décision a été qualifiée de victoire importante pour les élèves handicapés, et plus particulièrement les élèves ayant des troubles de lecture. Beaucoup de personnes espéraient qu’elle serait un catalyseur de changement systémique au sein du système d’éducation de l’Ontario.

Près de 10 ans après la décision Moore, la Commission ontarienne des droits de la personne (CODP) a publié un rapport sur son enquête publique relative au droit de lire. Le droit de lire s’applique à TOUS les enfants, et pas seulement aux élèves ayant des troubles de lecture. Cette enquête a révélé que l’Ontario ne respectait pas ses obligations en matière d’exercice du droit de lire des élèves.

Malgré des décennies de recherches multidisciplinaires sur les méthodes les plus efficaces d’enseignement des compétences initiales en lecture et la décision Moore affirmant que l’accès véritable à l’éducation, y compris à l’apprentissage de la lecture, est un droit de la personne, l’Ontario manque systématiquement à ses obligations envers les élèves ayant des troubles de lecture et beaucoup d’autres élèves. La décision Moore n’a pas donné les résultats escomptés. Par conséquent, de nombreux élèves courent le risque d’éprouver des difficultés la vie durant. L’enquête de la CODP ne portait pas uniquement sur le droit à l’égalité en matière d’apprentissage de la lecture, mais également sur le droit à l’égalité en matière de perspectives d’avenir.

La science de la lecture

Dans le présent rapport, les termes comme « science de la lecture », « fondé sur la recherche », « fondé sur des données probantes » et « fondé sur la science » renvoient au vaste corpus de recherches scientifiques ayant examiné comment se développent les compétences en lecture et comment assurer le plus haut niveau de réussite dans l’enseignement de la lecture à tous les enfants. En revanche, la science de la lecture réunit les résultats de milliers d’études et de méta-analyses revues par des comités de lecture et fondées sur des méthodes scientifiques rigoureuses. La science de la lecture repose sur l’expertise de différents champs d’activité, y compris l’éducation, l’éducation de l’enfance en difficulté, la psychologie du développement, la psychologie de l’éducation et la science cognitive.

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Lancement d’une enquête publique

La CODP a pour mandat de protéger les droits de la personne et l’intérêt public en Ontario, et de favoriser le respect du Code des droits de la personne de l’Ontario (Code). Elle y parvient en élaborant des politiques, en menant des enquêtes publiques et en intervenant stratégiquement devant les tribunaux. Bien que la CODP n’ait pas les mêmes pouvoirs que le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario (TDPO) lorsqu’il s’agit de rendre des décisions juridiquement contraignantes ou d’ordonner des réparations en cas de discrimination, elle a le pouvoir singulier de mener des enquêtes systémiques dans l’intérêt public (article 31 du Code). Cela inclut le pouvoir de réclamer des documents, données et informations, de les analyser avec l’aide d’experts et de publier des conclusions et recommandations. L’information ressortie d’une enquête menée aux termes de l’article 31 peut servir d’éléments de preuve dans des procédures devant le TDPO.

En octobre 2019, la CODP a lancé une enquête publique sur les questions de droits de la personne touchant les élèves ayant des troubles de lecture au sein du système d’éducation publique de l’Ontario qui faisait fond sur des efforts précédents dans le domaine de l’éducation accessible, y compris son intervention dans Moore et sa Politique sur l'éducation accessible aux élèves handicapés. La CODP a collaboré avec deux expertes du développement de la lecture et des troubles connexes, Linda Siegel et Jamie Metsala, afin d’analyser l’information considérable obtenue d’un échantillon représentatif de huit conseils scolaires publics de langue anglaise, des 13 facultés publiques des sciences de l’éducation de langue anglaise de l’Ontario et du ministère de l’Éducation (ministère).

Des milliers d’élèves, de parents, d’organisations, d’éducateurs et d’autres professionnels ont également fait part de leurs observations aux responsables de l’enquête par l’entremise de sondages, d’audiences publiques, d’une assemblée communautaire, de conversations avec les Premières Nations, les Métis et les Inuits, d’œuvres artistiques, de courriels, de mémoires, de rencontres et d’entretiens téléphoniques.

Première en son genre au Canada, l’enquête combinait l’expertise de la CODP en matière de droits de la personne et de discrimination systémique à celles de Linda Siegel et de Jamie Metsala relatives au développement de la lecture, aux troubles de lecture/à la dyslexie, aux mesures d’intervention visant à améliorer la lecture et au corpus important de recherches menées dans le domaine.

Conseils scolaires et facultés d’éducation examinés dans le cadre de l’enquête

Les huit conseils scolaires de langue anglaise choisis pour l’enquête étaient les suivants :

  1.  Hamilton-Wentworth District School Board (Hamilton-Wentworth)
  2. Keewatin-Patricia District School Board (Keewatin-Patricia)
  3. Lakehead District School Board (Lakehead)
  4. London District Catholic School Board (London Catholic)
  5. Ottawa-Carleton District School Board (Ottawa-Carleton)
  6. Peel District School Board (Peel)
  7. Simcoe Muskoka Catholic District School Board (Simcoe Muskoka Catholic)
  8. Thames Valley District School Board (Thames Valley).

Les 13 facultés publiques des sciences de l’éducation de langue anglaise étaient les suivantes :

  1. Université Brock
  2. Université Lakehead
  3. Université Laurentienne
  4. Université Nipissing
  5. Université Queen's
  6. Université Trent Institut universitaire de technologie de l’Ontario
  7. Université d’Ottawa
  8. Université de Toronto
  9. Université de Windsor
  10. Université Western
  11. Université Wilfrid
  12. Laurier Université York

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Importance des compétences initiales en lecture

La littératie ne s’arrête pas à la maîtrise de la lecture et de l’écriture. Elle inclut la capacité d’accéder à l’information, de l’assimiler, de l’analyser et de la communiquer dans une variété de formats, ainsi que d’interagir avec différentes formes de communication et technologies.

La lecture et l’épellation des mots sont des compétences de base en lecture et en écriture qui permettent d’interagir efficacement avec différentes formes de communication. Tout le monde veut et doit pouvoir lire les mots afin de fonctionner à l’école et dans la vie. Les responsables de l’enquête ont recueilli le témoignage d’un grand nombre de personnes qui sont incapables de lire un menu au restaurant, une liste d’ingrédients d’aliment ou des panneaux de signalisation, de jouer à des jeux vidéo faisant intervenir la lecture, d’effectuer des recherches dans Internet, de consulter des sites Web ou d’accéder à d’autres médias numériques.

Or, la capacité de lire des mots n’est pas le seul aspect de la littératie. La pleine compréhension des mots lus et des phrases dans lesquelles ils figurent est également importante. Les approches exhaustives de développement de la littératie au primaire reconnaissent l’importance de l’apprentissage des compétences en lecture des mots, du langage oral, du vocabulaire, des connaissances et de l’écriture.

L’enquête s’est attardée aux compétences en lecture des mots et compétences initiales en lecture connexes qui sous-tendent une bonne compréhension de la lecture. Les responsables de l’enquête ont choisi de concentrer leur attention sur ces compétences de base en raison des difficultés persistantes auxquelles se heurtent les élèves de l’Ontario qui tentent d’obtenir des mesures d’intervention fondées sur des données probantes pour les développer, du nombre considérable élèves, souvent issus de groupes protégés par le Code ou autrement marginalisés, qui n’arrivent pas à obtenir les résultats initiaux escomptés en matière de lecture, des recherches confirmant l’importance de l’enseignement des compétences de base en lecture des mots, et de la reconnaissance des droits des élèves ayant la dyslexie dans la décision Moore.

Chez les élèves qui peinent à apprendre à lire correctement, les difficultés de lecture des mots sont les difficultés les plus courantes. La plupart des élèves qui ont des difficultés de compréhension de lecture ont des difficultés de lecture des mots.

Malgré leur importance, les compétences de base en lecture des mots n’ont pas été ciblées de façon efficace au sein du système d’éducation de l’Ontario, qui les a largement négligées au profit presque exclusif de stratégies de lecture contextuelle des mots et des perspectives socioculturelles de la littératie. Or, quel que soit l’élève, rien ne remplace l’acquisition de solides compétences initiales en lecture des mots. De l’avis de la CODP, le fait d’assurer que tous les enfants apprennent à lire les mots avec fluidité et précision ne nuit pas à l’égalité et à la lutte au racisme et à l’oppression, mais les favorise.

Les compétences initiales en lecture des mots sont essentielles, mais ne sont pas les seuls facteurs déterminants des résultats en lecture. Des programmes d’analyse graphophonétique rigoureux et fondés sur des données probantes devraient faire partie d’un enseignement riche et exhaustif de la langue en salle de classe qui est lui-même fondé sur des données probantes et comprend, sans s’y limiter, le conte, la lecture de livres, les arts dramatiques et l’analyse de textes. La littératie dépend également de l’enseignement direct et explicite de l’orthographe et de l’écriture au moyen de méthodes fondées sur des données probantes. De nombreux élèves, y compris des élèves ayant des troubles de lecture, ont des difficultés d’expression écrite. Les méthodes explicites et fondées sur des données probantes d’acquisition du vocabulaire, des connaissances de base et des stratégies de compréhension de la lecture font également partie du développement exhaustif de la littératie. Bien que l’enquête se soit attardée à un des obstacles les plus fréquents à l’acquisition de bases solides en matière de lecture, le rapport reconnaît également les autres éléments d’une approche exhaustive en littératie. Ces éléments doivent également être pris en compte au moment de mettre en œuvre les recommandations du rapport.

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Ministère de l’Éducation, conseils scolaires et facultés d’éducation

L’enquête s’est articulée autour du ministère, des conseils scolaires et des facultés d’éducation (facultés) étant donné que chacune de ces entités occupe un rôle central dans le respect du droit de lire. Il revient ultimement au ministère de gérer l’éducation en Ontario. Le ministère établit le curriculum que doit respecter le personnel enseignant. Il peut établir des normes provinciales, par exemple en matière d’évaluation des élèves, d’évaluation des programmes et de transmission des résultats, de collecte de données et de services d’éducation de l’enfance en difficulté, et exiger que les conseils les respectent. Le ministère finance également l’éducation.

Il incombe aux 72 conseils scolaires de l’Ontario de fournir des services d’éducation, y compris des services d’éducation de l’enfance en difficulté, conformément aux exigences du ministère. Ces conseils ont également une grande latitude lorsqu’il s’agit de déterminer comment dépenser les fonds et prodiguer leurs services, dont les services d’éducation de l’enfance en difficulté. Les facultés jouent un rôle clé dans la préparation du personnel enseignant chargé de transmettre les compétences initiales en lecture aux élèves et son perfectionnement professionnel continu dans des domaines comme la lecture et l’éducation de l’enfance en difficulté.

D’autres partenaires du secteur de l’éducation ont d’importantes responsabilités liées au respect des droits des élèves ayant des troubles de lecture. L’Ordre des enseignantes et enseignants de l’Ontario (OEEO) fixe les exigences relatives aux programmes d’éducation des futurs enseignants (aussi appelés « enseignants en formation initiale » ou « candidats à l’enseignement ») et aux cours de perfectionnement professionnel sur les qualifications additionnelles (QA) à l’intention des enseignants actifs. Le rapport d’enquête compte des recommandations sur la formation que devraient recevoir les enseignants en formation initiale et enseignants actifs relativement à l’enseignement de la lecture et aux troubles de lecture.

L’Office de la qualité et de la responsabilité en éducation (OQRE) mène des évaluations du rendement des élèves à l’échelle de la province dans le but de favoriser la responsabilisation et l’amélioration continue des acteurs du système d’éducation publique de l’Ontario. Le rapport contient des recommandations relatives aux données de l’OQRE.

L’Ontario Psychological Association (OPA) et l’Association of Psychology Leaders in Ontario Schools (APLOS) élaborent des lignes directrices en matière de diagnostic des troubles de lecture des élèves, qui font l’objet de recommandations dans le cadre de cette enquête.

Le rapport Le droit de lire présente les conclusions de l’enquête, accompagnées de 157 recommandations interreliées sur la façon de respecter le droit de lire, à l’intention des partenaires du secteur de l’éducation. Étant donné que les problèmes soulevés sont d’ordre systémique et nécessitent une intervention à l’échelle du système, le rapport recommande au ministère de collaborer avec une, un ou plusieurs experts indépendants à la mise en œuvre de bon nombre des recommandations. Il est également essentiel d’assurer la mise en œuvre de toutes les recommandations, qui ensemble constituent une approche globale de respect du droit de lire. La CODP aimerait aussi souligner la nécessité d’octroyer un financement permanent stable et adéquat pour assurer la mise en œuvre réussie de ces recommandations.

Bien que l’enquête ait porté principalement sur les facultés d’éducation et conseils de langue anglaise, elle a aussi permis de cerner des problèmes liés à l’éducation de langue française. La plupart des conclusions et recommandations de l’enquête s’appliquent probablement tout autant à l’éducation de langue française, et la CODP s’attend à ce que le ministère et les conseils de langue française mettent en œuvre les recommandations applicables à l’enseignement en français.

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Contexte

Conclusions et recommandations principales

Ce rapport fait à la fois usage des termes « trouble de lecture » et « dyslexie ». À l’heure actuelle, le système d’éducation de l’Ontario utilise uniquement le terme « trouble d’apprentissage (TA) », qu’il réserve en général aux élèves dont le TA a été officiellement reconnu par l’entremise d’un comité d’identification, de placement et de révision (CIPR). Le système d’éducation n’indique pas si le TA reconnu au moyen du processus de CIPR nuit à la lecture des mots ou à d’autres domaines d’apprentissage comme les mathématiques, et ne recueille pas de données sur les élèves sans TA reconnu par un CIPR. Il en résulte une perte d’information précieuse en matière de planification et de suivi.

Le terme « dyslexie » brille également par son absence au sein du système d’éducation de l’Ontario. Or, le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5) de l’American Psychological Association indique que la dyslexie est un terme approprié pour décrire un profil de difficultés d’apprentissage qui se caractérise par des difficultés à reconnaître les mots avec précision ou fluidité, à les décoder et à les épeler. Après le lancement de l’enquête, l’Ontario Psychological Association a mis à jour ses lignes directrices pour le diagnostic et l’évaluation des TA chez les enfants, les adolescents et les adultes afin qu’elles reconnaissent l’utilité pour les psychologues d’utiliser le terme « dyslexie » au moment de poser un diagnostic. Phénomène bien compris, la dyslexie est le sujet de nombreuses recherches et ressources. Certaines personnes préfèrent également le terme « dyslexie » étant donné qu’il fait référence à une différence plutôt qu’à un « trouble », et en ce sens véhicule moins de stigmates de construction sociale. Aux termes du Code, les acteurs du système devraient respecter et reconnaître les préférences des élèves sur le plan de la façon de se définir.

La CODP recommande au ministère, aux facultés d’éducation et aux conseils scolaires de reconnaître explicitement le terme « dyslexie » [recommandations 51, 54, 55, 56, 114 et 126].

La CODP recommande que les conseils scolaires déterminent quels types de TA ont les élèves, et quels sont les domaines d’apprentissage touchés (p. ex., trouble de lecture plutôt qu’un TA), d’en effectuer le suivi [recommandation 126] et de recueillir des données spécifiques sur tous les élèves ayant des troubles de lecture (y compris les élèves dont le trouble de lecture n’a pas été reconnu par un CIPR) [recommandations 133, 135, 142, 143, 145 et 148].

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Troubles de lecture et autres obstacles à l’apprentissage de la lecture

La dyslexie ou un trouble de lecture des mots est un TA précis caractérisé par des difficultés à reconnaître les mots de façon exacte et (ou) fluide, et (ou) à les décoder et à les épeler. Ces difficultés de lecture des mots peuvent aussi occasionner des problèmes de compréhension de lecture et limiter l’acquisition du vocabulaire et des connaissances de base au moyen de la lecture. La dyslexie est le TA le plus courant, tandis que les TA sont l’anomalie la plus courante chez les élèves de l’Ontario ayant des besoins particuliers. Cela signifie que les troubles de lecture, ou la dyslexie, sont les handicaps les plus répandus dans les écoles. On trouve des élèves aux prises avec la dyslexie/des troubles de lecture dans toutes les salles de classe de l’Ontario.

Bien qu’on attribue à la dyslexie des origines neurobiologiques, des recherches ont révélé que l’enseignement de la lecture fondé sur des données probantes, l’identification précoce des élèves touchés et l’intervention précoce au moyen de mesures fondées sur des données probantes permettent de prévenir le développement d’un « trouble » de lecture chez les élèves à risque. Si le système d’éducation fonctionne comme il se doit, il est possible de prévenir les troubles de lecture chez la plupart des élèves.

Les élèves aux prises avec d’autres handicaps, y compris des déficiences intellectuelles, des troubles du spectre de l’autisme et des troubles de l’audition, peuvent aussi avoir de la difficulté à apprendre à lire si des méthodes inefficaces sont utilisées en salle de classe. En raison de leur marginalisation et de leur manque d’équité sur le plan structurel, les élèves noirs et autrement racialisés, les élèves des Premières Nations et communautés métisses et inuites, les élèves multilingues et les élèves de milieux à faible revenu courent aussi un risque accru de développer des difficultés de lecture. Il a été démontré que les méthodes d’enseignement des compétences initiales en lecture qui sont axées sur le décodage des mots et la compréhension du langage obtiennent les meilleurs résultats auprès de tous les élèves, et s’avèrent essentielles pour de nombreux élèves.

Chez la plupart des élèves, et plus particulièrement les élèves vulnérables, les résultats obtenus en lecture dépendent de la qualité de l’enseignement de la lecture prodigué. La presque totalité des élèves peut apprendre à lire les mots de façon fluide s’ils ont accès à un enseignement des compétences de base en lecture qui est explicite, systématique et fondé sur la science. Jumelée à une intervention rapide, l’identification précoce des quelques élèves qui pourraient encore peiner à lire les mots correctement malgré ce type d’enseignement peut favoriser leur succès futur à l’école, au travail et dans la vie. En revanche, dans la grande majorité des cas où cela est possible, le fait de ne pas prévenir les troubles de lecture des mots a des conséquences graves qui dureront toute la vie. Les recherches et les témoignages recueillis dans le cadre de l’enquête montrent la trajectoire négative que suivent les élèves qui ne développent pas de bonnes compétences initiales en lecture des mots.

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Qu’arrive-t-il quand les élèves n’apprennent pas à lire?

Les élèves qui ne développent pas de bonnes compétences initiales en lecture peuvent très rapidement en subir les conséquences sur le plan scolaire, qui ne feront que s’exacerber avec le temps. La lecture est un élément essentiel de nombreux aspects de l’apprentissage scolaire, et les difficultés éprouvées durant les premières années peuvent augmenter au fil du temps et nuire à l’apprentissage d’autres matières. Il s’agit là d’une des raisons pour lesquelles il est essentiel d’intervenir rapidement auprès des élèves qui ont des difficultés de lecture.

Les difficultés à apprendre à lire qu’ont les élèves peuvent se répercuter sur leur confiance dans leurs capacités scolaires et leur estime de soi générale, et occasionner des problèmes de santé mentale importants. Dans le cadre de l’enquête, de nombreux élèves ont dit être « stupides » parce qu’ils n’arrivaient pas à lire, malgré le fait que les troubles de lecture n’ont rien à voir avec l’intelligence. Beaucoup d’élèves et de parents ont parlé de dépression, d’anxiété, d’évitement scolaire, de comportements agressifs, d’intimidation, de victimisation, d’automutilation et même d’idées suicidaires ou de tentatives de suicide, ce qui reflète les résultats des recherches menées dans le domaine.

Les élèves ayant des troubles de lecture ont souvent un mauvais rendement scolaire. Ils sont plus susceptibles d’abandonner leurs études et moins susceptibles d’effectuer des études postsecondaires, et ont tendance à mettre plus de temps à compléter les programmes d’études auxquels ils s’inscrivent. Les effets des troubles de lecture peuvent durer bien après la fin des études, nuire à l’emploi et mener à des revenus plus faibles, à la pauvreté, à l’itinérance, à des taux de criminalité plus élevés et à la prison. Dans le cadre de l’enquête, des adultes aux prises avec la dyslexie ont fait part des conséquences à long terme du fait de ne pas avoir appris à lire, comme des problèmes de santé mentale et de toxicomanie, et des difficultés sur le plan de l’emploi.

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Répercussions plus générales sur la famille et la société

Des parents ont aussi rapporté des répercussions sur la famille, confirmées par la littérature. Ils ont fait part des conséquences pécuniaires du fait de devoir obtenir des services d’évaluation et de tutorat privés, ou laisser ou modifier son emploi pour consacrer du temps au soutien de leur enfant. Les répercussions sur la famille comprennent également les difficultés d’orientation dans le système scolaire, les effets négatifs sur les relations et l’impact sur la santé mentale.

Les répercussions plus générales du peu de littératie sur la société sont aussi bien documentées. C’est pourquoi de nombreuses organisations défendent la nécessité d’accroître la littératie en Ontario en dirigeant l’attention sur les compétences de base en lecture des mots. Par exemple, la Pediatricians Alliance of Ontario (PAO) et l’organisme Physicians of Ontario Neurodevelopmental Advocacy (PONDA) ont reconnu le lien qui existe entre la littératie et les résultats en matière de santé, et ont réclamé la mise au point d’un curriculum et de méthodes d’enseignement de la lecture qui reposent sur l’enseignement explicite et systématique du système graphophonétique, le dépistage précoce et l’intervention rapide fondée sur des données probantes. L’Association canadienne des chefs de police a qualifié la littératie d’outil pour combattre la criminalité.

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Réduction des coûts sociaux et économiques du peu de littératie

Le fait d’investir dans les compétences initiales en lecture réduit les coûts sociaux et économiques du peu de littératie pour les élèves, les familles et la société dans son ensemble. Cela accroît aussi l’équité. Les enfants issus de groupes protégés par le Code subissent de façon disproportionnée les effets du manque d’adoption de méthodes fondées sur des données probantes pour l’enseignement de la lecture et le soutien des élèves ayant des difficultés de lecture. Leurs parents n’ont pas toujours le même accès aux ressources et services privés de soutien que les parents plus nantis. Ces élèves comptent sur le système d’éducation publique pour développer les bases solides en lecture qui les aideront à surmonter leur désavantage historique et social. Les enfants qui ne développent pas ces bases risquent d’accroître leur marginalisation et de renforcer le cycle d’inégalité intergénérationnelle.

Ces fardeaux considérables que portent les élèves, les familles et la société peuvent être évités. Comme l’expliquait Louisa Moats, experte en formation des enseignants et en enseignement de la lecture fondés sur la science, dans Teaching Reading Is Rocket Science, 2020, « la plupart des échecs sur le plan de l’apprentissage de la lecture peuvent être évités, ce qui rend la situation actuelle tragique ». Des décennies de recherches illustrent l’importance de donner à tous les élèves des chances égales d’apprendre à lire, mais cela ne se reflète pas dans l’enseignement scolaire.

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Composantes essentielles de l’enseignement de compétences de base en lecture des mots à tous les élèves

Voici les composantes essentielles de l’enseignement efficace de la lecture à tous les élèves, et du soutien de ces élèves :

  1. Curriculum et enseignement basés sur les recherches scientifiques relatives aux meilleures approches d’enseignement de la lecture des mots Cela inclut l’enseignement explicite de la conscience phonologique et de l’analyse graphophonétique, qui favorisent l’acquisition des correspondances entre les graphèmes et les phonèmes (lettres-sons) en vue de leur utilisation pour décoder et épeler les mots, et les lire de façon précise et fluide. Il est vital de former adéquatement les enseignants chargés d’enseigner la lecture, et de leur offrir le soutien connexe nécessaire.
  2. Dépistage précoce de tous les enfants de la maternelle à la 2e année au moyen d’évaluations de dépistage standardisées et fondées sur des données probantes, afin d’identifier les élèves à risque de difficultés de lecture et de leur offrir immédiatement des mesures d’intervention précoce multiniveaux.
  3. Mesures d’intervention en lecture fondées sur des données probantes qui sont pleinement mises en œuvre et suivies de près, et offertes en temps opportun à TOUS les élèves qui en ont besoin, y compris en continu aux élèves ayant des difficultés de lecture des mots.
  4. Mesures d’adaptation (et modifications aux attentes du curriculum) offertes pour compléter l’enseignement du curriculum et les mesures d’intervention en lecture fondés sur des données probantes, mais pas comme substitut à un enseignement efficace de la lecture – Les mesures d’adaptation (p. ex., technologies d’assistance) offertes devraient être cohérentes et efficaces, offertes en temps opportun et soutenues en salle de classe.
  5. Évaluations professionnelles (plus particulièrement évaluations psychopédagogiques) effectuées en temps opportun et fondées sur des critères écrits, clairs et transparents, qui sont axés sur la réponse à l’intervention de l’élève – Les exigences et critères relatifs aux évaluations professionnelles devraient tenir compte du risque de biais auquel font face les élèves qui sont issus de la diversité culturelle et linguistique, qui sont racialisés, qui se définissent comme des membres de Premières Nations, des Métis ou des Inuits, ou qui viennent d’un milieu peu favorisé sur le plan économique. Il ne devrait pas être nécessaire de faire l’objet d’une évaluation professionnelle pour obtenir des mesures d’intervention ou d’adaptation.

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Questions d’équité générales ayant un impact sur les résultats des élèves

La CODP a évalué l’approche actuelle de l’Ontario à la lumière des composantes susmentionnées. Elle a aussi examiné des questions systémiques plus générales touchant ces champs d’activités afin de déterminer si :

  • à l’échelle des conseils scolaires et de la province, les approches et les normes sont harmonisées
  • la surveillance et la responsabilisation sont assurées à l’échelle des conseils scolaires et de la province
  • les conseils et la province recueillent des données pour faire le suivi des résultats de chacun des élèves, favoriser la prise de décisions fondées sur des données probantes et analyser les écarts en matière d’équité attribuables aux handicaps, à la race, à l’ascendance métisse ou inuite, ou à l’appartenance à une Première Nation, au statut socio-économique ou à toute autre caractéristique identitaire
  • les conseils font preuve de transparence dans leurs communications avec les parents.

La CODP a aussi pris en compte les obstacles auxquels se heurtent les élèves ayant d’autres handicaps et les élèves issus de groupes marginalisés comme les Premières Nations et les communautés métisses et inuites, les élèves noirs et les élèves autrement racialisés, les nouveaux arrivants, les élèves de milieux socio-économiques défavorisés et les élèves se heurtant à des obstacles croisés (élèves cumulant plusieurs facteurs dont l’intersection crée un désavantage unique ou aggravé).

La CODP formule des recommandations spécifiques relativement à ces obstacles, par exemple des recommandations traitant des besoins particuliers des apprenants des Premières Nations et communautés métisses et inuites [recommandations 1 à 26, et 120], et des élèves multilingues [recommandations 62, 118, 124]

Des obstacles et défis multiples et particuliers empêchent les enfants et les jeunes des Premières Nations et communautés métisses et inuites d’accéder à l’éducation. L’héritage persistant des pensionnats autochtones, les traumatismes, l’oppression, le colonialisme, le racisme, les désavantages (y compris le manque de logements adéquats, l’insécurité alimentaire et le manque d’accès à l’eau propre) et le manque de sentiment d’appartenance à l’école sont certains des facteurs qui nuisent à l’éducation des élèves des Premières Nations et communautés métisses et inuites, y compris à leur vécu en matière d’apprentissage de la lecture.

Selon les témoignages reçus durant l’enquête, bon nombre des défis auxquels se heurtent les élèves ayant des troubles de lecture et leur famille sont amplifiés chez les familles des Premières Nations et communautés métisses et inuites :

  • S’y retrouver dans le système d’enseignement est inutilement complexe et difficile.
  • Comme les soutiens en milieu scolaire aux élèves ayant un TA tendent à être limités, c’est aux parents qu’il revient de travailler avec leurs enfants à la maison. C’est parfois particulièrement difficile pour les parents des Premières Nations et communautés métisses et inuites, en raison d’un illettrisme intergénérationnel ou d’une réticence face au système scolaire conventionnel.
  • Les parents peuvent eux-mêmes avoir des troubles de lecture qui n’ont jamais été diagnostiqués ni traités.
  • Les parents des Premières Nations et communautés métisses et inuites pourraient avoir davantage de difficulté à aider leurs enfants à utiliser les mesures d’adaptation offertes sous forme de technologies d’assistance.
  • Les élèves des Premières Nations et communautés métisses et inuites pourraient se heurter à des obstacles en raison de leur niveau de pauvreté, de stigmatisation ou du fait qu’ils vivent dans un milieu rural ou du Nord.

Même si bon nombre des conclusions et recommandations du présent rapport appuieront le droit à la lecture des élèves des Premières Nations et communautés métisses et inuites, une attention particulière doit être portée à leurs besoins croisés afin de respecter leurs droits à une égalité substantielle, leurs droits découlant des traités et les droits que leur confère le droit international (par exemple la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones).

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Conclusions de l’enquête sur le rendement des élèves de l’Ontario en matière de lecture

Conclusions et recommandations principales

Les données quantitatives et qualitatives recueillies dans le cadre de l’enquête rendent compte d’un besoin urgent d’améliorer les résultats des élèves en lecture et à d’autres chapitres en Ontario. Trop d’élèves de l’Ontario n’apprennent pas à bien lire. Si le rendement en lecture des élèves de l’Ontario est généralement préoccupant, les résultats en lecture des élèves ayant des besoins particuliers (à l’exception des enfants doués), des élèves ayant des TA, des garçons, des élèves noirs et autrement racialisés, des élèves multilingues, des élèves issus de milieux socio-économiques défavorisés et des élèves autochtones le sont encore plus.

Grâce à un enseignement de la lecture des mots fondé sur des données probantes, beaucoup plus d’enfants peuvent développer de bonnes compétences en lecture, ainsi que le goût de la lecture, dès les premières années de l’élémentaire. Les élèves dont l’ensemble des compétences liées à la littératie sont le fruit d’un enseignement fondé sur des données probantes pourront satisfaire aux normes d’évaluation provinciales de la 3e et de la 6e année de l’élémentaire, et au Test provincial de compétences linguistiques (TPCL) de 10e année. Ils pourront également profiter de tous les autres avantages du fait de posséder de bonnes compétences et lecture et en compréhension de textes. L’idée selon laquelle certains élèves, y compris les élèves ayant des handicaps, n’apprendront jamais à bien lire est une forme de capacitisme. Elle sert à justifier le maintien d’obstacles systémiques plutôt que l’apport de changements ayant fait la démonstration de leur capacité d’aider tous les élèves à apprendre à lire.

Bien que l’enquête ait analysé certaines données quantitatives, il est nécessaire d’améliorer la collecte, l’analyse et la divulgation de certaines données sur les résultats des élèves en lecture et à d’autres chapitres. La divulgation des résultats de l’OQRE devrait être plus transparente et comprendre des renseignements plus détaillés sur les élèves ayant des besoins particuliers, y compris leur taux de succès et recours à des mesures d’adaptation. De meilleures données doivent aussi être produites sur les résultats en lecture et à d’autres chapitres pour déceler tout manque d’équité et rectifier la situation. Les données produites à l’échelle des conseils ou de la province sur le cloisonnement et l’accès aux études postsecondaires sont insuffisantes ou incohérentes. Plusieurs sections du rapport, dont la section 13 : Problèmes systémiques, traitent de préoccupations liées à la collecte de données.

La CODP recommande d’améliorer la collecte, l’analyse et la transmission de données dans plusieurs secteurs [recommandations 23 à 26, 55, 60, 63, 67, 81, 136, 137, 139 à 150].

 

Les données confirment la nécessité d’apporter des changements.

Des données quantitatives et qualitatives sur les résultats en lecture et en littératie en Ontario ont été recueillies dans le cadre de l’enquête. Étant donné que les conseils scolaires et la province ne recueillent pas d’autres données sur les résultats en lecture, les tests de lecture de l’OQRE ont constitué la source principale de données quantitatives utilisée durant l’enquête. Les responsables de l’enquête ont extrait de l’information des témoignages d’une variété de parties prenantes. Les données quantitatives et qualitatives recueillies montrent que le nombre d’élèves aux prises avec des difficultés de lecture est supérieur à ce qu’il devrait être.

Grâce à l’adoption d’approches d’enseignement de la lecture fondées sur des données scientifiques, jumelées au dépistage et à l’intervention précoce, nous nous attendrions à limiter à environ 5 % le nombre d’élèves ne satisfaisant pas aux attentes de l’année d’études en matière de précision et de fluidité de lecture des mots. Or, en 2018-2019 en Ontario, 26 % de tous les élèves de la 3année et 53 % des élèves de la 3e année ayant des besoins particuliers (élèves ayant un plan d’enseignement individualisé (PEI), à l’exclusion des élèves dont la seule anomalie reconnue est la douance) ne satisfaisaient pas à la norme provinciale de l’OQRE. Bien que les tests de l’OQRE ne mesurent pas séparément la précision et la fluidité de lecture des mots, ces deux compétences ont un effet considérable sur la compréhension de lecture durant les premières années d’études. Les résultats des élèves étaient minimalement supérieurs en 6e année, où 19 % de tous les élèves et 47 % des élèves ayant des besoins particuliers ne satisfaisaient pas à la norme provinciale.

L’enquête a révélé des résultats semblables dans les huit conseils scolaires. Dans ces conseils, beaucoup trop d’élèves ayant des besoins particuliers ont raté les évaluations de la lecture de la 3e et de la 6e année de l’OQRE en 2018-2019. De plus, dans la plupart d’entre eux, environ la moitié seulement des élèves dont le TA a été officiellement reconnu ont été en mesure de satisfaire à la norme provinciale de l’OQRE, et ce, même malgré un taux important d’utilisation de mesures d’adaptation.

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Les données n’illustrent pas toute l’étendue du problème.

Les taux de réussite aux évaluations de la lecture de l’OQRE sont encore plus troublants lorsqu’on tient compte du fait que la plupart des élèves ayant des besoins particuliers qui ont satisfait à la norme provinciale ont eu recours à des mesures d’adaptation comme des technologies d’assistance ou des services de transcription pour répondre aux questions d’évaluation. Les mesures d’adaptation sont importantes et requises par certains élèves pour avoir accès au curriculum et faire la démonstration de leur compréhension de la matière. Par contre, il est important de tenir compte des mesures d’adaptation utilisées lorsqu’on examine les résultats aux tests de l’OQRE puisque les technologies d’assistance et services de transcription font en sorte qu’il n’est plus possible de déterminer si les élèves qui les utilisent sont en mesure de lire et d’écrire sans assistance.

Selon les données provinciales et données obtenues des huit conseils scolaires examinés dans le cadre de l’enquête, très peu d’élèves ayant des besoins particuliers en matière d’éducation ont satisfait à la norme provinciale sans mesure d’adaptation. Par exemple, le rapport Lifting the curtain on EQAO scores de l’International Dyslexia Association (IDA) a révélé qu’en 2018-2019, seulement 8,5 % des élèves de la 3e année ayant un PEI ont satisfait à la norme provinciale au test de lecture de l’OQRE sans utiliser de technologie d’assistance ou de services de transcription. Cela va dans le sens des conclusions tirées par la CODP des données des conseils scolaires relatives aux élèves ayant des TA reconnus. En 2018-2109, très peu d’élèves des huit conseils scolaires examinés dans le cadre de l’enquête qui ont un TA reconnu ont satisfait à la norme provinciale en lecture de l’EQRO en 3e ou en 6année sans mesure d’adaptation.

Le rapport de l’IDA n’a décelé aucune ou quasi aucune amélioration aux taux de réussite sans mesure d’adaptation des élèves ayant des besoins particuliers (à l’exception des enfants doués) entre 2005 et 2019 ou des résultats en lecture de tous les élèves de l’Ontario. L’utilisation de technologies d’assistance ou de services de transcription a également augmenté au fil du temps.

Dans son rapport provincial de 2018-2019, l’EQRO a insisté sur le problème considérable que constituait le mauvais rendement des élèves ayant des besoins particuliers : L’EQRO a indiqué ce qui suit :

Les écarts persistants sur le plan du rendement entre les élèves ayant des besoins particuliers et les autres élèves requièrent de l’attention. Les données de l’OQRE indiquent que les TA sont l’anomalie la plus courante au sein de la cohorte d’élèves ayant des besoins particuliers en matière d’éducation en Ontario. Les élèves ayant des troubles d’apprentissage ont toujours eu des niveaux de rendement faibles malgré leur intelligence moyenne ou supérieure. Il serait bénéfique de passer en revue les soutiens offerts et les stratégies adoptées pour favoriser la réussite.

Déjà sources de préoccupations, les données de l’OQRE sous-représentent probablement beaucoup l’ampleur des difficultés de lecture des élèves de l’Ontario. Les résultats aux tests de l’OQRE n’indiquent pas dans quelle mesure le système d’éducation prépare les élèves à lire de façon autonome.

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Écarts sur le plan du rendement des élèves autochtones

Des formes particulières et cumulatives de désavantage contribuent à creuser l’écart entre le niveau de réussite des élèves des Premières Nations et des communautés métisses et inuites, et celui des autres élèves. Certains gains ont été réalisés depuis quelques années. Toutefois, lorsqu’on se reporte aux résultats aux tests de l’OQRE, aux taux d’accumulation des crédits et aux taux de diplomation, on constate que les élèves qui se définissent volontairement comme des membres des Premières Nations ou des communautés métisses ou inuites accusent encore un retard sur les autres élèves de l’Ontario.

Les données provinciales de l’OQRE et données des conseils examinés dans le cadre de l’enquête montrent que les élèves se définissant comme membres d’une Première Nation, comme Métis ou comme Inuits étaient moins susceptibles que la moyenne de satisfaire à la norme provinciale en lecture. Le pourcentage d’élèves qui s’identifiaient comme des membres des Premières Nations, des Métis ou des Inuits et qui avaient obtenu un diplôme en cinq ans ou moins dans les écoles provinciales étaient également inférieur au pourcentage de l’ensemble des élèves de la province.

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Témoignages relatifs aux nombreuses difficultés de lecture chez les élèves

Les données qualitatives recueillies dans le cadre de l’enquête incluent également de nombreux exemples d’élèves qui ne parviennent pas à apprendre à lire ou qui y parviennent uniquement après des efforts considérables et, lorsque la famille peut se le permettre, l’obtention de services privés. Les élèves, les parents, les enseignants et d’autres professionnels ont tous donné des exemples d’élèves accusant des années de retard en matière de lecture. Il semblerait que certains élèves faisant leur entrée au secondaire avaient un rendement en lecture équivalent aux premières années de l’élémentaire (de la 1re à la 3année). De nombreux éducateurs ont reconnu que ce genre de situations se produisaient et qu’elles représentaient l’échec du système d’éducation.

L’OQRE a également évalué le rapport qu’entretiennent les élèves avec la lecture au moyen d’un questionnaire à l’intention des élèves. En 2018-2019, moins que la moitié des élèves (44% en 3année et 42% en 6année) ont déclaré qu’ils aimaient lire. Une proportion considérable (38 % en 3année et 33 % en 6année) a affirmé ne pas avoir l’impression d’arriver à bien lire la plupart du temps. Cela laisse entendre que les méthodes actuelles d’enseignement de la lecture mènent à l’échec chez beaucoup d’élèves, ainsi qu’au manque de confiance et d’appréciation de la lecture chez de nombreux autres.

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Iniquités sur le plan d’autres indicateurs de réussite des élèves

Les responsables de l’enquête ont examiné d’autres résultats des élèves et soulevé des préoccupations. Par exemple, la question de l’acheminement ou du cloisonnement disproportionné des élèves marginalisés dans des cours appliqués ou élaborés à l’échelon local de niveau secondaire, plutôt que des cours théoriques, préoccupe depuis longtemps. Cela a un effet négatif sur le cheminement et les perspectives scolaires des élèves.

Les conseils scolaires qui recueillent et analysent des données démographiques ont constaté que les élèves autochtones, noirs et latino-américains, ainsi que les élèves de milieux socio-économiques défavorisés, sont représentés de façon disproportionnée dans les cours appliqués et élaborés à l’échelon local. L’enquête a révélé que les élèves ayant un TA reconnu sont aussi plus susceptibles de faire l’objet de cloisonnement. Au sein des conseils examinés dans le cadre de l’enquête, les élèves ayant un TA reconnu étaient environ de deux à quatre fois plus susceptibles de suivre majoritairement des cours appliqués en 9année.

L’enquête a également révélé que le cloisonnement peut prendre différentes formes additionnelles et se produire plus tôt durant les études. Le placement d’élèves dans des classes de l’enfance en difficulté où ils n’ont pas accès à des mesures appropriées d’intervention pour surmonter leurs difficultés de lecture et le retrait d’élèves de programmes d’immersion française au lieu de leur procurer les mesures d’adaptation et d’intervention nécessaires pour poursuivre leur immersion sont des exemples d’autres formes de cloisonnement effectuées.

Les responsables de l’enquête n’ont pas été en mesure d’évaluer d’autres formes possibles d’iniquités associées aux résultats des élèves. Pour leur part, les conseils examinés dans le cadre de l’enquête n’ont pas pu produire de données, ou du moins de données cohérentes sur la réussite des élèves ayant des TA reconnus ou d’autres caractéristiques identitaires, comme les taux de diplomation et l’accès aux études postsecondaires. Par exemple, bien que le ministère publie les taux de diplomation d’ensemble des différents conseils, les conseils ne font pas systématiquement le suivi des iniquités potentielles sur le plan des taux de diplomation des populations étudiantes historiquement marginalisées. Les conseils peuvent uniquement produire des données désagrégées sur les élèves qui obtiennent leur diplôme dans le district scolaire où ils ont entamé leurs études secondaires.

En raison du manque de données, les responsables de l’enquête n’ont pas pu vérifier si les élèves ayant des TA étaient plus susceptibles d’abandonner l’école avant d’obtenir leur diplôme, une tendance décelée lors de recherches. Dans le cadre de l’enquête, seulement un conseil scolaire a fourni un rapport qui examinait les données relatives au rendement pour mesurer les progrès effectués par les élèves en matière d’apprentissage et aider à identifier les stratégies susceptibles d’améliorer leur rendement et bien-être. En ce qui a trait à l’accumulation de crédits et à la diplomation, le rapport a révélé que des groupes spécifiques d’élèves, principalement les élèves autochtones et élèves ayant des besoins particuliers, continuent d’afficher un rendement inéquitable.

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Curriculum et enseignement

Conclusions et recommandations principales

Le but de la lecture est de comprendre ce qu’on lit et d’en tirer un sens. La preuve est faite : une bonne compréhension en lecture passe par l’aptitude à lire les mots avec précision et rapidité, c’est-à-dire automatiquement. Elle exige aussi une bonne compréhension à l’oral, y compris un vocabulaire et des connaissances de base solides.

La fluidité en lecture des mots est une compétence fondamentale de la littératie complète. Or, cette compétence est problématique pour la plupart des élèves ayant des difficultés en lecture. Bien des élèves, y compris les élèves qui ont la dyslexie, échouent à développer des bases solides en lecture des mots, ce qui les prédispose à d’autres problèmes scolaires et au risque d’une qualité de vie inférieure.

Si l’enseignement en classe repose sur un curriculum fondé sur des données probantes, la plupart (de 80 % à 90 %) des élèves apprendront à lire les mots avec précision et rapidité, et quelques élèves auront besoin d’un enseignement ou de mesures d’intervention plus intensifs. Des décennies de recherches multidisciplinaires démontrent que l’enseignement direct, explicite et systématique des compétences de base en lecture des mots est le meilleur moyen d’enseigner à tous les élèves à lire les mots. Dès la maternelle, cette stratégie englobe l’enseignement explicite de la conscience phonémique, soit l’aptitude à identifier les sons distincts (les phonèmes) d’un mot écrit, et de l’analyse graphophonétique, soit l’enseignement des associations entre les lettres et les sons (ou des correspondances graphèmes-phonèmes) et leur utilisation pour déchiffrer et épeler les mots. À partir de la 2e année environ, l’enseignement explicite est axé sur des connaissances et compétences plus avancées, telles que l’étude de la structure des mots et des constantes lexicales (les préfixes, les racines et les suffixes, par exemple), et les liens entre l’orthographe de certains mots. Dès le début de l’enseignement de ces compétences en décodage, les élèves s’exercent aussi à lire des mots dans des histoires afin de consolider la précision et la vitesse de la lecture des mots.

Malheureusement, le curriculum de l’Ontario de la 1re à la 8e année en anglais et en français de 2006 (curriculum de l’Ontario) et la formation offerte aux futurs enseignants dans les facultés ontariennes ne privilégient pas ces approches particulièrement efficaces pour l’enseignement de la lecture des mots au primaire. Au lieu de cela, à quelques exceptions près, les principales approches observées en Ontario consistent à enseigner des compétences en résolution des mots au moyen des trois systèmes d’indices et de la littératie équilibrée. Les trois systèmes d’indices encouragent les élèves à deviner ou prédire les mots à partir d’indices tirés du contexte et de leurs connaissances antérieures. Les modèles de littératie équilibrée (ou de littératie globale équilibrée) « dégagent graduellement la responsabilité » de l’enseignante ou de l’enseignant, qui commence par modéliser la lecture d’un texte, puis en fait une lecture partagée et guide ensuite la lecture de textes par l’élève, la lecture autonome constituant l’objectif ultime. Ces approches relatives à la lecture des mots sont enracinées dans une philosophie globale de la langue qui donne à penser que l’immersion des enfants dans la langue parlée et écrite leur permet de découvrir comment on lit. Compte tenu de cette philosophie, bon nombre d’autres résultats importants pour la littératie, au-delà des compétences en lecture des mots, risquent de ne pas faire l’objet d’un enseignement adéquat, explicite et fondé sur des données probantes.

Sauf de rares exceptions, on ne transmet pas aux élèves de l’Ontario les compétences de base en lecture des mots au moyen d’une approche explicite et systématique de l’enseignement de la conscience phonémique, de l’analyse graphophonétique, du décodage et de la fluidité de la lecture des mots. Même lorsque des conseils ou des enseignants tentent plus délibérément de donner un enseignement direct et systématique, ils sont freinés par le curriculum actuel de l’Ontario et son insistance sur les systèmes d’indices et la littératie équilibrée.

Bon nombre de rapports sur la lecture, d’enseignants et de fédérations enseignantes de haut niveau reconnaissent la nécessité de bien préparer et outiller les enseignants pour la prestation d’un curriculum de base fondé sur des données probantes, ce qui comprend l’enseignement des compétences de base en lecture des mots. Actuellement, l’éducation et le perfectionnement professionnel des enseignants n’accordent guère d’attention au mode de développement de la fluidité en lecture et à la façon d’enseigner la lecture des mots par l’enseignement direct et systématique des compétences de base en lecture des mots. Les enseignants apprennent peu de choses sur les méthodes éprouvées de dépistage précoce et d’intervention en lecture ou sur la façon de repérer les élèves ayant des difficultés en lecture et de les aider efficacement.

La CODP recommande au ministère de réviser, en collaboration avec une, un ou plusieurs experts externes, le Programme de la maternelle et du jardin d’enfants, le curriculum et les guides d’enseignement connexes afin de mettre fin au recours aux systèmes d’indices pour la lecture des mots et d’exiger, en lieu et place, l’enseignement explicite, systématique, direct et obligatoire des compétences de base en lecture des mots [recommandations 27 à 30]. Cette mesure devrait être mise en œuvre sans délai, le temps que le ministère et les conseils prennent simultanément des mesures immédiates pour arrimer leurs approches pédagogiques aux conclusions et aux recommandations de la CODP [recommandations 31, 33, 39 et 41].

La CODP recommande que les programmes de formation des enseignants tiennent compte des éléments suivants : l’importance de la précision et de l’efficacité en lecture des mots pour la compréhension en lecture; le mode de développement d’une lecture des mots précise et efficace; la façon d’enseigner en classe les compétences de base en lecture des mots et en orthographe; enfin, l’importance de l’enseignement des compétences de base en lecture des mots pour promouvoir l’égalité entre tous les élèves [recommandation 48]. La CODP recommande en outre que les programmes de formation des enseignants préparent mieux les enseignants qualifiés en enseignement de la maternelle à la 6e année à prodiguer les composantes essentielles de l’enseignement de la lecture des mots ainsi qu’à repérer, instruire et soutenir les élèves ayant des difficultés en lecture des mots [recommandations 49 à 55].

La CODP recommande au ministère d’élaborer, en collaboration avec une, un ou plusieurs experts externes, un programme complet de perfectionnement professionnel soutenu en cours d’emploi des enseignants, ainsi que des ressources qui portent sur l’enseignement de la lecture et sur les moyens de repérer, instruire et soutenir les élèves ayant des difficultés en lecture des mots [recommandation 54].

La CODP recommande au ministère de fournir un appui financier permettant de mettre en œuvre ces recommandations [recommandations 42, 43, 45, 57 58].

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Le curriculum et l’enseignement sont les fondements de la réussite en lecture.

La mise en œuvre d'un curriculum fondé sur la science et l’enseignement en classe sont deux fondements du respect du droit de lire. Dans le domaine de l’éducation, un cadre particulier d’aide à la réussite des élèves en lecture suscite un large consensus. Appelé « réponse à l’intervention (RAI) » ou « système de mesures de soutien multiniveaux (SMSM) », ce cadre est une méthode d’enseignement et d’intervention à trois niveaux. Cette approche vise à maximiser les résultats pour tous les élèves et pas seulement ceux qui ont des troubles de lecture. Le niveau 1 est le curriculum de base que tous les élèves reçoivent en classe. Le respect du droit de lire exige un enseignement de niveau 1 de qualité supérieure, donné en classe selon un curriculum de base scientifiquement éprouvé, fondé sur des données probantes. Ce niveau répondrait aux besoins d’environ 80 % à 90 % des élèves.

Les enseignants jouent un rôle vital dans le respect du droit de lire. En 2003, la Table ronde des experts en lecture de l’Ontario notait ce qui suit :

Les enseignantes et enseignants contribuent à la réussite scolaire de leurs élèves lorsque leur attitude traduit une ferme conviction que tout enfant peut apprendre à lire et que leur compétence et leur détermination font qu’il en est ainsi.

Le personnel enseignant doit recevoir une formation professionnelle continue et suffisante pour appliquer, comme il a été conçu, un curriculum de base de niveau 1 de qualité supérieure et fondé sur la science. Plusieurs rapports de premier plan soulignent l’importance de doter le personnel enseignant des compétences et des connaissances nécessaires pour donner un enseignement de la lecture fondé sur des données probantes, y compris en ce qui a trait aux compétences de base en lecture des mots. L’American Federation of Teachers (AFT), un syndicat de professionnels du domaine de l’éducation, a reconnu l’importance de préparer les enseignants à donner un enseignement de la lecture fondé sur la science, tant pour les résultats des élèves que pour autonomiser les enseignants et soutenir leur professionnalisme.

L’AFT a collaboré avec l’auteure Louisa Moats à la publication d’un rapport de 2020 intitulé Teaching Reading Is Rocket Science, qui traduit les plus récents résultats de recherche de ce domaine en information destinée aux enseignants. Plusieurs études canadiennes ont démontré qu’un enseignement efficace a le pouvoir de réduire le nombre d’enfants ayant des difficultés en lecture. Il est donc vital que les facultés d’éducation dotent les enseignants de ces compétences et que tous les enseignants bénéficient d’un soutien et d’un perfectionnement professionnel continus.

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La littératie structurée est la façon la plus efficace d’enseigner la lecture au primaire.

Il existe un énorme corpus de recherches scientifiques établies sur l’apprentissage de la lecture et sur les méthodes pédagogiques les plus efficaces dans ce domaine. Parmi les rapports résumant ces recherches figurent des rapports émanant de l’Ontario (le rapport de la table ronde des experts en lecture) et du Canada (le rapport du Réseau canadien de recherche sur le langage et l’alphabétisation), de même que des publications internationales (le rapport du National Reading Panel, aux États-Unis; les Rose Reports, au Royaume-Uni). Ces rapports prônent tous l’enseignement explicite et systématique des compétences de base qui favorisent une lecture efficace des mots : la conscience phonémique, le système graphophonétique, y compris le décodage et l’épellation des mots, et la pratique de la lecture de mots dans des histoires, afin de consolider la précision et la vitesse de la lecture des mots (littératie structurée).

Le but de la lecture est de comprendre le texte et d’en tirer un sens. Il est prouvé que l’aptitude à lire les mots rapidement et efficacement est une composante essentielle d’une bonne compréhension en lecture. Donc, pour comprendre ce qu’ils lisent, les élèves doivent apprendre à décoder, à convertir chaque mot écrit en sa correspondance à l’oral. Pour apprendre à décoder notre système alphabétique, l’élève doit à la fois connaître les rapports entre les lettres et les sons (les correspondances graphèmes-phonèmes) et être en mesure d’appliquer ces connaissances en combinant les différents sons afin d’identifier les mots écrits (le décodage).

Lorsqu’on enseigne explicitement aux élèves les compétences en jeu dans le décodage des mots et qu’on les laisse s’y exercer, le processus s’accélère et, avec la pratique, favorise la lecture automatique des mots.

Des compétences lacunaires en décodage produisent l’effet d’un goulot d’étranglement sur la compréhension en lecture. Quand l’élève doit investir beaucoup de temps, d’efforts et d’attention dans la lecture des mots, cette contrainte entrave le flux de la langue dans le texte et épuise les ressources mentales, de sorte que l’élève a plus de difficulté à comprendre ce qu’elle ou il lit. Le vocabulaire et les connaissances de base, l’aptitude à comprendre la langue parlée et le recours à des stratégies de compréhension sont autant d’autres aspects critiques du développement de la lecture. De fait, le National Reading Panel relève des fonctions cruciales pour l’enseignement dans chacune des cinq grandes idées pour l’apprentissage de la lecture : la conscience phonémique, l’analyse graphophonétique, la fluidité, le vocabulaire et la compréhension en lecture.

Pour les élèves, le meilleur moyen d’acquérir des compétences en lecture des mots dès la maternelle passe par l’enseignement explicite et systématique de la conscience phonémique, de l’analyse graphophonétique et du décodage des mots, l’apprentissage des correspondances entre les graphèmes et les phonèmes et l’application de ces éléments au décodage des mots, y compris la fusion des sons et la segmentation des mots en sons pour lire les mots et la segmentation des mots en sons pour les écrire. L’enseignement explicite comprend des compétences plus avancées au fil des progrès des enfants, telles que l’étude de la structure des mots et des constantes lexicales (les préfixes, les racines et les suffixes, par exemple). On appelle aussi « littératie structurée » cette approche explicite et systématique fondée sur la science de la lecture.

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L’approche actuelle de l’Ontario repose sur des méthodes inefficaces : les systèmes d’indices et de littératie équilibrée.

Le Programme de la maternelle et du jardin d’enfants de l’Ontario de 2016, le curriculum de la 1re à la 8e année et les guides d’enseignement de la lecture du ministère, de même que la formation des enseignants dans les facultés d’éducation ontariennes, mettent l’accent sur l’enseignement des compétences en lecture au primaire par des systèmes d’indices pour la résolution des mots et par la littératie équilibrée. Les systèmes d’indices encouragent les élèves à prédire ou deviner les mots à partir d’indices tirés du contexte ou de leurs connaissances antérieures. Selon l’approche de la littératie équilibrée et d’autres approches globales similaires, les enseignants « se dégagent graduellement de la responsabilité » de modéliser la lecture de textes ou de livres : ils en viennent successivement à la lecture partagée, à la lecture guidée, puis à la lecture autonome des textes par les élèves.

Les systèmes d’indices et la littératie équilibrée pour la lecture des mots sont conformes à une philosophie globale du langage, qui part de l’hypothèse que l’exposition à la langue parlée et écrite permettra aux enfants de « découvrir » comment on lit. Dans ces approches, les élèves ne reçoivent pratiquement aucun enseignement direct et systématique sur les éléments constituants de la langue écrite, la conscience phonémique et l’analyse graphophonétique, et sur l’application de ces compétences au décodage des mots. Par exemple, dans le système ontarien actuel, il est probable que l’on encouragera l’élève à prédire un mot à partir d’une image accompagnant le texte, ou à deviner un mot d’après le contexte de la phrase ou de l’histoire et la première lettre du mot, plutôt que de lui enseigner les sons que représentent les lettres et leurs combinaisons et la façon d’utiliser cette connaissance pour déchiffrer le mot.

Les modèles de littératie équilibrée ou de littératie globale équilibrée, les systèmes d’indices et les autres croyances et pratiques « globales » ne sont pas étayés par la science de la lecture. Ils ont été discrédités dans un grand nombre d’études, d’examens par des experts et de rapports sur les moyens d’enseigner la lecture des mots à tous les élèves. Les systèmes d’indices et la littératie équilibrée sont des méthodes inefficaces pour enseigner à une proportion significative d’élèves à lire les mots, et ils peuvent être très préjudiciables aux élèves à risque. Les élèves qui risquent le plus d’échouer en lecture, y compris les élèves ayant des troubles de lecture et beaucoup d’élèves de groupes protégés par le Code, n’acquièrent pas les compétences critiques pour la lecture au primaire lorsque ces approches sont utilisées à l’école.

Lorsque l’école échoue à leur enseigner à lire les mots avec précision et fluidité, les élèves ont plus de difficulté à comprendre ce qu’ils lisent et d’en tirer un sens. Ces élèves courent un risque accru d’avoir des difficultés scolaires et de subir d’autres conséquences négatives. Même chez les élèves capables de s’initier à la lecture quand ces méthodes sont mises en œuvre, un enseignement direct et systématique pourra avoir des effets bénéfiques sur la fluidité et l’épellation.

Le curriculum de l’Ontario décrit ce que tous les enseignants sont censés enseigner et ce que chaque élève est censé apprendre à chaque niveau. Le curriculum est un outil important pour l’établissement d’exigences obligatoires et l’uniformisation des pratiques à l’échelle de la province. La formation initiale et le perfectionnement professionnel des enseignants reposent en grande partie sur le curriculum de l’Ontario.

Le curriculum de l’Ontario met l’accent sur les trois systèmes d’indices en tant que principale méthode d’enseignement de la lecture des mots. Il explique qu’il s’agit de chercher des indices afin de prédire ou de deviner des mots, en fonction du contexte et des connaissances antérieures. L’une des attentes générales à chaque niveau est que les élèves puissent utiliser la connaissance des mots et des systèmes d’indices pour lire avec fluidité. Le curriculum donne une définition de la conscience phonologique, de la conscience phonémique et des indices graphophonétiques dans un glossaire, mais il omet d’en exiger l’enseignement ou de donner des indications sur la façon de les enseigner.

L’équipe d’enquête a examiné le volet « littératie » du Programme de la maternelle et du jardin d’enfants de l’Ontario en ce qui a trait au développement du décodage et de la lecture des mots et y a également constaté des lacunes. Le programme n’accorde pas assez d’attention à l’enseignement des compétences de base en lecture des mots. Plusieurs contenus d’apprentissage renvoient à la conscience phonémique et phonologique et à l’analyse graphophonétique, mais il n’est guère question de l’importance de ces compétences. Le programme ne prévoit aucun ensemble clairement défini de compétences en lecture que les enseignants doivent enseigner, et les élèves apprendre. L’information sur l’enseignement de la connaissance des lettres et des compétences en décodage est insuffisante; par exemple, il n’est pas question d’enseigner quotidiennement l’analyse graphophonétique. Le Programme de la maternelle et du jardin d’enfants passe également sous silence l’importance du suivi des compétences des élèves dans ces domaines ainsi que l’aide à offrir aux élèves ayant de la difficulté à développer ces compétences initiales en lecture.

Les guides d’enseignement ontariens tels que A Guide to Effective Instruction in Reading, Kindergarten to Grade 3, 2003 font aussi la promotion des systèmes d’indices en tant que mode principal d’acquisition des compétences en lecture des mots. Ces guides décrivent en détail la façon d’utiliser les systèmes d’indices. Certes, le guide précité mentionne la conscience phonémique, l’analyse graphophonétique et l’étude des mots (qu’il définit comme une activité pédagogique où les élèves s’exercent à reconnaître les mots fréquents et à apprendre des stratégies de résolution des mots), mais il met constamment l’accent sur les trois systèmes d’indices. Même lorsqu’il est question de la conscience phonémique, de l’analyse graphophonétique et de l’étude des mots, les auteurs privilégient les stratégies de conjecture.

Les ressources des conseils scolaires mettent elles aussi l’accent sur les approches des systèmes d’indices et de la littératie équilibrée. Les conseils de langue anglaise examinés dans le cadre de l’enquête ont déclaré qu’ils respectent les exigences du curriculum de l’Ontario et qu’ils s’appuient sur les ressources du ministère, en particulier A Guide to Effective Instruction in Reading, Kindergarten to Grade 3, 2003. Les conseils ont indiqué qu’en plus des systèmes d’indices, ils mettent en œuvre la littératie équilibrée ou la littératie globale (équilibrée) comme méthode d’enseignement des compétences initiales en lecture. La majorité des répondants au sondage des enseignants de la CODP ont également indiqué que la littératie équilibrée est la principale méthode d’enseignement de la lecture en Ontario.

Sauf de rares exceptions, les conseils ne font pas la promotion d’approche explicite et systématique de la conscience phonologique, de l’analyse graphophonétique, du décodage et de la fluidité de la lecture des mots. Peu de ressources des conseils mentionnent la conscience phonémique ou l’analyse graphophonétique. Lorsque ces approches sont mentionnées, il n’y a pas assez de détails sur les façons d’en intégrer les pratiques dans une démarche efficace d’enseignement de la lecture au primaire. Les enseignants peuvent donner de brèves « mini-leçons » sur certains aspects des compétences en lecture au primaire, habituellement avec de petits groupes d’élèves, à la discrétion de l’enseignante ou de l’enseignant. Toutefois, ce modèle d’enseignement ponctuel n’est pas équivalent à l’enseignement systématique et explicite de niveau 1, en groupe-classe, sur les compétences de base en lecture des mots.

Quelques conseils ont reconnu la nécessité d’un enseignement de la lecture au primaire plus fondé sur la science. Ils ont tenté d’incorporer un enseignement plus explicite de certaines compétences de base. Cependant, même lorsque des conseils ou des enseignants tentent plus délibérément de donner un enseignement direct et systématique, ils sont freinés par le curriculum actuel de l’Ontario et son insistance sur les systèmes d’indices et la littératie équilibrée. Parmi les autres obstacles, on note un manque d’orientation et d’uniformité d’accès quant aux ressources conviviales et fondées sur des données probantes qui pourraient aider les enseignants à maîtriser une approche étayée par la science et à la mettre en œuvre dans leur classe. Le maintien de l’accès à un perfectionnement professionnel efficace est un autre aspect particulièrement problématique.

L’enquête a également révélé un autre obstacle dans le fait que certains acteurs du secteur de l’éducation résistent au changement et font valoir des croyances bien ancrées en faveur des philosophies globales du langage.

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Les enseignants ont accès à une formation et à un soutien insuffisants.

Actuellement, les enseignants de l’Ontario sont tenus de suivre un curriculum qui n’a rien d’un programme de base fondé sur la science et respectant le droit de lire. De plus, les enseignants en formation initiale et les enseignants actifs en perfectionnement professionnel apprennent très peu de choses sur le mode de développement de la fluidité en lecture et sur l’enseignement de la lecture des mots selon les méthodes éprouvées de la littératie structurée.

Les facultés d’éducation de l’Ontario sont tenues de préparer les enseignants à suivre le curriculum de l’Ontario et le Programme de la maternelle et du jardin d’enfants. L’enquête a révélé que les cours de formation initiale des enseignants et les cours menant à une qualification additionnelle (QA) en lecture privilégient eux aussi les méthodes inefficaces des systèmes d’indices et de la littératie équilibrée (et, avant la 1re année, des approches fondées sur la découverte et le jeu). On y consacre peu de temps à veiller à ce que les enseignants en formation initiale comprennent le développement général du langage et celui de la lecture au primaire.

De plus, les facultés mettent souvent l’accent sur les perspectives socioculturelles et la pédagogie sensible à la culture. Ces aspects ont leur importance pour les discussions plus générales sur la littératie et l’équité en éducation, mais ils ne peuvent se substituer à la préparation des enseignants à donner un enseignement direct et explicite sur les compétences de base en lecture des mots. Ce manque d’insistance sur un enseignement des compétences initiales en lecture étayé par la science peut être préjudiciable pour bon nombre de populations étudiantes historiquement marginalisées, ce qui va à l’encontre de l’objectif de promouvoir l’équité.

L’enquête a révélé que les programmes de formation des enseignants et les cours menant à une QA en lecture et en éducation de l’enfance en difficulté n’abordent guère l’enseignement direct et systématique des compétences de base en lecture des mots. En général, on n’enseigne pas aux enseignants actifs ou en formation initiale comment se développe la fluidité en lecture, y compris l’importance de solides compétences initiales en lecture des mots pour la fluidité et la compréhension en lecture. Les enseignants n’apprennent pas adéquatement à enseigner la conscience phonémique, le système graphophonétique et le décodage, et l’efficacité en lecture des mots. Ils apprennent peu de choses sur le dépistage précoce des élèves ayant des difficultés en lecture et sur les mesures d’intervention fondées sur des données probantes. Même les enseignants qui suivent des cours menant à une QA spécialisée en lecture et en éducation de l’enfance en difficulté n’acquièrent pas ces compétences et n’apprennent pas à repérer les élèves ayant des difficultés en lecture et à les aider. En outre, ils n’apprennent pratiquement rien des troubles de lecture, tandis que le terme « dyslexie » est rarement employé.

Des conseils ont déclaré que les nouveaux diplômés en enseignement possèdent peu de connaissances de base sur l’enseignement de la lecture au primaire, de sorte que c’est le conseil qui doit fournir cette formation dans le cadre d’un programme d’insertion professionnelle du nouveau personnel enseignant. Bon nombre d’enseignants ont confirmé n’avoir rien appris sur l’enseignement efficace de la lecture et les troubles de lecture dans leur programme de formation à l’enseignement ou dans leurs cours menant à une QA. Ils doivent chercher ces connaissances ailleurs, souvent en consacrant leur temps libre et leur argent à des recherches, à des ressources et à des programmes de formation privés.

Des conseils et des enseignants ont également mentionné des problèmes associés au perfectionnement professionnel en cours d’emploi. Selon eux, l’approche de la province en matière de perfectionnement professionnel s’est éloignée d’un perfectionnement professionnel complet, continu et en personne. L’enquête a révélé que le manque de soutien financier et de congés d’enseignement pour activités professionnelles nuit à l’apprentissage professionnel en cours d’emploi.

Les responsables de l’enquête ont examiné la formation donnée dans les conseils sur l’enseignement de la lecture et dans d’autres domaines d’intérêt tels que le dépistage; elle a constaté que cette formation était principalement axée sur des programmes, ressources ou méthodes d’évaluation propres à chaque conseil et incompatibles avec des approches fondées sur la science. Les connaissances et l’expertise nécessaires pour offrir un perfectionnement professionnel fondé sur la science de la lecture ne se trouvent pas souvent au sein des conseils; ainsi, lorsqu’une formation est offerte, elle porte principalement sur les approches et les programmes inefficaces en usage dans les conseils. Deux des conseils scolaires visés par l’enquête semblent s’efforcer d’élargir la portée de leur perfectionnement professionnel et d’appuyer tous les enseignants de classe du cycle primaire dans l’enseignement explicite et systématique des compétences de base en lecture des mots. Toutefois, cette initiative ne devrait pas être laissée à la discrétion de chaque conseil, et le perfectionnement professionnel devrait être uniforme à l’échelle de la province. Un surcroît de ressources, d’orientations et d’appuis de la part du ministère sera bénéfique à tous les conseils de l’Ontario.

Des enseignants ont déclaré aux responsables de l’enquête qu’ils veulent un curriculum et un perfectionnement professionnel qui leur permettent de rejoindre tous les élèves. Ils veulent aussi des approches uniformes d’enseignement de la lecture à l’échelle du conseil, de l’école et de la classe. Selon ces enseignants, cela leur sera profitable ainsi qu’à leurs élèves. Les enseignants ne veulent pas voir leurs élèves avoir de la difficulté; ils veulent profiter d’une autonomie et d’un appui dans l’exercice de leur jugement professionnel, afin d’enseigner à leurs élèves dans un système fondé sur des données probantes et doté de ressources adéquates. Les conclusions et les recommandations de la présente enquête vont dans le sens de cet objectif.

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Dépistage précoce

Conclusions et recommandations principales

Une mesure ou un instrument de dépistage est une évaluation rapide et officieuse, fondée sur des données probantes, qui fournit de l’information sur de possibles difficultés de lecture des mots. Les mesures de dépistage permettent de repérer les élèves qui ont des difficultés de lecture des mots ou qui courent le risque d’en développer dans l’avenir, afin qu’ils puissent obtenir une instruction supplémentaire ou des mesures d’intervention immédiates. Tous les élèves devraient faire l’objet de dépistage deux fois par année de la maternelle à la 2e année, au moyen de mesures de dépistage standardisées et fondées sur des données probantes.

L’Ontario ne dispose pas actuellement d’approche systématique et fondée sur des données probantes de dépistage précoce universel visant à repérer les élèves à risque qui ont besoin d’enseignement additionnel et de mesures d’intervention immédiates. L’approche actuelle varie d’un endroit et d’une situation à l’autre, et repose majoritairement sur des évaluations de la lecture ne reposant pas sur des données probantes. Par conséquent, de nombreux élèves à risque ne sont pas repérés à temps, voire du tout, et n’obtiennent pas de mesures d’intervention précoce dont ils ont besoin.

Les difficultés de lecture de bien des élèves ne sont pas repérées en temps opportun, ce qui a d’énormes conséquences. L’enseignement des compétences de base en lecture aux enfants est le plus efficace entre l’âge de quatre et de sept ans, qui constitue une fenêtre critique d’opportunité pour l’apprentissage de la lecture. De nombreux élèves qui n’obtiennent pas les résultats escomptés en lecture passent par les mailles du filet et n’obtiennent pas les mesures d’intervention et de soutien en temps opportun dont ils ont besoin. Les parents qui se disent préoccupés par la situation entendent parfois qu’ils n’ont pas à s’inquiéter et que les retards sur le plan du développement sont courants et même à prévoir chez certains élèves (p. ex., les garçons et les élèves nés tard durant l’année civile). Ces idées fausses ont pour effet de repousser l’obtention du soutien requis, ce qui limite les chances de réduire l’écart s’étant creusé sur le plan de la lecture. Le dépistage universel réduit le risque que des idées fausses et des biais nuisent aux décisions relatives aux élèves.

L’Ontario doit rectifier son approche inadéquate en matière de dépistage précoce, qui occasionne inutilement des conflits et de la confusion entre les conseils scolaires et les enseignants, et fait fi du meilleur intérêt des enfants à risque. Des recherches poussées ont été menées dans le secteur du dépistage des difficultés relatives aux compétences initiales en lecture, les coûts financiers sont minimaux et les pratiques actuelles ont des répercussions néfastes sur les élèves.

La CODP recommande au ministère de collaborer avec sa, son ou ses experts externes pour exiger le dépistage standardisé et fondé sur des données probantes des difficultés relatives aux compétences de base en matière de précision et fluidité de lecture des mots. Le ministère devrait exiger que les conseils soumettent deux fois par année au dépistage tous les élèves de la maternelle à la 2e année, au moyen d’outils de dépistage valides et fiables, et leur fournir une enveloppe budgétaire annuelle stable pour effectuer ce dépistage. Les outils de dépistage utilisés devraient correspondre à l’année d’études et à la période de l’année (autrement dit, les conseils devraient mesurer les connaissances que devrait posséder une ou un élève de cette année d’études à ce moment de l’année). Les outils de dépistage sélectionnés devraient reposer sur des règles claires, fiables et valides d’interprétation des résultats et de décision [recommandations 59 à 61].

La CODP recommande que les résultats du dépistage précoce servent à l’identification des élèves à risque de ne pas apprendre à lire les mots de façon adéquate et à la prestation de mesures d’intervention immédiates, efficaces et fondées sur des données probantes à ces élèves [recommandations 60 à 62].

La CODP recommande que les enseignants obtiennent le perfectionnement professionnel nécessaire à la mise en œuvre réussie du dépistage [recommandation 66] et qu’ils disposent du temps requis pour compléter les évaluations [recommandation 67].

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Le dépistage universel assure une meilleure identification et intervention précoces.

Jumelé à un curriculum de base fondé sur la science et présenté par des éducateurs adéquatement préparés, le dépistage précoce universel fondé sur des données probantes est une composante importante d’un enseignement de niveau 1. Ce dépistage permet de repérer les élèves qui courent le risque de développer des difficultés de lecture ou ne réagissent pas de la façon escomptée à l’enseignement fondé sur des données probantes, ce qui signifie qu’ils ne développent pas les compétences et connaissances requises en matière de lecture. Le dépistage précoce permet de repérer les élèves ayant besoin d’un programme adapté afin de leur offrir ce programme avant que leurs difficultés s’accumulent. Effectué convenablement en combinaison avec un enseignement et des mesures d’intervention reposant sur des données probantes, le dépistage précoce réduit les risques qu’une ou un élève nécessite plus tard une évaluation professionnelle effectuée par une ou un psychologue ou orthophoniste. Bien que cela ne s’inscrive pas dans la portée du présent rapport, les mesures précoces peuvent aussi servir au dépistage des difficultés sur le plan du développement du langage parlé.

Le dépistage devrait être universel. Tous les élèves devraient faire l’objet de dépistage deux fois par année de la maternelle à la 2année, au moyen de mesures de dépistage communes, standardisées et fondées sur des données probantes. Les mesures de dépistage fondées sur des données probantes qui ont été avalisées par des recherches affichent une validité interne et externe forte, sont fiables et ont été associées à la science de l’enseignement de la lecture et de l’acquisition des compétences de base en lecture. Beaucoup de mesures de dépistage ont été rigoureusement mises au point et examinées afin de connaître leur validité et fiabilité pour l’établissement des risques de difficultés de lecture.

Les élèves des différentes années d’études devraient être soumis à des outils de dépistage spécifiques, qui mesureront le niveau d’acquisition des compétences en lecture escompté à ce moment précis de leur scolarité. Par exemple, les mesures de dépistage utilisées à la maternelle et au jardin d’enfants devraient évaluer entre autres la connaissance des lettres et la conscience phonémique, tandis que les mesures de dépistage utilisées par la suite, jusqu’en 2e année, devraient inclure l’évaluation de la lecture de passages de texte et de la rapidité de lecture des mots.

Le dépistage universel est nécessaire pour protéger les droits de tous les élèves, surtout les élèves issus de nombreux groupes protégés par le Code. Contrairement au dépistage discrétionnaire, le dépistage obligatoire réduit les risques de biais sur le plan de l’évaluation ou du choix des élèves admissibles aux mesures d’intervention. Il réduit également le risque que des élèves passent par les mailles du filet. Le dépistage universel fondé sur des données probantes fait en sorte que de meilleures décisions sont prises relativement aux élèves ayant besoin de soutien additionnel, ce qui améliore les résultats des élèves. Les données recueillies lors du dépistage sont aussi très utiles au travail de planification des conseils. Les conseils peuvent comparer les résultats obtenus d’une école à l’autre ou d’un groupe d’élèves à l’autre au moyen d’outils de dépistage couramment utilisés, et diriger les ressources où elles seront le plus utiles.

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Obstacles auxquels se heurtent les élèves qui apprennent le français

Tous les élèves peuvent apprendre le français s’ils ont accès aux soutiens nécessaires. Cependant, les enquêteurs ont appris que les élèves ayant des difficultés de lecture n’ont pas un accès équitable à l’éducation de langue française. Des personnes dont les enfants ont droit de recevoir une éducation en français ont dit avoir abdiqué ce droit et transféré leur enfant dans un conseil de langue anglaise étant donné que les conseils de langue française avaient moins de ressources et de programmes à l’intention des enfants ayant des difficultés de lecture. En raison d’idées fausses selon lesquelles les élèves qui peinent à apprendre à lire ne devraient pas apprendre l’anglais et le français en même temps, d’autres élèves pourraient aussi se voir dissuadés de s’inscrire en immersion française, ou encouragés à quitter un programme d’immersion française. Certains parents avaient également été informés par leur conseil scolaire que celui-ci n’offrait pas de soutien comme des mesures d’intervention et d’adaptation en immersion française.  

Une approche préventive doit également être mise en place à l’intention des élèves à risque de développer des troubles de lecture, dont la langue d’apprentissage est le français. Les élèves des écoles françaises devraient également avoir accès à des mesures de dépistage et d’intervention précoces équivalentes, ayant fait l’objet d’une validation scientifique.

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L’approche actuelle de l’Ontario en matière de dépistage est un échec auprès de beaucoup d’élèves.

Selon son interprétation actuelle, la note Politique/Programmes (NPP) no 155 du ministère nuit considérablement au dépistage précoce universel. La NPP n155 laisse aux enseignants le soin de déterminer la fréquence et le moment du dépistage, et le choix des outils de dépistage et des élèves à y soumettre, selon leur jugement professionnel. Elle empêche les conseils d’exiger que les écoles soumettent tous les élèves au dépistage à des moments précis de l’année, au moyen d’un outil de dépistage commun, fondé sur des données probantes. Cette situation a occasionné des lacunes et des incohérences, et a nui à l’adoption d’une approche de dépistage universel efficace et axée sur les élèves. La NPP limite aussi la capacité des conseils de recueillir des données centralisées et de les utiliser pour prendre des décisions.

L’enquête a révélé que les pratiques de dépistage varient d’un conseil, d’une école et d’un membre du personnel enseignant à l’autre. Des problèmes considérables ont également été constatés sur le plan des méthodes de dépistage actuelles, qui nuisent à l’efficacité des approches multiniveaux des conseils scolaires. Une personne représentant une association d’enseignants a affirmé que le mode actuel de sélection des élèves soumis au dépistage, du moment du dépistage et de la méthode utilisée « est basé sur la chance ».

La plupart des conseils scolaires n’effectuent pas le dépistage universel à différents moments entre la maternelle et la 2année. En règle générale, le dépistage a lieu une fois, au jardin d’enfants. Les enfants ne font pas tous l’objet de dépistage. Dans certains cas, les éducateurs soumettent uniquement au dépistage les élèves qui leur semblent avoir des difficultés.

Lorsque le dépistage est effectué au jardin d’enfants, les tests utilisés mesurent généralement les connaissances des noms et des sons des lettres et (ou) la conscience phonologique seulement. L’évaluation porte habituellement uniquement sur certains aspects de la conscience phonologique. Or, ces aptitudes préalables à l’apprentissage de la lecture et de l’écriture représentent une partie seulement des compétences à mesurer. Les conseils croient souvent à tort que ces outils de dépistage minimal au jardin d’enfants constituent des outils complets de dépistage de l’ensemble des connaissances et compétences nécessaires à l’apprentissage de la lecture des mots. Quelques conseils soumettent ensuite une deuxième ou même une troisième fois au même outil de dépistage ou à un outil quelque peu différent portant parfois sur des compétences plus poussées les élèves ayant échoué à la première évaluation. Cette méthode de dépistage pourrait nuire à l’identification des élèves qui réussissent le test de dépistage des aptitudes initiales à la lecture et à l’écriture, mais peinent ensuite à acquérir les compétences plus poussées, comme la précision et la fluidité de la lecture.

Après le jardin d’enfants, les conseils évaluent généralement les élèves au moyen de tests associés à des programmes d’intervention commerciaux reposant sur les approches des trois systèmes d’indices et de la littératie équilibrée. Or, ces outils de dépistage ne sont pas fondés sur des données probantes. Les enseignants utilisent typiquement des outils d’observation comme l’analyse des méprises ou les fiches d’observation individualisées, dans lesquelles ils consignent leurs observations des comportements de l’élève au moment de la lecture de textes à niveaux de lecture gradués, y compris les mots qu’ils lisent correctement, leur utilisation des trois systèmes d’indices pour deviner les mots et les erreurs commises. Ces méthodes ne constituent pas des mesures utiles. Elles indiquent uniquement au personnel enseignant si l’élève affiche un rendement considérablement sous celui de l’année d’études en matière de lecture de textes gradués, mais non si ses compétences de base en lecture des mots s’améliorent. Les évaluations reposant sur ces méthodes ne permettent pas d’identifier de nombreux élèves à risque d’échec en matière de lecture des mots.

Certains conseils ont inclus des outils de dépistage fondés sur des données probantes dans leurs listes d’outils de dépistage « approuvés ». Or, en raison de la NPP n155, il n’est pas garanti que les enseignants choisiront d’utiliser ces outils, et les conseils ne pouvaient pas garantir leur utilisation. Certains conseils se servent d’évaluations élaborées à l’interne, qui contiennent des composantes utiles, mais manquent certains éléments, et ne semblent malheureusement pas avoir été évaluées adéquatement pour en mesurer l’efficacité.

L’enquête a également révélé que les conseils ne pouvaient pas fournir d’information claire sur l’utilisation faite des résultats du dépistage, ou ne savaient pas quelle était la meilleure façon de réagir à l’information tirée du dépistage.

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Approche standardisée de dépistage précoce universel fondée sur des données probantes

L’Ontario a besoin d’exiger le dépistage précoce universel et standardisé, fondé sur la science de la lecture. Cela inclut le fait de stipuler le moment et la fréquence de dépistage de tous les élèves, ainsi que les outils utilisés. Les éducateurs et autres professionnels en milieu scolaire, comme les orthophonistes et psychologues des conseils, devraient participer de près à la mise au point de l’approche à adopter.

Les éducateurs chargés d’utiliser l’outil de dépistage devraient recevoir une formation professionnelle adéquate sur les principes de base du dépistage précoce des difficultés de lecture, accompagnée de connaissances sur les outils spécifiques qui seront employés. L’expérience d’autres régions et pays qui ont adopté des programmes efficaces de dépistage précoce montre que le dépistage prend de 10 à 15 minutes par élève. Les éducateurs doivent disposer du temps requis pour effectuer cet important travail, y compris la consignation des données de dépistage.

Les outils de dépistage utilisés doivent inclure des mesures appropriées à l’année d’études, être standardisés afin d’en assurer l’uniformité, être fondés sur des données probantes et être administrés deux fois par année à tous les élèves de la maternelle à la 2année. Les conseils devraient utiliser un système harmonisé de consignation des résultats de dépistage de l’ensemble des élèves. Les résultats devraient servir à identifier les mesures d’intervention requises par les élèves, et à les offrir sur-le-champ. La collecte de données sur le dépistage précoce est également très importante, mais les données recueillies ne devraient pas être utilisées pour gérer le rendement des éducateurs ou blâmer ces derniers pour les problèmes de lecture. Les conseils doivent aussi s’assurer de ne pas utiliser ou communiquer les données d’une façon qui stéréotype ou marginalise davantage des élèves, groupes d’élèves ou écoles.

La communication avec les parents fait également partie intégrante de la mise en œuvre réussie du dépistage précoce. Les parents doivent comprendre que leur enfant n’est pas pris à partie, mais plutôt que le dépistage est effectué auprès de tous les élèves pour déterminer lesquels ont besoin de mesures de soutien ou d’intervention complémentaires. Certains parents pourraient se préoccuper des risques d’étiquetage ou de stigmatisation de leur enfant à la suite du dépistage. Les conseils doivent expliquer que le dépistage réduit le risque que les élèves développent des troubles de lecture ou nécessitent plus tard des mesures additionnelles de soutien de l’enfance en difficulté.

Le dépistage est une composante essentielle d’une approche systématique et exhaustive de respect du droit de lire. Plus on repère tôt les élèves qui nécessitent un enseignement des compétences de base en lecture des mots accompagné d’une intervention ciblée, et meilleur sera leur rendement. L’investissement de temps et d’efforts dans le dépistage précoce universel et la mise en œuvre de mesures d’intervention réduira la nécessité d’offrir des services plus intensifs et coûteux dans l’avenir. Lorsque les enseignants disposeront d’information fiable et utile sur leurs élèves et seront mieux placés pour les aider, ils s’en porteront mieux et leurs élèves auront de meilleurs résultats.

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Mesures d’intervention en lecture

Conclusions et recommandations principales

Beaucoup plus d’élèves apprendront à lire si nous changeons les approches actuelles d’enseignement de la lecture en salle de classe, soumettons tous les élèves au dépistage et offrons à ceux qui en ont besoin des mesures d’intervention précoce multiniveaux. L’approche de l’Ontario en matière d’intervention auprès des élèves ayant des difficultés de lecture comporte des lacunes qui font en sorte que de nombreux élèves ne développent pas les compétences de base requises en lecture des mots. Lorsque cela se produit, c’est que notre système d’éducation a failli.

De nombreux élèves ont besoin de mesures d’intervention parce que l’enseignement de la lecture des mots en salle de classe n’est pas fondé sur la science de la lecture. Les besoins en matière de mesures d’intervention en lecture sont supérieurs aux places disponibles. Par conséquent, beaucoup d’élèves n’ont jamais accès aux mesures dont ils ont besoin à l’école, ou y ont accès beaucoup trop tard.

Les mesures d’intervention sont les plus efficaces lorsqu’elles sont offertes de la maternelle à la 1re année, et pas plus tard que la 2e année. Pourtant, en Ontario, les mesures d’intervention les plus efficaces peuvent uniquement être obtenues après la 3e année ou bien plus tard, et ce, uniquement dans les écoles qui en font usage. La première réaction des conseils aux difficultés de lecture persistantes de leurs élèves est souvent de fournir les mêmes mesures d’intervention en lecture qui n’ont pas fonctionné dans un premier temps, cette fois-ci en plus petits groupes ou de façon individuelle. Lorsqu’un programme d’intervention structuré est offert lors des premières années d’études, il s’agit presque toujours d’un programme commercial non efficace qui n’est pas fondé sur des recherches rigoureuses relatives à l’acquisition de compétences de base en lecture des mots. Une fenêtre critique d’opportunité pour l’apprentissage de la lecture commence alors à se fermer, et les élèves prennent de plus en plus de retard.

Certains conseils font exception à la règle et offrent des programmes efficaces d’intervention aux élèves les plus jeunes, mais encore là la demande est supérieure à l’offre. Le manque d’uniformité d’un conseil et d’une école à l’autre est préoccupant. De bons programmes d’intervention précoce devraient être mis à la disposition de tous les élèves, quelle que soit la région de la province où ils habitent ou l’école qu’ils fréquentent.

Certains programmes d’intervention efficaces sont offerts aux années supérieures, généralement après de nombreuses années de difficultés et de prise de retard sur le plan de la lecture. Encore là, les conseils semblent ne pas suivre de méthode équitable et systématique de sélection des élèves qui en bénéficieront. Les parents qui ont la capacité d’intervenir au nom de leur enfant ou les moyens de lui payer des services d’évaluation psychopédagogique privés sont plus susceptibles d’obtenir des mesures d’intervention pour leur enfant. Et même lorsque la sélection des élèves qui auront accès aux programmes dépend de critères de rendement, ces critères sont généralement problématiques, comme lorsqu’ils établissent l’admissibilité selon le nombre d’années de retard, mesurées en fonction de niveaux de lecture de livres peu fiables. Enfin, les besoins de beaucoup d’élèves ne sont jamais satisfaits en raison de la capacité maximale des programmes d’intervention.

L’Ontario a besoin d’assurer la prestation, en salle de classe, d’un enseignement explicite et systématique des compétences de base en lecture des mots afin de réduire les besoins en matière d’intervention en lecture des élèves de l’Ontario, tout en augmentant l’accès des élèves à des mesures d’intervention éprouvées dès les premières années d’études. Pour y parvenir, la CODP recommande au ministère de collaborer avec une, un ou plusieurs experts externes à la sélection de mesures d’intervention précoce (maternelle à la 1re année) et ultérieure (2e et 3e année, et années subséquentes) appropriées, parmi lesquelles les conseils scolaires devront choisir. Ces mesures d’intervention devraient être fondées sur des données probantes et inclure un enseignement explicite de la conscience phonémique, de l’analyse graphophonétique et des compétences en précision et fluidité de la lecture des mots [recommandation 69].

La CODP recommande que les conseils scolaires cessent immédiatement d’offrir des mesures d’intervention qui n’incluent pas ces composantes ou qui ne sont pas fondées sur des données probantes rigoureuses aux élèves qui ont des difficultés de lecture des mots, qui ont une dyslexie ou un trouble de lecture diagnostiqué, reconnu ou présumé, ou qui courent un risque d’en développer, et qu’ils s’en tiennent uniquement aux mesures d’intervention figurant dans la liste du ministère [recommandation 70].

Pour accroître et standardiser l’accès à des mesures d’intervention, La CODP recommande que les conseils scolaires veillent à ce que chaque école se dote d’au moins une mesure d’intervention en lecture fondée sur des données probantes de niveau 2 et de niveau 3 (plus intensive que le niveau 2) à l’intention des élèves de chaque niveau d’études qui en ont besoin [recommandation 73]. Cela nécessitera l’octroi par le ministère d’une enveloppe budgétaire annuelle stable de soutien à la mise en œuvre [recommandations 68, 80 et 83] et de mesures adéquates de perfectionnement et de soutien professionnels pour veiller à ce qu’il y ait des éducateurs informés et compétents capables d’offrir ces mesures d’intervention [recommandations 83 à 85].

La CODP recommande de supprimer les critères d’admissibilité non appropriés aux mesures d’intervention, comme l’obtention d’un diagnostic de TA ou l’absence de handicaps concomitants [recommandations 75 à 78]. Plutôt, le ministère devrait collaborer avec une, un ou plusieurs experts externes pour élaborer des critères cohérents et fondés sur des données de recherche de sélection des élèves qui auront accès aux mesures d’intervention en fonction des résultats à des tests de lecture standardisés. Pour assurer l’accès équitable aux mesures, TOUS les élèves qui satisfont aux critères devraient obtenir des mesures d’intervention [recommandations 71, 72, 75 à 78].

La CODP recommande d’améliorer le suivi des progrès des différents élèves et l’évaluation de l’efficacité d’ensemble des méthodes d’intervention [recommandations 81 et 82].

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Composantes clés de mesures d’intervention efficaces en lecture

Les mesures d’intervention précoce qui sont fondées sur des données probantes, pleinement mises en œuvre et surveillées de près, sont très efficaces pour réduire le nombre d’élèves qui n’apprennent pas à lire. Bien que l’intervention précoce soit l’intervention la plus efficace, les élèves de toutes les années d’études, de la maternelle au secondaire, devraient avoir accès à des mesures d’intervention efficaces en lecture. Jumelé à une intervention précoce au besoin, l’enseignement efficace en salle de classe fera en sorte que peu d’élèves nécessiteront des mesures d’intervention plus tard durant leurs études, lorsque celles-ci sont moins efficaces. Tous les élèves qui ont des difficultés de lecture devraient avoir accès à des mesures d’intervention, qu’ils aient ou non un trouble de lecture reconnu.  

Les mesures d’intervention fondées sur des données probantes représentent le niveau 2 et 3 d’une approche multiniveaux de soutien aux élèves ayant des difficultés de lecture. Les mesures d’intervention de niveau 2 s’adressent au 15 % à 20 % d’élèves qui pourraient encore peiner à lire après avoir obtenu un enseignement de niveau 1 fondé sur des données scientifiques. Ces élèves bénéficient d’un soutien d’intensité accrue de niveau 2 en petit groupe.

À la maternelle et en 1re année, les mesures d’intervention de niveau 2 fondées sur des données probantes sont efficaces pour la plupart des élèves. Les mesures de soutien de niveau 3 s’adressent au tout petit pourcentage d’élèves auprès duquel l’intervention de niveau 1 et de niveau 2 n’a pas les résultats escomptés. Ces élèves risquent fortement d’échouer à apprendre à lire les mots correctement, ou ont déjà passé du temps en classe sans arriver à répondre aux exigences en lecture. À ce niveau, il s’agit d’une intervention d’intensité accrue, effectuée en petit groupe ou individuellement.

Les mesures d’intervention sont habituellement offertes sur une base quotidienne, lors de périodes d’intervention ininterrompues. La différence principale entre les mesures d’intervention de niveau 2 et 3 a trait à leur intensité, à leur durée et à leur fréquence.

Au niveau 2, les programmes/mesures d’intervention fondés sur des données probantes doivent explicitement cibler les compétences de base liées à la connaissance des sons des lettres, à la conscience phonémique, au décodage, ainsi qu’à la précision et à la fluidité de lecture des mots. Ces domaines concorderont avec ceux de l’enseignement en salle de classe de niveau 1 des compétences de base en lecture des mots, fondé sur des données probantes. L’intervention de niveau 2 devrait être effectuée auprès de petits groupes d’élèves, sous forme de programme de durée et d’intensité suffisantes. Les mesures d’intervention offertes aux élèves plus âgés devraient porter également sur des stratégies et compétences en lecture des mots plus poussées (y compris les formes orthographiques, syllabes et morphèmes plus complexes).

L’intervention de niveau 3 devrait reprendre de façon plus intensive les programmes d’intervention de niveau 2 ou reposer sur des programmes plus spécialisés. Le niveau 3 devrait inclure des méthodes d’instruction plus explicites et des exercices pratiques échelonnés, être de plus longue durée et prévoir la révision cumulative suffisante des compétences apprises pour en assurer la maîtrise.

Parmi les autres composantes clés des approches multiniveaux efficaces figure ce qui suit :

  • règles claires et appropriées de prise de décisions relatives au choix des programmes fondés sur les données probantes d’enseignement en salle de classe et d’intervention par étapes, et au jumelage des élèves et des programmes d’intervention appropriés (p. ex., résultats standardisés à l’évaluation des compétences de base en lecture des mots plutôt qu’une vague indication de compétences « considérablement » sous le niveau de lecture de l’année en cours)
  • mesures valides et fiables de suivi des résultats des mesures d’intervention, dont les progrès effectués
  • règles et directives clairement établies pour la prise des décisions relatives à chaque élève, à chacune des étapes du système multiniveaux
  • répartition des mesures d’intervention faisant en sorte que tous les élèves aient accès à des mesures d’intervention efficaces
  • méthodes rigoureuses d’évaluation du programme (p. ex., mesures standardisées d’intervention en compréhension et en fluidité de lecture des mots) et de sa conformité (quand et comment il est offert)
  • ressources adéquates pour assurer la mise en œuvre des mesures d’intervention, ainsi que le perfectionnement professionnel de qualité et l’encadrement continu du personnel enseignant.

Les stratégies développées dans le cadre de programmes d’intervention efficaces doivent être appuyées en salle de classe. Une fois que les mesures d’intervention ont pris fin, les pratiques en salle de classe qui ne reposent pas sur des données probantes n’appuieront pas le maintien du développement des compétences requises chez les élèves.

Aucune mesure d’invention ne résoudra à elle seule toutes les difficultés de lecture de l’ensemble des élèves. Environ 3 % à 5 % des élèves ont des problèmes de lecture des mots qui réagissent moins aux mesures d’intervention, même lorsque celles-ci sont efficaces. Les conseils scolaires doivent adopter des mesures d’intervention fondées sur des données probantes à chaque niveau de façon à aider tous les élèves.

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En raison du manque d’enseignement fondé sur des données scientifiques dans les salles de classe de l’Ontario, plus d’élèves qu’il ne le devrait ont besoin de mesures d’intervention.

À l’heure actuelle en Ontario, beaucoup de jeunes élèves ont besoin de mesures d’intervention parce que l’enseignement en salle de classe est fondé sur les trois systèmes d’indices ou la littératie équilibrée, plutôt que la littératie structurée. Ces élèves sont plus nombreux qu’il ne le devrait et les places dans les programmes d’intervention manquent. Or, puisque l’offre de mesures d’intervention ne suit pas la demande, les conseils adoptent une position attentiste qui consiste à attendre de voir quels élèves prendront le plus de retard, puis à offrir des mesures d’intervention à ces élèves. Ce mode de « triage » des élèves auxquels offrir le peu de places disponibles dans les programmes fait en sorte que bon nombre d’élèves n’ont jamais accès aux mesures de soutien de niveau 2 ou 3 dont ils ont besoin, et que ceux qui y ont accès les obtiennent souvent trop tard.

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Les premières mesures d’intervention offertes par les conseils sont souvent inefficaces.

La première méthode d’intervention auprès des élèves qui peinent à lire est généralement l’accroissement de la lecture guidée en salle de classe. Si les difficultés de l’élève perdurent, le conseil lui procurera un programme commercial inefficace ou un « soutien additionnel en lecture » qui est vaguement défini. Or, ces programmes sont souvent basés sur les mêmes approches que celles adoptées en salle de classe, à la différence qu’ils sont prodigués à de plus petits groupes ou individuellement à l’élève. De meilleurs programmes existent, qui reposent sur des recherches. La prestation de programmes inefficaces retarde l’apprentissage des élèves.

Quelques conseils ont élaboré leurs propres méthodes isolées d’intervention, mais celles-ci sont incomplètes et aléatoires, et n’ont pas été adéquatement évaluées pour en garantir l’efficacité.

Quelques conseils examinés dans le cadre de l’enquête ont rapporté qu'ils offraient de bons programmes d’intervention tôt durant les études. Par exemple, un conseil a dit commencer à utiliser un programme fondé sur des données probantes auprès de certains élèves de la maternelle à la 1re année. Deux autres conseils rendaient des programmes semblables accessibles à des élèves n’ayant pas encore atteint la 3e année.

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Les élèves ont un accès inégal aux mesures d’intervention en raison du manque d’harmonisation des programmes à l’échelle de la province.

Le ministère n’exige pas l’adoption de méthode d’intervention, quelle qu’elle soit, auprès des élèves qui ne développent pas de compétences de base en précision et fluidité de lecture des mots. Les conseils scolaires déterminent quelles mesures d’intervention offrir, durant quelles années d’études, quels critères d’admissibilité adopter et quelle méthode de suivi des progrès utiliser, le cas échéant. Parfois, les conseils délèguent cette responsabilité aux écoles.

Les conseils examinés dans le cadre de l’enquête ont fait état d’au moins 16 différents programmes d’intervention commerciaux, dont cinq seulement sont fondés sur des données probantes. Cependant, deux des programmes d’intervention fondés sur des données probantes sont très peu utilisés. Six mesures d’intervention avaient été élaborées par des conseils scolaires, n’avaient pas été évaluées rigoureusement et ne ciblaient pas l’ensemble des compétences requises pour résoudre les difficultés éprouvées tôt ou plus tard durant les études.

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Des mesures d’intervention fondées sur des données probantes sont disponibles, mais on constate des problèmes sur le plan de leur calendrier, mise en œuvre et accessibilité.

Certains conseils utilisent des mesures d’intervention fondées sur des données probantes, auxquelles des parents associent de bons résultats. Malheureusement, ces mesures d’intervention sont souvent offertes trop tard. Les recherches démontrent clairement les avantages d’une intervention en bas âge. Les élèves font les plus grands progrès lorsqu’ils ont droit à des mesures d’intervention lors des premières années d’études. Après la 2e année, les élèves qui ont pris du retard en matière de lecture des mots perdent progressivement plus de terrain par rapport à leurs pairs qui lisent des mots avec davantage de précision et de fluidité, et l’acquisition de ces compétences critiques devient de plus en plus difficile. Les enfants qui ont de faibles compétences en lecture et n’ont pas accès tôt à des mesures d’intervention efficaces sont très susceptibles de conserver leurs difficultés de précision/fluidité de lecture des mots pendant la durée de leurs études.

La plupart des conseils ne prodiguent pas de mesure d’intervention fondée sur des données probantes de niveau 2 ou 3 avant la 4année ou les années subséquentes, voire parfois même avant la 6e, la 7e ou la 8e année. Or, à ce stade, la fenêtre d’opportunité s’est déjà refermée et il devient plus difficile de favoriser le rattrapage des élèves touchés.

L’enquête a révélé que même dans les conseils scolaires où de bons programmes sont offerts, l’accès à ces programmes est limité et très variable. Ces programmes ne sont pas offerts dans toutes les écoles, ou les places y manquent. Certaines écoles pourraient même avoir accès à ces programmes, mais ne pas les offrir. Les conseils scolaires et les écoles n’ont souvent pas les fonds requis pour faire l’acquisition de mesures d’intervention ou pour former le personnel qui les utilisera. La mise en œuvre efficace de mesures d’intervention de niveau 2 et 3 dépend de la dotation en personnel ayant les compétences requises pour prodiguer un programme fondé sur des données probantes.

Même lorsque les conseils ont recours à des programmes d’intervention fondés sur des données probantes, certaines écoles pourraient ne pas avoir accès à toutes les composantes de ces programmes, y compris les mesures d’intervention les plus précoces. Dans certains conseils, un petit pourcentage seulement des écoles offraient des mesures d’intervention précoce (p. ex., seulement 30 % à 40 % des écoles). Un conseil scolaire n’offrait pas de mesure d’intervention fondée sur des données probantes avant la 5année.

L’enquête a aussi permis d’apprendre que certains élèves inscrits à un programme d’intervention n’obtenaient pas de la façon prévue les mesures associées à ce programme (p. ex., mesures manquantes ou offertes quelques jours par semaine plutôt que tous les jours).

En règle générale, les conseils n’ont pas de procédures claires ou de critères objectifs valides d’identification des élèves auxquels offrir des mesures d’intervention précoce. La plupart des conseils se fient en partie à des évaluations peu fiables ou non valides pour déterminer quels élèves feront l’objet de mesures d’intervention. Ces évaluations mesurent la capacité de lire des livres des élèves à différents moments de l’année d’études (ce qui n’est pas une façon fiable de mesurer les compétences de base des élèves en matière de lecture des mots).

Les conseils établissent également des seuils limites qui pourraient ne pas être valides, comme un certain nombre d’années de retard en lecture par rapport à l’année d’études. Dans le cadre de l’enquête, des éducateurs et des parents ont indiqué que le processus de sélection n’était pas systématique et que la capacité des parents d’intervenir au nom de leur enfant était souvent un facteur déterminant de l’obtention de mesures d’intervention. Bien qu’un seul conseil ait dit exiger l’obtention d’une évaluation psychopédagogique, les responsables de l’enquête ont appris que ces évaluations facilitaient souvent l’accès aux mesures d’intervention. Fait préoccupant, un conseil examiné dans le cadre de l’enquête exige l’obtention d’une évaluation et d’un diagnostic de TA, et d’autres donnent la préférence aux élèves qui en ont obtenus, ce qui bloque l’accès de nombreux élèves aux mesures d’intervention. Les approches actuelles relatives au choix des élèves sont susceptibles de mener à des biais, ainsi qu’à des incohérences sur le plan de la mise en œuvre. Vu le manque de ressources, certains élèves qui ont besoin de mesures d’intervention n’en reçoivent pas.

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Meilleur suivi des progrès des élèves et de l’efficacité des programmes

Les conseils scolaires ne font pas un suivi adéquat des progrès des élèves individuels ou de l’efficacité générale des programmes d’intervention. Cette information est nécessaire afin d’orienter les décisions touchant des élèves individuels et les décisions prises à l’échelle du conseil.

Les conseils de l’Ontario n’ont actuellement pas de système uniforme leur permettant de mesurer la réponse des élèves aux mesures d’intervention offertes, ou de suivre les effets à long terme de ces mesures. Les conseils scolaires devraient recueillir des données valides et fiables sur les résultats obtenus dans l’immédiat et à long terme par les élèves, afin d’orienter leurs décisions relatives aux programmes à offrir aux différents élèves. Par exemple, ils devraient utiliser des renseignements fiables sur la réponse aux mesures d’intervention pour déterminer si une ou un élève a besoin de mesures plus intensives ou d’un aiguillage vers des services d’évaluation professionnelle.

Les conseils n’utilisent pas de méthode valide et fiable d’évaluation de l’efficacité des mesures d’intervention. La plupart des conseils ont dit évaluer les niveaux de lecture de livres des élèves avant et après l’intervention. Cette approche n’est pas utile pour mesurer les progrès effectués dans le cadre d’une mesure d’intervention. Les conseils devraient plutôt utiliser des outils standardisés de mesure d’aspects multiples des compétences en lecture.

Des données fiables sur les progrès et résultats des élèves ayant obtenu les différentes mesures d’intervention devraient également être recueillies et analysées à l’échelle du système, mais ne le sont pas. Bon nombre des problèmes relatifs au suivi des progrès des élèves s’appliquent également à la façon dont les conseils scolaires examinent l’efficacité des programmes. Les conseils ont besoin de meilleures données, basées non pas sur les niveaux de lecture de livres, mais sur des évaluations standardisées des compétences en lecture, afin de comprendre quels programmes d’intervention fonctionnent et donnent de bons résultats, auprès de quels élèves et dans quelles écoles. Par exemple, un programme qui semblait prometteur pourrait ne pas donner de bons résultats dans la plupart des écoles, ou encore une famille d’écoles pourrait obtenir des résultats exceptionnels au moyen d’une mesure d’intervention quelconque et servir d’exemple de mise en œuvre réussie au conseil ou à la province.

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Les connaissances relatives aux méthodes d’intervention fondées sur des données probantes doivent être appliquées à la pratique.

Il n’est pas suffisant de reconnaître l’importance d’adopter une méthode d’intervention multiniveaux. La méthode choisie doit reposer sur les composantes qualifiées d’optimales dans les recherches et les études. Malgré que le système d’éducation de l’Ontario reconnaisse l’importance des approches multiniveaux fondées sur des données probantes, il reste beaucoup à faire pour traduire ce savoir en pratiques rigoureuses.

L’accès à des mesures multiniveaux d’intervention précoce fondées sur des données probantes à l’école pour résoudre des difficultés de précision et de fluidité de lecture des mots est une question d’équité. De nombreux parents pouvant se le permettre ont baissé les bras devant l’inefficacité du système d’éducation publique et se paient des services privés. Les élèves issus de familles qui ne peuvent pas se permettre des services privés ou n’ont pas de bons services privés dans leur collectivité doivent tenter de déterminer, en s’y retrouvant au sein d’un système complexe, si leur école offre des mesures d’intervention et, le cas échéant, comment intervenir pour que leur enfant y ait accès. Même là, les mesures d’intervention obtenues au final pourraient ne pas être fondées sur des données probantes.

Il existe de meilleures façons d’assurer l’accès équitable des élèves ayant des difficultés de lecture à des mesures d’intervention en lecture des mots. Des progrès ont été faits dans les dernières années, mais il reste encore beaucoup de travail à faire. Il existe des mesures claires que l’Ontario peut prendre pour répondre aux besoins des élèves qui peinent à développer les compétences de base requises en lecture des mots. L’offre de mesures d’intervention fondées sur des données probantes à tous les niveaux, à tous ceux qui en ont besoin, réduira les fardeaux à courts et longs termes qui pèsent sur les élèves, les familles, les éducateurs et le système d’éducation. Cela aidera à réduire la nécessité d’offrir des mesures d’adaptation et de mener des évaluations professionnelles.

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Accommodement des besoins

Conclusions et recommandations principales

L’enseignement explicite et systématique des compétences de base en lecture des mots, jumelé à la prestation de mesures d’intervention fondées sur des données probantes aux élèves qui ont besoin de soutien additionnel pour apprendre à lire permettra de réduire le nombre d’élèves nécessitant l’accommodement de besoins en matière de lecture. L’accommodement des besoins ne devrait jamais servir de substitut à l’objectif de l’éducation consistant à enseigner la lecture à tous les enfants, mais les élèves qui en ont besoin devraient avoir accès en temps opportun à des mesures d’adaptation efficaces et au soutien connexe.

Les écoles devraient identifier proactivement les besoins des élèves en matière d’accommodement, et offrir des mesures d’adaptation immédiatement, sans que les parents aient à en réclamer. Les mesures d’adaptation devraient être mises en œuvre de façon uniforme par l’ensemble des enseignants, sans qu’il y ait d’interruption lorsque l’élève passe d’une année d’études ou d’une école à une autre. Les communications avec les parents sur les mesures d’adaptation offertes devraient être améliorées afin que ces personnes sachent que les besoins de leur enfant sont pris en charge.

Les modifications diffèrent des mesures d’adaptation en ce sens qu’elles changent les attentes du curriculum auxquelles doit satisfaire l’élève. Les élèves dont les attentes ont été modifiées pour équivaloir à celles d’une année inférieure pourraient ne plus jamais être en mesure de satisfaire aux attentes de leur année d’études. Cela aurait des conséquences négatives sur leur cheminement scolaire futur (p. ex., en limitant leur capacité de s’inscrire à des cours théoriques au secondaire). Des modifications devraient uniquement être apportées aux attentes lorsque l’école a épuisé toutes les options qui permettraient à l’élève de satisfaire aux attentes du curriculum de l’année d’études. Les parents (et les élèves, lorsque la situation l’indique) devraient être pleinement conscients des modifications effectuées et des conséquences possibles de la réduction des attentes du curriculum auxquelles doit satisfaire l’élève.

Malgré que l’accommodement des besoins ait lieu à l’échelle des conseils scolaires, le ministère a un rôle important à jouer lorsqu’il s’agit d’établir des normes et d’uniformiser les pratiques à l’échelle de l’Ontario. La CODP recommande au ministère de collaborer avec une, un ou plusieurs experts externes pour revoir ses documents de politiques relatives à la planification de programmes et au perfectionnement professionnel de façon à mieux orienter le recours aux mesures d’adaptation et aux modifications [recommandation 86], établir une liste de produits technologiques d’assistance accessibles et efficaces, accompagnés de la formation requise [recommandations 91 et 92], de faciliter l’accès et le recours des élèves aux technologies d’assistance [recommandations 91, 93 à 97] et d’établir des normes relatives aux PEI [recommandations 104 à 107].

La CODP recommande au ministère d’évaluer les structures et niveaux de financement actuels afin de veiller à ce que les ressources soient adéquates pour assurer l’accommodement efficace et en temps opportun des besoins [recommandation 90].

La CODP recommande que les conseils scolaires (et l’Ordre des enseignantes et des enseignants de l’Ontario, le cas échéant) veillent à ce que les éducateurs reçoivent une formation relative aux mesures d’adaptation et modifications, et à l’utilisation de technologies d’assistance [recommandations 87 à 89, 90, 92, 97]. La CODP recommande également que les conseils scolaires apportent plusieurs changements aux approches actuelles afin d’améliorer la transparence et la responsabilisation en matière d’accommodement des besoins et d’apport de modifications [recommandations 102 à 110].

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Les mesures d’adaptation ne sont pas un substitut à l’enseignement de la lecture.

L’accommodement des besoins a pour but premier d’offrir aux élèves les soutiens requis pour qu’ils aient accès aux différentes matières du curriculum et puissent faire la démonstration de leurs acquis. Des mesures d’adaptation doivent être offertes en combinaison avec des mesures d’intervention et un enseignement reposant sur des données probantes, et non en remplacement de ceux-ci. Cependant, au sein du système actuel, les mesures d’adaptation comme les technologies d’assistance servent souvent de substitut à l’enseignement efficace d’un programme de base en lecture fondé sur la science et à l’offre de mesures d’intervention précoce multiniveaux. Même là, l’accès en temps opportun des élèves à des mesures d’adaptation efficaces pose problème.

La mise en œuvre des recommandations de ce rapport permettra d’accroître le nombre d’élèves capables de lire sans assistance. Cependant, certains élèves pourraient encore nécessiter l’accommodement de leurs besoins afin d’assurer leur accès véritable à l’éducation, comme l’exige le Code.

Les technologies d’assistance sont un type de mesures d’adaptation couramment offert aux élèves ayant des troubles de lecture. Il peut s’agir d’un appareil, de matériel, de logiciel ou d’un système qui donne à l’élève accès au programme d’études de son année d’études. L’accès au programme d’études signifie que l’élève peut assimiler et comprendre la matière enseignée à l’école, comprendre et effectuer les travaux prévus, et faire la démonstration de ses acquis. Parmi les autres mesures d’adaptation courantes figure le fait de prévoir du temps additionnel pour l’exécution des examens et travaux, des stratégies individualisées d’enseignement et d’évaluation (par exemple le fractionnement des travaux en plusieurs tâches plus petites) et une assistance sous forme de services de prise de notes, de transcription (des réponses de l’élève) ou autre.

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Les modifications diffèrent des mesures d’adaptation et devraient être utilisées avec parcimonie.

Toutes les méthodes d’enseignement de la lecture et mesures d’intervention et d’adaptation fondées sur des données probantes ont pour but de veiller à ce que l’élève satisfasse aux attentes relatives à l’année d’études. Dans de rares cas, il pourrait être nécessaire de modifier les attentes relatives à l’année d’études pour une matière ou un cours en vue de répondre aux besoins en matière d’apprentissage de l’élève. Ces changements peuvent comprendre l’élaboration d’attentes qui reflètent les connaissances et les habiletés requises dans le curriculum pour une autre année d’études, habituellement moins avancée, ou la réduction du nombre d’attentes de l’année d’études auxquelles satisfaire. Les mesures d’adaptation aident les élèves à satisfaire aux attentes pour l’année d’études. Les modifications changent les attentes auxquelles doit satisfaire l’élève.

La modification à la baisse des attentes, pour les faire correspondre aux attentes du curriculum d’une année d’études inférieure, doit être effectuée avec prudence, à titre de dernier recours après épuisement de toutes les mesures d’intervention et d’adaptation possibles. La modification des attentes a des conséquences à long terme pour les élèves. Les élèves dont les attentes ont été revues à la baisse pourraient ne jamais rattraper le retard creusé par rapport à leurs pairs qui satisfont aux attentes de l’année d’études et, par conséquent, se voir cloisonner dans des cours appliqués ou élaborés à l’échelon local au secondaire, ce qui limiterait leur accès aux études postsecondaires.

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Problèmes de respect de l’obligation d’accommodement au sein du système d’éducation de l’Ontario

L’accommodement des besoins en matière d’éducation fonctionne. Certains élèves obtiennent des mesures d’adaptation efficaces qui leur permettent d’avoir accès au curriculum. L’enquête a révélé comment de bonnes approches à l’accommodement des besoins pouvaient réduire le stress et les problèmes de santé mentale, et permettre aux élèves de réussir et d’éprouver un sentiment de réussite à l’école. La plupart des conseils ont cessé d’effectuer uniquement l’accommodement des besoins des élèves dont les TA ont été reconnus par le CIPR, et font maintenant preuve de plus de flexibilité en offrant des mesures d’adaptation à tous les élèves qui pourraient en tirer avantage. L’accès accru à la technologie en salle de classe peut constituer une bonne pratique de conception inclusive, et certains conseils accordent la priorité à la formation des éducateurs, des élèves en matière d’utilisation de la technologie.

Dans le cadre de l’enquête cependant, des éducateurs, des parents et des élèves ont fait part de bon nombre de problèmes et de lacunes sur le plan de l’accommodement des besoins. La plus importante préoccupation soulevée avait trait à la dépendance excessive aux mesures d’adaptation comme substitut à l’enseignement efficace de la lecture à tous les élèves. Par exemple, certaines personnes ont cité en exemple des élèves de la 1re année qui ont des difficultés de lecture, mais reçoivent des technologies d’assistance au lieu d’un enseignement et de mesures d’intervention précoce en lecture reposant sur des données probantes. Le remplacement d’un enseignement et de mesures d’intervention qui reposent sur la science par des technologies d’assistance est tout simplement inacceptable.

Des éducateurs ont fait part du fait que le manque d’accès à des ressources matérielles et humaines nuisait à leur capacité de tenir compte des besoins des élèves. Ils ont indiqué qu’ils faisaient face à des situations de toutes sortes en salle de classe et que l’accès à du soutien additionnel leur permettrait de mieux répondre aux besoins en matière d’accommodement de tous les élèves. Ils ont décrit le fait de devoir se battre pour obtenir les ressources requises pour soutenir leurs élèves, et même utiliser leur propre argent pour se procurer du matériel.

Des parents ont décrit les difficultés rencontrées pour faire simplement reconnaître les besoins en matière d’accommodement de leur enfant et élaborer un plan d’accommodement, ou PEI. De nombreux parents ont dit avoir dû faire preuve de persévérance ou obtenir des services privés d’évaluation professionnelle pour y arriver. Ils ont parlé de retards dans l’obtention de mesures d’adaptation, de mise en œuvre incohérente des mesures d’adaptation, et de situations où on leur a affirmé que leur enfant réussissait « assez bien » sans mesure d’adaptation, même si des mesures d’adaptation lui auraient permis d’atteindre son plein potentiel. Les parents ne savaient souvent pas si leur enfant avait bel et bien accès aux mesures d’adaptation prévues dans son PEI, et si ces mesures d’adaptation étaient efficaces. Beaucoup se préoccupaient du fait que les écoles offraient aux élèves des mesures d’adaptation pour passer les tests de l’OQRE, mais pas toujours sur une base quotidienne, comme soutien à l’apprentissage des élèves. Des parents ont aussi dit avoir été informés du fait que leur enfant n’aurait pas accès à des mesures d’intervention ou d’adaptation au sein du programme d’immersion française et serait tenu de passer au volet de langue anglaise pour obtenir du soutien.

Des élèves ont décrit leurs propres difficultés relatives à l’obtention de mesures d’adaptation, comme le fait de devoir défendre leur droit à des mesures d’adaptation, de faire l’objet d’intimidation ou de stigmatisation pour avoir demandé des mesures d’adaptation, ou de se faire dire par certains éducateurs qu’ils « mentent » ou qu’ils « trichent » s’ils utilisent des mesures d’adaptation. Les élèves ont dit ne pas toujours avoir une formation assez approfondie sur l’utilisation de la technologie offerte, et décrit des cas où la technologie offerte ne fonctionnait pas ou devait être mise en commun avec de nombreux élèves.

La difficulté de s’y retrouver au sein du système était un thème couramment soulevé par les élèves et les parents. Il semblerait y avoir un lien direct entre la capacité des parents d’intervenir fermement au nom de leur enfant et de se procurer des ressources (comme des services privés d’évaluation professionnelle ou même des avocats) et l’accommodement des besoins de l’enfant. Cela soulève d’importantes questions en matière d’équité étant donné que les personnes issues de groupes historiquement marginalisés, comme les personnes racialisées ou autochtones, les personnes handicapées, les personnes nouvellement arrivées, les personnes qui ne maîtrisent pas bien l’anglais ou le français et les familles à faible revenu pourraient ne pas bénéficier des mêmes possibilités d’obtenir et de surveiller l’accommodement des besoins d’élèves.

Des parents ont aussi dit avoir consenti à ce qu’on modifie les attentes du curriculum auxquelles doit satisfaire leur enfant sans savoir que cet enfant pourrait ne plus jamais être en mesure de rattraper ses pairs, et que cela aurait des conséquences sur ses choix futurs en matière d’études. Plusieurs conseils ont admis que les écoles avaient parfois tendance à modifier les attentes des élèves plutôt que de leur offrir les mesures d’intervention et d’adaptation requises, pour éviter de devoir dire aux parents que leur enfant ne satisfaisait pas aux attentes de l’année d’études.

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Approche à adopter pour respecter l’obligation d’accommodement des troubles de lecture des élèves

Pour respecter le droit de lire, les élèves ayant des troubles de lecture doivent obtenir les mesures d’adaptation qui leur permettront d’avoir un accès véritable à la même éducation que le reste de la population étudiante. L’accommodement des besoins doit se faire en temps opportun parce que tout accommodement reporté est synonyme d’accommodement manqué. L’accommodement des besoins devrait se poursuivre de façon harmonisée et sans interruption d’une classe à l’autre, d’une année à l’autre et d’une école à l’autre. Pour obtenir les mesures d’adaptation requises, les élèves ne devraient pas devoir défendre leur droit à ces mesures d’adaptation, et les parents ne devraient pas avoir à s’en mêler.

Les mesures d’adaptation devraient tenir compte des besoins croisés des élèves, comme leurs autres besoins en matière de handicaps. Elles devraient être respectueuses de la dignité et de la vie privée des élèves, et ne pas causer leur isolement. Les écoles devraient être sensibles au fait que les mesures d’adaptation qui braquent les projecteurs sur les élèves pourraient incommoder ces élèves, et prendre des mesures proactives pour prévenir toute intimidation ou stigmatisation pouvant être liée à l’accommodement des besoins.

Il est nécessaire d’améliorer les normes et lignes directrices relatives à l’accommodement des troubles de lecture au sein du système d’éducation de l’Ontario, y compris en ce qui a trait à l’utilisation faite des mesures d’adaptation et modifications, et aux ressources en matière de technologie d’assistance qui sont accessibles et efficaces. Les conseils scolaires pourraient améliorer les communications qu’ils entretiennent avec les parents et élèves en matière d’accommodement des besoins et devraient mettre en place un processus de plainte accessible pour régler les différends.

Dès qu’on doit envisager de modifier les attentes auxquelles doit satisfaire un élève, ses parents (et l’élève, le cas échéant) devraient être informés de la façon dont seront modifiées les attentes et des conséquences possibles pour l’élève. Lorsqu’elles modifient les attentes du curriculum, les écoles devraient s’efforcer de procurer des mesures d’intervention fondées sur des données probantes et des mesures d’adaptation pour tenter d’amener l’élève à un niveau où il ou elle arrivera à satisfaire aux attentes relatives à l’année d’études.

Il est aussi essentiel d’améliorer le perfectionnement professionnel des éducateurs et d’assurer leur accès continu à l’encadrement et aux ressources dont ils ont besoin. Les éducateurs font souvent de leur mieux au moyen de ressources limitées. Le fait de les aider à comprendre la meilleure façon d’assurer l’accommodement des besoins et de leur procurer le soutien requis favoriser davantage le respect de l’obligation d’accommodement.

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Évaluations professionnelles

Conclusions et recommandations principales

L’approche actuelle d’enseignement de la lecture des mots et de gestion des difficultés de lecture de l’Ontario contribue inutilement à l’augmentation de la demande d’évaluations professionnelles coûteuses. Beaucoup moins d’élèves auront besoin d’évaluations professionnelles de la dyslexie lorsque l’enseignement en salle de classe sera fondé sur la science, le dépistage des difficultés de lecture éventuelles débutera à la maternelle et des mesures d’intervention multiniveaux fondées sur des données probantes seront offertes dès les premières années d’études. Les quelques élèves dont les difficultés de lecture des mots persisteront malgré ces mesures, et qui auront besoin d’évaluations professionnelles, par des orthophonistes et psychologues du conseil par exemple, devraient avoir un accès équitable en temps opportun à ces services. L’obtention d’une évaluation professionnelle ne devrait jamais constituer une condition à l’obtention de mesures d’intervention ou d’adaptation.

Les conseils scolaires n’ont pas de critères clairs et uniformisés pour déterminer quand aiguiller les élèves soupçonnés d’avoir des troubles de lecture vers leurs services d’évaluation professionnelle. Le processus d’aiguillage des élèves est hautement discrétionnaire et, en raison de ressources limitées, un nombre limité d’élèves nécessitant une évaluation y ont accès, souvent parce qu’ils répondent au critère « de besoin prioritaire » du conseil. Par conséquent, le risque de biais ou d’iniquité dans le choix des élèves faisant l’objet d’une évaluation professionnelle est élevé. De nombreux élèves ne sont jamais aiguillés vers les services d’évaluation de leur conseil et sont uniquement soumis à une évaluation si leur famille a les moyens de leur payer des services privés et coûteux.

Le critère que semble appliquer le plus couramment la majorité des conseils consiste à exiger qu’une ou un élève soupçonné d’avoir un trouble de lecture ait au moins atteint la 3année avant qu’on envisage de lui faire passer une évaluation psychopédagogique. Ce type de critère fondé sur l’âge/l’année d’études est problématique et inapproprié. Les décisions en matière d’aiguillage devraient plutôt être basées sur la réponse à l’intervention. Tous les élèves n’ayant pas répondu de façon appropriée (selon leurs résultats à un test de lecture standardisé) à un enseignement en salle de classe et à une intervention précoce fondée sur des données probantes de durée adéquate devraient être aiguillés vers des services d’évaluation. Cela peut avoir lieu dès la fin de la 1re année.

Jumelé au temps d’attente d’une évaluation, le report de l’aiguillage des élèves jusqu’à la 3année, au moins, signifie que bien des élèves n’obtiennent pas d’évaluation avant la 4ou la 5année, ou même les années subséquentes. À l’heure actuelle, les temps d’attente de services professionnels des conseils, et plus particulièrement les temps d’attente d’évaluations psychopédagogiques, sont longs. Peu de conseils visés par l’enquête conservent des listes d’attente centralisées, font le suivi des temps d’attente moyens ou prennent des mesures, comme le réacheminement des ressources, pour veiller à ce que les élèves n’attendent pas trop longtemps. Cela va directement à l’encontre des recommandations de 2018 de la vérificatrice générale de l’Ontario relativement aux gestes que devraient poser les conseils pour assurer l’accès équitable et en temps opportun aux évaluations professionnelles.

La définition actuelle des TA (qui comprend le trouble de lecture) du ministère n’est pas conforme aux derniers résultats de recherche ou aux exigences du DSM-5 en matière de diagnostic des TA, y compris la dyslexie. Elle indique également que les élèves n’ont pas de TA si leur TA est le résultat « de facteurs socioéconomiques, de différences culturelles [ou] d'un manque de maîtrise de la langue d'enseignement ». Bien que ces facteurs ne soient pas des motifs acceptables d’échec à l’école, les difficultés de certains élèves peuvent être jugées inévitables ou hors du contrôle du système d’éducation en raison d’une culture d’attentes réduites.

La CODP recommande au ministère de mettre immédiatement à jour sa définition du TA afin qu’elle cadre avec les critères du DSM-5 et élimine tout biais potentiel [recommandations 111 et 112].

La CODP recommande que les conseils scolaires établissent des critères et processus écrits clairs et transparents d’aiguillage des élèves soupçonnés d’avoir des troubles de lecture vers des services d’évaluation psychopédagogique qui dépendent non pas de l’âge ou de l’année d’études de l’élève, mais de sa réponse à l’intervention (RAI) [recommandations 113, 119 et 123]. Ces critères devraient assurer un accès équitable aux évaluations aux élèves multilingues, élèves issus de la diversité culturelle, élèves racialisés et élèves qui se définissent comme des membres de Premières Nations, des Métis ou des Inuits, et élèves des programmes d’immersion française [recommandations 117, 118, 120 et 124].

L’obtention d’une évaluation psychopédagogique ne devrait jamais constituer une condition à l’obtention de mesures d’intervention ou d’adaptation [recommandation 125].

La CODP recommande que les conseils améliorent leurs pratiques de gestion des temps d’attente et qu’ils fassent le suivi des évaluations professionnelles afin de veiller à ce que les élèves y aient accès de façon équitable, en temps opportun [recommandations 127 à 129]. Tous les élèves qui ont besoin d’une évaluation devraient y avoir accès, et tout obstacle à l’évaluation, ou limite imposée, devrait être supprimé [recommandations 121 et 122]. La CODP recommande au ministère d’octroyer une enveloppe budgétaire annuelle suffisante et stable pour veiller à ce que les conseils puissent mettre en œuvre les recommandations touchant l’évaluation [recommandation 130].

 

Réduction du besoin d’obtenir des évaluations professionnelles

L’adoption de méthodes inefficaces d’enseignement de la lecture au primaire, l’identification inadéquate des élèves à risque de difficultés de lecture des mots en maternelle, au jardin d’enfants ou en 1re année, et le manque d’accès de ces élèves à des mesures d’intervention précoce de niveau 2 et 3, fondées sur des données probantes, font augmenter le nombre d’élèves ayant besoin de services professionnels coûteux, et particulièrement des services d’évaluation psychopédagogique. En composant efficacement avec les difficultés initiales des élèves en matière de lecture, on peut réduire le besoin d’évaluations et libérer les professionnels des conseils afin qu’ils puissent offrir d’autres formes de soutien aux élèves et aux éducateurs.

Les professionnels des conseils comme les psychologues et les orthophonistes ont de vastes connaissances et un rôle important à jouer lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre les recommandations du présent rapport. À l’heure actuelle cependant, en raison de la demande élevée d’évaluations, ils passent le plus clair de leur temps à mener des évaluations au détriment d’autres formes de soutien des élèves. La réduction du nombre d’évaluations des difficultés de lecture des mots requises donnera au personnel professionnel la capacité d’appuyer le dépistage et l’intervention précoces fondés sur des données probantes, de contribuer à l’identification des mesures d’intervention appropriées et des élèves qui en ont besoin, et d’aider à l’évaluation des réponses à l’intervention, à la planification des mesures d’adaptation et au soutien du perfectionnement professionnel des éducateurs. Le personnel des services de psychologie peut aussi être appelé à composer avec les problèmes de santé mentale des élèves, comme l’anxiété et la dépression, à aider les élèves qui se heurtent à des difficultés d’ordre social et émotionnel, à intervenir en situation de crise et à aiguiller des élèves vers des services communautaires.

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Beaucoup d’élèves attendent trop longtemps de faire l’objet d’une évaluation ou ne font jamais l’objet d’une évaluation.

Au sein du système actuel, les élèves doivent attendre d’avoir éprouvé des difficultés de lecture pendant des années avant de faire l’objet d’une évaluation, et ce, lorsqu’ils y ont même accès. Les conseils songent rarement à aiguiller les élèves soupçonnés d’avoir un trouble de lecture vers une évaluation psychopédagogique avant la 3année, même si l’Ontario Psychological Association a indiqué qu’il n’était pas nécessaire ou approprié de reporter l’évaluation des TA, et que cela pouvait même nuire aux élèves. Les élèves aiguillés vers des services d’évaluation peuvent ensuite figurer sur une liste d’attente pendant plusieurs années, surtout si le conseil ne considère pas que leurs besoins sont importants ou prioritaires. Les élèves qui peinent à lire en silence sont parfois tout simplement laissés à leur sort ou déplacés au bas de la liste d’attente. Ces élèves ne font parfois pas l’objet d’une évaluation avant la 5e ou la 6e année, voire une année subséquente. Enfin, de nombreux élèves ne sont jamais aiguillés vers le personnel d’évaluation du conseil, et doivent se procurer des services d’évaluation psychopédagogique privés et coûteux, s’ils ont les moyens de le faire.

Bien que les conseils ne fassent pas rapport de quotas officiels ou du nombre d’élèves qu’ils peuvent aiguiller vers des services d’évaluation, la réalité veut que chaque école dispose d’un nombre de places limitées pour l’évaluation de ses élèves. Beaucoup d’élèves qui satisferaient à des critères objectifs d’admissibilité à l’évaluation pourraient ne pas être pris en compte par leur école parce que celle-ci a attribué toutes les places dont elle dispose aux services d’évaluation. Le manque de critères officiels, écrits et transparents d’admissibilité aux évaluations vient exacerber cette situation.

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Les conseils n’ont pas de critères appropriés d’aiguillage des élèves soupçonnés d’avoir des troubles de lecture.

Outre le fait que les élèves doivent avoir atteint la 3e année avant d’être aiguillés vers des services d’évaluation, une condition problématique en soi, les conseils n’ont pas, ou presque pas, de critères objectifs d’identification des élèves soupçonnés d’avoir des troubles de lecture nécessitant une évaluation. Pour la prise de leurs décisions en matière d’évaluations professionnelles, certains conseils visés par l’enquête utilisaient des procédures, listes de vérification ou graphiques documentés qui sont relativement plus clairs. Cependant, d’autres conseils ont peu de documentation transparente sur le processus ou les facteurs pris en compte, ou n’en ont pas du tout. Les décisions relatives aux évaluations sont souvent laissées aux équipes des écoles. Cela pourrait entraîner de grandes disparités entre les écoles d’un même conseil ou entre les conseils. Des élèves au même profil scolaire pourraient être admissibles à une évaluation dans une école, mais pas dans une autre.

Le manque de directives objectives et transparentes en matière d’aiguillage émanant des conseils ou de la province peut mener à des décisions biaisées. Des conseils examinés dans le cadre de l’enquête ont même fait part de facteurs qui pourraient entraîner un risque élevé de biais, comme le milieu culturel de l’élève, son manque de motivation, sa situation linguistique et sa mauvaise santé mentale. De nombreux conseils ont dit attendre longtemps avant d’aiguiller des élèves multilingues vers des services d’évaluation, croyant à tort que ces élèves devaient être exposés pendant plusieurs années à la langue d’enseignement avant d’être soumis à une évaluation de leur TA.

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Les décisions relatives à l’aiguillage devraient être basées sur la réponse à l’intervention.

Des critères clairs et transparents et des processus officiels d’aiguillage des élèves soupçonnés d’avoir des TA vers des services d’évaluation psychopédagogique devraient être élaborés. Ces critères ne devraient pas reposer sur des facteurs arbitraires ou potentiellement biaisés comme l’âge ou l’année d’études de l’élève (p. ex., 3année/8 ans au moins), un nombre minimal d’années d’études dans la langue d’enseignement (p. ex., dans le cas des élèves multilingues) ou l’impression selon laquelle les difficultés d’apprentissage sont attribuables à des facteurs socio-économiques ou à des différences culturelles. Les critères devraient plutôt être fondés sur le profil scolaire de l’élève et sa réponse à l’intervention.

Comme nous l’avons mentionné, une approche multiniveaux qui repose sur un enseignement des compétences de base en lecture des mots et des mesures d’intervention connexes reposant sur des données probantes permettrait de réduire le nombre d’élèves nécessitant une évaluation de difficultés de lecture. Les élèves qui, malgré l’adoption de cette approche, auraient besoin d’une évaluation psychopédagogique pourraient être aiguillés vers de tels services durant la 1re ou la 2e année. Dans le cas des élèves des années subséquentes qui peinent à lire avec précision ou fluidité, l’aiguillage pourrait avoir lieu en même temps que la prestation de mesures d’intervention multiniveaux.

Les écoles devraient également connaître les signes d’un trouble de lecture chez les élèves multilingues. Elles ne devraient pas reporter l’évaluation ou l’intervention inutilement. En outre, elles ne devraient pas fixer de seuils rigides d’obtention d’une évaluation ou d’une mesure d’intervention, comme exiger qu’un élève étudie dans sa langue d’instruction (anglais ou français) depuis au moins deux ou trois ans.

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Les critères d’identification des élèves ayant un TA devraient être fondés sur les connaissances actuelles.

Selon la définition employée actuellement au ministère pour l’identification des élèves ayant un TA, les élèves touchés devraient avoir « des résultats de sous-performance scolaire qui ne correspondent pas [à leurs] aptitudes intellectuelles », lesquelles devraient être « au moins dans la moyenne », et (ou) « des résultats scolaires qui ne peuvent être maintenus […] qu'avec des efforts extrêmement élevés ou qu'avec de l'aide supplémentaire ». Les plus récents résultats de recherche ou principes de diagnostic des troubles de lecture des mots/de la dyslexie versés au DSM-5 n’exigent pas que les élèves affichent un niveau d’intelligence dans la moyenne, au moins, ou un écart entre leurs capacités et leurs résultats. Ces critères ne permettent pas de prédire qu’une ou un élève réagira favorablement ou non à une intervention fondée sur des données probantes.

Les critères actuels de diagnostic d’un « trouble des apprentissages » du DSM-5 exigent seulement de déterminer ce qui suit :

  1. L’élève connaît des difficultés à lire, écrire ou effectuer des mathématiques qui persistent depuis plus de six mois malgré l’offre de mesures d’intervention ciblant ces difficultés.
  2. Les difficultés mènent à un rendement dans le domaine déficitaire significativement et quantifiablement en dessous du niveau escompté pour l’âge. Ce rendement est établi au moyen de tests standardisés du rendement et d’une évaluation clinique.
  3. La difficulté d’apprentissage est apparue durant les années scolaires (ou même à l’âge préscolaire), sans nécessairement se manifester pleinement avant l’âge adulte chez certaines personnes.
  4. Les difficultés ne sont pas uniquement attribuables à des handicaps intellectuels, à des troubles visuels ou auditifs, à d’autres « troubles » neurologiques ou mentaux, à une adversité psychosociale ou à un enseignement inadéquat (cependant, les troubles de lecture/la dyslexie peuvent cohabiter avec d’autres handicaps comme des « troubles » mentaux et neurologiques).

Les évaluations menées pour identifier des troubles de lecture n’ont pas toujours besoin de reposer sur des tests d’intelligence ou tests des processus cognitifs. Les évaluations des TA en lecture des mots/dyslexie devraient plutôt inclure une évaluation exhaustive des compétences en lecture et en épellation des mots, la documentation de la réponse à l’intervention de l’élève et l’identification des mesures d’intervention et d’adaptation additionnelles dont a besoin l’élève. Si d’autres préoccupations sont soulevées, une ou un psychologue peut faire enquête et cerner les difficultés ou troubles concomitants possibles, comme les troubles de l’attention, troubles développementaux du langage ou troubles mentaux. Cependant, même s’ils ont des handicaps concomitants, les élèves ayant la dyslexie ne devraient pas se voir bloquer l’accès à des mesures d’intervention.

Tout diagnostic de TA devrait être accompagné des domaines d’apprentissage touchés (par exemple,  précision ou fluidité de lecture des mots (dyslexie), compréhension de lecture, expression écrite ou mathématiques). Si le trouble touche plusieurs domaines d’apprentissage, ces domaines devraient tous être nommés.

D’après le DSM-5, la dyslexie est un terme de rechange qui renvoie à un schéma de difficultés d’apprentissage caractérisées par des difficultés dans la reconnaissance exacte ou fluide des mots et des habiletés limitées à décoder et à épeler les mots. En Ontario, la pratique actuelle consiste à utiliser uniquement le terme non spécifique « TA » et à ne pas reconnaître le terme « dyslexie ». Par conséquent, beaucoup d’information utile aux élèves, aux parents et aux indicateurs est perdue.

Le classement des TA selon le domaine d’apprentissage touché et la reconnaissance/l’utilisation du terme « dyslexie » faciliteront la collecte de données sur la prévalence de TA spécifiques afin d’améliorer l’allocation des ressources, la surveillance de l’efficacité des mesures d’intervention offertes aux élèves ayant des difficultés de lecture des mots et le suivi des progrès de ces élèves. À l’heure actuelle, ces activités ne sont pas possibles en raison de l’utilisation du terme général « TA ». La collecte d’information sur des domaines particuliers de TA est plus utile que la collecte d’information sur les TA en général, et permettra de fournir des renseignements plus clairs et précis aux parents, élèves et éducateurs.

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Les conseils devraient améliorer leur gestion des évaluations professionnelles.

La vérificatrice générale de l’Ontario a soulevé des préoccupations relatives à l’approche actuelle des conseils en matière de gestion des évaluations professionnelles. En 2017, elle a déterminé que les temps d’attente variaient considérablement selon l’école fréquentée et que les conseils scolaires ne pouvaient pas classer correctement par ordre de priorité les élèves en attente d’évaluations parce que l’information relative aux listes d’attente n’était pas regroupée. La vérificatrice générale a recommandé des gestes que les conseils devraient poser pour mieux gérer leurs évaluations professionnelles. Or, sauf exception, les conseils n’ont pas apporté les correctifs recommandés.

La plupart des conseils examinés dans le cadre de l’enquête ne tiennent pas à jour des listes d’attente électroniques et centralisées, ou ne disposent pas de système de gestion de cas pour le suivi ou l’affectation des évaluations professionnelles. Par conséquent, plusieurs conseils n’ont pas pu fournir d’information sur les listes d’attente d’évaluation, y compris la date à laquelle les élèves ont été placés sur la liste et le temps d’attente moyen ou médian d’une évaluation. Les conseils examinés manquaient également de données leur permettant de déterminer s’ils effectuent les évaluations en temps opportun et de manière équitable.

Les conseils examinés n’ont pas la capacité ou ont une capacité limitée de transférer un élève d’un membre du personnel des services de psychologie à un autre afin d’éviter qu’il n’attende trop longtemps pour obtenir une évaluation, comme le recommandait la vérificatrice générale. Aucun des conseils examinés dans le cadre de l’enquête n’effectue d’évaluation durant les mois d’été, comme l’avait également recommandé la vérificatrice générale.

Le ministère est conscient des problèmes liés à la gestion des évaluations professionnelles par les conseils scolaires. Même si les plans pour l’enfance en difficulté des conseils sont censés comprendre de l’information sur la gestion des listes et des temps d’attente d’évaluation, le ministère dispose de très peu d’information sur les listes et temps d’attente des différents conseils. L’enquête n’a pas permis de savoir clairement si le ministère compte exiger que les conseils améliorent leur approche de gestion et de collecte de données relatives aux listes et temps d’attente d’évaluations professionnelles.

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Il ne devrait pas être nécessaire de subir une évaluation professionnelle pour obtenir des mesures d’intervention et d’adaptation.

Les évaluations psychopédagogiques servent souvent à l’établissement d’un diagnostic officiel (p. ex., dans le cadre du processus du CIPR). Cependant, aux termes du Code, l’évaluation professionnelle ou le diagnostic ne doit pas constituer une condition à l’obtention de mesures d’intervention ou d’adaptation. Le ministère a aussi reconnu qu’un diagnostic n’est pas un prérequis pour l’obtention de soutiens à l’éducation de l’enfance en difficulté, en indiquant que l’offre de programmes d’éducation de l'enfance en difficulté devrait être basée sur les besoins particuliers de l'élève, déterminés lors de l'évaluation individuelle de ses points forts et de ses besoins, plutôt que sur un trouble de santé en particulier, diagnostiqué ou non.

La plupart des conseils ont rapporté qu’ils n’exigent pas que leurs élèves fassent l’objet d’une évaluation professionnelle ou obtiennent un diagnostic pour avoir accès à des mesures d’intervention ou d’adaptation. Cependant, un conseil exige l’obtention d’un diagnostic pour avoir accès à son intervention la plus intensive et d’autres conseils ont indiqué que les élèves ayant obtenu un diagnostic de TA sont plus susceptibles de faire l’objet de mesures. Cette exigence est un obstacle de taille pour de nombreux élèves qui ont besoin de ce programme. Les élèves ne devraient pas être tenus d’obtenir un diagnostic pour faire l’objet de mesures d’intervention ou d’adaptation.

Dans le cadre de l’enquête, de nombreux parents et éducateurs ont affirmé que même lorsqu’elles ne sont pas requises, les évaluations professionnelles facilitent l’obtention de mesures d’intervention ou d’adaptation. Vu l’accès très limité des élèves soupçonnés d’avoir des troubles de lecture aux services d’évaluation professionnelle des conseils, les parents sont nombreux à débourser des milliers de dollars pour obtenir des services privés d’évaluation psychopédagogique. Cela constitue un fardeau énorme pour certains parents, et un fardeau insurmontable pour beaucoup d’autres qui n’ont pas les moyens de se payer des services d’évaluation privés. Il en résulte un système d’éducation publique « à deux vitesses » qui n’est pas équitable. Cette situation peut avoir pour effet de pérenniser des désavantages existants et des cycles intergénérationnels d’analphabétisme. Du point de vue des droits de la personne, il est essentiel que les élèves qui en ont besoin aient un accès équitable aux mesures d’intervention et d’adaptation, que leurs parents aient les moyens ou non de leur payer des services d’évaluation privés.

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Problèmes systémiques

Conclusions et recommandations principales

L’enquête a révélé un manque considérable de standardisation à l’échelle de l’Ontario des approches adoptées pour soutenir les élèves ayant des difficultés de lecture. Le vécu des élèves varie grandement selon la région de la province où ils vont à l’école, voire même selon l’école qu’ils fréquentent au sein d’un conseil scolaire. La province et les conseils scolaires doivent de toute urgence assurer l’harmonisation des approches et fournir des directives claires sur la façon dont l’ensemble des conseils et des écoles devraient aborder les problèmes soulevés dans le cadre de l’enquête.

Il existe peu de données à l’échelle des conseils ou de la province pour favoriser l’élaboration de programmes, la prestation de services et la prise de décisions de haute qualité, ou pour mesurer les écarts sur le plan du rendement entre différents groupes d’élèves. Les données de qualité requises pour favoriser le suivi et la responsabilisation ne sont pas disponibles. Des données ne sont pas, non plus, utilisées pour cerner et combler les écarts en matière d’équité, une condition importante de la prévention de la discrimination systémique aux termes du Code.

L’enquête a révélé que le manque de transparence et de communication préoccupait considérablement les familles. Les parents ne sont souvent pas conscients du niveau de compétence en lecture de leur enfant, ou de ses difficultés à ce chapitre, ou des mesures d’intervention ou d’adaptation disponibles ou mises en œuvre. L’absence de processus efficaces de résolution des différends dans les écoles et les conseils scolaires a causé un stress important pour les élèves, les parents et les éducateurs.

La CODP recommande que le ministère et les conseils établissent des normes et assurent l’harmonisation, le suivi et la responsabilisation au sein du système d’éducation en général, et plus particulièrement en ce qui a trait aux élèves ayant des handicaps et d’autres dimensions identitaires protégées par le Code [recommandations 131 à 137].

La CODP recommande que le ministère et les conseils continuent d’améliorer la collecte, l’analyse et la transmission de données, et utilisent à meilleur escient les données recueillies pour accroître l’équité, améliorer le rendement et les résultats des élèves, et renforcer la prise de décisions [recommandations 139 à 150].

La CODP recommande d’améliorer la transparence et la communication relatives aux élèves ayant des difficultés de lecture, ainsi qu’au dépistage, aux mesures d’intervention et mesures de soutien sous forme d’évaluations professionnelles à leur disposition. Les parents devraient être gardés informés des progrès des élèves et des mesures de résolution des différends à leur disposition [recommandations 151 à 157].

La CODP recommande au ministère de fournir une enveloppe budgétaire annuelle adéquate et stable pour assurer l’exercice du droit de lire. Cela inclut des fonds permettant aux conseils d’embaucher du personnel additionnel comme des leaders en littératie [recommandation 45], d’offrir des services de perfectionnement professionnel exhaustifs en cours d’emploi [recommandation 57], d’effectuer le dépistage précoce universel fondé sur des données probantes [recommandation 59], d’offrir des mesures d’intervention fondées sur des données probantes à tous les élèves qui en ont besoin [recommandation 68], d’améliorer l’accès aux mesures d’adaptation [recommandation 90] et d’éliminer les obstacles à l’obtention de services professionnels [recommandation 130].

La CODP recommande également au ministère de fournir un financement et des soutiens additionnels, au besoin, pour faire en sorte que les conseils de petite taille et les conseils du Nord et des milieux ruraux et éloignés puissent pleinement mettre en œuvre les recommandations [recommandation 134]. En même temps, le ministère devrait veiller à ce que les fonds consentis ne soient pas utilisés pour l’acquisition de mesures de soutien qui n’ont pas fait la démonstration de leur efficacité auprès des élèves ayant des troubles de lecture ou été validées, et explorer les possibilités d’achats groupés [recommandation 138]. Des ressources servant au soutien d’autres élèves vulnérables ne devraient pas être réorientées vers la mise en œuvre des recommandations de ce rapport.

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Les élèves de l’ensemble de la province devraient avoir un accès équitable aux approches fondées sur des données probantes.

Les problèmes et obstacles systémiques cernés dans le cadre de l’enquête exigent une intervention à l’échelle du système. Les élèves de l’Ontario méritent la mise en œuvre d’approches uniformes et standardisées, ainsi qu’un accès universel à des services et mesures de soutien de qualité et de niveau équivalents, sans égard à l’école ou au conseil scolaire qu’ils fréquentent ou au fait que leur langue d’instruction est l’anglais ou le français. Ils méritent également une réponse adéquate aux lacunes constatées sur le plan des composantes du droit de lire. Au lieu de cela, leurs vécus varient considérablement selon la région où ils habitent ou vont à l’école. Les élèves ont accès à un ensemble disparate et aléatoire d’approches et de services majoritairement inefficaces qui souvent ne répondent aucunement à leurs besoins.

De plus, les éducateurs et autres professionnels des conseils méritent du soutien et des renseignements cohérents afin d’utiliser des méthodes fondées sur des données probantes auprès de leurs élèves. Ils veulent faire ce qu’il y a de mieux pour leurs élèves. Ils sont conscients des défis sur le plan des études et de la santé mentale auxquels se heurtent de nombreux élèves qui n’arrivent pas à apprendre à lire, et veulent intervenir. Le manque de lignes directrices claires et uniformes constitue un fardeau additionnel pour les éducateurs, qui doivent souvent déterminer eux-mêmes quelles sont les meilleures approches à adopter. Ils doivent aussi composer en aval avec les conséquences du manque de résolution précoce des difficultés de lecture des élèves, comme l’accroissement des mesures d’adaptation nécessaires. Selon certains éducateurs, l’embauche de nouveaux membres de directions d’école et de scolaire ayant leurs propres préférences pourrait également entraîner des changements de caps fréquents et troublants, qui ne sont pas nécessairement fondés sur des données scientifiques.

L’approche hautement décentralisée de l’Ontario en matière d’éducation, y compris l’éducation de l’enfance en difficulté, laisse aux 72 conseils scolaires et administrations scolaires le soin de prendre des décisions relatives à des composantes clés du droit de lire qui reposent sur peu de lignes directrices ou de normes centralisées. Un des conseils a indiqué dans le cadre de l’enquête que « les conseils scolaires ne rament pas tous dans la même direction ».

En matière de respect du droit de lire, l’Ontario doit adopter une approche stable et cohérente. Cela signifie d’établir des normes obligatoires claires relatives au curriculum et à l’enseignement, au dépistage précoce, aux mesures d’intervention et d’adaptation, et aux évaluations professionnelles. Cela signifie aussi d’assurer une surveillance continue et une responsabilisation accrue au sein du système d’éducation. Et, plus important encore, cela exige de prévoir une enveloppe budgétaire annuelle, stable.

En ce qui a trait aux cinq dimensions essentielles du respect du droit de lire des élèves, les responsables de l’enquête ont recueilli de l’information de sources multiples et déterminé que la standardisation, l’harmonisation, le suivi et la responsabilisation faisaient défaut. Les processus en place à l’heure actuelle n’obligent pas les conseils scolaires à satisfaire à une norme d’excellence en matière d’enseignement de la lecture et de services connexes, n’assurent pas un accès équitable à des mesures d’intervention et d’adaptation fondées sur des données probantes, et ne permettent pas aux conseils ou au ministère de cerner les problèmes ou disparités au sein du système.

Les conseils sont tenus de suivre le curriculum de l’Ontario, ainsi que les notes Politique/Programmes (NPP) du ministère. Malheureusement, le curriculum et les NPP actuelles touchant le dépistage, les évaluations professionnelles, les TA et d’autres questions concernant les élèves ayant des difficultés de lecture sont majoritairement désuets et non représentatifs de la science et des données probantes actuelles, ou limitent la capacité des conseils de favoriser la cohérence et la standardisation. Là où le ministère a tenté d’offrir des compléments d’information sur la satisfaction des besoins des élèves ayant des difficultés de lecture, il l’a fait principalement au moyen de lignes directrices facultatives.

Les conclusions de l’enquête relatives au manque de normes, de cohérence, de surveillance et de responsabilisation n’ont rien de nouveau. De nombreux autres rapports, comme ceux de la vérificatrice générale et du Comité d'élaboration des normes d'accessibilité à l'éducation de la maternelle à la 12e année, ont fait part de préoccupations semblables et formulé des recommandations pour y donner suite. Il est important de mettre en œuvre ces recommandations et celles de la présente enquête pour assurer la résolution de ce problème systémique à l’échelle du système.

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Peu de données sont recueillies ou analysées pour assurer le suivi et l’amélioration du rendement et des résultats scolaires, et combler les écarts en matière d’éducation équitable.

La CODP a qualifié la collecte de données d’outil important de promotion et de protection des droits de la personne. La collecte de donnée est souvent essentielle pour veiller à ce que tous les groupes aient un accès équitable aux services offerts. Dans le domaine de l’éducation, la collecte et l’analyse de données permettent aux conseils scolaires et à la province de surveiller et d’évaluer l’efficacité des services d’éducation de l’enfance en difficulté et des mesures de soutien connexes, et d’agir pour évaluer le rendement et les résultats des élèves, et plus particulièrement des élèves défavorisés ou issus de groupes protégés par le Code. À l’heure actuelle, le manque de collecte, d’analyse et de transmission de données est un obstacle important à l’accessibilité du système d’éducation de l’Ontario.

Au fil des ans, beaucoup de rapports, d’études et de plans relatifs au système d’éducation de l’Ontario ont fait valoir la nécessité d’améliorer la collecte, la gestion, l’analyse et la mobilisation des données. Ces documents ont reconnu l’importance des données pour le traitement équitable des élèves et le soutien à la prestation de programmes fondés sur des données probantes. Ils ont aussi fait part de lacunes considérables sur le plan des méthodes de collecte de données utilisées actuellement au sein du système d’éducation.

L’enquête a révélé que le nombre de conseils qui recueillent des données démographiques a augmenté depuis l’entrée en vigueur des exigences de la Loi de 2017 contre le racisme. Le 1er janvier 2023, tous les conseils seront tenus de recueillir des données démographiques. Cependant, il reste beaucoup à faire pour éliminer les lacunes sur le plan de la collecte, de l’analyse, de la transmission et de l’utilisation des données. À l’heure actuelle, les conseils scolaires et le ministère n’utilisent pas efficacement de données pour assurer la prise de décisions, la mise en œuvre de programmes et la prestation de services de haute qualité, ou pour évaluer et éliminer les écarts sur le plan du rendement de certains groupes d’élèves. Ils n’ont également pas de données fiables pour appuyer la surveillance et la responsabilisation.

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Les conseils n’ont pas la capacité de recueillir des données centralisées.

Les conseils scolaires examinés dans le cadre de l’enquête n’utilisent pas de systèmes centralisés de gestion de l’information, utilisent différents systèmes de gestion de l’information sur les élèves, ou ont des capacités variables de production d’information à partir de leurs systèmes de gestion de l’information sur les élèves. Les conseils ne recueillent pas certaines données importantes, ou ces données sont uniquement conservées à l’échelle de la classe ou de l’école. Les conseils sont souvent incapables d’effectuer la collecte et l’analyse centralisées de ces données, et de prendre des mesures pour y donner suite. Par conséquent, le ministère n’est pas en mesure de compiler et d’analyser des données importantes de l’ensemble de la province.

Les responsables de l’enquête ont demandé que leur soient fournies des données relatives aux progrès des élèves en lecture, au dépistage précoce, aux mesures d’intervention en lecture, aux mesures d’adaptation et aux évaluations professionnelles. Sauf exception, les conseils n’avaient pas ces données importantes. Ils disposaient d’information sur les élèves dont les troubles d’apprentissage avaient été reconnus officiellement, mais n’avaient pas d’information sur les élèves ayant des troubles de lecture/la dyslexie plus spécifiquement ou sur les élèves qui ont des difficultés de lecture et pourraient donc courir le risque de développer un trouble de lecture ou la dyslexie. Ils disposaient de peu de données centralisées sur les progrès des élèves en lecture, ou leur rendement ou résultats. Dans l’ensemble, ils ne pouvaient pas mesurer l’efficacité de leur enseignement de la lecture, leur dépistage précoce, leurs programmes d’intervention et leurs approches en matière d’accommodement des besoins, ou cerner les écarts en matière d’équité.

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Problèmes sur le plan des données démographiques des élèves

Bien que davantage de conseils mènent maintenant un recensement de leurs élèves pour recueillir des données démographiques sur les indicateurs relatifs à l’équité comme la race, l’origine ethnique, la croyance (religion), le handicap, l’identité sexuelle, l’orientation sexuelle et le statut socio-économique, ces conseils ne recueillent pas toujours les mêmes données. Cela complique la comparaison des données d’un conseil à l’autre ou l’analyse des données à l’échelle provinciale.

En ce qui concerne les handicaps, les conseils recueillent en général uniquement des données limitées sur les élèves qui ont fait l’objet d’un processus de CIPR et dont le TA a été officiellement reconnu. Or, de nombreux élèves ayant des troubles de lecture n’obtiennent jamais la reconnaissance officielle de leur TA par un CIPR. Et même lorsqu’un CIPR reconnaît le TA, rien n’indique s’il s’agit d’un TA en lecture; si plusieurs handicaps ont été reconnus, les élèves sont classés dans la catégorie générale « anomalies multiples ». Cela obscure la nature des anomalies et nuit à la collecte de données valables sur les élèves aux prises avec des TA qui ont des handicaps concomitants. Même les questions de recensement ne procurent pas aux parents et élèves qui les remplissent de moyen d’indiquer qu’il s’agit d’un trouble de lecture/de la dyslexie.

Au moment de l’enquête, les conseils ne semblaient pas analyser de données de façon à repérer tout cas d’intersection entre un TA et un autre motif de discrimination interdit par le Code. Par exemple, les conseils examinés dans le cadre de l’enquête avaient recueilli peu de données, voire aucune, sur l’identité sexuelle, la race, les troubles concomitants, l’ascendance autochtone ou le statut socio-économique des élèves ayant un TA reconnu. À mesure que d’autres conseils se mettront à recueillir des données de recensement relatives aux élèves (exigence à partir du 1er janvier 2023), il importera qu’ils mènent des analyses croisées et qu’ils relient les données démographiques à d’autres données disponibles dans leurs systèmes d’information sur les élèves (par exemple, les données sur le rendement des élèves).

Bien que les conseils aient relativement plus de données sur les élèves qui se définissent comme des membres des Premières Nations, des Métis ou des Inuits, ces données posent également problème. Dans le cadre de l’enquête par exemple, un conseil a indiqué que les données relatives aux élèves qui se définissent ainsi et ont des besoins particuliers en matière d’éducation sont conservées à l’échelle de l’école et « ne sont pas faciles à obtenir ».

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Indicateurs de réussite des élèves et écarts sur le plan de l’équité

La plupart des conseils ne recueillent pas les données nécessaires pour analyser les indicateurs du rendement et des résultats des élèves, comme des informations sur le cheminement scolaire des élèves (c’est-à-dire si les élèves suivent surtout des cours théoriques ou appliqués en 9e année) et la fréquentation d’établissements postsecondaires. Les conseils qui possèdent ce genre de données n’établissent pas les liens nécessaires avec d’autres données pour repérer les disparités affichées chez certains groupes (p. ex., élèves ayant des handicaps, élèves des Premières Nations et communautés métisses et inuites, élèves racialisés ou élèves issus de milieux socio-économiques défavorisés).

Un seul conseil examiné dans le cadre de l’enquête avait entamé le processus de croisement de ces données de recensement et autres données pour évaluer les disparités sur le plan des résultats des élèves (rendement, taux de suspension, taux de diplomation). Ce conseil a reconnu l’importance de pousser l’analyse plus loin pour déterminer si des groupes particuliers sont représentés de façon disproportionnée au sein des programmes et des services offerts et s’il existe des différences sur le plan du sentiment d’appartenance et de sécurité des élèves.

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Manque de transparence et de communication avec les parents

Beaucoup de parents trouvent que le système d’éducation est opaque, et qu’il est difficile de s’y retrouver. Ils ne savent pas ou ne comprennent pas comment fonctionnent les processus de dépistage, d’intervention, d’accommodement, de modification des attentes et d’évaluation professionnelle. Ils ne sont souvent pas conscients du fait que leur enfant pourrait être admissible à des services ou à des mesures de soutien, ou de la façon dont l’école répond, le cas échéant, à ses besoins. Au sein d’un système où le soutien des enfants dépend largement de l’intervention parentale, ce manque d’information place certains parents en situation de désavantage considérable. Par exemple, les responsables de l’enquête ont appris que des parents issus des Premières Nations ou de communautés métisses ou inuites se sentent intimidés par le système scolaire, notamment en raison des traumatismes persistants des pensionnats autochtones, et sont encore moins susceptibles de faire part de leurs préoccupations aux écoles.

La CODP a identifié des cas de non-transmission aux parents d’information importante sur le plan des progrès effectués par l’élève en lecture, du dépistage, des mesures d’intervention et d’adaptation, des modifications et des évaluations professionnelles. Durant l’enquête, la CODP a appris que les écoles n’informaient pas toujours les parents des difficultés de lecture qu’ils observaient chez l’élève, ou dont leur faisait part le personnel enseignant. Des parents pourraient ne pas savoir à quelles mesures d’adaptation à droit leur enfant, quelles mesures d’intervention sont mises en œuvre et quels sont les progrès observés. Certains parents ont même rapporté avoir consenti à des modifications aux attentes du curriculum auxquelles doit satisfaire leur enfant sans en comprendre les conséquences. Des parents ont aussi indiqué ne pas savoir combien de temps devra attendre leur enfant pour obtenir des mesures d’intervention en lecture ou une évaluation professionnelle.

Les écoles communiquent aussi avec les parents par l’entremise d’outils comme des bulletins, les recommandations de CIPR et des PEI. Mais les responsables de l’enquête ont appris que ces outils ne sont généralement pas assez détaillés, fréquents ou dynamiques pour fournir l’information requise pour comprendre comment l’élève progresse et de quels soutiens additionnels il ou elle pourrait avoir besoin.

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L’amélioration de la transparence et de la communication profitera aux élèves, aux parents et aux éducateurs.

Le fait de communiquer l’information sur le rendement des élèves aux parents (et aux élèves, le cas échéant) dans un format accessible et un langage simple qui invite ces personnes à participer et à faire part de leurs observations met l’information en contexte pour la rendre utile et facile à comprendre, et crée un environnement scolaire positif où les parents se sentent les bienvenus.

Bon nombre d’éducateurs ont également réclamé l’échange plus efficace d’information entre les enseignants et les autres membres du personnel de l’école. Selon eux, cela aidera à perfectionner et à appuyer les pratiques d’autres éducateurs, et mieux garantir le passage harmonieux des élèves d’une classe ou d’une école à l’autre.

La communication doit tenir compte des raisons pour lesquelles l’évaluation des élèves ou l’offre de mesures d’intervention ou d’adaptation pourrait préoccuper certaines familles. Des parents pourraient craindre que leur enfant soit stigmatisé si on lui découvre un risque de difficultés de lecture dans le cadre d’une évaluation ou si on le ou la retire de la classe pour lui offrir des mesures d’intervention. On pourrait observer ce genre de craintes tout particulièrement chez certaines communautés qui ont été stéréotypées ou dont les données ont été utilisées par le passé pour jeter sur elles une lumière défavorable. Les conseils et les écoles doivent communiquer l’information requise pour que les familles puissent prendre des décisions éclairées au nom de leurs enfants au moyen de différents mécanismes, comme des conseils communautaires, des réunions de conseils de parents, des bulletins d’information multilingues, des journées portes ouvertes et des rencontres parents-enseignants.

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Il a de meilleures façons de résoudre les différends.

Il arrive que des éducateurs et des parents ne s’entendent pas sur les besoins d’un enfant ou les meilleures façons de les combler. Sans mécanisme adéquat de résolution des différends, les relations entre les éducateurs et les parents peuvent s’envenimer et mener au dépôt d’une plainte en matière de droits de la personne. De nombreux parents ont déclaré ne pas se sentir à l’aise de soulever des préoccupations, ou craindre que leur enfant subisse des représailles s’ils le font. Là encore, certains parents sont mieux placés pour faire part de préoccupations ou intervenir au nom de leur enfant.

Les parents doivent savoir à quels membres du personnel ou processus de résolution des différends ils peuvent faire appel en cas de conflit. Les conseils devraient avoir et publiciser un programme de résolution des différends responsable et non antagonique.

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Conclusion

La CODP a qualifié le capacitisme et les attentes réduites à l’égard d’élèves issus de certains groupes protégés par le Code d’enjeux importants de cette enquête. Certains partisans des approches utilisées à l’heure actuelle en matière d’enseignement de la lecture au primaire soutiennent qu’on ne devrait pas modifier le système d’éducation pour tenir compte des besoins des élèves qui ont des troubles de lecture ou des autres élèves qui n’arrivent pas à apprendre à bien lire. Ils laissent entendre que les difficultés de lecture de nombreux élèves sont inévitables ou qu’on devrait examiner les autres raisons pour lesquelles les élèves prennent du retard, plutôt que de s’en tenir au fait que l’enseignement et les autres mesures de soutien que reçoivent les élèves contribuent aux écarts en matière d’équité.

De nombreux élèves font face à des sources de désavantage historique et sociétal. Il n’est pas suffisant d’avoir de fortes compétences initiales en lecture des mots pour surmonter des désavantages structuraux en matière d’éducation et dans la vie. Les élèves qui commencent l’école en situation de désavantage et n’arrivent pas à développer cette compétence de base ne font qu’accroître les obstacles qui se dressent sur leur parcours.

Notre système d’éducation a, aux termes du Code des droits de la personne de l’Ontario, la responsabilité et l’obligation légale d’éliminer les obstacles qui limitent les possibilités d’apprendre et de réussir des élèves. Les conclusions et recommandations présentées dans ce rapport sont des questions d’équité en matière d’éducation.

En même temps, beaucoup de parties prenantes du domaine de l’éducation reconnaissent que l’approche actuelle d’enseignement de la lecture au primaire est un enjeu de justice sociale parce qu’elle contribue aux iniquités en matière d’éducation et autres iniquités à vie. Elles luttent pour le changement et seront des partenaires importants lorsque viendra le temps de donner suite aux conclusions et aux recommandations du présent rapport.

Il ne sera pas facile de donner suite aux conclusions de ce rapport et de mettre en œuvre ses recommandations. Cela exigera la collaboration de nombreux partenaires qui devront s’engager de façon soutenue à éliminer les iniquités auxquelles font face beaucoup d’Ontariennes et d’Ontariens. Étant donné que ce rapport ne s’attarde pas à tous les aspects d’une approche exhaustive en matière de littératie, d’autres recherches devront être menées afin de veiller à ce que l’Ontario ait en place toutes les composantes critiques d’un curriculum rigoureux, ainsi que des méthodes améliorées d’enseignement des compétences de base en lecture. Ce travail peut et doit être effectué. Il est temps que la situation change.