A. Description et raison d’être
Les politiques de lutte contre le harcèlement et la discrimination doivent clairement établir que le harcèlement et la discrimination ne seront pas tolérés, et prescrire les normes et les attentes quant aux comportements à adopter à cet égard. Elles doivent notamment décrire les types de comportement considérés comme étant discriminatoires ou constituant du harcèlement, et véhiculer le message rappelant que ces cas seront traités avec toute la rigueur qui s’impose. Elles doivent également décrire les rôles et les responsabilités incombant à chacun. Ces politiques en matière de droits de la personne doivent être liées aux autres politiques internes et intégrées au mode de fonctionnement quotidien de l’organisme.
B. Considérations
Le harcèlement constitue une forme spécifique de discrimination. En raison des problématiques particulières liées au harcèlement, certains organismes mettent en place des politiques distinctes relatives au harcèlement, d’une part, et relatives à d’autres formes de discrimination, d’autre part.
Par ailleurs, puisque le harcèlement et la discrimination sont fondés sur les divers motifs visés par le Code et se manifestent souvent de manière différente, certains organismes choisissent de mettre en place des politiques particulières en matière de harcèlement ou de discrimination en fonction du type de motif : l’orientation sexuelle, la race ou un motif lié à la race, le sexe, l’identité sexuelle et l’expression de l’identité sexuelle, etc.[14]
Les politiques de lutte contre le harcèlement et la discrimination énoncent des attentes et des normes de conduite, alors que les procédures régissant les plaintes énoncent la manière dont les manquements à ces politiques seront traités. Nombre d’organismes consignent leurs politiques et procédures de lutte contre le harcèlement et la discrimination dans un seul et même document.
En outre, les organismes peuvent élaborer une politique relative aux droits contradictoires pour traiter les cas où les droits de chacun sont susceptibles d’entrer en conflit en milieu de travail. Cette politique peut faire partie des politiques plus générales de lutte contre la discrimination et le harcèlement ou faire l’objet d’un document distinct. Le document de la CODP intitulé Politique sur les droits de la personne contradictoires formule des conseils sur les éléments à inclure dans ce type de politique interne.
C. Éléments
Remarque : Le libellé type ci-après porte sur le domaine de l’emploi mais il peut être adapté au contexte du logement ou des services. Les textes ci-après sont uniquement fournis à titre d’exemple. Il n’existe pas une politique ou une procédure qui soit meilleure en soi. Vous devez toujours revoir les politiques et procédures pour vous assurer qu’elles sont conformes à l’état courant du droit et des politiques en matière de droits de la personne et qu’elles sont adaptées à votre organisme.
1. Engagement de l’organisme
La politique doit faire état d’un engagement manifeste de l’organisme en faveur de la création et du maintien d’un climat de respect des droits de la personne,
et de la promotion de l’égalité et de l’inclusion.
L’organisme XYZ s’engage à maintenir un environnement exempt de harcèlement et de discrimination, au sein duquel chaque individu est traité avec respect et dignité, peut contribuer pleinement et jouit de possibilités égales.
En vertu du Code des droits de la personne de l’Ontario, chaque personne a le droit de vivre dans un milieu exempt de harcèlement et de discrimination. Le harcèlement et la discrimination ne seront pas tolérés, acceptés ni ignorés au sein de l’organisme XYZ. Si une plainte pour harcèlement ou discrimination est prouvée, des mesures disciplinaires seront imposées, pouvant aller jusqu’au congédiement de la personne fautive.
L’organisme XYZ s’engage à mettre en œuvre une stratégie globale de lutte contre le harcèlement et la discrimination, notamment ;
- par la formation et l’éducation visant à s’assurer que chacun est au courant de ses droits et de ses responsabilités
- par un examen régulier des systèmes internes visant à déceler les obstacles éventuels eu égard aux motifs visés par le Code
- par la mise en place d’une procédure de traitement des plaintes efficace et équitable
- par la promotion de normes de conduite appropriées en tout temps.
2. Objectifs de la politique
La politique doit préciser les objectifs visés, notamment la promotion des droits de la personne au sein de l’organisme et la prévention du harcèlement et de la discrimination, et définir les principes et normes de conduite.
Cette politique poursuit les objectifs suivants :
- Veiller à ce que les membres, les clients et les collaborateurs de l’organisme XYZ soient informés que le harcèlement et la discrimination constituent des pratiques inacceptables et incompatibles avec les normes préconisées par cet organisme, en plus de constituer une contravention à la loi.
- Préciser les types de comportement pouvant être considérés comme offensants et qui sont interdits par la présente politique.
3. Application de la politique
La politique doit préciser les activités concernées et les personnes auxquelles elle s’applique. En matière d’emploi, par exemple, les protections assurées en vertu du Code ont reçu une interprétation large, s’appliquant tant aux personnes occupant un emploi temporaire, occasionnel ou contractuel qu’aux bénévoles. Les employés jouissent d’une protection contre le harcèlement ou la discrimination de la part de collègues de travail, de membres de la direction ou de cadres intermédiaires, et contre les actions de toute personne intervenant en milieu de travail, par exemple les fournisseurs et les clients. Cette protection peut également s’étendre à l’extérieur du lieu de travail ou des heures ouvrables normales, lorsqu’il s’agit d’activités liées à l’emploi. Ainsi, puisque les employés ont le droit de travailler dans un milieu exempt de harcèlement et de discrimination de la part des clients, des fournisseurs ou de quiconque intervient en milieu de travail, vous devez afficher la politique à la vue de tous ou la porter à la connaissance des visiteurs.
Le Code exige également que les organismes veillent à éviter le harcèlement ou la discrimination dans le cadre des services qu’ils offrent. Cela concerne notamment les interactions avec la clientèle, un client potentiel ou un partenaire commercial, comme un fournisseur.
En matière de logement locatif, le droit à un milieu exempt de harcèlement s’applique tant aux locataires qu’aux personnes présentant une demande de location. Le locateur peut notamment être tenu responsable s’il ne prend pas des mesures raisonnables pour s’assurer que les locataires sont à l’abri du harcèlement de la part d’autres locataires ou de personnes se rendant sur les lieux, comme les préposés à l’entretien.
Le droit à un milieu exempt de discrimination et de harcèlement s’étend à tous les employés, y compris les employés à temps plein, à temps partiel, temporaires, à l’essai, occasionnels ou contractuels, ainsi qu’aux bénévoles, étudiants en formation, stagiaires et apprentis.
Il est également inacceptable pour tout membre de l’organisme XYZ de faire preuve de harcèlement ou de discrimination lorsqu’il traite avec les clients ou avec toute personne avec laquelle il a des échanges dans le cadre de ses fonctions, y compris les entrepreneurs et les fournisseurs de services.
Cette politique s’applique à tous les niveaux de l’organisme et à tous les aspects liés au milieu de travail et à l’emploi, y compris en matière de recrutement, de sélection, de promotion, de mutation, de formation, de rémunération, d’avantages sociaux et de cessation d’emploi. Elle s’applique en outre aux modalités se rapportant au taux de rémunération, aux heures supplémentaires, aux heures de travail, aux congés, au travail de quart, aux mesures disciplinaires et aux évaluations du rendement.
Cette politique s’applique également aux événements qui ont lieu à l’extérieur des locaux de l’organisme, par exemple durant un voyage d’affaires ou à l’occasion d’une fête organisée par l’organisme.
4. Énumération et explication des motifs visés par le Code
Le Code des droits de la personne interdit toute discrimination dans cinq domaines de la vie sociale, à savoir l’emploi, le logement, les services, les contrats et l’adhésion à un syndicat ou à une association professionnelle. Cette protection se fonde sur 17 motifs (voir ci-après). Veillez à énoncer dans votre politique les motifs visés par le Code et leur définition, au besoin. Il convient de noter que certains motifs visés par le Code peuvent différer selon le domaine. Par exemple, le motif de l’existence d’un casier judiciaire s’applique uniquement dans le domaine de l’emploi, tandis que le motif de l’état d’assisté social ne s’applique qu’en matière de logement.
Alors que le Code interdit la discrimination fondée sur la grossesse en vertu du motif lié au sexe d’un individu, il pourrait être opportun de préciser dans la politique l’interdiction d’exercer une discrimination ou du harcèlement en raison de la grossesse, car de nombreuses personnes ne sont pas au courant des protections assurées en vertu du Code.
La politique peut également faire état de la possibilité qu’une personne fasse l’objet de discrimination ou de harcèlement du fait de l’intersection d’une multiplicité de motifs discriminatoires (l’intersectionnalité). Par exemple, une personne subissant un harcèlement parce qu’elle est une femme musulmane pourrait déposer une plainte tant pour le motif de harcèlement fondé sur le sexe que pour le motif de harcèlement fondé sur la religion.
Un organisme pourrait aussi étendre la protection contre le harcèlement et la discrimination à d’autres motifs non spécifiquement prévus par le Code. Par exemple, certains organismes interdisent toute forme de harcèlement psychologique, ou encore toute forme de discrimination ou de harcèlement fondé(e) sur les opinions politiques d’un individu.
Cette politique interdit la discrimination ou le harcèlement fondé sur l’un ou l’autre des motifs énumérés ci-après, ou une combinaison de ces motifs, à savoir :
- l’âge
- la croyance (la foi et les pratiques religieuses)
- le sexe (y compris la grossesse et l’allaitement maternel)
- l’orientation sexuelle
- l’identité sexuelle
- l’expression de l’identité sexuelle
- l'état familial (notamment le fait d’être dans une relation parent-enfant)
- l’état matrimonial (notamment le fait d’être une personne mariée, célibataire, veuve, divorcée, séparée ou ayant une relation conjugale sans être mariée, avec une personne de même sexe ou de sexe opposé)
- le handicap (notamment un handicap mental ou physique, un retard du développement ou des difficultés d’apprentissage)
- la race
- l’ascendance
- le lieu d’origine
- l’origine ethnique
- la citoyenneté
- la couleur
- l’existence d’un casier judiciaire (une condamnation relative à une infraction provinciale ou à une infraction à l’égard de laquelle la personne a obtenu un pardon);
- l’association ou l’existence d’un lien avec une personne visée par l’un des motifs précités
- la perception que l’un des motifs précités s’applique.
5. Définition des concepts fondamentaux
Définissez les concepts fondamentaux, en fonction de la loi et des politiques en matière de droits de la personne, en les illustrant par des exemples.
Il peut également être utile de définir des concepts connexes, tels que le racisme, l’hétérosexisme, l’âgisme, etc., et de dresser une liste sommaire des manifestations les plus courantes en lien avec les divers motifs visés par le Code. Consultez les politiques pertinentes de la CODP pour en savoir plus.
Il est important de noter que les personnes victimes de harcèlement peuvent ne pas manifester de réaction virulente aux commentaires ou à la conduite en cause. Un tel comportement n’est cependant pas opposable à une plainte de harcèlement : en effet, la personne victime de harcèlement peut ne pas se sentir en mesure d’y objecter, par exemple parce qu’elle se sent vulnérable et craint les conséquences si elle dénonce le harcèlement dont elle fait l’objet.
Les comportements ci-après sont interdits :
Discrimination : s’entend d’une forme de traitement inégal fondé sur un motif visé par le Code, imposant un fardeau additionnel à une personne ou lui niant le droit à des avantages. Le geste posé peut être intentionnel ou non intentionnel. Il peut s’agir d’actes directs de discrimination ou d’une règle, pratique ou procédure qui peut sembler neutre de prime abord mais qui désavantage certains groupes d’individus. La discrimination peut se présenter de manière évidente ou survenir de manière plus subtile. Dans tous les cas, même s’il peut y avoir plusieurs facteurs influant sur une décision ou une action, il s’agit d’un manquement à la présente politique si la discrimination est l’un de ces facteurs.
Harcèlement : s’entend de commentaires ou d’actes dont on sait ou devrait raisonnablement savoir qu’ils sont déplacés. Il peut s’agir de paroles ou de gestes dont on sait ou devrait raisonnablement savoir qu’ils sont offensants, embarrassants, humiliants, dégradants ou déplacés, selon l’un des motifs de discrimination énoncés dans cette politique. Le harcèlement peut se produire en lien avec quelque motif de discrimination que ce soit.
Voici quelques exemples de harcèlement :
- employer des surnoms ou faire des remarques, des farces ou d’autres commentaires désobligeants ayant trait à la race, à l’identité sexuelle, à l’expression de l’identité sexuelle, au sexe, à un handicap, à l’orientation sexuelle, à la croyance, à l’âge ou à quelque autre caractéristique d’une personne visée par un motif du Code
- montrer ou faire circuler des photos, des graffitis ou d’autres documents offensants, sous forme d’imprimé, par courriel ou par un quelconque moyen électronique
- s’en prendre à une personne en particulier en lui adressant des remarques humiliantes ou désobligeantes parce qu’elle appartient à un groupe visé par le Code
- faire des commentaires ridiculisant une personne en raison de certaines caractéristiques, comme son habillement, sa façon de s’exprimer, etc. ayant un lien avec un motif de discrimination énoncé dans cette politique.
Si la personne visée ne semble pas objecter au harcèlement dont elle fait l’objet ou semble même s’en accommoder, cela ne signifie pas pour autant que le comportement est acceptable et ne constitue pas une instance de harcèlement.
Harcèlement sexuel et fondé sur le sexe : le harcèlement sexuel constitue une forme de harcèlement pouvant se manifester de diverses façons, par exemple :
- faire des commentaires à connotation sexuelle au sujet des caractéristiques physiques ou des manières d’une personne
- faire preuve de paternalisme en raison du sexe d’une personne alors que cette dernière estime que cela mine son amour-propre ou ses attributions professionnelles
- avoir un contact physique déplacé
- faire des remarques ou des commentaires suggestifs ou offensants au sujet de personnes d’un certain sexe
- proposer d’avoir des relations intimes
- tenir un langage abusif, proférer des menaces ou avoir d’autres comportements semblables à connotation sexuelle
- fixer ou regarder une personne de manière déplacée
- se vanter de ses prouesses sexuelles ou poser des questions au sujet des activités sexuelles d’une personne ou en discuter
- faire des plaisanteries ou tenir des commentaires offensants à connotation sexuelle au sujet d’un employé ou d’un client;
- tenir des propos osés et vulgaires à connotation sexuelle
- montrer des photos, des graffitis ou d’autres documents offensants à connotation sexuelle, sous forme d’imprimé ou par un quelconque moyen électronique
- proposer un rendez-vous galant ou demander des faveurs sexuelles.
Proposition à caractère sexuel : cette politique interdit toute proposition ou avance à caractère sexuel faite par une personne qui est en position d’accorder ou de refuser un avantage ou un bénéfice à la personne qui en fait l’objet. Cela comprend notamment les cadres supérieurs et intermédiaires, ainsi que tout collègue de travail qui est en position d’accorder ou de refuser un avantage ou un bénéfice à la personne à laquelle est adressée la proposition ou l’avance en cause. Il est également interdit d’user de représailles à l’égard de la personne ayant refusé une telle proposition ou avance.
Atmosphère empoisonnée : une atmosphère empoisonnée est instaurée par des commentaires ou agissements (y compris des commentaires ou des agissements qui sont tolérés ou dont il est permis qu’ils se poursuivent bien que la direction en ait connaissance) qui créent un environnement de travail empreint de discrimination. Les commentaires ou les agissements en question peuvent ne pas être dirigés envers une personne en particulier et peuvent émaner de quiconque, peu importe son poste ou son statut. Un seul commentaire ou acte, s’il est suffisamment grave, peut donner naissance à une telle atmosphère.
6. Rôles et responsabilités
Énoncez les rôles et les responsabilités des diverses parties œuvrant au sein de l’organisme.
Il est entendu que toutes les personnes œuvrant au sein de l’organisme XYZ doivent respecter cette politique et s’y conformer, notamment en se gardant de se livrer à quelque forme de harcèlement ou de discrimination que ce soit, et en offrant leur entière collaboration à toute enquête réalisée au sujet d’une plainte pour harcèlement ou discrimination.
Les cadres supérieurs et intermédiaires ont en outre la responsabilité d’agir sans délai au regard d’une observation ou d’une allégation de harcèlement ou de discrimination. Il incombe également aux cadres supérieurs et intermédiaires de favoriser et de maintenir un milieu de travail exempt de harcèlement et de discrimination au sein de l’organisme, et de traiter sans délai les situations pouvant dégénérer en des problématiques plus graves.
[14] Les politiques publiées par la CODP, disponibles en ligne à l’adresse www.ohrc.on.ca, donnent des exemples des diverses formes sous lesquelles le harcèlement et la discrimination peuvent se présenter suivant les divers motifs visés par le Code.