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14. Connaissance et application des droits

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14.1. Mécanismes de plainte

De nombreuses personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances nous ont fait savoir qu’elles étaient généralement peu conscientes de leur droit de ne subir aucune discrimination fondée sur un trouble psychique ou une dépendance en matière de logement et d’emploi, de même que lorsqu’elles reçoivent des services. Parallèlement, il semble que les organisations ont elles aussi une méconnaissance de leurs responsabilités découlant du Code. Même lorsque les gens connaissaient leurs droits, beaucoup d’entre eux ont indiqué qu’ils ont une grande difficulté à les faire appliquer, que ce soit en portant plainte contre l’organisation faisant l’objet de leurs récriminations, le système des droits de la personne ou d’autres organismes décisionnels, tels que les tribunaux administratifs ou les tribunaux[179]. Nous avons entendu que les façons de faire respecter les droits étaient essentielles aux mesures correctives et à la prévention des violations des droits humains que les gens subissent. Cependant, beaucoup de gens ne savent pas qu’il existe un système des droits de la personne auquel ils peuvent avoir recours pour lutter contre la discrimination.

On nous a dit que les gens sont souvent empêchés d’accéder aux systèmes de plaintes en raison des symptômes liés à leur handicap, et se sentent dépassés par la gestion de leurs activités quotidiennes, en particulier en raison de facteurs liés à la pauvreté. Selon l’Association des travailleuses et travailleurs sociaux de l’Ontario (ATTSO), « les personnes atteintes de maladie mentale qui ont un mode de vie essentiellement itinérant sont probablement plus enclines à faire l’expérience de la discrimination et peuvent avoir une capacité réduite de demander réparation par la voie des systèmes formels parce qu’elles n’ont pas d’adresse ni de numéro de téléphone pour les suivis et en raison des circonstances perpétuellement changeantes de leur vie. »

Nous avons également entendu que les exigences relatives au dépôt d’une plainte (remplir un formulaire de demande) sont souvent complexes ou intimidantes et conçues sans tenir compte des besoins des personnes ayant des handicaps psychosociaux. Par exemple, on nous a fait remarquer que les preuves considérables exigées pour se préparer à une audience devant un tribunal administratif peuvent constituer un obstacle pour les personnes ayant des pertes de mémoire attribuables à un état de stress post-traumatique.

Connaître vos droits fondamentaux ne signifie pas que vous allez les faire respecter. Il n’est pas question de sensibilité. L’expression de préoccupations et de questions touchant les droits de la personne n’est pas accessible. La question en est une d’accessibilité et de rayonnement hors du système des droits de la personne vers les personnes qui subissent la discrimination. – Participant(e) au groupe de consultation

ARCH a indiqué que les tribunaux administratifs doivent appliquer des processus appropriés et équitables pour les personnes qui ont été jugées inaptes à prendre des décisions particulières. L’organisme a déclaré que quand les tribunaux croient qu’une personne est inapte, ils peuvent rechercher une « solution rapide » : un mandataire ou quelqu’un qui prendra des décisions au nom de la personne qui a déposé la plainte. Cette approche peut être envahissante. Elle peut s’étendre au-delà du processus du tribunal, et elle peut ne pas être compatible avec les capacités décisionnelles de la personne. ARCH conseille aux tribunaux d’envisager plutôt d’utiliser un continuum d’approches souples qui aident en s’adaptant d’abord aux capacités décisionnelles de la personne. Pour les requérants non représentés, par exemple, l’organisation suggère la désignation d’un ami de la cour, un amicus curiæ, pour maximiser le respect des choix de la personne et fournir au tribunal les informations dont il a besoin pour évaluer sa demande[180].

En raison de ces préoccupations, un grand nombre de personnes consultées a demandé à la CODP de dispenser une formation aux droits de la personne aux personnes ayant des handicaps psychosociaux, aux fournisseurs de logements, aux employeurs, aux fournisseurs de services, au grand public et aux décideurs tels que les membres des tribunaux administratifs. L’ATTSO a recommandé un accès accru aux services de l’ombudsman afin d’améliorer la capacité des individus, en particulier des personnes itinérantes, à se plaindre de services.

Box: Plusieurs tribunaux administratifs en Ontario ont donné de la formation sur les façons de répondre aux besoins des personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances dans le processus du tribunal. Cette formation a également été donnée par la CODP. Pour plus d’informations, consultez le site Web de la Society of Ontario Adjudicators and Regulators (SOAR) au www.soar.on.ca/events/index.phpEnd of box.

Recommandations :

52. La Society of Ontario Adjudicators and Regulators (SOAR) et le SOAR Administrative and Management Network (SAMN) doivent continuer de s’assurer que les nouveaux arbitres, arbitres existants et membres du personnel reçoivent une formation sur le Code, notamment sur les mesures d’adaptation à offrir aux personnes ayant des problèmes de santé mentale ou des dépendances durant le processus du tribunal.

53. Les tribunaux administratifs et autres organismes de traitement des plaintes et instances décisionnelles doivent examiner leurs politiques et procédures afin de repérer et d’éliminer les obstacles qui empêchent les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances d’accéder à ces services. Dans le cadre de ce processus, les décideurs doivent utiliser des approches qui maximisent la participation et s’adaptent aux besoins des personnes pouvant éprouver des difficultés avec la capacité décisionnelle.

Engagement de la CODP :

E26. La CODP poursuivra sa collaboration avec les tribunaux administratifs ontariens pour offrir une formation sur les droits de la personne, notamment sur l’obligation d’accommodement, dans la mesure où ils s’appliquent aux services aux personnes ayant des troubles psychiques et des dépendances, ainsi qu’aux autres groupes protégés aux termes du Code.

14.1. Intervention

Quand j’ai vu mon médecin, il ne savait pas quoi me dire. Sa première réaction a été de répondre : « Eh bien, je suis un médecin et je sais ce que je fais. » Rares sont les personnes capables de dire au médecin de faire ses recherches. Il vous faut un intervenant. Les personnes ayant des troubles mentaux doivent avoir quelqu’un pour les défendre.

– Participant(e) à la table ronde de North Bay

Un nombre considérable de participants à la consultation ont dit qu’ils ont eu beaucoup de difficulté à avoir un accès équitable à un logement locatif, aux hôpitaux psychiatriques, au POSPH, aux prestations d’assurance, aux tribunaux administratifs et aux autres services, sans l’aide de quelqu’un pour intervenir en leur nom, surtout s’ils n’étaient pas en bonne santé. Beaucoup de gens ont également identifié la nécessité de soutien humain, d’intervenants et de services d’intervention pour les aider à s’y retrouver dans les systèmes, à accroître leur connaissance de leurs droits et de ceux des autres, à lutter contre la discrimination et à formuler des plaintes.

Les services d’intervention peuvent être considérés comme une forme importante de soutien humain et une méthode d’adaptation aux besoins des gens. Parallèlement, le recours tous azimuts aux intervenants est indicateur de la nécessité pour les organisations et services de dispenser leurs services de manière inclusive, sans exercer de discrimination, et d’éliminer les obstacles qui empêchent les gens d’agir en leur propre nom. (Voir la section 13.2 pour plus d’informations sur l’élaboration de services inclusifs.)

Je trouve frustrant pour les usagers qu’ils ne puissent pas obtenir eux-mêmes des services. L’usager est de bonne foi et tente sa chance, puis il se bute contre un obstacle. On ne retourne aucun de ses appels. Je prends le téléphone, je parle à quelqu’un et les choses sont faites sans problème. Mes clients sont soulagés, mais frustrés. Pourquoi faut-il une autre personne pour obtenir des résultats? Mon client perd son indépendance. Il ne devrait pas avoir à sauter dans des cerceaux et à surmonter des obstacles. – Participant(e) à la table ronde de North Bay 

Le rôle d’intervenant peut être joué par de nombreuses personnes différentes dans des contextes différents. Par exemple, le soutien par les pairs est perçu comme une forme positive d’intervention. Dans les hôpitaux psychiatriques, l’intervention au nom des personnes et des groupes de personnes ayant des troubles psychiques est faite par des conseils de patients et de familles et par le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques (BIPEP), qui dispose également du mandat conféré par la loi de fournir aux patients des conseils sur leurs droits.

Les personnes consultées ont souligné combien le statut socioéconomique peut avoir des répercussions sur l’accès des gens aux services. Elles nous ont dit que les personnes ayant un revenu plus élevé sont plus en mesure d’accéder aux services que celles ayant un faible revenu, parce que les premières sont plus enclines à avoir quelqu’un pour les aider.

Les groupes d’usagers/survivants et d’autres organisations ont insisté sur l’importance des services d’intervention indépendants pour les usagers/survivants, qui peuvent trouver très difficile de se plaindre, en particulier lorsque des obstacles risquent de creuser les écarts de pouvoir réels ou perçus entre les fournisseurs et les utilisateurs de services. L’ATTSO et d’autres nous ont dit que les gens font face à un risque considérable de perdre leurs services, leur logement ou leur emploi à la suite d’une plainte de discrimination, en particulier s’ils dépendent de ces systèmes pour avoir accès à ces services fondamentaux pour leur santé. Cela peut rendre particulièrement difficile de se plaindre quand différentes ressources sont directement liées les unes aux autres, par exemple lorsqu’un propriétaire fournit également des services de soutien à une personne ayant des troubles mentaux dans un environnement des logements supervisés[181].

Certaines personnes ont adopté des approches différentes aux concepts d’intervention et d’auto-assistance. Par exemple, nous avons entendu qu’il faut défendre la capacité des gens d’intervenir en leur propre nom. Tel qu’indiqué précédemment, le fait de collaborer avec des intervenants ne soustrait pas l’organisation à son obligation de concevoir ses services de manière inclusive, d’éliminer les obstacles ou d’évaluer et éliminer la discrimination systémique.

Recommandation :

54. Le gouvernement de l’Ontario et les organisations répondant aux besoins des personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances doivent donner leur soutien actif aux services d’intervention au nom des personnes aux prises avec des troubles mentaux et collaborer avec ces services pour que ces personnes réalisent leurs droits auprès des services de logement et des hôpitaux en santé mentale. L’indépendance des services d’intervention doit être considérée comme un facteur assurant que les gens sont en mesure de faire valoir leurs droits sans crainte de conflit d’intérêts. Les organisations qui forment des intervenants doivent offrir une formation aux droits de la personne, notamment à ceux que protège le Code.


[179] Lorsque les questions de justice ont trait à un trouble mental ou à une dépendance, les gens peuvent être enclins à recourir à un tribunal administratif comme le Tribunal de l’aide sociale, la Commission du consentement et de la capacité, la Commission de la location immobilière, le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario et la Commission des affaires municipales de l’Ontario. Ces tribunaux ont la capacité de faire appliquer le Code et devraient le faire dans les cas soulevant des questions de droits de la personne; Tranchemontagne c. Directeur (Programme de soutien aux personnes handicapées), [2006] 1 R.C.S. 513, à 23 – 24; il en est ainsi parce que le Code est une loi fondamentale quasi-constitutionnelle. On doit non seulement l’interpréter dans un sens large, mais assurer l’accessibilité de son application.

[180] Tess Sheldon et Ivana Petricone, Access to Administrative Justice for Persons with Disabilities. Addressing the Capacity of Parties before Ontario’s Administrative Tribunals: Promoting Autonomy and Preserving Fairness, Toronto, ARCH, 2009, p. ii-iii.

[181] Le Code assure une protection contre les représailles pour avoir fait une plainte relative aux droits de la personne (article 8).

 

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