Les stéréotypes entourant le vieillissement et les capacités des personnes âgées peuvent donner lieu à un traitement discriminatoire. Certaines personnes associent le vieillissement à la dépendance et à la fragilité et considèrent que les personnes âgées drainent les ressources des employeurs, des familles, des fournisseurs de services et des gouvernements[25]. Le fait que la proportion de personnes âgées augmente, combiné au grand nombre d’articles et d’études traitant du fardeau qu’auront éventuellement à supporter les générations plus jeunes pour subvenir aux besoins de la population vieillissante[26], engendrent un risque de préjudice encore plus grand à l’endroit des personnes âgées. Comme le soulignent les bulletins du Conseil consultatif national sur le troisième âge, dans les débats publics sur le vieillissement de la population, le vieillissement est souvent présenté comme un problème ayant des conséquences néfastes pour la société[27].
Dans le monde occidental, les personnes âgées se heurtent souvent au problème d’être jugées incompétentes ou incapables d’accomplir des tâches simplement à cause de leur âge. On s’imagine que les personnes âgées sont incapables d’apprendre des choses nouvelles.[28]
Il y a dans notre société une tendance à vouloir compartimenter le processus de vieillissement et à établir des distinctions très nettes entre les différents groupes d’âge[29]. L’exemple le plus éloquent pour illustrer cette tendance est le phénomène du 65e anniversaire de naissance. Le matin de ses 65 ans, la personne découvre qu’on peut la forcer à prendre sa retraite et qu’elle a acquis, aux yeux de la société, le statut de personne « âgée » et de « pensionnée », avec tous les préjudices associés à cet état. Cette méthode de démarcations tranchées a été critiquée pour son côté arbitraire et pour son inaptitude à reconnaître que nos capacités physiques et mentales ainsi que notre situation financière ne seront pas toutes identiques le jour de nos 65 ans[30]. Comme le démontrent les statistiques, les personnes âgées ne sont pas un groupe homogène et c’est pourquoi il ne convient pas de réserver le même traitement à toutes les personnes âgées du Canada. Malheureusement, cette généralisation est enchâssée dans le Code lui-même, qui prévoit que les travailleuses et travailleurs âgés de plus de 65 ans n’ont pas le droit de déposer une plainte pour discrimination en raison de leur âge.[31] Pourtant, les généralisations devraient être interdites non seulement en ce qui concerne les attitudes stéréotypées à l’endroit des personnes âgées, mais aussi au sujet des programmes et politiques légitimes visant à répondre aux besoins de la population âgée.
[25] « Des collectivités qui font place aux aînés », Expression : Bulletin du Conseil consultatif national sur le troisième âge, vol. 13, no 1 (automne 1999), en ligne: Health Canada <http://www.hc-sc.gc.ca/seniors-aines/pubs/expression/expintro_f.htm>.
[26] Par exemple, l’Institut C.D. Howe a publié un communiqué ayant pour titre : « Younger Canadians pay more tax, receive fewer benefits, than older generations, says C.D. Howe Institute Study ». L’étude en question cite des données empiriques, mais transmet du coup un message voulant que les personnes âgées soient un fardeau pour le système, au lieu de s’en tenir à des conclusions basées essentiellement sur l’écart entre les générations.
[27] « Célébrer les contributions des aînés », Expression : Bulletin du Conseil consultatif national sur le troisième âge, vol. 12, no 2 (hiver 1998), supra note 25.
[28] Tiré de « Age and retirement – educating the public sector » dans TIROHIA, Quarterly Newsletter of the New Zealand Human Rights Commission, Komihana Tikanga Tangata (avril 1999), p. 9.
[29] C. Ford, « Bright Lines: Status, Recognition and the Elusive Nature of Ageing », Appeal: Review of Current Law and Law Reform, vol. 2, no 4, 1996, au par 2, en ligne: QL (JOUR).
[30] Ibid. au par. 3.
[31] Article 10.