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8. Statut socioéconomique, maladie mentale et dépendances

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Il y a un lien direct entre le soutien de ma famille et ma classe sociale, d’une part, et mes réalisations et ma qualité de vie de l’autre […] Mais retirez-moi cette sécurité et ma santé mentale périclite rapidement. Je pourrais me retrouver sans abri. J’ai connu des périodes où je ne pouvais pas organiser assez mes pensées pour me nourrir correctement. Le fait que des personnes aux prises avec des handicaps invisibles puissent être pénalisées en Ontario parce qu’elles sont malades en dit long sur le manque de respect de nos droits fondamentaux.  – Participant(e) au sondage

Beaucoup de personnes et d’organisations ont parlé du vécu des gens en matière de pauvreté. La pauvreté est une source importante de préoccupations pour les personnes aux prises avec des handicaps psychosociaux de l’ensemble de la province. Chez ces personnes, le chômage, le sous-emploi, la discrimination et le manque de logements abordables sont qualifiés de facteurs de pauvreté importants. Des données de Statistique Canada tirées de l'Enquête sur la participation et les limitations d'activités de 2006 indiquent qu'en Ontario, 27 p. 100 des personnes ayant un handicap « affectif »[43] ont un revenu faible [44] comparativement aux personnes aux prises avec un autre type de handicap (10 p. 100) et aux personnes qui rapportent ne pas avoir de handicap (11 p. 100).

On nous a dit que la discrimination fondée sur le handicap en matière de logement, d’éducation et d’emploi contribuait au faible statut socioéconomique et à la limitation des choix de vie. Le Centre ontarien des droits des locataires (CODL) et bon nombre de personnes consultées ont expliqué que le fait de vivre dans la pauvreté mène à d’autres expériences de discrimination ou d’exclusion sociale, et nuit à la santé mentale et physique des gens. Nous avons appris que les politiques qui nuisent aux personnes à faible revenu (par exemple, le besoin d’utiliser un téléphone pou communiquer avec un fournisseur de services) ont souvent davantage d’effets négatifs sur les personnes aux prises avec des troubles psychiques et des dépendances, que sur le reste de la population. Nous avons aussi appris que les personnes à faible revenu ont beaucoup plus de difficultés à avoir accès aux services, à un logement et à un emploi que le reste de la population.

Il existe des liens clairs entre la pauvreté, la maladie mentale, les dépendances et les autres motifs de discrimination interdits par le Code. En général, les personnes protégées aux termes du Code sont plus susceptibles d’avoir un faible revenu que la population générale. L’Association des infirmières et infirmiers autorisés de l’Ontario (AIIAO) a identifié les groupes qui courent un risque particulièrement élevé d’afficher un faible revenu et ses conséquences sur la santé. Ces groupes incluent les parents seuls soutiens de famille (le plus souvent des mères), les nouveaux immigrants, les personnes ayant un handicap limitant leur capacité de travail, les Autochtones, les femmes, les personnes qui n’ont pas terminé leurs études secondaires et les membres des groupes racialisés[45]. Étant donné le lien étroit qui existe entre le faible statut socioéconomique et l’appartenance à un groupe protégé par le Code, les mesures qui soumettent les personnes à faible statut socioéconomique à un traitement inéquitable peuvent soulever des préoccupations liées aux droits de la personne. Le gouvernement, les responsables des politiques et les organisations devraient veiller à ce que leurs politiques et leurs pratiques n’exercent aucun effet défavorable sur les personnes protégées aux termes du Code.

Le fait que le Canada ne respecte pas ses obligations internationales en ne protégeant pas le droit à un niveau de vie adéquat, qui fait partie des droits sociaux inclus au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, était aussi source de préoccupations. Selon l’AIIAO, ce manquement aux obligations des gouvernements canadien et provincial a été amplement documenté par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels (CDESC) des Nations Unies et par le rapporteur spécial des Nations Unies en matière de droits de la personne, qui a fait part d’inquiétudes sur l’état du logement adéquat au Canada en 2007.

En 2004, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels (CDESC) des Nations Unies a mis en lumière le niveau élevé de pauvreté des personnes marginalisées au Canada, notamment les personnes handicapées[46]. Selon l’Association des hôpitaux de l’Ontario (OHA), le Canada et l’Ontario devraient continuer d’investir dans les efforts visant à éliminer les disparités sociales, perçues comme étant à l’origine d’une majorité des problèmes de santé, dont les troubles mentaux et les dépendances.

La Convention relative aux droits des personnes handicapées reconnaît que les personnes handicapées ont tendance à vivre dans la pauvreté. L’article 28 de la Convention reconnaît le droit à un niveau de vie adéquat et à une protection sociale, notamment en matière d’alimentation, de vêtements et de logement, sans discrimination fondée sur le handicap. En ratifiant la CRDPH, le Canada s’est engagé à protéger ces droits, notamment en assurant l’accès à des programmes de réduction de la pauvreté, à des régimes et prestations de retraite, à des services appropriés et abordables, et à de l’aide financière[47].

Le CODDL et l’AIIAO ont demandé l’inclusion de protections explicites pour les personnes à faible revenu dans les lois sur les droits de la personne actuelles au moyen de l’ajout du « statut socioéconomique » au nombre des motifs de discrimination interdits par le Code.

En 2009, l’Assemblée législative de l’Ontario a adopté la Loi de 2009 sur la réduction de la pauvreté[48] qui engage le gouvernement de l’Ontario à mettre en œuvre sa Stratégie de réduction de la pauvreté (lancée en 2008), à en mesurer l’évolution et à faire rapport sur les progrès accomplis. La Loi stipule que la Stratégie de réduction de la pauvreté doit reconnaître que les personnes handicapées, entre autres groupes, courent un risque accru et que les personnes handicapées doivent être consultées à intervalles réguliers relativement à la stratégie[49]. Bien que la province ait concentré les efforts en priorité sur la réduction de la pauvreté infantile, notamment en augmentant l’accès aux services de santé mentale pour les enfants et les jeunes, on ne sait pas encore clairement si ces mesures ont eu des répercussions sur la vie des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances. Le récent ralentissement économique a entraîné des compressions et des gels budgétaires touchant le logement et les services d’aide aux Ontariennes et Ontariens à faible revenu qui auront probablement une incidence sur les mesures de réduction de la pauvreté[50].

Avec le faible niveau de revenu que fournit le système d’aide sociale, on ne peut pas manger correctement. Se nourrir convenablement est très important pour les personnes ayant des troubles de santé mentale. – Participant(e) à la table ronde de North Bay

On nous a dit que les revenus faibles ne pouvaient pas suivre le rythme de l’accroissement du coût de la vie. ARCH a mis en lumière les différences entre l’allocation de logement fournie dans le cadre du programme Ontario au travail (OT) et du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées (POSPH), et les loyers réels demandés à l’échelle de la province pour un logement adéquat. Selon L’ACSM – Ontario, un grand nombre d’Ontariennes et d’Ontariens aux prises avec des problèmes de santé mentale reçoivent des prestations d’aide sociale qui les placent bien en-dessous du seuil de pauvreté[51]. Les personnes consultées nous ont dit qu’une fois le loyer payé, les bénéficiaires de l’aide sociale ont peu d’argent pour se procurer des articles de première nécessité, comme de la nourriture.

Le système d’aide sociale de l’Ontario est en cours de réexamen (2012) aux termes d’obligations prises en ce sens dans le cadre de la Stratégie de réduction de la pauvreté. Dans notre rapport de consultation sur les droits de la personne et le logement de 2008, Le droit au logement, nous recommandions au gouvernement de l’Ontario de réviser et d’améliorer les taux de financement, les programmes, les lois et les règlements de l’Ontario pour s’assurer que les locataires à faible revenu soient en mesure de s’offrir un loyer moyen, de se nourrir et de combler leurs autres besoins fondamentaux. Les personnes à faible revenu, dont les personnes aux prises avec des troubles psychiques et des dépendances, doivent être en mesure de se procurer les articles de première nécessité dont elles ont besoin.

Recommandations :

4. Dès qu’il envisage d’adopter des mesures budgétaires restrictives qui auront une incidence négative sur les services, le logement et l’emploi des personnes à faible revenu, le gouvernement de l’Ontario devrait tenir particulièrement compte des objectifs énoncés dans la Stratégie de réduction de la pauvreté et des besoins des personnes aux prises avec des troubles psychiques, des personnes vivant dans la pauvreté et des autres groupes protégés aux termes du Code.

5. Le gouvernement de l’Ontario devrait bonifier et améliorer l’aide sociale, ce qui comprend la révision et l’amélioration des prestations offertes, pour veiller à ce que la population puisse se procurer les articles de première nécessité dont elle a besoin, comme de la nourriture, des vêtements et un toit adéquat.


 

[43] Pour déceler les répondants ayant des troubles émotifs, l’Enquête sur la participation et les limitations d’activités incluait la question suivante : « Avez-vous (est-ce que …. a) des troubles émotifs, psychologiques ou psychiatriques qui durent depuis au moins 6 mois ou qui pourraient durer 6 mois ou plus? Ceci inclut les phobies, les dépressions, la schizophrénie, les problèmes d’alcool et de drogues, et autres. » Statistique Canada, Enquête sur la participation et les limitations d’activités – 2006 (Adultes – 15 ans et plus), 2006. Accessible en ligne : Statistique Canada http://www23.statcan.gc.ca/imdb-bmdi/instrument/3251_Q2_V2-fra.pdf.

[44] Dans les données de son Enquête sur la participation et les limitations d’activités que le ministère a transmises à la CODP, Statistique Canada définit ainsi le faible revenu : familles économiques à faible revenu ou personnes seules à faible revenu (après impôt).

[45] Pour consulter une analyse de la recherche, voir l’Association des infirmières et infirmiers autorisés de l’Ontario, Creating Vibrant Communities: OIIO’s Challenge to Ontario’s Political Parties 2011 Provincial Election, Technical Backgrounder, Toronto, AIIAO, 2010. Accessible en ligne : AIIAO, www.OIIO.org/Storage/65/5964_Backgrounder.pdf, à 9. Dans plusieurs décisions, le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario et les tribunaux judiciaires ont reconnu le lien entre l’appartenance à un groupe visé par le Code et la probabilité d’avoir un faible revenu. Par exemple, voir Kearney v. Bramalea Ltd. (No. 2), (1998), 34 C.H.R.R. D/1 (Ont. Bd. Inq.).

[46] Observations finales, Comité des droits économiques, sociaux et culturels, Canada, CDESC, 1er - 19 mai 2006, UN HRCOR, 36e session, documents des Nations Unies. E/C.12/CAN/CO/4 et E/C.12/CAN/CO/5, Accessible en ligne : http://www.unhchr.ch/tbs/doc.nsf/898586b1dc7b4043c1256a450044f331/368b3c2ca5af4de4c12571ae0039e7f0/$FILE/G0642784.pdf, à15.

[47] CRDPHsupra note 9, article 28(2) a-e.

[48] L.O. 2009, chap.10.

[49] Par. 2(2) de la Loi, principe 3, par. 5(2).

[50] Dans son projet de budget initial de 2012, le gouvernement de l’Ontario n’a pas proposé de hausse des taux de l’aide sociale et a repoussé l’augmentation de la Prestation ontarienne pour enfants. Au moment de rédiger ce rapport, la version finale du budget provincial n’avait pas été adoptée. Voir Des mesures décisives pour l’Ontario, Budget de l’Ontario 2012, documents budgétaires, Toronto, Imprimeur de la Reine pour l’Ontario, 2012, p. 44-45. Plusieurs rapports font état du lien entre le financement réduit des services, la réduction de la pauvreté et les répercussions sur la santé et la sécurité alimentaire des Ontariennes et Ontariens à faible revenu. Voir Wellesley Institute, Ontario Budget 2012: Austerity is bad for our Health, 2012. Accessible en ligne : Wellesley Institute, www.wellesleyinstitute.com/wp-content/uploads/2012/03/Ontario-budget-2012-Austerity-is-bad-for-our-health-Will-the-budget-avoid-harm-to-children-lowincome-ontarians-and-women1.pdf; 25 in 5 Network for Poverty Reduction, Common Ground: A Strategy for Moving Forward on Poverty Reduction. Third Annual Progress Report on Poverty Reduction in Ontario, décembre 2011. Accessible en ligne : 25 in 5, 25in5.ca/wp-content/uploads/2011/12/25-in-5-Common-Ground-final.pdf, à 5; Social Planning Network of Ontario, A recovery-free zone: the unyielding impact of the economic downturn on non-profit community social services in Ontario, juillet 2010, à 5; Social Planning Network on Ontario, Hard hit: Impact of the Economic Downturn on Nonprofit Community Social Services in Ontario, octobre 2009.

[51] Dans son deuxième document de discussion, la Commission d’examen du système d’aide sociale en Ontario a indiqué qu’environ 60 p. 100 des 27 600 demandes de POSPH acceptées en 2009-2010 concernaient une maladie mentale comme état principal ou secondaire. Commission d’examen du système d’aide sociale en Ontario, Document de discussion 2 : Méthodes de réforme, Toronto, Imprimeur de la Reine pour l’Ontario, février 2012, à 12.

 

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