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Les droits de la personne au travail 2008 - Troisième édition /

IV. Situations mettant en cause les droits de la personne à toutes les étapes de l’emploi

On doit demander le type de renseignements suivants seulement s’il s’agit d’une exigence justifiée par la nature de l’emploi. À cause de leur nature délicate, il faut demander de les obtenir seulement après avoir présenté une offre d’emploi (par écrit, de préférence) :

  • permis de conduire (peut indiquer des handicaps, l’âge, le sexe, et l’identité sexuelle);
  • certificat de naissance (peut indiquer l’âge, le sexe, et l’identité sexuelle);
  • permis de travail d’Immigration Canada (contient des renseignements sur la date d’arrivée au Canada);
  • attestations scolaires ou professionnelles (peuvent indiquer le lieu d’origine);
  • numéro d’assurance sociale (peut contenir des renseignements sur la date d’arrivée au Canada ou le statut de résident);
  • des renseignements sur l’âge ou la santé nécessaires à l’adhésion aux régimes de pension, d’invalidité, de retraite, d’assurance-vie et d’avantages sociaux [peuvent indiquer des handicaps, l’âge, le sexe (cas de grossesse) ou l’identité sexuelle];
  • vérification des dossiers de la police (peut contenir des renseignements sur la santé mentale);
  • résultats d’évaluations psychologiques, s’ils sont vraiment nécessaires pour évaluer la capacité de la personne de faire le travail;
  • nom d’un proche ou de la personne à prévenir en cas d’urgence (peut indiquer l’état familial, l’état matrimonial, l’orientation sexuelle);
  • nom du bénéficiaire de la police d’assurance (peut indiquer l’état familial, l’état matrimonial ou l’orientation sexuelle);
  • besoins en matière d’adaptation.

Il importe que ces renseignements demeurent confidentiels.

a) Mesures d’adaptation en fonction d’exigences physiques et d’autres tâches essentielles

Lorsqu’une offre d’emploi conditionnelle a été présentée, l’employeur peut demander à une personne d’examiner les tâches essentielles du poste et de l’informer de ses besoins en matière d’adaptation, le cas échéant. L’employé n’est pas tenu de révéler des besoins reliés à son handicap ou autres, ni des renseignements médicaux sans rapport avec les tâches essentielles du poste.

Il ne faut pas soumettre des personnes en particulier à un interrogatoire en s’appuyant uniquement sur leur apparence – plutôt, il faut demander les mêmes questions sur le besoin de mesures d’adaptation à tous les employés. Établir un lien entre les questions et la politique de l’employeur en matière d’adaptation et indiquer que les demandes de mesures d’adaptation peuvent faire référence à plus d’un motif prévu au Code. Expliquer clairement aux employés les raisons de la collecte de ces renseignements – par exemple, ils aident à satisfaire à tout besoin d’adaptation pour des motifs prévus au Code, dans la mesure où cela ne cause aucun préjudice injustifié.

Exemple : L’employeur demande à ses employés de compléter un formulaire après l’embauche. Une des questions sur le formulaire se lit comme suit : « Estimez-vous que vous êtes désavantagé dans votre emploi en raison d’un déficit physique, mental, psychiatrique, sensoriel ou d’apprentissage? » Il pourrait être légitime de demander des renseignements de cet ordre après l’embauche, mais la question est difficile à comprendre, les mots choisis ont une résonance négative et on voit mal à quoi sert cette question puisqu’elle ne fait pas mention de l’adaptation. Le résultat obtenu est que les employés qui présentent un de ces handicaps tendent à répondre « non » à cette question. Ils commencent dans leur emploi sans avoir obtenu les mesures d’adaptation appropriées.

Certains employés requièrent peut-être des mesures d’adaptation pour s’acquitter des tâches physiques essentielles de leur poste. L’employeur est en droit de s’attendre à ce que, avec de telles mesures, l’employé puisse s’acquitter des tâches essentielles si elles ont été fixées de bonne foi. Des employeurs s’appuient parfois sur des analyses de tâches pour juger de la capacité d’un employé d’accomplir les tâches physiques de son poste. Il faut cependant être prudent avec ce genre d’analyses parce qu’elles sont souvent réalisées en fonction de personnes qui ne souffrent pas de handicap. Elles devraient être conçues ou modifiées de manière à ne pas être exclusives et de manière à ce que les mesures d’adaptation y soient intégrées.

b) Examens médicaux

Dans le passé, les employeurs se sont souvent appuyés sur les renseignements médicaux exigés sur les formulaires de demande d’emploi ou obtenus grâce à des examens médicaux préalables à l’embauche pour écarter les personnes qui avaient un handicap. La Commission estime que de demander des renseignements de ce genre à l’étape initiale du processus d’embauche est en contravention du paragraphe 23 (2) du Code.

Tout examen médical visant à établir ou à décider si une personne est capable de satisfaire aux exigences essentielles d’un emploi ne doit avoir lieu que lorsqu’une offre d’emploi conditionnelle lui a été faite, de préférence par écrit. Cette condition permet aux personnes handicapées de voir leur candidature évaluée sur la seule base du mérite lors du processus de sélection, comme elles y ont droit.

Les renseignements tirés d’un examen médical risquent d’exposer les personnes ayant un handicap à une discrimination par suite d’un effet préjudiciable. Il est donc préférable de ne divulguer à un employeur que les résultats d’un examen médical concernant la capacité d’une personne de s’acquitter des tâches essentielles de l’emploi, et, s’il y a lieu, toute restriction susceptible de limiter cette capacité. Il appartient à la personne de communiquer assez de détails sur ses éventuels besoins d’adaptation pour aider l’employeur à y satisfaire.

L’employeur qui prend possession directement de renseignements portant sur l’état de santé d’une personne postulant un emploi risque de se trouver dans une situation délicate, car toute décision prise ultérieurement, peu importe que ce soit une décision sur l’embauche d’un autre candidat ou concernant des mesures disciplinaires ou le congédiement de l’employé, pourrait être perçue comme fondée sur ces renseignements.

C’est pourquoi la Commission estime que, pour protéger l’employeur au même titre que le candidat ou le titulaire d’un emploi, ce type de renseignements doit n’être connu que du médecin qui procède à l’examen et ne pas être versé au dossier constitué par le service du personnel concernant cette personne. Le médecin pourra toujours, sur demande, fournir les renseignements pertinents à l’employeur, par exemple concernant toute restriction relative à la capacité d’une personne d’effectuer les tâches essentielles d’un emploi, sans pour autant dévoiler la nature du handicap.

Certaines entreprises mettent en place un mécanisme de cloisonnement entre ces renseignements et les décisions d’emploi en confiant à certains membres du personnel, par exemple des infirmières, la responsabilité de la protection de la confidentialité des renseignements médicaux transmis par un médecin et de la mise en place de mesures d’adaptation. Les lois sur la protection des renseignements peuvent s’appliquer à la saisie, au stockage et à l’élimination des renseignements médicaux des employés. Pour plus de renseignements sur ces lois, consulter l’annexe B – « Lois applicables aux droits de la personne au travail ».

La liste de vérification suivante délimite le champ des obligations de l’employeur qui souhaite mettre en place une procédure d’examens médicaux :

  1. Les candidats à un emploi ont-ils été informés du fait que le processus d’embauche inclut un examen médical?
    L’employeur qui peut justifier l’emploi d’un examen médical et qui a l’intention de l’exiger doit en informer les candidats au moment de l’offre d’emploi. Il doit expliquer clairement et à quelle étape l’examen devrait avoir lieu.
     
  2. Existe-t-il une raison objective d’exiger l’examen médical?

    L’employeur doit s’assurer que l’examen médical est bien nécessaire et justifié. Pour décider dans quelles conditions il faut procéder à un examen, l’employeur doit prendre en considération les questions suivantes, le cas échéant :

    a) Existe-t-il une justification objective pour procéder à cet examen relativement au rendement professionnel? Autrement dit, existe-t-il un lien rationnel entre les examens ou les tests et le rendement?
    b) Existe-t-il une raison objective de penser que le degré, la nature et la portée d’un handicap ainsi que les risques associés à son existence compromettent la sécurité des autres membres du personnel ou du public?

  3. A-t-on pris des dispositions visant à assurer la manutention compétente des échantillons soumis à l’analyse?

    L’administration des tests doit être confiée à des professionnels compétents et les analyses doivent être effectuées dans des laboratoires reconnus. De plus, il incombe à l’employeur de s’assurer que les échantillons prélevés sont correctement étiquetés et protégés en tout temps.

  4. A-t-on passé en revue les résultats d’examen avec la personne?

    L’employeur doit établir des procédures qui permettent au médecin de passer en revue les résultats d’examen avec la personne.

  5. A-t-on pris des dispositions pour veiller à la confidentialité des résultats d’examen?

    Afin d’assurer la confidentialité des résultats, toutes les données liées à l’évaluation de l’état de santé doivent demeurer sous la garde exclusive du médecin qui procède à l’examen et ne doivent jamais être versées au dossier de la personne qui est conservé par le service du personnel. Ces renseignements doivent être protégés conformément aux pratiques et en vertu des lois sur la confidentialité des renseignements.

    Pour plus de renseignements, consulter l’analyse des exigences professionnelles légitimes à la section IV-2 – « Établissement des exigences professionnelles ».

c) Tests psychométriques et psychologiques

L’employeur utilise parfois des tests pour établir le profil psychologique ou sonder la personnalité des candidats à un emploi. Or, le recours à de tels tests à l’étape initiale du processus de sélection des candidats soulève des questions quant à une atteinte aux droits de la personne. Il ne faudrait jamais procéder à ces tests avant d’avoir présenté une offre d’emploi conditionnelle et, de toute manière, il faut procéder avec soin.

Le paragraphe 23 (2) du Code interdit d’utiliser un formulaire de demande d’emploi qui établit, de manière directe ou non, des catégories fondées sur un motif illicite de discrimination ou de soumettre un candidat à un interrogatoire oral ou écrit ayant le même effet. Cette interdiction s’applique aussi aux tests psychologiques et psychométriques. La validité des tests axés sur le comportement pour prévoir le rendement éventuel au travail peut aussi donner lieu à une plainte pour atteinte aux droits de la personne.

Les profils de comportement soulèvent deux questions importantes. La première est celle de savoir si l’établissement d’un tel profil constitue de la discrimination directe fondée sur un motif prévu au Code. Il pourrait y avoir discrimination directe si le test administré identifie des personnes selon un motif de discrimination illicite ou s’il établit des catégories fondées sur un de ces motifs. Un test qui chercherait par exemple à déterminer l’appartenance religieuse d’un candidat serait directement discriminatoire, donc inadmissible.

La seconde question se rapporte aux profils de comportement établis de façon raisonnable et de bonne foi qui risquent néanmoins d’être contraires au Code s’ils aboutissent à l’exclusion d’un groupe de personnes identifiées par un motif de discrimination illicite. Ce serait le cas, par exemple, si la candidature des membres de certains groupes ethniques était involontairement, mais systématiquement écartée parce que la conception d’un test comporterait une erreur systématique qui avantagerait d’autres cultures.

Tous les tests doivent constituer une façon raisonnable et légitime d’évaluer la capacité montrée par un candidat de faire le travail. Il ne faut pas utiliser de test ne répondant pas à ces critères. Les tests doivent être conçus sur mesure pour les tâches réellement effectuées. On doit veiller à ce qu’ils tiennent compte des diverses façons de les accomplir et on doit prévoir des mesures d’adaptation appropriées. L’employeur est tenu de satisfaire aux besoins des personnes désignées par le Code, dans la mesure où cela ne cause aucun préjudice injustifié, à la lumière des coûts, de sources extérieures de financement et des éventuels risques pour la santé et la sécurité.

L’employeur doit éviter les tests visant à évaluer les centres d’intérêt, les attitudes et les valeurs morales des candidats. Et lorsque leur utilisation est justifiée pour mesurer la capacité d’une personne d’accomplir un certain travail, il faut redoubler de vigilance en les employant et voir à ce qu’ils n’avantagent pas les personnes de certaines cultures, par exemple. Beaucoup de ces tests sont dépassés et peut-être même ont-ils été construits sur des stéréotypes ou des préjugés couverts par le Code. Il est conseillé, avant d’administrer un test à des employés potentiels ou en place, de se renseigner sur son origine et de voir s’il est fiable, à jour, valide et conforme au Code ainsi qu’à toute directive ou pratique établie par une association professionnelle reconnue, comme la Société canadienne de psychologie. Cette façon de procéder est utile en cas de présentation d’une plainte pour atteinte aux droits de la personne. Peu importe que le test soit équitable, l’employeur doit s’assurer de la mise en place de mesures visant à réduire le plus possible les biais involontaires de la part les évaluateurs. On peut, par exemple, faire appel à plus d’une personne pour les évaluations.

d) Tests de dépistage de la consommation de drogues et d’alcool avant l’embauche

Il est légitime pour l’employeur de vouloir assurer la sécurité des lieux de travail. À cette fin, il a parfois recours à des tests de dépistage de la consommation de drogues et d’alcool. Depuis quelques années, le nombre de désaccords, reliés aux droits de la personne, entourant ces tests se multiplient au Canada, particulièrement dans les entreprises affiliées à d’autres entreprises faisant des affaires à l’étranger, notamment aux États Unis. Ces tests sont controversés et souvent donnent lieu à des plaintes pour discrimination.

La dépendance à l’égard des drogues et de l’alcool en tant que handicap
La dépendance à l’égard de l’alcool et des drogues, réelle ou présumée, est une forme de handicap au sens du Code. Or, les personnes ayant ou ayant eu un handicap sont protégées contre toute forme de discrimination dans le domaine de l’emploi ou à l’embauche.

Exemple : Un employeur refuse une promotion à un employé parce qu’il a l’impression que ce dernier souffre d’une dépendance à l’égard de l’alcool. En raison de cette perception et des actes de l’employeur qui en résultent, il est possible que le droit de l’employé à un traitement égal en vertu du Code ait été violé.

Exemple : La personne qui, dans le passé, a présenté une dépendance à la drogue ou à l’alcool, mais qui ne souffre plus de ce handicap, demeure protégée par les dispositions du Code.

i) Principes fondamentaux :

L’administration de tests de dépistage de la consommation de drogues et d’alcool est à première vue discriminatoire au vu de la législation canadienne sur les droits de la personne. L’employeur peut néanmoins justifier l’application de règles discriminatoires s’il peut satisfaire à un critère à trois volets, exposé à la section IV-2 – « Établissement des exigences professionnelles » – IV-2a) « Voir à ce que les exigences professionnelles soient raisonnables et légitimes ».

Lors de l’application du critère à trois volets aux tests de dépistage de la consommation de drogues et d’alcool, l’employeur doit, s’il y a lieu, prendre ce qui suit en considération :

  1. Existe-t-il une raison objective de penser que le rendement professionnel pourrait être amoindri par une dépendance aux drogues ou à l’alcool? Autrement dit, y a-t-il un lien rationnel entre les tests et le rendement professionnel?
  2. Existe-t-il une raison objective de penser, à l’égard d’un employé en particulier, que des absences imprévues et répétées, des retards habituels ou un comportement non approprié ou excentrique au travail sont liés à l’alcoolisme ou à une dépendance ou à une accoutumance aux drogues? Ces éléments pourraient constituer un fondement à l’administration de tests « pour motif valable » ou « par suite d’un incident », pourvu que les conclusions qui en sont tirées soient légitimes.
  3. Existe-t-il une raison objective de penser que le degré, la nature et la portée de la dépendance aux drogues ou à l’alcool ainsi que les risques que cette dépendance peut comporter ont un effet indésirable sur la sécurité des autres travailleurs ou des membres du public?

On a jugé que l’administration de tests de dépistage de la consommation de drogues et d’alcool en l’absence d’un lien démontrable avec la sécurité et le rendement professionnel portait atteinte aux droits des employés.[41] Le rapport ou lien rationnel entre les tests de dépistage de la consommation de drogues et d’alcool et le rendement professionnel est une composante importante de toute politique respectueuse de la loi en la matière. La politique ne doit pas à cet égard être arbitraire quant aux groupes d’employés qui seront assujettis à ces tests.

Exemple : Il ne serait pas justifiable qu’un employeur exploitant une entreprise d’expédition soumette aux tests de dépistage de la consommation d’alcool uniquement les employés nouvellement embauchés ou réembauchés, et non le personnel en place. Par ailleurs, il peut être justifié d’administrer des tests uniquement aux membres du personnel qui occupent des postes critiques du point de vue de la sécurité (par exemple les camionneurs et les conducteurs de chariots élévateurs.

ii) Les tests de dépistage constituent une forme d’examen médical :

Les tests de dépistage de la consommation de drogues et d’alcool constituent une forme d’examen médical. Et en règle générale, il est interdit de procéder à des enquêtes ou à des examens médicaux administrés à l’étape de la sélection initiale de candidats. La tenue de tests de dépistage de la consommation de drogues et d’alcool dans un cadre professionnel est acceptable dans certaines circonstances seulement. Consulter la section IV-9k) – « Tests de dépistage de la consommation de drogues et d’alcool ». Avant l’embauche, il faut se conformer aux principes suivants :

  1. À l’étape de l’entrevue, les questions posées et les examens médicaux préalables à l’emploi doivent se limiter à déterminer l’aptitude de la personne à exécuter les tâches principales de l’emploi.
  2. Si l’employeur veut mettre en œuvre un programme de dépistage avant l’embauche, il doit pouvoir démontrer que les tests préalables à l’embauche lui procurent une évaluation juste de la personne. La Commission est d’avis que l’employeur ne doit pas administrer de tests à l’embauche qui ne mesurent pas effectivement le handicap. De récents jugements indiquent que les tests de certification de la sécurité sur le dépistage de drogues, fondés sur des analyses d’urine, peuvent être acceptables dans certains cas pourvu qu’ils soient assortis de mesures d’adaptation en cas de résultats positifs. Les tribunaux débattent présentement de l’acceptabilité des tests pré-emploi. L’employeur doit faire preuve de circonspection.
  3. Lorsque l’administration considère l’emploi de tests de dépistage de la consommation de drogues et d’alcool comme exigence légitime au regard des tâches essentielles, l’employeur doit informer les candidats de cette exigence au moment de l’offre d’emploi. Les raisons pour ce genre de tests médicaux doivent être exposées clairement.
  4. Dans sa politique sur la consommation de drogues et d’alcool, l’employeur doit prévoir des mesures d’adaptation à l’intention de ceux qui obtiendraient des résultats positifs à ces tests.
  5. Si la personne demande des mesures d’adaptation pour pouvoir s’acquitter des principales fonctions de l’emploi, l’employeur est tenu de prendre les mesures nécessaires, à moins que l’adaptation ne lui occasionne un préjudice injustifié.

e) Renseignements relatifs à l’identité sexuelle

L’identité sexuelle est une caractéristique personnelle, que l’on peut faire connaître ou non à autrui. La plupart des gens ne s’inquiètent pas de ce que les autres la connaissent, mais ce n’est pas toujours le cas pour les transsexuels et les transgenres.

L’employeur ou le fournisseur de services qui a légitimement besoin de certains renseignements personnels doit, si ces renseignements lui permettent de connaître directement ou indirectement le sexe d’une personne, prendre toutes dispositions utiles pour en préserver la confidentialité. La raison à cela est que le sexe indiqué sur certains documents comme le certificat de naissance ou le permis de conduire peut différer de l’identité sexuelle de la personne en question. Cette règle vaut dans tous les cas et dans toutes les situations, à l’inclusion des dossiers et des fiches d’emploi, des dossiers des compagnies d’assurance et des dossiers médicaux. Les renseignements peuvent être requis pour permettre à un employé ou à toute autre personne d’adhérer à un régime d’assurance ou d’en demander des prestations.

Afin de protéger la vie privée des personnes, tous les renseignements de cette nature doivent être confiés à des membres du personnel désignés à cette fin et être conservés dans un système de rangement des dossiers qui soit fermé à clef. L’employeur ou le fournisseur de services qui néglige de protéger correctement des renseignements portant sur le sexe ou sur l’identité sexuelle d’une personne est passible d’une plainte pour avoir contrevenu aux dispositions du Code si l’employé est victime de discrimination en raison de son identité sexuelle.

f) Vérification des dossiers de la police

Une personne atteinte d’une maladie mentale ou qui a souffert d’un trouble mental dans sa vie peut avoir été transportée à l’hôpital par la police en vertu de la Loi sur la santé mentale de l’Ontario. Le dossier qui résulte de ce contact à caractère non pénal avec la police pourrait avoir des répercussions préjudiciables pour elle tout au long de sa vie.

La Commission est bien consciente du devoir qui incombe aux organismes et aux corps de police de protéger le public et d’assurer sa sécurité. Toutefois les vérifications des dossiers de la police soulèvent des questions d’atteinte aux droits de la personne si elles ne sont pas effectuées et utilisées correctement.

Les organisations demandent de plus en plus aux candidats à un poste, rémunéré ou bénévole, de consentir à une vérification des dossiers de la police. Dans des cas exceptionnels, cette vérification peut se révéler nécessaire en vue de protéger des personnes vulnérables; on pense par exemple à des fonctions qui exigent des contacts avec des enfants, des personnes âgées ou des personnes atteintes de certains handicaps. Dans d’autres cas, les vérifications ne sont pas nécessaires, mais simplement privilégiées comme moyen additionnel d’évaluation. Dans tous les cas, les dispositions du Code des droits de la personne s’appliquent si la vérification a des répercussions préjudiciables sur la personne atteinte d’un handicap mental qui a eu un contact à caractère non pénal avec la police par le passé. Il est donc primordial que les particuliers et que les organisations qui demandent une vérification des dossiers de la police comprennent la portée juridique de l’obtention de ces renseignements.

L’article 23 du Code indique que la détermination de l’aptitude d’une personne à occuper un poste rémunéré ou bénévole ne doit pas reposer sur des présomptions liées à des motifs énoncés dans le Code, comme la maladie mentale. Le fait de conserver l’information relative aux contacts avec la police pour un motif prévu dans la Loi sur la santé mentale de l’Ontario, à l’inclusion des transferts volontaires ou non à des ressources médicales, est à la source d’importantes préoccupations sur le plan des droits de la personne.

Les articles 11 et 17 du Code indiquent clairement que même des exigences neutres, qui semblent ne pas cibler certaines personnes ou certains groupes précis, pourraient involontairement avoir un effet discriminatoire. La vérification des dossiers de la police peut être préjudiciable aux personnes racialisées ou aux personnes atteintes de maladies mentales qui ont peut-être eu un nombre disproportionné de contacts avec la police à cause de la discrimination ou du profilage racial.

Exemple : Un homme racialisé est accusé d’avoir troublé la paix même si des jeunes de race blanche se sont livrés à des comportements pires et n’ont pas eu d’accusations portées contre eux. Cet homme n’a pas les moyens de faire appel à un avocat. Il plaide coupable sans faire état de ses allégations de profilage racial. Lorsqu’il présentera sa candidature à un poste requérant normalement une vérification des dossiers de la police, cet incident sera signalé et il risque de ne pas obtenir l’emploi.

Face aux risques de préjudices fondés sur les droits de la personne, la vérification des dossiers de la police concernant des personnes doit être pratiquée uniquement lorsqu’il est raisonnable et légitime de le demander à cause de la nature du travail, peu importe que ce soit du travail rémunéré ou bénévole. Une organisation peut souhaiter détenir le plus de renseignements possible sur des personnes, il demeure que les droits de la personne prévalent.

Toute organisation souhaitant connaître les antécédents de personnes doit être en mesure de justifier son besoin au regard du critère déterminé par la Cour suprême du Canada pour évaluer si une politique, une pratique ou une exigence est raisonnable et légitime. Consulter la section IV-2a(i) – « Critère pour qu’une exigence soit légitime ». Les organisations qui peuvent établir le besoin légitime de procéder à une vérification des antécédents ne doivent demander cette vérification qu’après avoir pris la décision d’offrir l’emploi à un candidat, conditionnellement aux résultats de la vérification. En d’autres mots, les vérifications de cette nature doivent constituer la dernière étape du processus de recrutement. Il devrait s’agir de la mesure finale de détermination de l’acceptabilité d’un candidat. Consulter également le document de la Commission intitulé Politique sur la discrimination fondée sur la santé mentale et les vérifications des dossiers de la police - Ébauche, affiché sur le site Web de la Commission le 11 février 2008 ou toute version définitive qui sera approuvée par la Commission dans l’avenir.


[41] Entrop, supra, note 6.