Les personnes transgenres et les autres personnes qui ne se conforment pas aux stéréotypes sexospécifiques sont issues de tous les milieux. Elles proviennent de toutes les classes sociales, cultures, races et religions, occupent tous les genres d’emploi et sont de toutes les orientations sexuelles. On les retrouve partout en Ontario et dans le monde entier, où elles contribuent à la vie de leur collectivité.
Pourtant, les personnes « trans » constituent l’un des groupes les plus défavorisés de la société. Elles sont couramment victimes de préjugés, de discrimination, de harcèlement, de haine et de violence. Les personnes en phase de « transition » ou de « dévoilement » y sont particulièrement vulnérables[1]. Bon nombre d’enjeux touchent des aspects fondamentaux de la dignité humaine. Les tribunaux administratifs et judiciaires ont indiqué qu’il s’agissait d’une situation « répandue et troublante »[2].
Ces formes de marginalisation sociale des personnes trans sont le résultat de craintes et de mythes sociétaux profonds à l’égard des personnes qui ne se conforment pas aux « normes » sociales relatives aux identités d’homme et de femme. Leur effet sur la vie quotidienne, la santé et le bien-être des personnes touchées est considérable.
En 2010, l’initiative Trans PULSE[3] a mené un sondage détaillé auprès de 433 personnes trans de l’ensemble de l’Ontario. Les personnes sondées ont fait part d’obstacles et de discrimination sur le plan de l’accès à l’emploi et aux soins médicaux[4]. Bien qu’une proportion élevée de personnes trans ait effectué des études postsecondaires, cela ne se reflétait pas dans les niveaux de revenus de la communauté. La plupart des personnes trans vivaient sous le seuil de pauvreté[5]. Les taux d’emploi rapportés étaient également faibles[6]. Les deux tiers des personnes sondés disaient éviter des lieux publics que le reste de la population tient pour acquis, comme les centres commerciaux, boutiques de vêtements, restaurants et centres de conditionnement physique, par crainte de faire l’objet de harcèlement, d’être « reconnues » (perçues comme une personne trans) ou de voir leur identité trans « révélée ». Au premier rang des lieux publics évités figuraient les toilettes[7]. De tous les répondants, 77 % ont dit avoir eu des pensées suicidaires au cours de leur vie et 43 % ont rapporté avoir déjà effectué une tentative de suicide[8].
En même temps, des changements sociaux et juridiques d’envergure se sont amorcés. La société commence à reconnaître la valeur et l’importance de respecter l’identité sexuelle et l’expression de l’identité sexuelle de chacun de ses membres. Les normes internationales en matière de droits de la personne, ainsi que la législation et la jurisprudence du pays confirment que le respect du droit de vivre à l’abri de la discrimination et du harcèlement fondés sur l’identité sexuelle et l’expression de l’identité sexuelle constitue une obligation juridique.
Le Code des droits de la personne de l’Ontario (Code) est une loi provinciale qui établit les droits et obligations relatifs à la protection contre la discrimination. En 2012, trois partis représentés à l’Assemblée législative de l’Ontario ont parrainé ensemble la Loi Toby, un projet de loi visant à inclure l’« identité sexuelle » et l’« expression de l’identité sexuelle » au nombre des motifs de discrimination interdits aux termes du Code[9]. L’inclusion de ces motifs indique clairement que les personnes trans et autres personnes non conformistes sur le plan du sexe ont droit d’être protégées contre la discrimination et le harcèlement fondés sur l’identité sexuelle ou son expression au même titre que s’il s’agissait de discrimination et de harcèlement fondés sur la race, l’âge, le handicap ou tout autre motif de discrimination interdit[10].
[1] Voir aussi la rubrique 13.2 : Transition et l’Annexe B : Glossaire de la présente politique.
[2] XY v. Ontario (Government and Consumer Services), 2012 HRTO 726, au par. 15 (CanLII). Dans cet arrêt, le TDPO a reconnu que les personnes transgenres constituent un « groupe historiquement défavorisé ». Brodeur v. Ontario (Health and Long-Term Care), 2013 HRTO 1229, au par. 41 (CanLII). Dans cet arrêt, le TDPO a indiqué que « les désavantages et préjudices à l’endroit des personnes transgenres en Ontario demeurent répandus et troublants ».
[3] L’initiative Trans PULSE est un projet de recherche communautaire créée en vue de résoudre les problèmes d’accès aux services de santé et services sociaux cernés au sein des communautés trans de l’Ontario. Le financement du projet provient du Wellesley Institute, du Réseau ontarien de traitement du VIH et des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC). Pour en savoir davantage, consulter : http://transpulseproject.ca/about-us/
[4] Jake Pyne et coll. Improving the Health of Trans Communities: Findings from the Trans PULSE Project (présentation effectuée lors du Trans Health Advocacy Summit, le 24 août 2012), en ligne à l’adresse : Trans PULSE http://transpulseproject.ca/research/improving-the-health-of-trans-communities-findings-from-the-trans-pulse-project/.
[5] G. Bauer et coll. « Who are Trans People in Ontario? », Trans PULSE e-Bulletin, vol. 1, no 1, 20 juillet 2010, en ligne à l’adresse : Trans PULSE www.transpulseproject.ca.
[6] G. Bauer et coll. « We’ve Got Work to Do: Workplace Discrimination and Employment Challenges for Trans People in Ontario », Trans PULSE e-Bulletin, vol. 2, no 1, 30 mai 2011, en ligne à l’adresse : Trans PULSE www.transpulseproject.ca.
[7] A. Scheim, G. Bauer et J. Pyne. « Avoidance of Public Spaces by Trans Ontarians: The Impact of Transphobia on Daily Life », Trans PULSE e-Bulletin, vol. 4, no 1, 16 janvier 2014, en ligne à l’adresse : Trans PULSE www.transpulseproject.ca.
[8] Pyne et coll. Supra, note 4.
[9] Voir le projet de loi 33, Loi modifiant le Code des droits de la personne en ce qui concerne l’identité sexuelle ou l’expression de l’identité sexuelle, 1re session, 40e législature de l’Ont. (sanctionnée le 19 juin 2012), L.O. 2012, chap. 7, en ligne à l’adresse : Assemblée législative de l’Ontario http://www.ontla.on.ca/web/bills/bills_detail.do?locale=fr&BillID=2574&….
[10] Le Code des droits de la personne de l’Ontario compte 17 motifs de discrimination interdits : la race, la couleur, l’ascendance, la croyance, le lieu d’origine, l’origine ethnique, la citoyenneté, le sexe (y compris la grossesse), l’orientation sexuelle, l’identité sexuelle, l’expression de l’identité sexuelle, l’âge, l’état matrimonial, l’état familial, le handicap, l’état d’assisté social (logement ) ou le casier judiciaire (emploi).