Il n’est pas toujours possible de classer la discrimination fondée sur la croyance dont certaines personnes font l’objet dans des catégories claires. Les formes de discrimination s’entremêlent et se chevauchent souvent considérablement. Cependant, aux fins de la présente politique, il est utile de décrire les différentes façons dont la discrimination fondée sur la croyance peut se manifester. Les sections qui suivent abordent certaines de ces manifestations.
7.1 Discrimination directe, indirecte et subtile
La discrimination directe peut survenir quand des personnes ou des organisations bloquent ouvertement l’accès de personnes appartenant à une communauté de croyance à des emplois ou services, leur refusent des avantages offerts à d’autres ou leur imposent des fardeaux additionnels qu’elles n’imposent pas à d’autres, sans défense légitime prévue par le Code.
Beaucoup de plaintes pour discrimination fondée sur la croyance allèguent l’adoption de stéréotypes, parfois dissimulés ou inconscients, ou découlant d’une antipathie et de préjugés flagrants à l’endroit d’une personne ou d’un groupe au motif de sa croyance. Il s’agit là d’une forme de discrimination directe.
Exemple : Une société d’aide à l’enfance et de services aux jeunes décide de mettre fin au contrat de foyer d’accueil d’une femme. La TDPO détermine qu’il y a discrimination, et que cette discrimination est fondée en partie sur la « vision stéréotypée qu’a la société de la foi chrétienne de la requérante « qui est présumée nuire à sa capacité d’offrir un foyer d’accueil adéquat aux enfants gais[126].
La discrimination peut également se manifester de façon indirecte. Par exemple, elle peut être exercée par l’entremise d’une tierce personne ou organisation.
Exemple : Un locateur embauche une entreprise de gestion immobilière, qu’il somme de s’assurer de ne pas louer de logement à des personnes autochtones qui semblent se soumettre à des pratiques spirituelles autochtones traditionnelles. Cela est dû à l’aversion du locateur à l’odeur de la fumée d’herbes et de remèdes autochtones traditionnelles utilisés pour l’observance des rites autochtones traditionnels, et à des prétendues questions de sécurité. Le locateur qui fixe des conditions discriminatoires et le gestionnaire immobilier qui exerce cette discrimination peuvent être tous les deux nommés dans une plainte relative aux droits de la personne et tenus responsables de discrimination.
La discrimination peut aussi se manifester de manière plus subtile et cachée. La plupart des gens se gardent de formuler ouvertement des remarques discriminatoires ou d’exprimer des points de vue stéréotypés pour expliquer leur comportement. Pour établir l’existence de discrimination subtile, il peut s’avérer nécessaire d’examiner l’ensemble des circonstances afin de voir s’il se dessine un modèle de comportement discriminatoire. Examinés de façon isolée, des actes individuels peuvent sembler ambigus ou défendables. Replacés dans un contexte plus large, cependant, ils peuvent amener à conclure que la discrimination fondée sur la croyance a constitué un facteur dans le traitement d’une personne. Par exemple, un écart inexplicable par rapport aux pratiques habituelles peut servir à démontrer l’existence de discrimination[127]. Des critères applicables uniquement à certaines personnes et non à d’autres peuvent également constituer une preuve de discrimination si l’on peut démontrer que des personnes et des groupes protégés par le Code sont visés par un traitement négatif.
L’effet cumulatif de la discrimination directe, subtile et indirecte peut avoir des répercussions profondes sur les personnes qui en font l’objet.
Le Code interdit aux organisations et membres de la collectivité de faire de la discrimination fondée sur la croyance à l’endroit de quiconque, et les oblige à prévenir les cas de discrimination et à régler ceux qui surviennent. Ces obligations s’appliquent aux situations de discrimination directe résultant des stéréotypes et des préjugés d’une personne. Elles s’appliquent aussi à la discrimination indirecte pouvant avoir cours au sein et à l’échelle d’organisations en raison de lois ou de politiques et pratiques adoptées inconsciemment.
7.2 Harcèlement
Durant ses consultations, la CODP a appris que le harcèlement flagrant à l’endroit des personnes identifiées par une croyance, et particulièrement les personnes que l’on peut associer à la vue à des communautés de croyance minoritaires visibles, fait encore très partie de la réalité en Ontario[128].
Le Code interdit le harcèlement fondé sur une variété de motifs y compris la croyance, l’origine ethnique, le lieu d’origine, la race, la couleur, l’ascendance, la citoyenneté, le sexe, l’orientation sexuelle, l’identité sexuelle et l’expression de l’identité sexuelle. Les personnes et communautés adhérant à une croyance peuvent faire l’objet de harcèlement fondé sur un ou plusieurs motifs de discrimination interdits par le Code.
En plus de prévoir des mesures explicites de protection contre le harcèlement en matière de logement et d’emploi, le Code interdit le harcèlement en matière de services et dans d’autres domaines sociaux[129].
Le Code définit le harcèlement de la façon suivante : « Fait pour une personne de faire des remarques ou des gestes vexatoires [c’est-à-dire gênants ou inquiétants] lorsqu’elle sait ou devrait raisonnablement savoir que ces remarques ou ces gestes sont importuns »[130]. La référence aux remarques formulées ou gestes posés alors que la personne « sait ou devrait raisonnablement savoir que ces remarques ou ces gestes sont importuns » établit un critère à la fois objectif et subjectif de détermination de ce qui constitue du harcèlement.
Du côté subjectif, on considère la connaissance qu’a le harceleur de la réaction provoquée par son comportement. Du côté objectif, soit le point de vue d’une tierce partie « raisonnable », on considère le type de réaction généralement provoquée par le comportement. Pour établir le point de vue d’une tierce partie « raisonnable », il faut prendre en compte la perspective de la personne qui est victime de harcèlement. Autrement dit, le TDPO peut conclure selon la preuve à sa disposition qu’une personne savait, ou aurait dû savoir, que ses gestes étaient importuns [131].
La simple réaction d’une personne à certains types de remarques ou de gestes qui lui sont adressés devrait permettre de comprendre que ces remarques ou gestes sont importuns, même si la personne ne s'en plaint pas ouvertement. C'est, par exemple, le cas d’une personne qui s'éloignerait avec dégoût d’un collègue de travail qui formule des commentaires offensants à l’endroit des adeptes d’une religion particulière[132]. La victime n’a pas besoin de formuler d’objection explicite ou directe au harcèlement[133]. Elle pourrait être vulnérable et garder le silence en raison de menaces ou de craintes, ou parce que l’auteur du harcèlement exerce sur elle une autorité ou un pouvoir (p. ex. gérant ou locateur).
Certains gestes ou remarques en lien avec la croyance peuvent ne pas être offensants à première vue. Ils peuvent toutefois être jugés « importuns » par la personne ciblée. Cependant, le fait d’adopter de nouveau le comportement ou un comportement similaire malgré que la personne ait indiqué qu’il est malvenu peut constituer une violation du Code.
Le harcèlement fondé sur la croyance est souvent le résultat de stéréotypes qui attribuent des convictions, pensées, motivations et comportements particuliers aux personnes, seulement ou en partie en raison de leur croyance (actuelle ou perçue).
Exemple : Après le 11 septembre, un employé d’origine iranienne a fait l’objet d’insultes dans son milieu de travail, et a été associé à Osama Bin Laden et Saddam Hussein. Exposé à ce que l’on a déterminé être des insultes à caractère racial, il a été victime de discrimination et de harcèlement[134].
La réaction au harcèlement fondé sur la croyance peut varier d’un sexe à l’autre ou d’une communauté de croyance raciale ou ethnique à l’autre. Des personnes font souvent l’objet de formes distinctes de stéréotypage fondées sur une combinaison des motifs que sont la croyance, l’origine ethnique, la race et le sexe.
Le harcèlement fondé sur la croyance peut inclure :
- des remarques dérogatoires à l’égard de personnes ou de communautés adhérant à une croyance
- des insultes, des remarques qui humilient ou rabaissent les gens, ou les tournent au ridicule en raison de leur adhésion à une croyance ou de leur façon d’exprimer leur croyance
- des commentaires ou comportements qui résultent de la perception selon laquelle une personne ne se conforme pas au « mode de vie canadien » ou constitue une menace à ce mode de vie
- des commentaires désobligeants à propos de l’engagement d’une personne envers sa foi ou de l’adhésion à ses convictions
- des blagues portant sur la croyance d’une personne, y compris les blagues écrites qui circulent par courriel ou dans les médias sociaux
- la propagation de rumeurs sur la croyance d’une personne, y compris par Internet [135]
- des remarques ou questions indiscrètes, ou des insultes à l’égard de la croyance ou des pratiques rattachées à la croyance d’une personne, dont les vêtements qu’elle porte ou son apparence personnelle
- des menaces, des attouchements non sollicités, de la violence et des agressions physiques.
Le harcèlement sert souvent à tenter de forcer des personnes à se conformer aux normes de la société dominante, ou à les punir de ne l’avoir pas fait. Il s’agit aussi d’une méthode d’intimidation dont le but est de ridiculiser et d’ostraciser certaines personnes, d’exercer sur elles du pouvoir et de leur donner l’impression qu’elles ne sont pas les bienvenues en raison de leur croyance.
Du harcèlement fondé sur la croyance peut avoir lieu entre des personnes de même croyance ou de croyances distinctes. Il peut aussi viser des personnes qui n’adhèrent pas à une croyance particulière (voir la section 7.4 sur l’imposition de messages ou de pratiques en lien avec la croyance).
Les organisations ont l’obligation d’assurer un environnement libre de harcèlement fondé sur la croyance, que des personnes y fassent ou non objection. Dans le cas de l’emploi, la Loi sur la santé et la sécurité au travail[136] exige que les employeurs formulent des politiques sur le harcèlement et la violence au travail, et les examinent une fois par année.
Les organisations ont également la responsabilité de contacter les autorités appropriées dans les cas où le harcèlement pourrait dégénérer en crime haineux[137] ou contrevenir au Code criminel de toute autre façon.
7.3 Milieu empoisonné
Même si le harcèlement repose généralement sur plus d’un incident de remarques ou de gestes désobligeants, un seul de ces gestes ou remarques peut parfois être suffisamment grave pour créer un « milieu empoisonné »[138].
Le maintien d’un milieu empoisonné est une forme de discrimination. Dans le domaine de l’emploi, les tribunaux ont jugé que l’atmosphère d’un lieu de travail est une condition d’emploi au même titre que les heures de travail ou le taux salarial. Les « conditions d’emploi » comprennent les circonstances émotionnelles et psychologiques du lieu de travail[139]. La notion d’atmosphère empoisonnée s’est surtout manifestée en contexte d’emploi, mais est tout aussi applicable lorsqu’une telle atmosphère entraîne des modalités et conditions inéquitables en contexte de logement, de services, de contrats ou d’adhésion à un syndicat ou à une association professionnelle.
Exemple : Une professeure à une profonde aversion envers la religion. En classe, elle fait souvent des remarques dénigrantes à propos de la religion et des croyants. Ses remarques incluent des commentaires stéréotypés à l’endroit des étudiants qui adhèrent à une religion, qu’elle qualifie de personnes incapables de pensée critique indépendante.
Un seul incident grave de remarques et de gestes importuns et (ou) la présence continue ou répandue de remarques ou de gestes du genre au sein d’une organisation peut empoisonner un milieu et créer une atmosphère hostile ou angoissante pour un membre ou plus d’un groupe protégé par le Code. Bien que l’exposition continue à du harcèlement puisse en constituer un facteur, on détermine l’existence d’un milieu empoisonné non pas en fonction du seul nombre d’occurrences de gestes ou remarques, mais également en fonction de la nature de ces gestes ou remarques, et de leur effet sur une personne ou un groupe[140].
Pour créer un milieu empoisonné, il n’est pas nécessaire que le comportement en cause soit dirigé vers une personne en particulier. Une personne peut en subir les effets même si elle n’appartient pas au groupe visé.
Exemple : Une femme tibétaine de foi bouddhiste travaille au sein d’un bureau syndical où les insultes à caractère racial, l’intolérance religieuse et les commentaires stéréotypés sont monnaie courante. Bien que l’employée ou sa communauté de croyance ne soit jamais directement visée par les remarques lancées par ses collègues, elle peut avoir raison d’alléguer qu’elle a été soumise à une atmosphère empoisonnée sur le plan racial et religieux[141].
Voici des exemples de situations qui pourraient enfreindre le Code en créant un milieu empoisonné :
- Un superviseur ou un propriétaire lance à un employé ou à un locataire : « je me demande pourquoi, vous autres (en parlant des personnes de confession musulmane, hindoue ou sikhe), vous ne retournez pas d’où vous venez, parce que vous n’avez rien à faire ici »[142].
- Des commentaires, écriteaux, caricatures ou bandes dessinées sont affichés dans un environnement de services, tel qu’un magasin ou un restaurant, de travail ou de location, et qui représentent des adhérents d’une croyance de façon humiliante.
- Des graffitis ciblant des communautés de croyance ne sont pas retirés sur le champ par un employeur, un propriétaire ou un fournisseur de services.
- Des remarques, plaisanteries ou insinuations relatives à la croyance d’un employé, client ou locataire. Les remarques, plaisanteries ou insinuations relatives à la croyance d’autrui peuvent également donner à un employé, client ou locataire l’impression qu’on a des points de vue similaires à son égard.
Lorsqu’un milieu est empoisonné, certaines personnes font face à des conditions d’emploi, de location, d’éducation ou d’obtention de services néfastes, auxquelles d’autres personnes ne sont pas assujetties (par exemple, atteintes répétées à leur dignité et respect de soi). Cela constitue un traitement inéquitable.
Les organisations ont l’obligation d’assurer un milieu libre de discrimination, de garder l’œil sur les milieux empoisonnés qui se forment et de prendre immédiatement des mesures pour intervenir et les éliminer[143]. C’est le cas même si personne ne s’objecte au comportement ou si la participation au comportement est généralisée[144]. Les remarques et gestes non appropriés empoisonnent l’environnement des personnes ciblées en raison de leur croyance, dérangent et peuvent se répercuter sur l’environnement de tout le monde.
Toute personne, quel que soit son statut ou sa position d’autorité, peut formuler des remarques ou poser des gestes qui créent un milieu empoisonné. Il peut s’agir d’un collègue de travail, d’un superviseur, d’un colocataire, d’un fournisseur de logements, d’un membre d’un conseil d’administration, d’un compagnon de classe, d’un enseignant, d’un entrepreneur, d’un client ou autre. La personne responsable a l’obligation d’intervenir, quel que soit l’auteur des remarques ou des gestes en cause.
Parfois, des remarques formulées ou des gestes posés à l’extérieur du milieu de travail ou de services peuvent avoir des effets et conséquences discriminatoires au sein de celui-ci.
Exemple : Il a été déterminé qu’un conseil scolaire du Nouveau-Brunswick avait fait de la discrimination parce qu’il avait négligé de réagir de façon appropriée à la conduite d’un enseignant dont les écrits, déclarations et commentaires antisémites hors du milieu de travail étaient devenus tristement célèbres au sein de la collectivité. Bien que l’enseignant eût formulé ses remarques et posé ses gestes à l’extérieur de l’école et qu’il n’y ait aucune preuve directe de leurs répercussions sur le conseil scolaire de district, la Cour suprême a conclu que son maintien en poste au sein de l’école nuisait à l’environnement scolaire en l’empoisonnant[145].
Le fait de faire fi de la discrimination ou du harcèlement qui sévit peut en soi causer un milieu empoisonné[146].
Exemple : Le 12 septembre 2001, un détective d’un service de police a laissé un message dans la boîte vocale d’un autre détective. Le message laissait entendre qu’il possédait des informations impliquant un employé civil du service de police (qui s’identifiait comme un non-blanc d’ascendance afghane) dans les événements du 11 septembre[147]. Le message a été envoyé à la division des affaires internes du service de police à des fins d’enquête, au cours de laquelle il a été porté à la connaissance de l’employé civil. L’incident s’est rapidement répandu au sein de la division et l’employé visé est devenu la cible de commérages et de soupçons à propos de sa participation aux événements du 11 septembre. L’employé était très bouleversé et estimait que son employeur n’avait pas fait suffisamment enquête ni pris des mesures adéquates en réponse à cet incident. Il a déposé une plainte pour atteinte aux droits de la personne.
Le TDPO a conclu que, bien qu’il eût été laissé « à la blague », le message du détective avait mené à du harcèlement fondé sur l’origine ethnique, le lieu d’origine et la croyance perçue (religion musulmane), et à un milieu empoisonné. De conclure également le tribunal, l’employeur n’était pas intervenu de manière suffisante pour mettre fin aux commérages et soupçons qu’avait entraînés l’incident, malgré qu’il eût procédé à une enquête appropriée et pris des mesures disciplinaires à l’égard du détective fautif. Il a été établi que cette situation avait créé un milieu de travail empoisonné pour l’employé[148].
Les gestionnaires qui savent ou devraient savoir que l'atmosphère est empoisonnée mais ne font rien pour régler la situation tolèrent essentiellement cette discrimination même s’ils n'y contribuent pas directement[149].
7.4 Imposition de messages ou de pratiques en lien avec la croyance
Le droit de vivre à l’abri de la discrimination fondée sur la croyance aux termes du Code inclut le droit de ne pas faire l’objet de pression ou de coercition en lien avec la croyance dans les domaines de l’emploi, des services, du logement, des contrats et de l’adhésion à des associations professionnelles[150]. Aucune personne ou organisation ne peut exercer de pression sur une personne afin qu’elle accepte des convictions quelconques rattachées à la croyance, s’y soumette ou adopte des pratiques quelconques dictées par la croyance, ni l’obliger à le faire[151]. L’exercice de pression à caractère religieux peut aussi constituer une forme de harcèlement ou créer un milieu empoisonné (voir les sections 8.2 et 8.3). La Charte[152] exige que les organisations gouvernementales demeurent neutres à l’égard de la religion (c’est-à-dire qu’elles ne traitent pas une religion ou un système de convictions donné avantageusement ou défavorablement par rapport aux autres)[153].
Les employeurs ne peuvent pas exercer de « pression à caractère religieux » indésirable sur des employés ou imposer comme condition d’emploi la participation à des affaires à caractère religieux[154].
Exemple : Un employeur a entraîné un employé dans de nombreuses discussions sur la religion, organisé des prières lors de réunions d’affaires et convoqué des groupes d’étude de la Bible hebdomadaires. Le TDPO a conclu que l’employeur avait fait de la discrimination en imposant une atmosphère religieuse à laquelle l’employé jugeait qu’il devait participer dans le cadre de son emploi[155].
Le Code interdit d’imposer à autrui des messages en lien avec la croyance dans l’un quelconque des domaines sociaux couverts, et ce, même si l’auteur du message est très convaincu de son devoir de faire du prosélytisme et de partager ce message[156].
Cependant, les décisions des tribunaux laissent également entendre que les discussions de questions religieuses en milieu de travail sont acceptables jusqu’à un certain point. Il n’est pas interdit aux gens d’exprimer leurs convictions sincères en milieu de travail, dans les limites des dispositions du Code, tant que la situation ne mène pas à une pression à caractère religieux importune[157].
Exemple : Le TDPO a déterminé qu’une superviseure qui avait entamé des discussions sur la religion avec une employée, lui avait donné une Bible et lui avait parlé du réconfort qu’apporte la religion dans des situations difficiles n’avait pas exercé de pression à caractère religieux importune compte tenu des circonstances[158].
Il a aussi été établi que le fait de privilégier sélectivement une croyance ou tradition religieuse au dépend d’une autre dans un contexte d’emploi ou de services constituait une forme d’imposition de la religion qui contrevenait aux droits à l’égalité d’autrui[159].
Exemple : Une école primaire publique conçoit de façon inclusive son matériel scolaire et ses activités scolaires et parascolaires tout au long de l’année pour veiller à ce qu’ils soient accueillants et qu’ils reflètent les origines multiculturelles et multiconfessionnelles de la population étudiante. Cela lui permet d’assurer un environnement d’apprentissage équitable pour tous les élèves, sans favoriser une communauté de croyance particulière au dépend d’une autre ou les personnes qui n’adhèrent à aucune croyance au dépend des croyants, et vice versa, et sans nuire à quelconque de ces groupes.
Il a aussi été déterminé que l’imposition de la prière du Seigneur dans les écoles et lors d’assemblées publiques constituait une forme de pression ou de contrainte à caractère religieux qui contrevient à la liberté de religion d’autrui[160]. Bien que les tribunaux administratifs et judicaires aient eu des divergences d’opinion à propos du caractère discriminatoire du fait de réciter des prières plus inclusives, non sectaires et non confessionnelles, y compris des prières qui font mention de Dieu, dans certains contextes de services[161], la Cour suprême du Canada a conclu que même les prières non confessionnelles peuvent contrevenir aux droits dans la mesure où elles privilégient les adeptes de fois religieuses au détriment des athéistes et adeptes de fois non religieuses[162].
Exemple : Un homme qui se qualifie d’athée et qui assiste régulièrement aux assemblées de son conseil municipal a contesté la pratique de la municipalité consistant à débuter chaque assemblée par une prière. La prière, qui avait lieu dans une salle du conseil où se trouvait une statue du Sacré-Cœur ornée d’un lampion rouge électrique et un crucifix au mur, faisait référence à Dieu et était précédée et suivie du signe de la croix, que les conseillers municipaux effectuaient en disant « au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit ». Le Tribunal des droits de la personne du Québec a conclu que la prière était de nature religieuse et qu’elle faisait en sorte que l’homme se sentait isolé, mal à l’aise et exclu. Le conseil municipal a porté en appel la décision du tribunal et la Cour suprême du Canada a été chargée de trancher. Celle-ci a déterminé que la conclusion du tribunal selon laquelle la prière était de nature religieuse (et associée de près au catholicisme) et entraînait une exclusion fondée sur la religion était raisonnable. D’affirmer la Cour, « [l]a prière récitée par le conseil municipal [était] en violation du devoir de neutralité de l’État [et a engendré] une distinction, exclusion et préférence fondée sur la religion, soit l’athéisme sincère [du requérant], qui, conjuguée aux circonstances entourant sa récitation, [faisait] des séances un espace préférentiel favorisant les croyants théistes »[163]. La Cour a également conclu que « même “inclusive”, une pratique religieuse étatique risque néanmoins d’exclure les incroyants »[164].
Cependant, selon le contexte, la décision de la Cour suprême dans Saguenay (voir l’exemple ci-haut) pourrait ne pas écarter l’emploi de déclarations ou d’invocations d’ouverture lors d’assemblées publiques ou municipales qui s’avèrent tout aussi inclusives à l’endroit de la variété des convictions religieuses et non religieuses.
L’adoption de règlements permettant à quiconque de ne pas participer à des activités ayant une signification rattachée à une religion ou à une croyance ne protège pas nécessairement les organisations contre un verdict éventuel de discrimination et pourrait même dans certains cas accroître l’exclusion et la discrimination dont font l’objet certaines personnes[165].
Exemple : Le règlement d’un conseil scolaire obligeait les écoles publiques de la région à commencer et à terminer chaque jour par des exercices religieux comprenant la lecture des Saintes écritures ou la récitation du Notre père ou de toute autre prière appropriée. Même si le règlement permettait aux élèves d’être exemptés de ces pratiques et était de portée assez large pour permettre la récitation de prières non chrétiennes, un tribunal a déterminé qu’il était non constitutionnel, en partie parce qu’il faisait indirectement pression sur les élèves pour qu’ils se conforment aux pratiques religieuses de la majorité[166].
Le devoir de neutralité religieuse de l’État ne signifie pas qu’il est interdit aux personnes associées au gouvernement d’exercer leurs droits religieux à titre personnel.
Il n’existe pas de droit général de vivre à l’abri de toute exposition à la religion ou à la croyance d’autrui en contexte de services, de logement, d’emploi ou d’associations professionnelles[167]. Il n’existe également pas de droit général de ne pas être exposé à des perspectives et convictions qui sont contraires aux siennes. Par exemple, la Cour suprême a conclu qu’en milieu scolaire, la simple exposition à une variété de perspectives, et la « dissonance cognitive » que cela peut créer chez les jeunes à qui on enseigne à la maison des idées qui diffèrent de celles auxquelles ils sont exposés à l’école, est un fait nécessaire de la vie au sein de la société multiculturelle canadienne auquel tous les citoyens doivent se préparer[168].
Pour distinguer les formes discriminatoires d’expression de la religion et de la croyance en milieu de travail de ses formes non discriminatoires, on doit souvent examiner les circonstances propres de l’affaire et considérer le contexte social, historique et organisationnel plus vaste[169].
En matière d’éducation, il est possible d’aborder des questions religieuses à l’intérieur et à l’extérieur de la salle de classe, pourvu qu’on s’assure de faire preuve de neutralité en évitant toute forme d’endoctrinement[170].
Exemple : La Cour d’appel de l’Ontario a invalidé l’instruction religieuse dans les écoles publiques de l’Ontario dans l’affaire connue sous le nom d’Elgin County[171]. Pour aider à trouver « le juste équilibre entre l’endoctrinement et l’éducation », le tribunal a établi les critères suivants d’évaluation du caractère approprié et non discriminatoire de l’éducation religieuse offerte dans les écoles publiques (non catholiques) :
- L’école peut parrainer l’étude de la religion, mais pas la pratique de la religion.
- L’école peut exposer l’élève à tous les points de vue religieux, mais ne peut pas lui imposer de point de vue particulier.
- L’école doit adopter une approche d’enseignement de la religion et non d’endoctrinement.
- L’école a pour fonction d’éduquer l’élève à propos de toutes les religions et non de le convertir à une religion en particulier.
- L’approche de l’école doit être didactique et non dévotionnelle.
- L’école devrait étudier les convictions de tous, mais ne devrait pas enseigner à un élève quoi croire.
- L’école devrait chercher à sensibiliser l’élève à toutes les religions, mais ne devrait pas le pousser à en accepter une en particulier.
- L’école devrait chercher à informer l’élève d’une diversité de croyances, mais ne devrait pas chercher à faire en sorte qu’il se conforme à une croyance en particulier[172].
Dans les écoles confessionnelles, l’enseignement peut être prodigué selon une perspective fondée sur la religion ou la croyance, mais la Cour suprême du Canada a confirmé que l’État pourrait quand même exiger que certaines matières soient enseignées selon une perspective neutre, lorsque cela assure la promotion d’intérêts et de valeurs fondamentales légitimes de l’État, comme le respect de la diversité et l’égalité[173].
« L’État [...] a un intérêt légitime à s’assurer que les élèves de toutes les écoles seront en mesure, une fois devenus adultes, de se comporter avec ouverture et respect lorsqu’ils devront faire face aux différences culturelles et religieuses. Une démocratie multiculturelle et pluraliste dynamique doit pouvoir compter sur la capacité de ses citoyens “de discuter de manière réfléchie et ouverte en profitant” de diverses visions du monde et pratiques religieuses ». – Cour suprême du Canada[174]
L’adoption de politiques inclusives en matière de croyance ne garantit pas l’absence de pression en lien avec la religion ou la croyance. Au moment de déterminer si le droit à un traitement égal a été respecté, les pratiques concrètes adoptées sur le terrain revêtent une importance tout aussi grande[175].
7.5 Profilage fondé sur la croyance et les motifs connexes liés à la race
Le « profilage » est une question de droits de la personne importante et une forme de discrimination ayant un effet négatif sur les gens en raison de leur croyance et (ou) de leur race[176].
Le profilage fondé sur la religion ou la croyance fait référence à tout geste posé à des fins de sécurité ou de protection du public qui repose non pas sur des soupçons raisonnables mais sur des stéréotypes à l’égard de la religion ou de la croyance d’une personne, ou de tout autre motif que l’on croit lié à la religion ou à la croyance (p. ex. race ou origine ethnique), dans le but d’accorder à cette personne une plus grande attention ou un traitement particulier.
Le profilage repose sur des idées préconçues à propos d’une caractéristique d’une personne protégée par le Code. Le « profilage » fondé sur la croyance s’additionne souvent au profilage racial, et peut constituer une forme de ce type de profilage. Le fait de soumettre des gens à des mesures de sécurité, de contrôle et de surveillance accrues en raison de leur apparence extérieure, de leur adhérence perçue à une certaine croyance et de stéréotypes à propos des adeptes de cette croyance, ou encore de leur association à des communautés raciales et ethniques particulières, en est un exemple.
Le profilage fondé sur la croyance nuit particulièrement aux personnes arabes et musulmanes. Un sondage effectué en 2003 révèle que 48 % des Canadiennes et Canadiens approuvent du profilage des membres de ces communautés, malgré le fait que cela pourrait violer leurs libertés civiles[177]. Un sondage mené en 2002 par le Conseil national des musulmans canadiens (anciennement le Conseil des relations américano-islamiques) a également révélé qu’une majorité (60 %) de Canadiennes et Canadiens de religion musulmane rapportent avoir fait l’objet de préjugés ou de discrimination depuis les attentats terroristes du 11 septembre[178].
Le sectarisme et les préjudices antimusulmans s’articulent parfois autour de l’attribution, à tous les musulmans (jusqu’à preuve de leur innocence), d’une responsabilité et d’un blâme collectifs pour les gestes commis par des personnes ou des groupes de même origine ethnique ou religieuse[179]. Parfois, les non-musulmans dotés de marqueurs ethniques et raciaux typiquement associés à la foi islamique peuvent faire l’objet de profilage religieux ou racial en raison de la relation perçue entre la religion, la croyance et d’autres motifs raciaux comme la couleur, l’origine ethnique, le lieu d’origine, la langue et la citoyenneté.
Le profilage fondé sur la religion ou la croyance diffère du profilage criminel. Le profilage criminel se fonde sur le comportement réel d’une ou plusieurs personnes répondant à un certain signalement ou sur des renseignements relatifs à la présumée activité criminelle de cette personne ou ces personnes.
Le profilage fondé sur la croyance se manifeste le plus souvent dans les secteurs du maintien de l’ordre et de la sécurité, mais peut s’exercer dans une grande variété de situations. En voici des exemples :
- au moment d’obtenir des services ou d’avoir accès à des services, comme des services d’éducation, des services offerts par des commerces et des services gouvernementaux, communautaires et sociaux
- en emploi, y compris au moment du recrutement, de l’embauche, du maintien en poste ou de la promotion d’employés, et dans le cadre des activités quotidiennes
- au moment de voyager ou d’utiliser les transports publics
- au moment d’essayer d’obtenir un logement ou d’y habiter.
Plusieurs affaires de profilage fondé sur la croyance sont survenues en contexte d’emploi. Dans tous les cas, des collègues de travail ont adopté des conduites discriminatoires fondées sur le chevauchement de motifs liés à la croyance et à la race, et l’employeur n’est pas intervenu adéquatement pour résoudre la situation[180].
Exemple : Un citoyen canadien de religion musulmane a été soumis à une enquête humiliante de la GRC après qu’une de ses collègues de travail a communiqué avec la GRC pour dire qu’elle le soupçonnait d’avoir été mêlé aux attentats du 11 septembre[181]. Selon le tribunal, la collègue de travail n’aurait pas agi ainsi si l’homme n’avait pas été un arabe musulman ayant immigré de l’Arabie saoudite. Le tribunal a également conclu que l’employeur n’était pas responsable de la dénonciation à la GRC, qui avait été faite hors du lieu de travail, mais qu’il était responsable du profilage racial discriminatoire au sein du milieu de travail parce qu’il avait laissé libre cours aux soupçons à l’endroit de l’employé et n’avait pris aucune mesure pour remédier aux effets de la situation sur lui. L’employeur a plutôt laissé l’employé soupçonné à tort d’activités terroristes se démener seul dans un milieu de travail empoisonné.
Le profilage fondé sur la croyance peut se manifester dans d’autres contextes, comme au moment d’évaluer les risques pour la santé et la sécurité de l’adoption de mesures d’adaptation.
Exemple : Un conseil scolaire a interdit à un élève sikh de porter un kirpan[182] en alléguant, entre autres, que le kirpan constituait un « symbole de violence » véhiculant comme message que l’emploi de la force est la façon de régler les conflits et d’obtenir le respect de ses droits. La Cour suprême du Canada a conclu que la prétention du conseil était contraire à la preuve concernant la nature symbolique du kirpan, qu’elle était également irrespectueuse envers les adeptes de la religion sikhe et qu’elle ne tenait pas compte des valeurs canadiennes fondées sur le multiculturalisme. En définitive, la Cour suprême a conclu que le risque associé à l’emploi du kirpan par l’élève à des fins violentes était faible, et que le fait de lui en interdire le port contrevenait à ses droits religieux[183].
Les preuves directes de profilage sont rares. La démonstration du profilage devra souvent se faire par inférence, à l’aide de preuves circonstancielles[184]. Les critères ci-après sont tirés de la jurisprudence sur le profilage racial et pourraient s’avérer pertinents au moment de déterminer si un traitement préjudiciable allégué avait une composante de profilage fondé sur la croyance :
- l’intimé est conscient de la croyance de la personne, ou à une perception de cette croyance
- des commentaires révélant de stéréotypes ou de préjugés à l’endroit d’un adepte d’une croyance (p. ex. commentaires négatifs) ont été formulés
- aucune explication n’a été donnée pour expliquer pourquoi une personne a fait l’objet d’une plus grande attention ou d’un traitement différent, ou les explications données étaient contradictoires, changeantes ou illogiques[185]
- on a fait des écarts difficiles à expliquer par rapport à la pratique habituelle[186]
- on a fait preuve de manque de professionnalisme ou de courtoise à l’égard de la personne (p. ex. on lui a fait subir un interrogatoire)[187]
- la personne a un certain profil[188]
- on a pris des mesures ou formulé des soupçons non fondés en réaction à une conduite facilement justifiable[189]
- des gestes innocents ou ambigus ont été mal interprétés et jugés compromettants (p. ex. le fait de ne pas regarder une personne dans les yeux)
- on a eu des réactions excessives à des comportements jugés difficiles en raison de la menace perçue associée aux personnes adhérant à une certaine croyance, et ce, même lorsqu’il n’existe pas de risque réel[190]
- la situation aurait connu un dénouement différent si on n’avait pas su ou n’avait pas l’impression que la personne adhérait à une croyance particulière[191]
- l’intimé jette un filet d’enquête si large que la croyance de la personne a contribué à la décision de mener une enquête sur elle[192].
On peut s’attendre à ce que les personnes qui pensent faire l’objet de profilage trouvent l’expérience troublante et réagissent par de la colère et des propos agressifs. Dans les circonstances, la réaction négative de la personne exige un certain degré de tact et de tolérance, et ne doit pas entraîner un traitement différentiel subséquent[193].
7.6 Formes de discrimination intersectionnelles
La discrimination peut s’avérer unique ou distincte lorsqu’elle fait intervenir deux motifs du Code ou plus. Ce type de discrimination peut être qualifié d’« intersectionnel ». Le concept de discrimination intersectionnelle repose sur le fait qu’on attribue à l’identité des dimensions multiples se chevauchant et qu’on reconnaisse que la marginalisation et l’exclusion fondées sur des motifs du Code peuvent être le résultat de l’intersection de ces dimensions identitaires[194].
La discrimination fondée sur la croyance peut chevaucher une variété d’autres formes de discrimination, y compris la discrimination fondée sur la race ou d’autres motifs liés à la race et au sexe.
Selon la CODP, il importe de reconnaître les situations où l’intersection de motifs multiples engendre une expérience de discrimination ou de harcèlement unique afin de tenir compte du plein impact de la discrimination ou du harcèlement.
7.6.1 Motifs liés à la race et croyance
La discrimination fondée sur la croyance chevauche le plus souvent de la discrimination fondée sur la race ou des motifs connexes protégés par le Code, y compris l’origine ethnique, la couleur, l’ascendance, le lieu d’origine et la citoyenneté[195].
Exemple : Le TDPO a ordonné à un restaurant de payer 100 000 $ en dommages-intérêts pour discrimination fondée sur une combinaison des motifs de la croyance, de la couleur, de l’ascendance, du lieu d’origine et de l’origine ethnique, y compris du harcèlement, des représailles et le maintien d’un milieu empoisonné. Trois employés musulmans originaires du Bangladesh ont fait l’objet de railleries parce qu’ils parlaient le bengali. On leur a dit de parler uniquement l’anglais à la cuisine et refusé des mesures d’adaptation pour célébrer la fête de l’Eid. On a également menacé de les remplacer par du personnel « blanc » et fait pression sur eux pour qu’ils procèdent à des tests de dégustation de plats de porc que leur interdisait leur religion, et ce, même pendant le mois sacré du Ramadan[196].
Un autre exemple : le fait d’empêcher une personne de se soumettre à une pratique qui revêt une signification religieuse ou spirituelle ainsi que culturelle et ancestrale en est un exemple (pour un complément d’information et d’exemples, voir la section 11 sur les pratiques spirituelles autochtones).
7.6.2 Sexe et croyance
La discrimination fondée sur la croyance chevauche souvent de la discrimination fondée sur le sexe. Les femmes qui pratiquent une religion ont souvent constitué les principales victimes de la discrimination et des préjugés fondés sur la croyance en Ontario. Dans certains cas, cela est dû en partie à leur plus grande visibilité ou à leur vulnérabilité réelle ou perçue[197].
Une grande partie du débat public sur l’accommodement religieux dans la sphère publique s’est articulé autour de ce que les femmes musulmanes devraient et ne devraient pas porter. Les conclusions des recherches et des consultations de la CODP laissent entendre que les femmes musulmanes qui portent le voile recouvrant la tête (hijab) ou celui recouvrant le visage (niqab) ont été particulièrement vulnérables à la discrimination, aux préjugés et au harcèlement, compte tenu en partie de leur plus grande visibilité.
Les femmes adeptes d’une religion peuvent aussi parfois porter un double fardeau et désavantage en faisant l’objet, d’une part, de discrimination fondée sur le sexe et de marginalisation au sein même de leur communauté, et de l’autre, de discrimination et de préjugés fondés sur le sexe et la race à l’extérieur de la communauté[198].
Les femmes se heurtent parfois aussi à des formes particulières de discrimination et de harcèlement fondés sur une combinaison des motifs du sexe et de la croyance et d’autres stéréotypes (p. ex. en lien avec la croyance).
Exemple : Une femme d’ascendance africaine qui adhère à une religion traditionnelle africaine et porte des vêtements traditionnels africains au travail fait l’objet de harcèlement de la part de ses collègues. Ces derniers dénigrent son identité culturelle et ses convictions ou pratiques spirituelles, et font des blagues à propos de ses pouvoirs « vaudou » et de son caractère soi-disant « imprévisible » et « instable », en se basant sur des stéréotypes fondés sur le sexe et la race.
Exemple : Une femme hindoue porte des vêtements traditionnels indiens à une entrevue d’emploi de gestion dans un magasin de ventes au détail. Le comité de sélection rejette rapidement sa candidature et lui dit de laisser son « costume » à la maison la prochaine fois qu’elle répond à une offre d’emploi.
7.6.3 Croyance et handicap
La discrimination fondée sur la croyance peut également chevaucher de la discrimination fondée sur le handicap. L’observance de certaines pratiques rattachées à la croyance est à ce point exigeant sur le plan physique et mental qu’elle peut nuire à la capacité d’une personne de vaquer physiquement et mentalement à ses activités quotidiennes, surtout chez les personnes qui pourraient avoir un handicap préexistant.
Les effets des pratiques rattachées à la croyance sur un handicap préexistant peuvent déclencher l’obligation d’accommodement jusqu’au point de préjudice injustifié, aux motifs entrecroisés de la croyance et du handicap.
Exemple : Une chrétienne orthodoxe qui a le diabète est incapable d’effectuer certaines des tâches les plus exigeantes sur le plan physique de son emploi de préposée au nettoyage de bureaux les jours où elle doit observer le jeûne. L’employeur a l’obligation de tenir compte de ses besoins en matière de handicap et de croyance jusqu’au point de préjudice injustifié.
Même lorsque la personne n’a pas de handicap préexistant, l’obligation d’accommodement demeure si une règle, une norme ou une tâche nuit à sa capacité de se soumettre à une pratique sincère relative à la croyance (p. ex. jeûne)[199].
7.6.4 Différences au sein des communautés de croyance
Un nombre croissant de différends et de situations de discrimination en lien avec la croyance surviennent entre membres d’une même confession[200]. Dans certains cas, ces conflits sont alimentés par des différences sociales et des dynamiques de pouvoir s’opérant au sein de communautés et fondées sur le statut socio-économique, la croyance, le sexe, des motifs relatifs à l’origine ethnique, la race et (ou) l’orientation, ou d’autres motifs protégés par le Code. Parfois, ils sont aussi alimentés par des conflits survenant ailleurs dans le monde.
Exemple : Un employeur a été tenu responsable de ne pas avoir réagi adéquatement aux propos discriminatoires proférés par un employé d’origine ethnique serbe de Bosnie à l’endroit d’un de ses collègues de travail, qui s’identifiait comme un Bosniaque musulman. Un tribunal a conclu que l’employé serbe avait menacé de tuer des musulmans à Sarajevo et de faire du mal à l’employé et à sa famille. Il avait également utilisé le terme « zacklan », que l’employé ciblé a trouvé particulièrement injurieux en raison de sa signification violente (décapitation) et de sa connotation passée et actuelle pour une personne d’ascendance bosniaque. Le tribunal a déterminé que les propos avaient été proférés à l’endroit du collègue de travail en raison de son patrimoine et de son ascendance bosniaques, de son lieu d’origine et de sa religion, et que la réaction de l’employeur aux menaces graves avait été inadéquate[201].
Les conflits, la discrimination et le harcèlement peuvent également être fondés sur des différends, au sein de communautés, sur la façon d’interpréter et de mettre en pratique une croyance particulière.
Exemple : Un superviseur a laissé entendre qu’une employée qui adhère comme lui à la foi chrétienne ne fait pas son travail correctement, en partie parce qu’elle n’agit pas en « vraie chrétienne ». Cela a entraîné des conséquences négatives sur l’emploi de la personne et a été jugé discriminatoire[202].
Exemple : Un homme juif a allégué faire l’objet de discrimination fondée sur la croyance en raison du refus d’une organisation juive de lui accorder la certification de traiteur casher au motif qu’il n’était pas « orthodoxe ou shomer shabbat ». L’intimé, le Kashruth Council, est une société qui offre la certification de produits et d’établissements qui se conforment, à ses yeux, aux lois de la Kachroute (régime alimentaire juif). Le TDPO a déterminé que le requérant n’avait pas réussi à démontrer que le refus de l’intimé avait un lien avec la croyance et a rejeté la requête. La politique de l’organisation n’exigeait pas qu’un traiteur soit orthodoxe ou shomer shabbat. En fait, le requérant avait déjà obtenu la certification même s’il n’était pas orthodoxe. Aucune preuve n’indiquait que la décision était liée à la croyance du requérant[203].
Les organisations devraient être conscientes de la grande variété des convictions ou pratiques rattachées à la croyance observées au sein de communautés de croyance et en tenir compte au moment d’assurer une conception inclusive et l’accommodement de la croyance. Elles devraient adopter une approche personnalisée qui reconnaît l’identité particulière de chaque personne, sans se baser sur des notions préconçues, des suppositions ou des stéréotypes à propos des gens qui sont fondés sur la croyance ou d’autres motifs du Code[204].
7.7 Association
Certaines personnes font l’objet de discrimination en raison de leur association à une personne appartenant à une communauté de croyance[205].
Exemple : Une femme fait l’objet de harcèlement et de commentaires antisémites de la part de ses collègues de travail après qu’ils apprennent qu’elle est mariée à un homme juif.
Il est interdit, aux termes du Code, d’exposer une personne à de la discrimination en raison de son association à une personne ou à un groupe[206]. Cela peut s’appliquer aux amis, aux membres de la famille[207] ou à d’autres personnes (p. ex. les personnes qui interviennent au nom des personnes affiliées à une croyance).
7.8 Discrimination indirecte (ou par suite d’un effet préjudiciable)
Il y a discrimination « indirecte » ou « par suite d’un effet préjudiciable » lorsqu'une exigence, une qualité requise ou un critère neutre a un effet préjudiciable sur les membres d'un groupe visé par un motif de discrimination interdit aux termes du Code. L’article 11 (1) du Code porte explicitement sur cette forme de discrimination[208].
Des effets préjudiciables peuvent découler d’exigences neutres ou d’un traitement identique[209].
Il s’agit d’une des formes de discrimination auxquelles se heurtent le plus souvent les personnes adhérant à une religion ou à une croyance.
L’analyse doit s’articuler autour des « effets » préjudiciables de l’exigence, de la qualité requise ou du critère, et non sur l’intention et les motifs sous-jacents, qui peuvent s’avérer neutres et non discriminatoires à première vue.
Exemple : Un employeur exige que ses employés masculins se rasent et portent les cheveux courts. L’employeur se base sur cette règle pour refuser d’embaucher un homme adepte du rastafarisme qui ne se rase pas et ne se coupe pas les cheveux pour des motifs religieux. La règle ne vise pas à empêcher les rastafariens d’occuper un emploi dans l’entreprise, mais à cet effet. À moins qu’un employeur puisse démontrer qu’un changement ou qu’une exception à la règle serait trop coûteuse ou poserait un risque considérable sur le plan de la santé et de la sécurité ne pouvant pas être réduit d’une autre façon, il devrait accepter de modifier la règle.
Généralement, en matière de croyance, les problèmes de discrimination indirecte ont trait aux questions suivantes :
- politiques relatives aux horaires, congés et pauses
- codes vestimentaires
- règles et normes de santé et de sécurité
- photos et identification biométrique (pour un complément d’information, voir la section 10.4)
- pratiques et interdictions alimentaires.
La discrimination indirecte ou par suite d’un effet préjudiciable enfreint le Code à moins que :
- l’exigence, la qualité requise ou le critère ne soit établi de façon raisonnable et de bonne foi dans les circonstances[210], et qu’on ne puisse tenir compte des besoins de la personne sans créer de préjudice injustifié ou
- la loi prévoit une exception stipulant que la discrimination fondée sur un tel motif ne constitue pas une atteinte à un droit[211].
Pour un complément d’information sur les exigences en lien avec l’obligation d’accommodement, voir la section 9.5.
7.9 Discrimination systémique
La discrimination fondée sur la croyance peut être le résultat de comportements individuels ou des effets involontaires et inattendus d’un système discriminatoire. On appelle ce type de discrimination de la discrimination systémique. La discrimination systémique peut parfois découler de formes systémiques de désavantages liés à la foi (voir la section 3.2 pour plus d’information sur les désavantages liés à la foi) et être alimentée par ces désavantages.
La discrimination systémique fondée sur la croyance peut être décrite comme des modèles de comportement, de politiques et de pratiques qui font partie de la structure administrative ou la « culture » officieuse d’une organisation, d’un groupement ou d’un secteur, et qui, intentionnellement ou par inadvertance, créent ou perpétuent des désavantages auxquels se heurtent des personnes en raison de leur croyance[212].
Bien que la discrimination systémique puisse chevaucher des actes individuels de discrimination et être en partie reproduite par l’entremise de tels actes, l’analyse de la discrimination systémique s’articule autour des résultats ou effets de politiques, de pratiques et de procédures institutionnelles.
Selon la CODP, il existe trois facteurs à considérer pour identifier et résoudre les cas de discrimination systémique :
- données numériques
- politiques, pratiques et processus décisionnels
- culture organisationnelle.
Pour obtenir un complément d’information sur la façon d’évaluer ces facteurs de discrimination systémique, voir le document de la CODP intitulé Politique et directives sur le racisme et la discrimination raciale.
La culture organisationnelle fait référence aux normes et valeurs informelles qui ont une influence sur l’activité de l’organisation et l’expérience des personnes qui évoluent tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de cette organisation. Une organisation peut avoir des sous-cultures dominantes et contradictoires[213].
Les cultures organisationnelles, pratiques officieuses et évaluations subjectives sont particulièrement susceptibles de désavantager par inadvertance les minorités de croyance évoluant au sein des organisations.
Exemple : Une société de placement a comme tradition de célébrer ses succès dans un bar, autour d’un verre. Elle organise régulièrement des « retrouvailles » en soirée les jeudis dans un bar local pour permettre aux employés de se détendre et de discuter des dernières tendances du marché. Ces rencontres offrent des occasions de réseautage et de mentorat à bâtons rompus au personnel moins chevronné. Les personnes de confession religieuse qui ne boivent pas d’alcool pour des motifs liés à la croyance sont, dans les faits, incapables de tirer avantage de ces possibilités d’échange d’information et de réseautage officieuses, ce qui pourrait limiter de façon considérable leur avancement au sein de la société. Le fait de ne pas offrir d’autres occasions plus inclusives de réseautage professionnel et de mentorat au personnel, y compris aux personnes qui ne consomment pas d’alcool ou ne peuvent pas se réunir dans des endroits où l’on sert de l’alcool pour des motifs liés à la croyance, pourrait s’avérer discriminatoire.
Les organisations ont la responsabilité de veiller à ne pas exercer de discrimination systémique de manière intentionnelle ou non. Cela demande de la vigilance ainsi qu’une volonté de surveiller et de passer en revue les données numériques, les politiques, les pratiques, les processus décisionnels et la culture organisationnelle. Du point de vue des droits de la personne, il n’est pas acceptable qu’une organisation choisisse de fermer les yeux sur l’existence de discrimination systémique ou de ne pas agir au moment de prendre conscience d’un problème.
Pour obtenir un complément d’information sur les mesures de lutte contre la discrimination systémique, voir le document de la CODP intitulé Politique et directives sur le racisme et la discrimination raciale.
7.10 Représailles
L’article 8 du Code protège les gens contre les représailles et les menaces de représailles. Des représailles sont des gestes ou des menaces qui ont pour but[214] de punir une personne pour avoir revendiqué ou exercé un droit aux termes du Code.
Les membres de communautés de croyance peuvent revendiquer leurs droits protégés par le Code en déposant un grief contre un employeur (en milieu de travail syndiqué), une plainte pour discrimination à l’interne, auprès d’un fournisseur de services, fournisseur de logements ou employeur, ou une requête auprès du TDPO. Cependant, pour démontrer l’existence de représailles, il n’est pas nécessaire que la personne qui allègue en avoir subies ait déposé une plainte ou une requête officielle aux termes du Code. Elle n’a pas non plus à prouver qu’elle a bel et bien fait l’objet de discrimination[215].
Une personne a subi des représailles en lien avec un motif du Code si :
- un geste a été posé contre elle ou des menaces ont été proférées à son endroit
- la menace ou le geste allégué avait trait au fait qu’elle avait revendiqué ou tenté d’exercer un droit protégé par le Code
- l’organisation avait l’intention de se venger sur la personne pour avoir revendiqué ou tenté d’exercer le droit[216].
Exemple : Un restaurant de Toronto a été jugé coupable d’avoir contrevenu à l’article 8 du Code en exerçant des représailles sur trois anciens membres du personnel de la cuisine qui s’étaient plaints de discrimination. Les trois anciens employés, un chef cuisinier, un sous-chef et un cuisinier, ont subi diverses formes de représailles après avoir soumis deux lettres dans lesquelles ils faisaient part à l’employeur d’une variété de griefs, dont des allégations de discrimination fondée sur la croyance et d’autres motifs liés à la race[217]. Le TDPO a conclu que le traitement réservé aux employés par le gérant du restaurant après le dépôt de la lettre s’est aggravé : l’employeur a pris des mesures pour embaucher du personnel de remplacement (composé uniquement de personnes blanches); on a demandé au chef cuisinier de former un nouveau subalterne (sous-chef) à son poste de travail habituel et de s’occuper du buffet à salade (un poste inférieur dans la hiérarchie de la cuisine). En définitive, le TDPO a déterminé que l’employeur « avait rendu le milieu de travail insupportable pour chacun des requérants » et que le gérant avait « précipité une confrontation » ayant mené au congédiement du chef cuisinier, et peu après des autres membres du personnel de la cuisine, et que cela constituait un congédiement déguisé et des représailles[218].
La menace de représailles contribue parfois à la décision d’une personne de ne pas se plaindre ou revendiquer ses droits. Par exemple, durant les consultations[219], la CODP a appris que certains employés, surtout ceux qui se sentent insécures ou vulnérables sur le plan économique, ne font pas part de leur appartenance ou besoins en matière de croyance. Ils ne se plaignent pas du manque d’accommodement de leur croyance et ne demandent pas de mesures d’adaptation connexes par crainte d’être marginalisés ou stigmatisés pas des collègues de travail ou l’employeur et (ou) d’être congédiés ou rétrogradés.
Pour lutter contre la discrimination systémique, les organisations doivent créer un climat inclusif et accueillant propice à la remise en question et à l’élimination des stéréotypes et des pratiques et attitudes négatives[220].
[126] Williams v. Children’s Aid Society of Toronto, 2011 HRTO 265 (CanLII).
[127] Voir Johnson v. Halifax Regional Police Service (2003), 48 C.H.R.R. D/307 (N.S. Bd.Inq.) [Johnson], au par. 57, pour obtenir un exemple d’écart par rapport aux pratiques habituelles utilisé à l’appui d’un jugement de discrimination raciale. Voir aussi Pieters v. Peel Law Association, 2010 HRTO 2411 (CanLII).), confirmé dans Pieters, supra, note 34.
[128] Des musulmans (y compris des personnes perçues à tort comme des musulmans) et des personnes sikhes figuraient couramment parmi les membres de communautés de croyance signalant des incidents de harcèlement manifeste fondé sur la croyance (et tout particulièrement les femmes musulmanes portant un voile).
[129] Voir Haykin, supra, note 92, qui confirme que le Code interdit le harcèlement en matière de services.
[130] Paragraphe 10(1) du Code. Dans Murchie v. JB’s Mongolian Grill, 2006 HRTO 33 (CanLII), au par. 161, le TDPO a jugé qu’un incident grave isolé pouvait constituer du harcèlement. Cependant, on considère plus souvent qu’autrement les incidents isolés comme une forme de discrimination (voir la section 7.3 sur les milieux empoisonnés). Voir par exemple Romano v. 1577118 Ontario Inc., 2008 HRTO 9 (CanLII) et Haykin, supra, note 92.
[131] Voir Reed v. Cattolica Investments Ltd., (1996), 30 C.H.R.R. D/331. Voir aussi Gregory v. Parkbridge Lifestyle Communities Inc. 2011 HRTO 1535 (CanLII), au par. 87, [Gregory] citant Ghosh v. Domglas Inc. (No. 2) (1992), 17 C.H.R.R. D/216 (Ont. Bd. Inq.), aux par. 43 à 48, et Dhanjal v. Air Canada, (1996), 28 C.H.R.R. D/367, au par. 50 (C.H.R.T.), [Dhanjal], confirmé dans Dhanjal c. Canada (Commission des droits de la personne), 1997 CanLII 5751 (C. féd.).
[132] Voir, par exemple, S.S. v. Taylor, 2012 HRTO 1839 (CanLII), au par. 71.
[133] Voir, par exemple, Harriott v. National Money Mart Co., 2010 HRTO 353 (CanLII), au par. 104.
[134] Dastghib v. Richmond Auto Body Ltd. (No. 2) (2007), 60 C.H.R.R. D/167 (B.C.H.R.T.). Le tribunal de la C.-B. a déterminé que le requérant avait fait l’objet de discrimination fondée sur la race, la couleur et la religion, et a souligné les conséquences particulières des insultes survenues après les événements du 11 septembre : « À mon avis, les références à Bin Laden et à Hussein, dans le contexte du 11 septembre, et la manière dont ces deux personnes étaient représentées dans les médias, nous mèneraient à conclure qu’une personne était comparée à l’auteur de massacres, à un dictateur ou à un terroriste. Surtout aux lendemains du 11 septembre, de telles remarques proférées contre une personne musulmane ou venant du Moyen-Orient sont extrêmement blessantes, elles constituent une insulte raciste et sont donc discriminatoires » (par. 212).
[135] Perez-Moreno v. Kulczycki, 2013 HRTO 1074 (CanLII).
[136] L.R.O. 1990, chap. O.1. art. 32.0.1-32.0.7.
[137] Voir R. v. Feltmate, 2012 NSSC 319 (CanLII) pour un exemple d’affaire pénale en lien avec la religion/croyance. Voir aussi le Rapport de recherche et de consultation sur les droits de la personne et la croyance pour une analyse plus poussée des tendances en matière de crimes haineux fondés sur la croyance.
[138] Dans Dhanjal c. Air Canada, supra, note 131, le Tribunal canadien des droits de la personne a noté que plus la conduite est grave, moins il est nécessaire qu’elle soit répétée. À l’inverse, le tribunal a indiqué que moins la conduite est grave, plus il est nécessaire de démontrer sa persistance. Voir aussi General Motors of Canada Limited v. Johnson, 2013 ONCA 502 (CanLII).
[139] Islam v. Big Inc. 2013 HRTO 2009 (CanLII), au par. 275, [Big Inc.], confirmé dans Big Inc. v Islam, 2015 ONSC 2921 (CanLII), citant Xu v. Quality Meat Packers Ltd., 2013 HRTO 533 (CanLII), au par. 108. Voir aussi Smith v. Menzies Chrysler, 2009 HRTO 1936 (CanLII); Dhillon v. F.W. Woolworth Co. (1982), 3 C.H.R.R. D/743, au par. 6691 (Ont. Bd. Inq.); Naraine v. Ford Motor Co. of Canada (No. 4) (1996), 27 C.H.R.R. D/230, au par. 50 (Ont. Bd. Inq.), confirmé dans Ontario (Human Rights Commission) v. Naraine, 2001 CanLII 21234 (Ont. C.A.), citant Dhillon v F.W. Woolworth Co. (1982), 3 C.H.R.R. D/743, au par. 6691.
[140] Voir Dhanjal, supra, note 131 et 138; Johnson, supra, note 127; Moffatt v. Kinark Child and Family Services (1998) 35 C.H.R.R. D/205 (Ont. Bd. Inq.); Kharoud v. Valle-Reyes (2000), C.H.R.R. Doc. 00-144 (B.C.H.R.T.); Dhanjal, supra, note 131.
[141] Voir aussi Lee v. T.J. Applebee’s Food Conglomeration (1987), 9 C.H.R.R. D/4781 (Ont. Bd. Inq.).
[142] Il pourrait également s’agir de discrimination fondée sur le chevauchement de plusieurs motifs du Code associés à la race.
[143] Voir p. ex. Vanderputten v Seydaco Packaging Corp., 2012 HRTO 1977 (CanLII) [Vanderputten].
[144] Voir Smith v. Ontario (Human Rights Commission), (2005), 52 C.H.R.R. D/89 (Ont. Div.Ct.) et Naraine v. Ford Motor Company [1996], 27 C.H.R.R. D/23014 (Ont. Bd. Inq.); confirmé dans 34 C.H.R.R. D/405 (Ont. Div. Ct.); infirmé dans (2001), 209 D.L.R. (4th) 465 (Ont. C.A.); autorisation d’appel refusée [2002] S.C.C.A. No. 69 (QL).
[145] Ross c. Conseil scolaire du district nº 15 du Nouveau-Brunswick, [1996] 1 R.C.S. 825. La Cour suprême du Canada a examiné l’allégation de Malcolm Ross selon laquelle une décision d’une commission d’enquête en matière de droits de la personne qui l’empêchait de continuer à enseigner en raison de ses propos antisémitiques avait contrevenu à ses droits religieux. En plus de conclure que les commentaires tenus par M. Ross à l’extérieur du travail avait, dans les faits, empoisonné le milieu scolaire, la Cour suprême a aussi conclu que le conseil scolaire avait manqué à son obligation de maintenir un environnement positif et avait fait de la discrimination en n’adoptant pas d’approche proactive pour résoudre la controverse entourant M. Ross.
[146] Vanderputten, supra, note 143; McKinnon v. Ontario (Ministry of Correctional Services), [1998] O.H.R.B.I.D. No. 10 [McKinnon].
[147] Plus précisément, en déguisant sa voix et en adoptant un accent censé être celui d’une personne du Moyen-Orient, le détective a déclaré que l’homme avait suivi des leçons de pilotage à l’aéroport de Buttonville. Il a également suggéré que l’on fouille son casier pour y trouver un manuel de pilotage en arabe et a affirmé qu’il était un « infâme militant islamique ». Yousufi v. Toronto Police Services Board, 2009 HRTO 351 (CanLII) [Yousufi].
[148] Idem.
[149] Ghosh v. Domglass Inc. (1992), 17 C.H.R.R. D/216 (at D/227), au par. 76, tel que cité dans McKinnon v. Ontario (Ministry of Correctional Services), supra, note146. Pour en savoir davantage sur la responsabilité des sociétés relativement aux actes commis par les « âmes dirigeantes » de l’organisation, voir la section 12.
[150] Dufour, supra, note 7.
[151] Ce principe a été établi, dans le contexte de la Charte, dans l'affaire Big M, supra, note 5.
[152] Comme l’a affirmé la Cour suprême du Canada dans Big M, supra, note 5, au par. 123 : « Quels que soient les autres sens que peut avoir la liberté de conscience et de religion, elle doit à tout le moins signifier ceci : le gouvernement [et par extension les autres organisations publiques assujetties à la Charte] ne peut, dans un but sectaire, contraindre des personnes à professer une foi religieuse ou à pratiquer une religion en particulier ».
[153] S.L. c. Commission scolaire des Chênes, 2012 CSC 7, [2012] 1 R.C.S. 235 [S.L.]; Saguenay, supra, note 41; Loyola, supra, note 8. Pour en savoir davantage sur le devoir de neutralité, voir la section 9.11.6 sur la laïcité et le devoir de neutralité.
[154]Voir Dufour, supra, note 7 et Streeter v. HR Technologies, 2009 HRTO 841 (CanLII) [Streeter]. Un employeur peut légitimement exiger qu’un candidat possède certaines qualités religieuses s’il s’agit d’un groupement religieux et qu’il satisfait aux exigences d’admissibilité à une défense prévue dans le Code; voir les sections 8.2 et 8.3.
[155] Streeter, idem. Selon le TDPO, les activités et discussions religieuses allaient au-delà de ce qu’on pourrait qualifier de « normal » dans un bureau, et constituaient une tentative de persuasion de M. Streeter afin qu’il épouse une question qui n’avait rien à voir avec les affaires de l’entreprise ou son travail d’employé.
[156] Dufour, supra, note 7.
[157] Dans les affaires Dufour, idem, et Streeter, supra, note 154, le tribunal a clairement souligné que le seul fait de discuter de religion ne contrevient pas au Code.
[158] Lapcevic v. Pablo Neruda Non-Profit Housing Corporation, 2010 HRTO 927 (CanLII). Le TDPO a conclu que l’information n’était pas suffisante pour établir que la superviseure aurait dû savoir que cette conduite était importune.
[159] L’une des principales décisions de la Cour suprême du Canada portant sur les droits religieux, Big M., supra, note 5, portait sur une contestation, aux termes de la Charte, d’une loi fédérale, la Loi sur le dimanche, selon laquelle il était illégal pour les magasins de rester ouverts le dimanche, à quelques exceptions près. La Cour suprême a conclu que l’objet de la loi était d’obliger l’observance du jour de repos chrétien et que cet objet portait atteinte à la liberté de religion. La Cour a également souligné qu’en imposant des prescriptions de la foi chrétienne, cette loi créait un climat hostile aux Canadiennes et Canadiens non chrétiens et paraissait en outre discriminatoire à leur égard. La Cour a également conclu que le pouvoir d'imposer l'observance universelle du jour de repos préféré par une religion ne concordait guère avec le maintien et la valorisation du patrimoine multiculturel des Canadiennes et Canadiens.
[160]Par exemple, dans Freitag v. Penetanguishene (Town) (1999), 47 O.R. (3d) 301 (C.A.) [Freitag ONCA], la Cour d’appel de l’Ontario a déterminé que la récitation de la prière du Seigneur au début des assemblées municipales avait pour objectif d’imposer « un ton de morale chrétienne aux délibérations du conseil », et contrevenait aux droits des non-chrétiens. Voir aussi Saguenay, supra, note 41.
[161] Dans Allen v. Renfrew (Corp. of the County) 2004 CanLII 13978 (ON S.C.) [Allen v. Renfrew], un « humaniste non confessionnel » a contesté l’usage, par le conseil du comté de Renfrew, d’une prière non confessionnelle durant ses assemblées mensuelles. La Cour supérieure de l’Ontario a conclu qu’une prière qui est largement œcuménique et qui n’est pas liée à une confession particulière, même si elle fait référence à Dieu, ne constituait pas une atteinte aux droits de religion malgré le fait qu’elle puisse être incompatible avec les croyances de certains « groupes minoritaires ». La Cour a également rejeté l’argument selon lequel le seul fait de mentionner Dieu dans une prière dans le cadre d’une réunion gouvernementale pourrait être perçu comme une tentative coercitive d’imposer une observance religieuse. Cependant, cette décision précède une décision de la HRTO qui établissait qu’une prière d’ouverture non confessionnelle et optionnelle similaire contrevenait au Code; Freitag HRTO, supra, note 107, et Freitag ONCA, supra, note 160; Voir aussi Saguenay, supra, note 41.
[162] Saguenay, idem (voir surtout les par. 135-140). La Cour a établi une distinction d’avec les arrêts Freitag ONCA, supra, note 160, et Allen v. Renfrew, supra, note 161 (aux par. 138-140).
[163] Saguenay, supra, note 41, au par. 120. La Cour a aussi déclaré que cela avait pour effet de permettre aux personnes ayant des convictions théistes de « participer à la démocratie municipale dans un environnement favorable à l’expression de leurs croyances, alors que si les incroyants peuvent eux aussi participer, c’est au prix de l’isolement, de l’exclusion et de la stigmatisation. Cela compromet le droit [du requérant] à l’exercice de sa liberté de conscience et de religion ».
[164] Saguenay, idem, au par. 137.
[165] Voir, par exemple, Saguenay, idem, au par. 101, dans le cadre duquel la Cour suprême a aussi déterminé que le fait d’allouer au requérant (un athée) et aux autres participants aux assemblées du conseil qui le souhaitaient le temps requis pour quitter la salle durant la récitation de la prière d’ouverture ne faisait qu’« accentuer » et que « faire ressortir » l’effet d’exclusion de la pratique. (Voir aussi les par. 122-125). Voir aussi Freitag ONCA, supra, note 160, aux par. 39-40.
[166] Dans Zylberberg v. Sudbury Board of Education, la Cour d’appel de l’Ontario a expliqué qu’il doit être tenu compte du « point de vue des élèves dans le contexte délicat de l’école publique » et que « la pression exercée par les pairs et les normes de la classe auxquelles les enfants sont extrêmement sensibles […] sont réelles et omniprésentes, et ont pour effet de contraindre les membres de minorités religieuses à se conformer aux pratiques religieuses de la majorité ». 1988 CanLII 189 (Ont. CA), aux par. 20-21.
[167] Pour en savoir davantage sur la religion dans la sphère publique, voir la section 9.11.6.
[168] Dans S.L., supra, note 153, au par. 40 :
[S]uggérer que le fait même d’exposer des enfants à différents faits religieux porte atteinte à la liberté de religion de ceux-ci ou de leurs parents revient à rejeter la réalité multiculturelle de la société canadienne et méconnaître les obligations de l’État québécois en matière d’éducation publique. Bien qu’une telle exposition puisse être source de frictions, elle ne constitue pas en soi une atteinte à l’al. 2a) de la Charte canadienne et à l’art. 3 de la Charte québécoise.
En tirant cette conclusion, la Cour a cité, au par. 39, ses propres commentaires antérieurs sur les « dissonances cognitives » dans l’arrêt Chamberlain c. Surrey School District No. 36, [2002] 4 R.C.S. 710 [Chamberlain], aux par. 65-66. Pour connaître les autres facteurs à prendre en compte dans le contexte de l’éducation, voir la section 10.5.
[169] Par exemple, dans R.C., supra, note 67, aux par. 46-48, le TDPO a tenu compte des relations de pouvoir, inégalités et désavantages sociaux et historiques qui existent entre les communautés de croyance, ainsi que les circonstances particulières d’un milieu scolaire primaire.
[170] Par exemple, dans R.C., idem, au par. 60, le TDPO a indiqué que « les activités en lien avec la croyance menées à l’extérieur de la salle de classe ne doivent pas automatiquement être éliminées, tant que la participation à ces activités est facultative, que les élèves ne subissent pas de pression en vue d’y participer, et que l’école conserve sa neutralité, montre clairement qu’elle appuie ce genre d’activités pour toutes les croyances et qu’elle ne fait pas la promotion d’une croyance particulière ».
[171]Dans Canadian Civil Liberties Assn. v. Ontario (Minister of Education), 1990 CanLII 6881 (Ont. CA) [Elgin County], la Cour d’appel de l’Ontario a examiné un règlement provincial qui imposait des périodes d’éducation religieuses dans le cadre du programme d’études des écoles publiques de l’Ontario. Confirmant la décision antérieure dans l’arrêt Zylberberg (voir supra, note 166), le tribunal a jugé que ce règlement avait pour objet et pour effet de permettre l’endoctrinement religieux, ce que la Charte canadienne n’autorise pas. Cependant, la Cour d’appel a fait remarquer qu’un programme qui prodiguerait un enseignement religieux et moral sans toutefois tendre à endoctriner dans une foi particulière n’enfreindrait pas la Charte canadienne. La Cour suprême du Canada a cité avec approbation Elgin County dans S.L., supra, note 153, au par. 20.
[172] Elgin County, idem, aux par. 40-41, citant Religion in the Public Schools, American Association of School Administrators, 1986, au par. 33 [nous soulignons], traduit de Education About Religion in Ontario Public Elementary Schools du ministère de l’Éducation de l’Ontario, qui citait les directives en soulignant (Extrait le 24 septembre 2010 de www.edu.gov.on.ca/eng/document/curricul/religion/religioe.html)].
[173] Voir Loyola, supra, note 8.
[174] Loyola, supra, note 8, au par. 48 [souligné dans l’original], citant Benjamin L. Berger. « Religious Diversity, Education, and the ‘Crisis’ in State Neutrality” » (2014), R.C.D.S., vol. 29, p. 103, à 115.
[175] Par exemple, par le passé, un conseil scolaire permettait uniquement la distribution d’ouvrages chrétiens aux élèves. Il a révisé sa politique pour permettre la distribution de matériel d’autres religions mais, dans la pratique, seuls des ouvrages chrétiens ont continué d’être distribués. Aucun effort n’a été déployé pour publiciser la nouvelle politique ou veiller à ce que les membres d’autres croyances sachent qu’ils pouvaient fournir du matériel. Quand des adeptes d’une foi non chrétienne demandaient d’obtenir la distribution d’autre matériel, aucun suivi n’était fait. Il a été déterminé qu’il y avait eu discrimination, malgré l’existence d’une nouvelle politique. R.C, supra, note 67.
[176] La jurisprudence abonde de décisions établissant le phénomène du profilage racial. Voir, par exemple, Nassiah v. Peel Regional Police Services Board, 2007 HRTO 14 (CanLII) [Nassiah]; Shaw v. Phipps, 2012 ONCA 155 (CanLII); McKay v. Toronto Police Services Board, 2011 HRTO 499 (CanLII) [McKay]; Pieters, supra, note 34. Voir aussi le document de la CODP intitulé, Politique et directives sur le racisme et la discrimination raciale, offert en ligne à l’adresse www.ohrc.on.ca/fr/politique-et-directives-sur-le-racisme-et-la-discrimination-raciale, ainsi que le rapport de 2003 de la CODP Un prix trop élevé : Les coûts humains du profilage racial, offert en ligne à l’adresse www.ohrc.on.ca/fr/un-prix-trop-%C3%A9lev%C3%A9-les-co%C3%BBts-humains-du-profilage-racial.
[177] Société Radio-Canada. September 11th in Hindsight : Recovery and Resolve, 2002. En ligne à l’adresse : cbc.ca/september11/content_files/text/poll_nw.html#section3. Extrait le 1er mai 2003.
[178] Conseil canadien des relations islamo-américaines. Survey : More than half of Canadian Muslims Suffered Post-9/11 Bias, 22 septembre 2002. Extrait de www.caircan.ca/itn_more.php?id=A90_0_2_0_M. Voir aussi Reem Bahdi, Olanyi Parsons et Tom Sandborn. « Racial Profiling: B.C. Civil Liberties Association Position Paper », Marcuse, R. (éd.) BCCLA : Racial Profiling Vancouver, BCCLA, vol. 31 (2010), p. 35; CTV.ca News Staff. 1 in 6 Canadians victims of Racial Profiling : Poll, 21 mars 2005. Extrait le 29 décembre 2008 de www.ctv.ca/servlet/an/story/CTVNews/20050321/racism_ipsos_050321; Powell, Terry. « One in Six Canadians Victims of Racism », Canadian Press, 21 mars 2005. Extrait le 29 décembre 2008 de www.caircan.ca/mw_more.php?id=P1488_0_7_0_C.; Hanniman, W. « Canadian Muslims, Islamophobia and National Security », Int’l J L, Crime & Jus, vol. 36 (2008), p. 271, aux p. 273-275.
[179] Voir Esposito, J. et Kalim, I., supra, note 56; Poynting, S., et Perry, B., supra, note 59; Razack, S., supra, note 58; Gottschalk, P et Greenberg, G, supra, note 59.
[180] Yousufi, supra, note 147; Kinexus Bioinformatics Corp. v. Asad, 2008 BCHRT 293 (CanLII) [Kinexus], confirmé dans Kinexus Bioinformatics Corporation v. Asad, 2010 BCSC 33 (CanLII). De plus, la CODP a reçu de nombreux rapports sur le profilage racial et le profilage fondé sur la croyance en réponse à son sondage sur la croyance de 2013.
[181] Kinexus, idem.
[182] Un kirpan est un objet religieux (représentation stylisée d’une épée ressemblant à un poignard) que portent les hommes sikhs.
[183] Multani c. Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys, [2006] 1 R.C.S. 256, au par. 71 [Multani].
[184] Pieters, supra, note 34; R. v. Brown (2003), 64 O.R. (3d) 161 (Ont. C.A.). Voir aussi R. v. Richards, 1999 CanLII 1602 (Ont. C.A.); Peart v. Peel Regional Police Services, 2006 CanLII 37566 (Ont. C.A.); R. v. Khan, 2004 CanLII 66305 (Ont. Sup. Ct.) [Khan].
[185] Par exemple, dans Khan, idem, aux par. 65 et 68, l’explication des agents de police qui avaient interpellé M. Khan et fouillé sa voiture ne concordait pas avec la preuve documentaire ni avec le sens commun. La Cour a estimé raisonnable de conclure qu’il s’agissait de profilage racial, M. Khan étant un jeune homme noir, au volant d’une voiture de luxe.
[186] Dans Johnson, supra, note 127, au par. 57, la commission d’enquête de la Nouvelle-Écosse a estimé que, pour déterminer l’existence prima facie d’un traitement différentiel, une commission d’enquête doit essayer d’établir de quelle façon les événements se déroulent normalement dans une situation analogue. Les écarts de la pratique normale et les marques d’intransigeance ou d’impolitesse permettent de conclure à un traitement différentiel.
[187] Johnson, idem. La commission d’enquête a jugé que la manière non professionnelle dont la personne avait été traitée lors d’un incident de la circulation était due à sa race et qu’il serait difficile d’imaginer qu’on traite un automobiliste blanc de la même façon. Voir aussi Radek v. Henderson Development (Canada) Ltd. (No. 3) (2005), 52 C.H.R.R. D/430 (B.C.H.R.T.), au par. 471 [Radek]; Nassiah, supra, note 176, aux par. 100-106.
[188] Voir Radek, idem.
[189] Voir, par exemple, McKay, supra, note 176.
[190] R. v. Parks, 1993 CanLII 3383 (Ont. C.A.). Voir aussi Adams v. Knoll North America, 2009 HRTO 1381 (CanLII), confirmé dans Knoll North America Corp. v. Adams, 2010 ONSC 3005 (CanLII).
[191] L’analyse proposée dans le contexte du profilage racial est la suivante : « [P]our déterminer s’il y a eu traitement différentiel, la commission doit nécessairement faire une hypothèse sur la façon dont les choses se seraient passées si le chauffeur et son passager avaient été blancs plutôt que noirs […] Je trouve difficile d’imaginer que ces événements se seraient déroulés de la même façon si un automobiliste blanc du Texas avait été en cause ici ». Voir Johnson, supra, note 127, aux par. 51 et 57. Voir aussi Abbott v. Toronto Police Services Board, 2009 HRTO 1909 (CanLII).
[192] Par exemple, dans Maynard v. Toronto Police Services Board, 2012 HRTO 1220 (CanLII), aux par. 175 et 176 [Maynard], la CODP a conclu qu’un agent de police avait le TDPO a estimé que l’agent de police avait « tant élargi le champ de ses recherches » que la race était le facteur prédominant qui l’avait poussé à s’intéresser à un jeune Noir.
[193] Maynard, idem, au par. 154; Commission ontarienne des droits de la personne. Politique et directives sur le racisme et la discrimination raciale, 2005, p. 23.
[194] Pour en savoir davantage sur le concept de l’intersectionnalité et de son application dans la jurisprudence, voir le document de travail de la CODP de 2001 intitulé Approche intersectionnelle de la discrimination pour traiter les plaintes relatives aux droits de la personne fondées sur des motifs multiples (www.ohrc.on.ca/fr/approche-intersectionnelle-de-la-discrimination-pour-…).
[195] L’examen mené par la CODP des plaintes déposées auprès du Tribunal des droits de la personne de l’Ontario (« requêtes ») et citant la croyance comme motif de discrimination a révélé qu’une majorité des requêtes relatives à la croyance citaient aussi un motif lié à la race (pour une analyse plus poussée des requêtes realtives à la croyance déposées auprès du TDPO, voir le Rapport de recherche et de consultation sur les droits de la personne et la croyance de la CODP). Voir aussi la section 3.3 pour une exploration plus poussée des tendances actuelles.
[196] Big Inc., supra, note 139.
[197] Voir, par exemple, R. c. N.S., [2012] 3 R.C.S. 726 [N.S.].
[198] Pour de plus amples renseignements sur les dynamiques intersectionnelles faisant intervenir le sexe et la croyance, voir, par exemple, Caroline Sweetman's (éd.). Gender, Religion and Spirituality, 1998, Royaume-Uni, Oxfam International.
[199] Voir la section 10.6.1 pour obtenir plus de renseignements sur l’obligation d’accommodement de la pratique du jeûne rattaché à la croyance, par exemple. L’obligation d’accommodement peut être limité ou inexistant s’il créerait un préjudice injustifié, ou s’il peut être démontré que la règle, la norme ou la tâche en cause constitue une exigence de bonne foi. Voir la section 9.5.2 pour en savoir davantage sur les exigences de bonne foi.
[200] Par exemple, dans Krall v. Vedic Hindu Cultural Society (2005), 56 C.H.R.R. D/306 (B.C.H.R.T.), une femme a déposé une plainte contre un temple hindou auprès du tribunal des droits de la personne de la C.-B., après qu’on lui a demandé de quitter la salle à une occasion et de prier à l’arrière du temple parce que lorsqu’elle prie, elle entre en transe, crie, gesticule et saute. Selon le tribunal, l’arrêt Amselem confirmait que l’interprétation personnelle qu’une personne a de sa foi est protégée et que les limites ayant été imposées à la requérante constituaient en effet de la discrimination fondée sur la religion. Toutefois, le tribunal a également conclu que son comportement perturbait les autres fidèles et effrayait les enfants. Par conséquent, les autorités du temple avaient proposé une mesure d’adaptation raisonnable en lui demandant de prier à l’arrière du temple. Voir l’Examen de la jurisprudence relative à la croyance pour obtenir des exemples récents de décisions judiciaires. Pour en connaître davantage sur la tendance vaste et croissante que constitue la diversité intrareligieuse, et sur le rôle de la laïcisation et l’individualisation, voir le Rapport de recherche et de consultation sur les droits de la personne et la croyance de la CODP. Pour en savoir davantage sur le déclin des formes institutionnelles centralisées d’autorité religieuse dans l’ère moderne et de ses répercussions sur la diversité religieuse contemporaine, voir aussi Woodhead, L. et coll. Religions in the Modern World (revised 2nd edition): Traditions and Transformations, New York, Routledge, 2009.
[201] Hadzic v. Pizza Hut, (1999), 37 C.H.R.R. D/252 (B.C.H.R.T.).
[202] McGuire v. Better Image Property Maintenance Inc. (2006), CHRR Doc. 06-744, 2006 BCHRT 544.
[203] Rill v. Kashruth Council of Canada, 2008 HRTO 162 (CanLII). Le requérant, qui avait précédemment obtenu la certification, avait tenté de faire une nouvelle demande pour devenir traiteur casher en février 2008 parce qu’il était d’avis que la politique du Kashruth Council permettait à un traiteur non orthodoxe d’obtenir la certification tant qu’un mashgiach orthodoxe était présent en tout temps pour superviser la préparation des aliments. Cependant, l’intimé ne lui a pas permis de déposer une nouvelle demande.
[204] Voir la section 9.2.
[205] Voir l’art. 12 du Code des droits de la personne de l’Ontario pour obtenir de plus amples renseignements sur la discrimination fondée sur l’association : www.ontario.ca/fr/lois/loi/90h19
[206] Idem.
[207] Voir p. ex. Knibbs, supra, note 101, et Petterson, supra, note 101.
[208] Le paragraphe 11(1) du Code indique qu’il peut y avoir discrimination dans le cas suivant :
[L]’existence d'une exigence, d'une qualité requise ou d'un critère qui ne constitue pas une discrimination fondée sur un motif illicite, mais qui entraîne l'exclusion ou la préférence d'un groupe de personne identifié par un motif illicite de discrimination et dont la personne est membre […]
[209] Big Inc., supra, note 139, au par. 112.
[210] Cela est établi à l’al. 11(1)b) du Code.
[211] Cela est établi à l’al. 11(1)b) du Code. Voir la section 8 (Défenses et exceptions) et 9.8 (Obligation d’accommodement) pour en savoir davantage sur les exceptions prévues par la loi.
[212] Dans Moore, supra, note 116, la Cour suprême du Canada a réaffirmé la définition de discrimination systémique qu’elle avait établie en 1987 dans son arrêt charnière CN. c. Canada (Commission canadienne des droits de la personne), [1987] 1 R.C.S. 1114, c’est-à-dire « des pratiques ou des attitudes qui, de par leur conception ou par voie de conséquence, gênent l’accès des particuliers ou des groupes à des possibilités d’emplois, en raison de caractéristiques qui leur sont prêtées à tort » (aux par. 1138 et 1139). La CODP emploie « discrimination systémique » pour parler d’institutions individuelles ou de systèmes institutionnels auxquels s’applique le Code (p. ex. le système d’éducation).
[213] Pour en savoir davantage sur la création d’une culture organisationnelle axée sur les droits de la personne, voir : www.ohrc.on.ca/fr/droits-de-la-personne-et-services-policiers-cr%C3%A9e…
[214] Comme l’a indiqué la CODP dans Big Inc. : « Aux fins du Code, les représailles impliquent un acte délibéré. À la différence d’une allégation de discrimination, qui ne nécessite pas l’existence d’une intention pour faire la preuve d’une violation du Code, le requérant doit démontrer qu’un geste a été posé en guise de punition ou de représailles » : supra, note 139, au par. 186, citant Noble v. York University, 2010 HRTO 878 (CanLII) [Noble], Jones v. Amway of Canada Ltd., 2001 CanLII 26217 (HRTO), Ketola v. Value Propane Inc., 2002 CanLII 46510 (HRTO) et Moffatt v. Kinark Child & Family Services (1998), 35 CHRR D/205.
[215] Noble, idem, au par. 34.
[216] Noble, idem, au par. 33.
[217] Dans les lettres, les membres du personnel se plaignaient d’avoir été « forcés de goûter à du porc » et de manger d’autres aliments durant le mois sacré musulman du Ramadan, de n’avoir pas eu droit de prendre une journée de congé pour célébrer la fête religieuse musulman de l’Eid et d’avoir été menacés d’être licenciés et remplacés par du personnel blanc.
[218]Big M, supra, note 5.
[219]Voir par exemple le Résumé des conclusions du sondage sur les droits de la personne et la croyance de la CODP. Les commentaires de membres de groupes de travail issus de minorités religieuses, dont beaucoup parlaient au nom de récents immigrants en Ontario, révèlent la même situation.
[220] Voir la section 13 pour connaître des pratiques exemplaires.