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13. Services

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Aux termes du Code, les fournisseurs de services ont l’obligation de fournir des services libres de discrimination et de harcèlement. La catégorie des « services » est très vaste et comprend les services grand public (boutiques, restaurants, éducation) et les services qui s’appliquent tout spécifiquement aux personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances (système de santé mentale ou centres de traitement des dépendances). Certains services touchent un nombre restreint de personnes. D’autres, cependant, contribuent considérablement à la capacité des gens de faire valoir leurs droits, de gagner leur vie, de maintenir la santé, d’obtenir justice ou de prendre part à la vie communautaire ou politique. Les types de services qui posaient le plus de problèmes selon les personnes consultées avaient trait à l’éducation et au système de justice pénale (y compris les services de la police, des tribunaux et du système correctionnel), aux programmes d’aide sociale, aux soins de santé physique et mentale, au bien-être de l’enfance, aux règles du gouvernement concernant les permis de conduire, au système d’assurance et aux tribunaux administratifs.

13.1. Disponibilité des services de santé mentale et de soutien

Un grand nombre de participants à la consultation nous ont parlé du besoin pressant de services de santé mentale et autres services de soutien adéquats pour les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances. On nous a fait part des profondes répercussions qu’a le manque de services de santé mentale appropriés sur la vie des gens, y compris l’accroissement de la criminalité, de l’itinérance et de l’isolement social, la perpétuation de la pauvreté, la détérioration de la santé physique et mentale, et les décès prématurés. Nous avons également appris que le manque de services offerts au sein de la collectivité avait un impact sur la capacité des gens de faire valoir leurs droits fondamentaux dans d’autres sphères de la vie. Par exemple, les longs temps d’attente d’évaluations psychologiques afin de déterminer les besoins d’une personne peuvent retarder la mise en œuvre de mesures d’adaptation en matière d’emploi, d’éducation ou de justice pénale, ce qui peut brimer le droit à l’égalité d’accès ou des chances dans ces sphères de la vie.

Les thèmes soulevés durant la consultation reflètent, en partie, les propos des participants aux consultations provinciale et fédérale sur la réforme du système de santé mentale[125]. Par exemple, on nous a fait part du besoin d’accroître les traitements de la maladie mentale et des dépendances, et les services de counselling et de soutien (comme les soutiens au logement et à l’emploi). Les gens ont décrit le fait que de tels services n’étaient souvent pas offerts aux personnes qui sortaient d’établissements psychiatriques ou correctionnels, ou aux détenus des établissements correctionnels. Nous avons appris que certaines clientèles bénéficiant de protections particulières aux termes du Code avaient beaucoup de difficultés à obtenir des services. C’est le cas des jeunes, des Autochtones, des réfugiés et des immigrants, des personnes ayant des troubles de l’apprentissage ou du développement, des troubles auditifs, des troubles de la personnalité limite ou des troubles causés par l’alcoolisation fœtale, des femmes victimes de violence et des membres de la communauté francophone. Nous avons également appris que les personnes provenant de plus d’une de ces clientèles avaient encore davantage de difficultés à trouver des services, ou à y accéder.

Des personnes s’inquiétaient aussi des différences de financement des services dans les collectivités rurales par opposition aux centres urbains de l’Ontario, des très longues listes d’attente pour rencontrer une professionnelle ou un professionnel de la santé mentale, ainsi que de la couverture insuffisante de l’Assurance-santé de l’Ontario en ce qui a trait aux médicaments et aux consultations avec des psychologues, thérapeutes et autres intervenants en santé mentale. Les gens nous ont dit que l’hospitalisation à des fins de traitement posait un problème en ce sens qu’il fallait être sur le bord de la crise ou qualifié de risque pour soi-même ou autrui, aux termes de la Loi sur la santé mentale, pour y être admissible.

De l’avis des personnes consultées, le manque de coordination de la prestation des services et le mandat étroit des services de santé mentale, autres services et ministères gouvernementaux chargés de les financer entraînaient la création d’un amalgame problématique de services auxquels les gens sont inadmissibles. Par exemple, une personne d’Ottawa a expliqué que la définition de « diagnostic double » varie selon que les services sont financés par le ministère de la Santé et des Soins de longue durée ou le ministère des Services sociaux et communautaires[126]. L’Association ontarienne des troubles de l’apprentissage nous a dit que le manque de coordination des services à l’échelle du gouvernement et au sein des ministères constitue un grand problème pour les personnes aux prises avec à la fois des troubles de l’apprentissage et des troubles mentaux.

Je trouve parfois que les services de santé mentale sont très spécifiques. Si vous ne cadrez pas exactement dans la catégorie des services offerts, vous passez par les mailles du filet et n’obtenez pas les services dont vous avez besoin.

            – Participant(e) à la table ronde de North Bay

Des gens se préoccupaient du fait que le système de santé mentale est financé de façon inéquitable comparativement aux soins de santé généraux. Par le passé, d’autres rapports ont documenté les divergences entre le financement du système de santé mentale et du secteur plus vaste des soins de santé[127]. Selon le rapport Romanow de 2002 sur l’état du système canadien de soins de santé, le système de santé mentale a traditionnellement été perçu comme l’« orphelin » des soins de santé étant donné que les programmes relatifs à la santé mentale et aux dépendances ont été gérés séparément des autres programmes de soins de santé[128]. Le Canada accorde moins de financement aux soins de santé mentale que la plupart des pays développés[129]. Pour corriger les déséquilibres sur le plan du financement des soins généraux et soins de santé mentale, la stratégie nationale de la santé mentale de la Commission de la santé mentale du Canada recommande d’accroître les investissements dans la santé mentale et les autres sphères sociales (comme le logement, l’éducation et le système de justice pénale)[130]. D’autres ont suggéré de fusionner les systèmes de santé générale et de santé mentale de façon à traiter la personne dans son entier.

La Cour suprême du Canada a donné aux gouvernements la latitude de répartir les ressources et de choisir les services qu’ils financeront. Les fonds ne doivent pas, cependant, être répartis de façon discriminatoire[131]. Si sa répartition des ressources en soins de santé a un effet néfaste sur l’un quelconque des groupes protégés aux termes du Code, le gouvernement peut être obligé de démontrer que sa décision est raisonnable et légitime (de bonne foi) compte tenu des circonstances. Cela inclut le fait d’examiner l’objectivité du processus utilisé pour prendre la décision et la possibilité que la décision relative à la couverture de soins de santé ait été basée sur des points de vue discriminatoires à l’endroit du groupe en question[132].

Le manque d’accès des personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances à des soins de santé appropriés peut aussi entrer en conflit avec les droits de ces personnes aux termes de la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CRDPH). Selon la CRDPH, les États Parties (y compris le Canada) fourniront aux personnes handicapées les services dont elles ont besoin spécifiquement en raison de leur handicap, y compris des services de dépistage et d’intervention précoce, au besoin (par. 25(b)) et les États Parties organiseront, renforceront et développeront des services et programmes diversifiés d’adaptation et de réadaptation, en particulier dans les domaines de la santé, de l’emploi, de l’éducation et des services sociaux (par. 26(1)).

La plupart des gens ont fait état du besoin de mettre sur pied davantage de services de santé mentale et d’autres services de soutien qui répondent aux besoins diversifiés des personnes au moyen d’une variété d’approches. La CODP n’a pas pour rôle d’émettre des recommandations sur la façon d’octroyer des fonds aux divers services de santé mentale, de traitement des dépendances ou autres, ni l’expertise nécessaire pour se prononcer à ce chapitre. Cependant, toute inégalité sur le plan de la disponibilité de ces services ne devrait pas contribuer aux obstacles auxquels se heurtent les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances lorsqu’il s’agit d’obtenir des soins de santé et autres soutiens appropriés comparativement aux personnes non handicapées ou aux prises avec d’autres types de handicap.

Recommandation :

29. Le gouvernement de l’Ontario devrait cerner et éliminer les inégalités en matière de soins de santé, services de réadaptation et autres services de soutien auxquelles se heurtent les personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances, comparativement à la population générale.

13.2. Obligation d’accommodement en matière de services

La section 2.4 présente les grandes lignes de l’obligation d’accommodement. On nous a aussi fait part de ce qui suit :

a) 13.2.1. Services inclusifs et accessibles

Beaucoup de personnes consultées ont décrit comment différents types de services, y compris les services de soutien au revenu, services policiers et services de soutien à la santé mentale, ne sont habituellement pas conçus de façon à répondre aux besoins des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances. Des obstacles liés aux attitudes peuvent exister et nuire à ces personnes. Selon l’Association des travailleuses et travailleurs sociaux de l’Ontario (ATTSO), la conception même des services peut inclure de la discrimination en situation de : ressources limitées; mécanismes de reddition de comptes déficients; manque de mandats spécifiques, de formation et de capacité nécessaire pour travailler auprès de clients perçus comme étant difficiles à aider et de cas plus complexes.

Les participants à la consultation étaient aussi d’avis que les services ne sont souvent pas conçus de façon à répondre aux besoins des personnes aux prises avec des handicaps épisodiques. Quand le service est prêt à intervenir, la personne peut ne pas être prête pour l’intervention, et vice versa. Compte tenu de restrictions sur le plan du financement, certaines organisations peuvent uniquement avoir pour mandat d’aider les personnes ayant des handicaps graves. Des gens peuvent être poussés à démontrer non pas qu’ils ont un handicap les affectant considérablement, mais qu’ils répondent aux critères de handicaps permanents (bureau des droits de la personne de l’Université de Guelph). Enfin, des personnes ont raconté s’être fait refuser des prestations ou des services parce qu’au moment de l’évaluation, certains de leurs problèmes n’étaient pas débilitants.

Tout au long de la consultation, on nous a dit que les services reposaient sur la notion de handicap unique. Les personnes qui ont des handicaps multiples ont de la difficulté à se prévaloir de certains services ne bénéficiant pas d’une conception inclusive. Beaucoup de gens ont indiqué que la présence d’une déficience intellectuelle, d’une dépendance ou d’un trouble de l’apprentissage concomitant pouvait créer un obstacle à l’obtention d’un traitement de la maladie mentale ou de services de soutien. Certains services peuvent être conçus de façon à accueillir uniquement les personnes aux prises avec des handicaps physiques ou autres, tout en excluant les personnes ayant des handicaps psychosociaux qui pourraient également bénéficier de leur assistance.

La conception, la structure, les politiques et les processus de prise de décisions des services peuvent également, par inadvertance, créer des obstacles pour les personnes qui ont des troubles psychiques ou des dépendances. D’après l’ATTSO, entre autres, beaucoup de systèmes de santé mentale et de soutien comptent des processus d’aiguillage qui sont peu efficaces en présence de symptômes de maladie mentale. Certains usagers/survivants ou personnes aux prises avec des dépendances peuvent avoir de la difficulté à organiser leurs pensées, ce qui peut s’avérer problématique lorsqu’il est nécessaire de garder un œil constant sur des listes d’attente.

Les formulaires de demande de certains services (p. ex. des tribunaux administratifs ou du POSPH) ont été qualifiés de complexes, difficiles à remplir et rédigés en langage qui n’est pas simple. Certains processus de demande exigeraient aussi la transmission d’une documentation substantielle pouvant entraîner des frais que les demandeurs n’ont pas les moyens de débourser. Les centres d’appels qui effectuent l’évaluation initiale, pour les programmes d’aide sociale ou Aide juridique Ontario par exemple, ont été caractérisés de difficiles à accéder. Les processus de demande peuvent poser des difficultés extrêmes aux personnes qui n’ont pas accès à un téléphone ou ont des troubles cognitifs ou de la mémoire, ou un niveau d’alphabétisation peu élevé. Consulter la section 2.5.1.2.1. pour connaître les inquiétudes des participants par rapport au processus de demande d’un logement avec services de soutien.

Certaines méthodes de paiement ou d’évaluation pourraient sans le vouloir encourager les fournisseurs de services à refuser les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances. Le fait de rémunérer les fournisseurs de services selon le nombre de clients et d’évaluer leur rendement en fonction de cibles axées sur la prestation de services à un nombre élevé de clients (p. ex. cabinets de médecins) peut avoir un effet néfaste sur les personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances, ou d’autres types de handicap qui requièrent plus de temps (ACSM – Ontario; ARCH). Nous avons aussi appris que les personnes ayant des handicaps psychosociaux pouvaient être perçues comme étant plus « difficiles » si elles requièrent plus de temps de la part des fournisseurs de services. Le fait d’accorder plus de temps à des clients en raison de besoins liés à un handicap s’inscrit dans l’obligation d’accommodement. Des fournisseurs de services ont déclaré qu’on ne peut pas accorder plus de temps à des clients qui en aurait besoin sans prendre en compte les besoins des autres clients qui ont aussi besoin du service.

Box: L’organisme ARCH a expliqué que certains avocats qui acceptaient des certificats d’aide juridique pouvaient hésiter à représenter des clients qui n’ont peut-être par la capacité juridique, mais ne sont pas accompagnés d’un décideur substitut. Le fait d’évaluer la capacité d’une personne à chaque rendez-vous prend du temps, pour lequel l’avocat n’est pas nécessairement rémunéré. End of box

Comme dans le secteur du logement social, les personnes ayant des handicaps psychosociaux peuvent être rejetées ou se faire refuser des services en raison de facteurs en lien avec leur handicap. En particulier, certains usagers de services ayant des troubles psychiques peuvent se voir refuser des services parce qu’ils sont jugés à « risque élevé » en raison de comportements en lien avec leur handicap, affichés par le passé auprès du même fournisseur ou d’un fournisseur différent. Le fait que de nombreux fournisseurs ne tiennent pas compte de leur obligation d’accommodement et refusent tout simplement les personnes ayant un casier judiciaire, même si ce casier a trait à un problème de santé mentale ou une dépendance, était aussi une source de préoccupations.

De plus, selon certaines personnes, il peut arriver que des fournisseurs de services refusent de fournir des services à des personnes qui ne respectent pas les modalités du traitement recommandé, ne se comportent pas de la façon à laquelle le fournisseur s’attend ou n’acceptent pas un certain type de traitement de la maladie mentale alors qu’il ne s’agit pas d’une condition légitime (de bonne foi) de participation au service. Par exemple, un étudiant universitaire a raconté qu’on lui avait refusé les mesures d’adaptation des examens requises par son handicap parce qu’il ne voyait pas son conseiller à intervalles réguliers.

Box: Des personnes ont rapporté à la CODP que si elles ne prenaient pas les médicaments prescrits par leur psychiatre ou médecin, ce dernier les informait qu’il cessait de les aider. End of box

Pour évaluer correctement les besoins des personnes ayant des handicaps psychosociaux, on nous a dit que les services devraient être conçus de façon à accorder à chaque personne le temps et la flexibilité nécessaires, en fonction de ses besoins individuels, sans qu’il soit essentiel de s’informer de la présence d’un handicap ou de supposer qu’il y en existe un. Selon les personnes consultées, les règles, politiques et procédures des organisations doivent être modifiées et assouplies afin de répondre aux besoins individuels des clients. À propos de la restructuration des services ou des systèmes, les participants de la table ronde d’Ottawa ont exprimé particulièrement clairement le besoin d’inclure les usagers/survivants au processus afin qu’ils orientent les travaux, en ajoutant qu’on « ne devait rien planifier pour eux, sans eux ».

Parmi les types de mesures d’adaptation en matière de services dont pourrait avoir besoin une personne aux prises avec des troubles psychosociaux figurent :

  • des délais flexibles ou plus de temps
  • un environnement de services tranquille
  • un soutien additionnel de la part de personnes (soutien humain)
  • des modes de communication multiples avec l’organisation (p. ex. téléphone, courriel, en personne, poste)
  • de l’aide ou du soutien à la prise de décisions
  • des formulaires d’admission et d’autres formes de communication écrite accessibles et rédigées en langage simple
  • de la flexibilité sur le plan de l’établissement des rendez-vous
  • la prise en compte du handicap comme facteur atténuant avant d’imposer des mesures punitives.

Recommandation :

30. Aux termes de la LAPHO et du Code, les organismes de services devraient passer en revue leurs politiques, pratiques, formulaires de demande et procédures de prise de décisions en collaboration avec des groupes d’usagers/de survivants et des experts en matière d’accessibilité de façon à cerner et à éliminer les obstacles pouvant mener au traitement inéquitable des personnes ayant des handicaps psychosociaux ou des dépendances.

13.3. Traitement inéquitable et harcèlement en matière de services

De nombreux fournisseurs de services sont conscients de leur obligation individuelle d’assurer le traitement équitable des personnes aux termes du Code. D’ailleurs, certaines personnes consultées ont décrit de très bonnes interactions avec des fournisseurs de services, durant lesquelles elles se sont senties respectées, estimées et incluses. Des centaines d’organisations et de fournisseurs de services individuels ont pris le temps de faire part de leurs préoccupations relativement à la violation des droits fondamentaux des personnes ayant des problèmes de santé mentale et des dépendances. Comme l’a expliqué un fournisseur de services, directeur régional d’un centre de soins de santé, « […] nous nous impliquons toujours à fond dans ces questions parce que nous croyons que les clients font l’objet de discrimination ».

D’un autre côté, beaucoup de participants ont noté que, comparativement à la population générale, les personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances peuvent se heurter à des comportements non professionnels ou à des traitements inéquitables de la part de fournisseurs de services, y compris des commentaires ou comportements en lien avec le handicap qui peuvent équivaloir à du harcèlement ou empoisonner l’environnement de services. Ils relatent aussi des jugements de la part de fournisseurs de services selon lesquels les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances tentent de « tirer avantage » des systèmes.

Ces commentaires et comportements peuvent résulter d’attitudes négatives ou discriminatoires à l’égard des personnes ayant des handicaps psychosociaux. Selon l’Association des travailleuses et travailleurs sociaux de l’Ontario, les fournisseurs de services peuvent parfois utiliser un « langage commun qui est discriminatoire, désobligeant et plein de jugements, qui peut rendre des usagers éventuels peut enclins à recourir à leurs services. Les fournisseurs de services peuvent parfois s’attarder uniquement à l’étiquette collée à l’usager/au survivant, réduisant ainsi l’identité de la personne à sa maladie. »

Après ma chirurgie, le chirurgien m’a dit : « Si j’avais su que tu étais fou, je ne t’aurais pas opéré ».

– Participant(e) au groupe de consultation

Des personnes se préoccupaient tout particulièrement du fait que certains professionnels de la santé mentale et des soins primaires créaient un environnement de services peu accueillant et empoisonné, où les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances pouvaient faire l’objet de harcèlement.

J’ai travaillé au sein [du personnel ambulancier paramédical] de services d’urgence et ces gens-là dénigrent beaucoup les personnes qui ont des troubles mentaux. À l’heure du lunch, ils parlaient d’aller chercher une autre « folle » ou un autre « dopé ». Et ce sont des intervenants de première ligne.

– Participant(e) à la table ronde de North Bay (qui se qualifiait également d’usager(e)/de survivant(e))

La Commission de la santé mentale du Canada a dirigé la première phase de sa campagne pancanadienne de lutte contre la stigmatisation sur les professionnels de la santé, en partie parce que le rapport Kirby faisait état des mêmes préoccupations[133].

Deux personnes nous ont donné un exemple de l’effet de l’étiquetage en nous racontant qu’elles avaient dû porter un brassard mauve à l’hôpital pour indiquer qu’elles représentaient un danger pour elles-mêmes ou autrui (elles étaient toutes les deux suicidaires). Elles ont déclaré s’être senties très stigmatisées. L’une d’entre elles a aussi affirmé avoir été plus mal traitée par le personnel de l’hôpital lorsqu’elle portait le brassard que lors d’un autre séjour, lorsqu’elle n’avait pas eu à le porter.

Box: Les participants à la consultation ont soulevé des préoccupations en matière de vie privée. Beaucoup de personnes ont dit que les renseignements sur les antécédents de maladie mentale ou de dépendances d’une personne peuvent être transmis d’un fournisseur de services à un autre, souvent après que la personne concernée a signé un formulaire de consentement « général » des années plus tôt. Les formulaires de consentement ne sont pas toujours renouvelés sur une base annuelle, ce qui peut donner aux fournisseurs de services accès à des renseignements médicaux privés dont ils n’ont pas besoin pour fournir le service, et violer la vie privée de l’usager du service. End of box

13.4. Types de services soulevant des préoccupations

a) Éducation

Box: L’article 24 de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées garantit le droit à l’éducation. En ratifiant la CRDPH, le Canada s’est engagé à prendre des mesures graduelles pour s’assurer que les élèves handicapés ne sont pas exclus du système éducatif en raison de leur handicap, et qu’ils ont accès à des mesures d’adaptation et à des mesures de soutien individualisé afin de maximiser leur développement scolaire et social en conformité avec l’objectif d’inclusion[134].  End of box

Les problèmes de santé mentale font souvent éruption quand la personne est en âge d’aller à l’école et qu’elle fréquente un établissement primaire, secondaire ou postsecondaire. Selon les personnes consultées, l’évaluation initiale des élèves touchés et la détermination de leurs besoins revêtent une importance critique. À Windsor, des participants se préoccupaient du fait que des élèves puissent être qualifiés de « paresseux » ou de « fauteurs de troubles » lorsqu’ils ont des troubles mentaux naissants qui ne sont pas reconnus ou pris en compte. Ces élèves peuvent avoir besoin de mesures d’adaptation à tous les niveaux scolaires pour assurer leur accès équitable à l’éducation. Les mesures d’adaptation que requièrent habituellement les élèves ayant des problèmes de santé mentale incluent l’adaptation des examens, l’offre de soutien humain, l’extension des délais de production des travaux, ainsi que la prise en compte des absences liées au handicap et, dans le cas des suspensions scolaires, des facteurs atténuants liés au handicap.

École primaire et secondaire

Selon l’organisme ARCH, les obstacles liés aux attitudes sont courants au sein du système d’éducation publique de l’Ontario. Les stéréotypes, suppositions et attitudes discriminatoires constituent d’importants obstacles et pourraient empêcher certains élèves aux prises avec des troubles mentaux d’obtenir des mesures d’adaptation appropriées. Nous avons entendu que les élèves ayant des problèmes de santé mentale peuvent être considérés comme n’ayant pas les capacités requises pour réussir. Ces suppositions sont peut-être plus courantes si la personne handicapée se heurte aussi à de la discrimination raciale ou à de la discrimination fondée sur d’autres motifs visés par le Code. D’après les participants au groupe de consultation de l’Ethno-Racial Disability Coalition of Ontario, les élèves racialisés dont les parents ont une maladie mentale ou une dépendance peuvent être ciblés à l’école et orientés vers des programmes qui ne leur permettent pas d’atteindre leur plein potentiel.

Certains participants à la consultation ont décrit avoir été mal traités, intimidés ou exclus par d’autres élèves en raison d’un trouble psychosocial, ou s’être sentis exclus après avoir été qualifiés de « différents ».

Il est encore courant d’être ostracisé à l’école parce qu’on agit étrangement ou différemment. Et si on choisit d’expliquer ce qui se passe, les gens n’en savent pas assez sur la maladie mentale pour ne pas hausser les épaules ou en rire. Il faut sensibiliser davantage les élèves de tous les niveaux scolaires, pas seulement à propos des handicaps physiques mais aussi des handicaps mentaux.

      – Participant(e) au sondage

Beaucoup d’élèves mettent fin à leurs études en raison du manque de services appropriés de traitement ou d’évaluation. Nous avons appris que des élèves pouvaient attendre jusqu’à deux ans pour obtenir une évaluation psychologique dans le but de cerner leurs besoins. Selon l’OSSTF/FEESO, le système éducatif doit parfois bloquer l’accès aux études aux élèves qui constituent un danger pour eux-mêmes ou autrui en raison du manque de ressources adéquates pour évaluer et traiter ces élèves. Malgré les situations où un élève peut représenter un risque pour sa santé ou sécurité, ou celle d’autrui, la Directive concernant l’éducation accessible de la CODP indique que le processus d’accommodement doit être exploré pleinement jusqu’au point de préjudice injustifié.

Plusieurs personnes consultées, dont l’organisme ARCH, craignaient que les élèves aux prises avec des handicaps multiples, y compris des troubles du comportement et des déficiences intellectuelles et développementales comme l’autisme ou le DCA/THADA, soient suspendus ou renvoyés de l’école en raison de comportements liés à leur handicap, sans exploration convenable des mesures d’adaptation possibles. Nous reconnaissons cette possibilité depuis des années, et l’avons abordée dans le cadre de notre consultation sur l’éducation accessible, présentée dans Une chance de réussir. Selon ARCH, les suspensions fréquentes et mauvais résultats scolaires dus au manque de mesures d’adaptation convenables aux handicaps ont des effets très négatifs sur la santé mentale des élèves. Des parents et élèves ont rapporté à l’organisme que les suspensions multiples et le manque d’accès à des mesures d’adaptation à l’école entraînent des troubles anxieux, la dépression ou une mauvaise estime de soi. Comme le faisait remarquer l’OSSTF/FEESO, les élèves qui ont des phobies scolaires non traitées, une dépression ou une psychose non diagnostiquée peuvent ne pas vouloir ou pouvoir fréquenter l’école de façon régulière. Le comité consultatif de l’éducation spéciale du conseil scolaire de district Lakehead a recommandé de fournir des ressources aux conseils scolaires pour faire en sorte d’offrir au personnel et aux élèves la formation appropriée pour régler toute question d’accommodement pouvant survenir.

Le conseil scolaire a dit que la santé mentale ne le concernait pas, immédiatement après qu’un autre garçon ayant des besoins particuliers se soit suicidé l’année dernière. Je devais recevoir des services d’ergothérapie l’an dernier, mais l’école n’a pas pris la peine de traiter ma demande pour que je puisse obtenir de l’assistance. Aucun membre du personnel n’a même lu mon dossier pour que je reçoive l’aide appropriée pour mon apprentissage. On m’a donné la note de passage sans même que j’effectue les travaux ou examens. C’est plus facile de suspendre les élèves que de les aider. Si on pose un geste légèrement inapproprié, ils appellent la police sans avertir nos parents pour qu’ils puissent venir nous défendre. Ma mère dit que c’est une façon de nous faire peur.

      – Participant(e) au sondage

Des personnes se préoccupaient du fait que les élèves aux prises avec des handicaps, y compris des problèmes de santé mentale, sont parfois placés dans des classes pour l’enfance en difficulté sans le consentement des parents et sans grande possibilité d’inclusion dans des classes ordinaires. Cela ne respecte pas le principe d’inclusion inhérent aux droits de la personne, les Directive concernant l’éducation accessible de la CODP, la position stratégique du ministère de l’Éducation et l’orientation du Règlement 181/98 pris en application de la Loi sur l’éducation, qui régit le placement des élèves en difficulté en salles de classe[135].

Les personnes consultées ont déclaré que la stratégie sur l’éducation inclusive du ministère de l’Éducation offrait une fondation positive pour le respect des droits fondamentaux des élèves handicapés. La stratégie et la Note Politique/Porgrammes no119 reconnaissent que les obstacles discriminatoires en matière d’apprentissage peuvent nuire aux élèves qui ont des troubles mentaux ou d’autres motifs de discrimination interdits aux termes du Code. La Note no 119 énonce les exigences auxquelles tous les conseils scolaires financés par les fonds publics doivent satisfaire en matière d’élaboration, de mise en œuvre et de suivi de l’exécution d’une politique en matière d’éducation équitable et inclusive, conçue pour favoriser un climat scolaire sain qui est libre de discrimination et de harcèlement[136].

De plus, les trois premières années de la stratégie sur la santé mentale du ministère de la Santé et des Soins de longue durée (MSSLD), d’une durée de 10 ans, portent tout particulièrement sur les enfants et les jeunes. Le MSSLD a déclaré qu’il investirait dans l’accroissement des ressources en santé mentale (dont des intervenants) dans les écoles en plus de faire la promotion des connaissances sur la santé mentale en milieu scolaire et des pratiques libres de stigmatisation visant, entre autre, les enfants, les jeunes et les éducateurs[137].

Établissements postsecondaires

Les mémoires axés sur l’éducation postsecondaire portaient principalement sur l’obligation des établissements d’offrir des mesures d’adaptation aux étudiants ayant des troubles psychiques jusqu’au point de préjudice injustifié, au moment de la demande d’admission et durant les études. Plusieurs étudiants ont dit avoir eu facilement accès à des mesures d’adaptation étant donné que les établissements postsecondaires abritent des bureaux d’aide aux personnes handicapées qui procurent de l’assistance à ce chapitre. D’autres personnes ont cependant affirmé qu’il y avait quand même des lacunes sur le plan des pratiques d’accommodement qui faisaient en sorte que les étudiants aux prises avec des troubles psychiques étaient plus susceptibles d’abandonner leurs études.

Malgré le fait que je participe au programme pour personnes handicapées de l’école, qui me donne accès à certaines mesures d’adaptation, il m’arrive de frapper des professeurs qui ne sont pas prêts à respecter ces mesures. Je crois que les gens pensent que je fais semblant parce que mon handicap n’est pas visible. Ça me coûte tellement de devoir me battre pour obtenir ces mesures que je finis habituellement par abandonner le cours, et je me retrouve avec encore plus de retard à l’école.

            – Participant(e) au sondage

D’après ce qu’on nous a dit, les étudiants aux prises avec des troubles psychosociaux sont parfois tenus d’expliquer des périodes d’interruption de l’emploi ou des études, ce qui réduit leurs chances d’être acceptés dans un programme d’études postsecondaires. Or, ces périodes d’interruption peuvent avoir servi à se rétablir d’un problème de santé mentale ou d’une dépendance (ARCH). On nous a également fait part de cas où des professeurs ou d’autres personnes avaient contesté la prestation de mesures d’adaptation, ou l’établissement avait exigé des renseignements détaillés sur un handicap ou un diagnostic avant d’accorder de telles mesures, ce qui était perçu comme une atteinte à la vie privée des étudiants.

Comme c’est le cas dans les écoles primaires et secondaires, des personnes ont indiqué que les retards sur le plan de la prestation des services de santé mentale (p. ex. obtention d’un rendez-vous avec un psychiatre) réduisent l’accès à l’éducation des étudiants aux prises avec des troubles psychiques et des dépendances parce que les établissements postsecondaires dépendent des évaluations de ces intervenants pour donner suite aux demandes d’accommodement. Selon le bureau des droits de la personne de l’Université de Guelph, les éducateurs doivent tenir compte de la nature variable des problèmes de santé mentale des étudiants au moment de planifier les mesures d’adaptation. D’ajouter le bureau, les demandes de mesures d’adaptation doivent être examinées au cas par cas en fonction des besoins des étudiants, sans perdre de vue l’importance pour l’établissement de maintenir l’intégrité de ses programmes d’études.

La CODP a appris que certains professeurs tentent de dissuader des étudiants aux prises avec des antécédents de troubles mentaux d’effectuer des stages coopératifs ou d’apprentissage dans le secteur de la santé mentale ou dans un environnement où ils devraient travailler auprès de gens. Cela a des répercussions sur leur carrière future. De plus, l’obligation de se soumettre à une vérification du casier judiciaire (voir la section 7 pour obtenir de plus amples renseignements) a eu un effet sur la capacité des gens de décrocher des stages coopératifs ou d’apprentissage dans des secteurs vulnérables.

Je n’ai pas pu participer à un programme de sciences de laboratoire médical. L’admission au programme exigeait une vérification du casier judiciaire parce que j’aurais effectué des prises de sang auprès de patients. On a refusé de m’accepter dans le programme en raison de deux épisodes suicidaires où la police m’a conduit à l’hôpital.

      – Participant(e) au sondage

b) Présomption de risque : permis de conduire, protection de l’enfance et assurance

Une intervenante de la société d’aide à l’enfance m’a déjà dit : « Mais vous avez un trouble bipolaire. Comment pouvez-vous élever des enfants? » Cette même intervenante a admis qu’elle ne croyait pas que les personnes ayant une maladie mentale pouvaient être parents.

– Participant(e) au sondage

D’après beaucoup de gens, les services de protection de l’enfance, les assurances vie et invalidité et les règles régissant la suspension du permis de conduire peuvent aussi poser des problèmes du point de vue des droits de la personne. En particulier, les gens craignaient de ne pas faire l’objet d’un traitement équitable relativement à ces services parce qu’on présumait qu’ils posaient un risque en raison de leur handicap.

Le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques et d’autres personnes consultées s’inquiétaient du fait que la suspension du permis de conduire en raison d’un trouble mental ou d’une dépendance à l’alcool ou à une autre drogue aux termes du Code de la route est effectuée sans évaluation individualisée préalable de la situation médicale de la personne par des médecins ou par le ministère des Transports. Le processus d’appel en vue de récupérer son permis de conduire aurait également des répercussions disproportionnées sur les personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances étant donné son coût et sa complexité.

On nous a également parlé du système de bien-être de l’enfance. D’après les participants, les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances sont parfois considérées comme un danger pour leurs enfants en raison de stéréotypes liés au handicap. On nous a dit que des parents avaient été signalés à la société d’aide à l’enfance après avoir dévoilé un problème de santé mentale à la direction de l’école de leur enfant, et que les tests de dépistage des drogues peuvent ne pas adéquatement évaluer le danger que représente une personne pour ses enfants.

Beaucoup de personnes ont raconté avoir de la difficulté à souscrire une assurance vie ou invalidité, y compris de l’assurance individuelle et collective, en raison de troubles psychosociaux ou de dépendances, et des risques connexes de suicide ou d’invalidité. Elles nous ont également dit qu’elles n’étaient pas admissibles à une couverture d’assurance en raison d’un « état de santé antérieur », même si elles sont actuellement en bonne santé.

Selon le Centre d’assistance juridique en matière de droits de la personne, l’absence de symptômes liés au handicap et de traitement dans les 12 derniers mois pourrait constituer une condition d’admissibilité à une protection d’assurance. Cependant, cette condition pourrait nuire aux personnes aux prises avec des troubles mentaux en pénalisant les personnes qui suivent un traitement les tenant en santé. D’expliquer l’Association canadienne des compagnies d’assurances de personnes, les assureurs évaluent le risque d’une personne en fonction des facteurs comme la gravité de l’état de santé, son caractère chronique ou récurrent, le dossier de soins du médecin traitant et le temps écoulé depuis le plus récent incident ou épisode symptomatique.

Quand des distinctions sont établies dans ces secteurs relativement à un handicap, et qu’elles créent un préjudice, il peut s’agir de discrimination. Le Code pourrait prévoir des défenses et des exceptions dans ces cas, qu’il faudrait envisager. Les organisations doivent s’assurer que les risques sont évalués au cas par cas, sur la base de critères objectifs.

Engagement de la CODP :

E19. La CODP examinera davantage les politiques et processus relatifs à la suspension des permis de conduire, à la protection de l’enfance ou aux assurances, et consultera les intervenants et ministères gouvernementaux appropriés pour déterminer s’ils contreviennent au Code. Dans le cas de possibles violations du Code, la CODP utilisera les moyens prévus par son mandat pour régler les sources de préoccupations.

c) Aide sociale

Le système d’aide sociale est un système cruel qui laisse les clients croire qu’une fois qu’ils bénéficient d’un revenu « pour handicapé », leur vie se résumera à cela, à une vie de pauvreté et d’inutilité perpétuelles. En quoi est-ce une méthode saine économiquement parlant? En quoi le fait de sous-utiliser les ressources humaines est-il intelligent ou vaguement bon pour la prospérité globale de notre province ou de notre pays?

            – Mémoire écrit

Une grande partie de la consultation a porté sur l’expérience des bénéficiaires de l’aide sociale. On nous a fait part d’obstacles relatifs à la conception et à la prestation des programmes d’aide sociale qui portaient préjudice aux personnes ayant des handicaps psychosociaux. Comme l’indique la section sur le statut socioéconomique, le gouvernement de l’Ontario revoit actuellement ses programmes OT et POSPH dans le but d’y éliminer les obstacles et d’accroître les possibilités d’emploi des bénéficiaires.

Le processus de demande d’aide sociale (OT et POSPH) était une source de préoccupations pour les personnes consultées. En plus de la nature complexe des formulaires, de nombreuses personnes ont indiqué qu’il pouvait être très difficile de rassembler toute l’information requise dans les délais prévus, surtout lorsqu’on a des symptômes de handicap. Pour certaines personnes, cela peut entraîner la perte des prestations ou l’inadmissibilité au programme.

Nous avons appris que l’« énergie émotionnelle » requise pour évoluer au sein du système d’aide sociale, jumelée aux symptômes de santé mentale, était souvent trop considérable, et poussait certaines personnes à « abandonner » tout simplement. Ces personnes étaient ensuite incapables de se procurer des articles de première nécessité comme de la nourriture et de payer leur loyer ou leurs factures de services publics. D’autres personnes ont décrit comment le stress causé par le système avait eu des effets néfastes sur leur santé mentale. Un représentant du programme d’aide sociale a rapporté à la CODP que des efforts avaient été déployés pour accroître l’accessibilité du service en améliorant les lettres et brochures, et en accroissant la disponibilité des chargés de cas.

Il semble impossible de s’y retrouver au sein du système. [Après mon congé de l’hôpital] Je n’avais pas les pensées claires. Nous sommes laissés à nous-mêmes. Il y a un système, mais il est presque impossible d’y accéder.

      – Participant(e) à la table ronde de Toronto

On nous a aussi fait part de préoccupations quant aux types de prestations dont les gens ont besoin en raison de leur handicap, mais qui ne sont pas offerts par les programmes d’aide sociale. Des personnes ont indiqué que le POSPH ne couvrait pas certains frais médicaux additionnels liés au handicap, comme les coûts des régimes alimentaires spéciaux requis en raison d’un problème de santé mentale ou d’une dépendance. La CODP intervient dans une affaire en cours devant le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario pour contester certains aspects du programme de régime alimentaire spécial offert dans le cadre du POSPH (et d’OT). L’affaire pourrait entraîner l’élimination des prestations pour régime alimentaire spécial offertes aux personnes schizophrènes qui prennent certains types de médicaments.

Beaucoup de personnes ont rapporté que les fournisseurs de services ne tenaient pas compte de leurs besoins individuels en lien avec leur handicap. Par exemple, certains fournisseurs pouvaient fixer des rendez-vous à des heures ou une personne ne pouvait se présenter en raison de symptômes de son handicap. Selon des participants, les problèmes de mémoire et de concentration, et les difficultés à s’exprimer en raison d’un handicap, peuvent faire en sorte qu’il soit difficile de « défendre ses besoins » devant un chargé ou une chargée de cas, ce qui peut retarder la prestation des services. D’autres ont déclaré que les attitudes négatives à l’endroit des usagers de services étaient courantes et qu’elles avaient l’impression qu’on les traitait comme si elles « profitaient » du système.

Des conditions strictes ou des procédures complexes de réadmission aux programmes d’aide sociale peuvent créer des obstacles pour les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou d’autres handicaps épisodiques en compliquant l’accès à répétition au système. Dans le cas du RAFEO, le bureau des droits de la personne de l’Université de Guelph a fait remarquer que des étudiants doivent parfois abandonner leur session complète en raison d’un handicap, ce qui peut entraîner une restriction sur le plan du RAFEO. Les étudiants peuvent en appeler d’une telle restriction seulement une fois, ce qui ne convient pas dans le cas de problèmes de santé mentale ou  dépendances à nature imprévisible.

Des préoccupations ont également été soulevées par rapport à l’accès des personnes aux prises avec des dépendances au programme OT et au POSPH. Après la décision dans l’affaire Tranchemontagne, le gouvernement de l’Ontario a commencé à permettre aux personnes dont le seul handicap était une dépendance de participer au POSPH. Par contre, même lorsque le médecin détermine que la dépendance d’une personne constitue un handicap, l’organisme ARCH affirme que l’admissibilité au POSPH peut être difficile à obtenir et nécessiter l’appel d’un refus initial. D’autres participants se sont dits préoccupés du fait que les personnes ayant des dépendances font l’objet d’un suivi plus étroit que les autres bénéficiaires du programme OT et qu’elles risquent de perdre leurs prestations si une rechute les empêche de participer à leur programme de toxicomanie obligatoire[138].

Recommandation :

31. La Commission d’examen du système d’aide sociale de l’Ontario devrait se pencher sur l’inaccessibilité des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances au système d’aide sociale et veiller à ce que les politiques et pratiques en matière d’aide sociale n’aient pas d’effet néfaste sur les personnes protégées aux termes du Code, dont les personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances.

d) Soins de santé

Box: Selon l’article 25 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, les personnes handicapées ont le droit de jouir du meilleur état de santé possible sans discrimination fondée sur le handicap. Cela signifie, entre autres :

  • de fournir aux personnes handicapées des services de santé couvrant la même gamme et de la même qualité que ceux offerts aux autres personnes
  • de fournir aux personnes handicapées les services de santé dont celles-ci ont besoin en raison spécifiquement de leur handicap
  • d’exiger des professionnels de la santé qu’ils dispensent aux personnes handicapées des soins de la même qualité que ceux dispensés aux autres, notamment qu’ils obtiennent le consentement libre et éclairé des personnes handicapées concernées; à cette fin, les États Parties mènent des activités de formation et promulguent des règles déontologiques pour les secteurs public et privé de la santé de façon, entre autres, à sensibiliser les personnels aux droits de l’homme, à la dignité, à l’autonomie et aux besoins des personnes handicapées
  • d’empêcher tout refus discriminatoire de fournir des soins en raison d’un handicap[139]End of box

Soins de santé primaires

Les personnes handicapées ont le droit à des soins de santé aux termes des lois internationales sur les droits de la personne. Elles ont aussi le droit, aux termes du Code et de la CRDPH, de ne pas subir de discrimination en matière de soins de santé. Un grand nombre de personnes ont rédigé des mémoires sur leur vécu au sein du système de santé, y compris dans les salles des urgences ou auprès de médecins de famille et de professionnels des soins de santé, ou sur celui de connaissances ayant des troubles mentaux ou des dépendances.

Selon CAMH et l’ACSM – Ontario, les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances sont en général moins susceptibles de recevoir des soins de santé primaires ou d’avoir le même accès à l’hospitalisation que la population générale, ce qui constitue en soi un obstacle systémique[140]. Les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ont aussi rapporté devoir attendre longtemps avant d’obtenir de l’aide dans les salles des urgences parce qu’on ne juge pas leur situation « urgente » comparativement à celle des personnes ayant d’autres types de maux[141].

Le fait que les fournisseurs de services ne prennent pas au sérieux les symptômes physiques des gens s’ils savent que ceux-ci ont un problème de santé mentale ou une dépendance inquiète aussi considérablement. Cela peut mener à des erreurs de diagnostic, à des délais sur le plan du traitement, au traitement non approprié des symptômes physiques et à la non-évaluation du patient. Par conséquent, des participants ont rapporté avoir caché leurs troubles mentaux, médicaments ou dépendances à leur médecin par crainte qu’on ne prenne pas leurs symptômes sérieusement, ou qu’on leur refuse des services.

On nous a aussi dit qu’on soupçonnait souvent les gens d’être « en quête de drogues » lorsqu’ils cherchent à obtenir des soins médicaux pour des symptômes physiques graves (BIPEP)[142]. Une personne a raconté s’être rendue à l’hôpital en raison d’une douleur abdominale grave. Lorsque les médecins ont appris qu’elle suivait un traitement de substitution à la méthadone, ils l’ont laissée seule à attendre pendant 10 heures, même après qu’elle a perdu connaissance à cause de la douleur. Plus tard, les médecins ont déterminé qu’elle avait besoin d’une chirurgie intestinale. D’après le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques (BIPEP), la province a besoin de politiques et de procédures claires si elle ne veut pas que les préjugés associés aux troubles psychiques, y compris l’importance disproportionnée accordée à la sécurité individuelle et publique, prennent le dessus sur les problèmes non psychiques et créent des obstacles à l’obtention de soins primaires.

Un thème important de la consultation gravitait autour du fait que de nombreux médecins, y compris des généralistes, refusent de traiter des personnes ayant des handicaps psychosociaux, souvent parce qu’ils jugent que leur besoins sont « trop complexes ».

J’avais désespérément besoin d’un médecin, mais quand j’ai rempli le formulaire, elle m’a dit qu’elle n’acceptait pas de patients qui avaient une maladie mentale. J’ai dû la prier de m’accepter et promettre de venir uniquement une fois par année, pour subir un examen général et renouveler mon ordonnance de pilule contraceptive. Je vais la voir seulement une fois par année. Le reste du temps, je fréquente les cliniques sans rendez-vous et services d’urgence, et j’utilise télésanté.

– Participante au sondage

On nous a dit que certains médecins hésitaient à travailler auprès de personnes aux prises avec certains troubles mentaux ou des dépendances, et que les personnes qui avaient des troubles de l’alimentation, des troubles bipolaires ou un trouble de la personnalité limite étaient rejetées par des médecins généralistes et des professionnels de la santé mentale, y compris des psychiatres, en raison de leur handicap. Il semblerait également que certains médecins ne veulent pas accepter des patients avec des antécédents de dépendance en raison des stéréotypes négatifs associés aux personnes qui ont des dépendances. Les médecins peuvent aussi ne pas avoir la formation requise pour répondre à leurs besoins.

Le rapport Kirby et la consultation sur la santé mentale menée à l’échelle de la province par le ministère de la Santé et des Soins de longue durée soulèvent tous les deux des préoccupations relatives au refus de fournir des services. Les modèles de financement qui encouragent les médecins à voir rapidement des patients, surtout des patients en santé, peuvent contribuer à ce problème. À la suite de sa propre consultation sur la santé mentale, le Comité spécial de la santé mentale et des dépendances, formé de membres de tous les partis, a recommandé au MSSLD « d’envisager d’apporter d’autres changements au modèle de rémunération des médecins de famille pour mettre l’accent sur l’amélioration de l’accès aux soins primaires et sur l’amélioration des soins pour les personnes atteintes de problèmes de santé mentale et de dépendance »[143].

Dans sa politique sur l’admission de nouveaux patients, élaborée en consultation avec la CODP, l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario (OMCO) a indiqué qu’on devrait accepter les patients selon la méthode du « premier arrivé, premier servi ». La compétence clinique et l’étendue des problèmes sont des motifs de refus de patients. Ces motifs ne peuvent cependant pas servir à exclure de façon injuste les patients perçus comme ayant des besoins complexes en matière de santé ou comme étant « difficiles »[144].

Recommandations :

32. L’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario (OMCO) et le ministère de la Santé et des Soins de longue durée devraient consulter la CODP et des groupes de personnes handicapées pour accroître la conformité à la politique de l’OMCO régissant l’admission de nouveaux patients.

33. L’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario devrait revoir ses politiques et procédures régissant les plaintes et éliminer les obstacles qui peuvent rendre le dépôt de plaintes relatives aux pratiques professionnelles plus difficiles pour les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances.

34. L’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario, l’Ontario Medical Association, l’Association des hôpitaux de l’Ontario et le ministère de la Santé et des Soins de longue durée devraient sensibiliser les médecins et étudiants en médecine à leurs obligations aux termes du Code de ne pas refuser des patients sur la base d’un motif interdit par le Code.

Engagements de la CODP :

E20. La CODP sera à la disposition de l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario et du ministère de la Santé et des Soins de longue durée pour discuter du respect accru de la politique de l’OMCO relative à l’acceptation de nouveaux patients.

E21. Le cas échéant, la CODP mènera des enquêtes d’intérêt public, cherchera à intervenir dans le cadre d’affaires ou déposera des requêtes pour contester des cas de refus par des médecins de fournir des services à des personnes en raison de troubles mentaux ou de dépendances, ou prendra une combinaison de ces mesures, en conformité avec son mandat.

Soins de santé mentale

Certains participants à la consultation ont fait part d’expériences positives au sein du système de santé mentale, caractérisant celui-ci de « bouée de sauvetage » et les médecins et membres du personnel traitants d’accueillants, de respectueux et d’autonomisants. Cependant, beaucoup d’autres personnes ont relaté des expériences négatives, surtout au sein du système hospitalier, et fait part d’inquiétudes à propos de l’étiquetage des patients, de la surmédication, d’entraves à la liberté et de l’utilisation non appropriée de mesures de contention. Certains représentants d’établissements psychiatriques ont répliqué que l’examen des préoccupations soulevées à propos du système psychiatrique durant la consultation doit tenir compte des dispositions de la Loi sur la santé mentale et d’autres lois, qui permettent qu’on restreigne les droits de la personne dans certaines circonstances. En Ontario, les personnes ayant des troubles mentaux peuvent être hospitalisées contre leur gré si elles présentent un risque pour elles-mêmes ou autrui, si elles risquent de se blesser par inadvertance ou si leur état se détériore et qu’elles doivent être hospitalisées[145]. Certains fournisseurs de services ont qualifié de défi le fait de concilier, d’une part, les droits de la personne et, de l’autre, les risques éventuels pour la santé et la sécurité de la personne et de la collectivité.

Certaines personnes consultées se souciaient du fait qu’on avait refusé d’hospitaliser contre leur gré des membres de leur famille parce qu’ils ne satisfaisaient pas aux critères de la Loi sur la santé mentale. D’autres ont indiqué qu’on refusait de leur fournir des renseignements médicaux sur des membres de leur famille sans le consentement de la personne. Le ministère de la Santé et des Soins de longue durée a accepté de former un groupe de travail pour déterminer s’il y a lieu de modifier les lois actuelles en matière de santé mentale et de vie privée pour tenir compte de ces préoccupations.

  • Préoccupations internationales à l’endroit des établissements de santé mentale

En Ontario, les lois et politiques régissant les établissements incluent plusieurs mesures de protection contre le mauvais traitement des personnes aux prises avec des troubles psychiques et des dépendances. Ces mesures comprennent des processus d’appel de l’hospitalisation forcée et d’autres situations ayant trait au consentement et à la capacité, la prestation de conseils en matière de droits et la défense des droits fondamentaux, des mécanismes de dépôt de plaintes et l’élaboration d’une charte des droits des patients.

Selon ce qu’on nous a dit, toutefois, des atteintes aux droits de la personne ont encore lieu. Que ces préoccupations représentent ou non un traitement inéquitable des personnes en raison d’un handicap ou d’un autre motif de discrimination interdit aux termes du Code, elles pourraient constituer une atteinte aux droits plus généraux des personnes à l’autonomie, à la liberté et à l’intégrité physique ou mentale, conformément à la Charte et au droit international.

La vulnérabilité des patients handicapés des établissements de santé mentale et autres, et le potentiel de violation de leurs droits fondamentaux sont reconnus sur la scène internationale[146]. En 2008, le rapport intérimaire du Rapporteur spécial du Conseil des droits de l’homme sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, M. Manfred Nowak, faisait état d’outrages dont sont victimes des personnes handicapées partout dans le monde, dans des milieux ségrégés comme des prisons, des centres de soins sociaux, des orphelinats et des établissements de santé mentale[147].

Le Rapporteur spécial a émis des craintes par rapport à l’utilisation prolongée de mesures de contention et d’isolement des personnes handicapées partout dans le monde, ce qui peut constituer de la torture ou des mauvais traitements[148]. Il a aussi affirmé que les types invasifs d’interventions médicales, comme les électrochocs, doivent être uniquement administrés avec le consentement libre et éclairé, et que l’administration de force de médicaments psychiatriques, en particulier de neuroleptiques (souvent utilisés pour le traitement de la psychose), doit être surveillée de près. Sans consentement libre et éclairé, les souffrances infligées par ce type d’interventions et leurs effets sur la santé de la personne peuvent constituer une forme de torture ou de mauvais traitement, selon les circonstances du cas[149]. De poursuivre le Rapporteur spécial, les traitements et l’isolement forcés sont contraires aux dispositions de la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CRDPH), qui vient s’ajouter à d’autres conventions interdisant la torture.

  • Droit à la liberté et à la sécurité de la personne et critères d’admission forcée

La CRDPH énonce les droits et obligations en lien avec les questions abordées durant la consultation de la CODP. La CRDPH peut offrir des conseils sur la façon d’élaborer les mesures législatives, politiques et programmes du secteur de la santé mentale en vue d’assurer le traitement équitable des personnes handicapées. L’article 14 (Liberté et sécurité de la personne) garantit le droit des personnes de ne pas être privées de leur liberté de façon illégale ou arbitraire. Il veille en outre à ce que toute privation de liberté soit conforme à la loi et, à ce qu’en aucun cas, l’existence d’un handicap ne justifie une privation de liberté[150]. Le rapport annuel de 2009 du Haut-commissaire des droits de l’homme des Nations Unies donne cette interprétation de l’article 14 :  

Les mesures législatives autorisant l’internement des personnes handicapées en raison de leur handicap sans obtenir leur consentement libre et éclairé doivent être abolies. Cela doit inclure l’annulation des dispositions autorisant l’internement sans consentement libre et éclairé des personnes handicapées à des fins de soins et de traitement, ainsi que des dispositions autorisant la détention préventive de ces personnes au cas où elles poseraient un risque pour elles-mêmes ou autrui, ou pour tout autre motif du genre, dans tous les cas ou les motifs en lien avec les soins, le traitement ou la sécurité publique sont associés aux termes de la loi à une maladie mentale manifeste ou diagnostiquée.

Cela ne doit pas être interprété de manière à ce que les personnes handicapées ne puissent, aux termes de la loi, faire l’objet d’une détention préventive ou d’une détention à des fins de soins ou de traitement, mais plutôt de manière à ce que les motifs à l’origine de l’atteinte à la liberté soient dissociés du handicap et définis de façon neutre, afin de s’appliquer équitablement à toutes et tous[151].

Compte tenu des commentaires que nous avons reçus, des dispositions de l’article 14 et d’autres articles de la CRDPH, la province doit examiner de plus près ses mesures législatives régissant la santé mentale. Des organisations comme la Commission du droit de l’Ontario et la Commission de la santé mentale du Canada élaborent actuellement des outils pour évaluer les mesures législatives, les politiques et les normes de la province dans le but de les aligner plus étroitement sur les obligations du Canada aux termes des lois sur les droits de la personne du pays et de la CRDPH[152].

  • Droits en matière de capacité juridique et modèles de prise de décisions assistée

Les droits garantis aux termes de l’article 12 de la CRDPH doivent également être examinés attentivement étant donné leur lien avec les questions de prise de décisions assistée des personnes ayant des handicaps psychosociaux et de détermination de la capacité de prendre certaines décisions. L’article 12 reconnaît que « les personnes handicapées jouissent de la capacité juridique dans tous les domaines sur la base de l’égalité avec les autres ». Selon le Haut-commissaire des droits de l’homme des Nations Unies, cette disposition n’inclut aucune exception[153]. Aux termes de l’article 12, les États Parties doivent prendre des mesures appropriées pour donner aux personnes handicapées accès à l’accompagnement dont elles peuvent avoir besoin pour exercer leur capacité juridique. Le Haut-commissaire des droits de l’homme des Nations Unies soutient que la restriction de l’exercice de la capacité juridique au motif d’une maladie mentale ou d’un trouble psychosocial manifeste ou réel peut constituer une violation des obligations énoncées à l’article 12[154].

Le Canada a émis une déclaration et des réserves relativement à l’article 12, indiquant qu’il se réservait le droit de continuer d’utiliser des mesures de représentation relatives à l’exercice de la capacité juridique, sous réserve de garanties appropriées et effectives[155]. Généralement, les systèmes de tutelle du Canada et de l’Ontario prévoient la désignation d’un mandataire spécial pour décider au nom d’une personne jugée incapable de prendre des décisions dans une sphère particulière, comme ses finances ou ses soins personnels[156].

Néanmoins, l’article 12 exige que l’on prenne des mesures appropriées pour donner aux personnes handicapées accès à l’accompagnement dont elles peuvent avoir besoin pour exercer leur capacité juridique. Par exemple, cela signifie qu’une personne doit avoir accès à un réseau de personnes pouvant l’aider. Un rapport de la Commission de la santé mentale du Canada recommande de modifier les lois de façon à limiter le recours aux mandataires spéciaux en établissant que ces mandataires doivent uniquement servir de dernier recours[157]. Pour assurer une équité substantive réelle, certains penseurs et groupes de personnes handicapées soutiennent qu’on doit inclure à l’obligation légale d’accommodement le fait de fournir les soutiens requis, dans la mesure du possible, pour permettre aux personne de prendre leurs propres décisions[158].

Recommandation :

35. Compte tenu des mesures de soutien requises aux termes de la Convention relative aux droits des personnes handicapées et du libellé des articles 12 et 14, le gouvernement de l’Ontario devrait examiner et évaluer toutes les lois, politiques et normes relatives à la santé mentale en consultation avec des groupes de personnes handicapées et autres intervenants, de façon à assurer le traitement équitable des personnes ayant des troubles psychiques ou des dépendances. Cet examen devrait s’étendre au système de tutelle de l’Ontario et à ses critères d’admission forcée.

  • Questions de dignité et d’autonomie

Les questions de libre-choix et de respect de la dignité occupaient une place importante dans l’expérience des gens au sein du système de santé mentale et des milieux psychiatriques médicolégaux. Certaines personnes consultées ont rapporté se sentir déshumanisées et « mises à l’écart », et ne pas avoir l’impression que leurs préoccupations ont été abordées durant leur séjour à l’hôpital. Nous avons appris que la relation entre le personnel des milieux hospitaliers et les patients est souvent conflictuelle. Certaines personnes ont déclaré avoir fait l’objet de fouilles à nu devant des membres du personnel masculins et féminins. Dans des cas extrêmes, des personnes ont rapporté avoir fait l’objet de harcèlement ou de mauvais traitements physiques ou sexuels de la part de membres de personnel.

Les médecins cherchent uniquement à savoir ce qui « ne va pas » […] À cause de leur formation, ils s’intéressent uniquement aux états pathologiques et considèrent la plupart des problèmes comme des pathologies nécessitant l’administration de médicaments. Le patient doit ensuite suivre à la lettre le traitement médicamenteux inadéquat prescrit. Je pense qu’il est discriminatoire de ne s’intéresser qu’aux pathologies, puisque cela part du principe que toutes les personnes qui voient un psychiatre ont besoin de médicaments et de supervision, et qu’elles sont « moins capables » que les autres. Dès le départ, le modèle de traitement repose sur une analyse erronée.

            – Participant(e) au sondage

Les gens décrivent avoir été traités comme s’ils étaient moins intelligents et moins capables de prendre des décisions que les autres. Ils racontent avoir été abordés de façon condescendante et avoir été écartés des décisions concernant leurs soins médicaux, même lorsqu’ils étaient capables de participer à la décision. On nous a aussi fait part des préoccupations des gens à propos des choix de traitements thérapeutiques offerts au sein du système de santé mentale. Même si certaines personnes ont indiqué avoir ressenti des effets positifs en prenant des médicaments, d’autres se sont dites préoccupées par certaines méthodes de traitement, dont l’administration de médicaments antipsychotiques et d’électrochocs, particulièrement quand ces méthodes ont des effets négatifs néfastes. Les gens ont aussi déclaré avoir eu l’impression de ne pas avoir la possibilité de suivre un traitement de médecine douce, non axé sur la prise de médicaments.

Le système de « privilèges » constitue un autre thème de la consultation. Au sein des établissements, des libertés et responsabilités accrues sont données à certaines personnes à des fins de renforcement de comportements souhaités. Bien qu’il s’agisse d’une pratique courante au sein d’établissements de santé mentale et d’établissements psychiatriques médicolégaux, des personnes et des organisations se souciaient du fait que les privilèges puissent être arbitraires, appliqués de façon non uniforme selon le membre du personnel et utilisés de façon à punir certains patients pour ne pas avoir suivi les règles ou le traitement prévu. Elles se préoccupaient aussi du fait que le système de privilèges puisse faire entrave aux droits des gens de faire leur propre choix, ce qui mine leur dignité.

Les personnes qui interviennent au nom des personnes aux prises avec des troubles psychiques ou des dépendances craignaient que des personnes soient punies pour des infractions mineures et qu’on utilise la sécurité comme justification même quand cela n’est pas légitime. On nous a dit que dans certains milieux, le fait d’aller à l’extérieur prendre l’air, de porter ses propres vêtements ou d’utiliser le téléphone cellulaire pour parler à autrui sont des privilèges devant être acquis et pouvant être perdus. L’accès des patients à ces privilèges ou à d’autres peut dépendre du nombre d’employés présents.

Le système de santé mentale semble accorder une valeur considérable à l’« obéissance » des patients. En raison du déséquilibre de pouvoir entre le personnel et les patients, ces derniers peuvent ne pas être enclins à poser des questions à propos de leurs soins, à protester contre des traitements inadéquats ou à chercher à obtenir des conseils, le cas échéant. Les déséquilibres de pouvoir dissuadent aussi les gens de déposer des plaintes relatives à des motifs de discrimination interdits par le Code, ou à faire valoir leurs droits d’autres façons. La culture d’une organisation peut être empreinte de telles attentes en matière d’obéissance. Dans le rapport Kirby, le Comité sénatorial a affirmé qu’en général :

les étiquettes péjoratives de type « non obéissant », « manipulatrice », « difficile à diriger », « difficile à aider », « recherche l’attention » ou « intrusif » (pour un membre de la famille) ont discrédité les comportements d’affirmation de soi et réduit davantage les gens au silence[159].

Les résidents des établissements de santé mentale ont constaté qu’ils hésitent à se plaindre de mauvais traitements de peur de perdre leurs privilèges ou de ne pas être pris au sérieux. Par exemple, une participante a dit que d’autres femmes et elle ont été victimes de harcèlement sexuel durant des séjours en établissement, mais que leurs plaintes avaient été perçues comme « le fruit de leur maladie » et écartées.

Les organisations où ce genre de climat s’est installé peuvent devoir apporter des modifications pour assurer en tout temps le traitement respectueux des gens. Les propos des participants illustrent l’importance de doter les hôpitaux de personnes qui ont de l’expertise en droits de la personne et peuvent faire en sorte que les patients obtiennent le soutien approprié, des conseils sur leurs droits aux termes de la loi et l’encadrement requis pour déposer des plaintes relatives aux droits de la personne.

  • Traitement et consentement éclairé

Dans Fleming v. Reid, la Cour d’appel de l’Ontario a affirmé le droit d’une personne compétente de déterminer ce qui doit être fait à son propre corps et de vivre à l’abri des traitements médicaux non consensuels. De plus, selon la cour, si une personne perd la capacité de prendre ses propres décisions, les désirs en matière de traitement qu’elle a exprimés lorsqu’elle était compétente doivent être respectés. La cour a comparé les patients des établissements psychiatriques aux patients ayant des maladies physiques, et indiqué qu’ils avaient tous les mêmes droits de refuser de suivre les conseils ou médicaments offerts par leur médecin. L’hospitalisation forcée ne rend pas automatiquement la personne incompétente, ou incapable de prendre des décisions médicales. De déterminer la cour, « les personnes ayant une maladie mentale ne doivent pas être stigmatisées en raison de la nature de leur maladie ou handicap. Elles ne devraient pas non plus être traitées comme des personnes de moindre statut ou dignité. Leur droit à l’autonomie et à l’autodétermination n’est pas moins significatif; il commande la même protection que celui des personnes compétentes souffrant de maladies physiques[160]. »

Bon nombre de personnes consultées et d’intervenants au nom des personnes ayant des troubles mentaux et des dépendances ont dit avoir subi des traitements contre leur gré durant des séjours en milieu hospitalier pour traiter des troubles psychiques, ou connaître des personnes ayant subi de tels traitements. Tout le monde a le droit de refuser de consentir à un traitement, à moins d’avoir été jugé inapte sur le plan mental à prendre des décisions en matière de traitement[161]. L’Empowerment Council a fait remarquer que de nombreuses personnes en milieu hospitalier ne connaissent pas leurs droits en matière de consentement au traitement, malgré le fait qu’ils sont énoncés dans Loi sur le consentement aux soins de santé.

Certaines personnes ont rapporté ne pas comprendre les effets secondaires de la médication qu’elles prenaient, ou n’avoir pas été mises au courant de ces effets. D’autres ont dit n’avoir pas été avisées officiellement de leur diagnostic par un professionnel médical ou informées du fait qu’elles étaient visées par une Formule 1 (détention forcée à l’hôpital pendant une période maximale de 72 heures à des fins d’évaluation psychiatrique). Le cas de personnes qui sont admises de leur gré à l’hôpital mais placées dans des unités fermées causerait également des préoccupations. De plus, des gens nous ont dit avoir été contraints de prendre des médicaments, sous peine de ne pas obtenir leur congé s’ils refusaient. Le traitement inéquitable des personnes handicapées en matière de services et l’établissement d’un lien entre le consentement au traitement et l’obtention de services soulèvent à la fois des questions sur la capacité des personnes de refuser des traitements et des préoccupations relatives au respect du Code.

Selon l’organisation ACE, les résidents âgés des foyers de soins de longue durée ou leur mandataire spécial (si la personne âgée est jugée inapte) sont souvent maintenus dans l’ignorance relativement à leurs droits de refuser de consentir à un traitement. ACE dit recevoir régulièrement des plaintes de mandataires qui se soucient du fait qu’on administre à un résident âgé inapte d’un foyer de soins de longue durée des médicaments sans leur consentement. Pour sensibiliser la population aux options s’offrant aux gens après une déclaration d’inaptitude de manière à assurer la sécurité des personnes, ACE recommande de renforcer la Loi sur le consentement aux soins de santé en inscrivant dans la réglementation le devoir des intervenants en santé de fournir des conseils spécifiques en matière de droits, dont l’obligation d’aviser la personne d’une déclaration d’inaptitude et de fournir de l’information et de l’assistance relatives à l’interjection d’appels devant la Commission du consentement et de la capacité.

  • Ordonnances de traitement en milieu communautaire (OTMC) et Équipes de traitement communautaire dynamiques (ETCD) :

Les OTMC et les plans des ETCD ont également soulevé des préoccupations. Les ETCD supervisent le traitement des personnes au sein de la collectivité, tandis que les plans des ETCD pourraient servir à orienter les personnes vers des services autres que ceux du système de justice pénale. On nous a indiqué que ces mesures pouvaient réserver un traitement restrictif aux personnes aux prises avec des troubles psychiques sur la base de leur handicap, sans veiller à ce que les restrictions imposées aient un lien légitime avec l’objectif du programme ou les circonstances individuelles des gens. Les OTMC peuvent imposer une variété de conditions, comme des couvre-feux, l’interdiction de communiquer avec des personnes d’un certain âge, des restrictions relatives à l’utilisation des transports collectifs ou à la location immobilière. Comme l’a indiqué le BIPEP, les restrictions associées aux plans des ETCD peuvent n’avoir rien à voir avec l’infraction commise initialement. Elles peuvent avoir été imposées pour respecter des conditions d’assurance, plutôt que par suite de l’évaluation d’un risque réel.

Pour certaines personnes, les OTMC représentaient généralement des mécanismes coercitifs visant à pousser les gens à entreprendre ou à observer un traitement. Un examen de l’efficacité des OTMC mené en 2005 a donné des résultats mitigés. Certaines personnes ont décrit les effets positifs du fait d’avoir une OTMC, y compris la stabilité requise pour éviter l’admission en milieu hospitalier et la capacité de réintégrer la collectivité. D’autres, par contre, étaient d’avis que les inconvénients associés aux OTMC, dont la perte d’autonomie et de contrôle personnel, étaient supérieurs aux avantages de telles mesures[162].

  •  Contention

Une femme a décrit son séjour à l’hôpital à la suite d’une surdose intentionnelle de la façon suivante :

[…] Après l’évaluation [psychiatrique], je me suis mise à pleurer en silence et la psychiatre a demandé 4 mg d’Ativan [médicament contre l’anxiété]. Je n’aime pas prendre des médicaments à moins de connaître exactement ce qu’ils contiennent, mais la psychiatre ne voulait pas me décrire les effets secondaires de ce médicament ou me dire comment il me ferait sentir. Elle m’a dit que je devais le prendre parce que j’étais trop surstimulée et qu’elle devait assurer la sécurité des autres patients. Ça n’avait pas de sens parce que j’étais couchée en silence (mis à part quelques reniflements occasionnels) dans le lit et n’avais démontré aucune violence (verbale ou physique) depuis mon arrivée […] J’ai dit à l’infirmière que je ne voulais pas prendre les 4 mg d’Ativan. Elle m’a répondu que l’alternative était de m’attacher au lit à l’aide de dispositifs de contention en cuir. Je n’ai pas besoin de vous dire que j’ai choisi la contention chimique.

      – Participante au sondage

Selon l’Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario, la contention, qu’elle soit appliquée par des moyens physiques, environnementaux ou chimiques, est un moyen servant à maîtriser les mouvements ou le comportement d’une personne ou à immobiliser une partie de son corps. Les instruments de contention physique restreignent les mouvements d’un client. La contention environnementale vise à limiter la mobilité du client (comme une unité fermée, l’isolement ou une aire d’isolation). Par contention chimique s’entend tous les médicaments psychotropes visant, non pas à traiter une maladie, mais à inhiber intentionnellement un comportement ou un mouvement précis[163].

On nous a fait savoir que les établissements de la province n’appliquent pas de politiques et de pratiques uniformes en matière de contention des personnes aux prises avec des troubles psychiques[164]. Selon les personnes qui interviennent au nom des patients et les représentants du secteur hospitalier, la province supervise peu le recours à la contention en Ontario. Des fournisseurs de services comme Ontario Shores ont laissé entendre que la promotion de directives cohérentes et appropriées concernant l’isolement et la contention devrait constituer un objectif dans ce secteur.

À l’heure actuelle, l’utilisation de dispositifs de contention est permis dans certaines circonstances, comme lorsqu’il est nécessaire d’éviter qu’une personne n’inflige des blessures graves à elle-même ou autrui. Bon nombre de participants à la consultation ont exprimé de sérieuses préoccupations à propos de leurs expériences passées de contention dans un milieu de soins de santé en raison d’un problème de santé mentale, ou de l’expérience d’autres personnes, et étaient d’avis que des dispositifs de contention avaient été utilisés de façon inappropriée. D’autres nous ont fait part de cas de personnes immobilisées à l’aide de dispositifs de contention pendant des heures ou des jours, dans certains cas sans même que des membres du personnel viennent s’assurer que tout allait. Dans un cas, une personne a décrit comment son fils n’avait pas pu aller à la salle de bains après avoir été immobilisé par contention pendant huit heures.

Des participants nous ont également dit que la contention ou l’isolement sont parfois utilisés pour composer avec des patients perçus comme peu disposés à suivre les consignes ou traitements du personnel. D’autres ont indiqué que la contention était utilisée comme solution de rechange au manque de personnel (p. ex. auprès des patients âgés atteints d’Alzheimer dans des foyers de soins de longue durée)[165]. On nous a dit que l’usage de contention physique avait des effets préjudiciables particuliers sur les personnes malentendantes, qui ne peuvent plus communiquer à l’aide du langage des signes une fois immobilisées.

Des rapports et des enquêtes menées précédemment ont aussi soulevé des préoccupations à propos de l’usage de contention. L’Institut canadien d’information sur la santé a publié un rapport sur l’usage de contention auprès de personnes admises dans une unité psychiatrique entre 2006 et 2007, et 2009 et 2010. Le rapport révèle que près d’une personne sur quatre avait fait l’objet d’une forme de contention quelconque[166]. En 2005, Jeffrey James est décédé à l’hôpital après avoir fait l’objet de contention physique et chimique, et isolé pendant plusieurs jours. À la suite de l’enquête sur les circonstances de sa mort, le coroner de l’Ontario a recommandé que tous les hôpitaux psychiatriques de la province aspirent à fournir des soins libres de contention et prévoient la participation de davantage de patients et d’intervenants au nom des patients à la gestion des facteurs de risque avant le recours à la contention.

Également par suite de l’enquête, l’Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario a élaboré des meilleures pratiques cliniques en matière de contention[167]. Selon l’OIIO, « il existe trop peu d’éléments de preuve à l’appui de l’usage de contention, y compris l’isolement, à des fins de gestion à court terme des comportements perturbés ou agressifs en milieu psychiatrique pour adultes ». Le guide appuie le recours à la contention uniquement après que toutes les méthodes de désamorçage de la situation ont été essayées, en vain[168].

Les pratiques et politiques de contention peuvent contrevenir au Code lorsqu’elles ne sont pas fondées sur des risques réels en matière de santé et de sécurité, mais sur des stéréotypes liés à un motif de discrimination interdit par le Code, ou lorsqu’elles visent de façon disproportionnée les membres des groupes protégés aux termes du Code et ne sont pas légitimes. Par exemple, si un homme d’origine afro-canadienne qui a un trouble psychique est retenu par contention sur la base d’une perception stéréotypée de sa race et de son handicap, au lieu de risques imminents pour la santé et la sécurité, l’usage de contention pourrait représenter une atteinte à ses droits aux termes du Code. L’usage de contention comme moyen de dernier recours après avoir tenté d’autres mesures de désamorçage de la situation, l’application des mesures appropriées d’évaluation du risque et la mise en place de moyens de protection et de surveillance pourraient éviter la violation des droits de la personne.

Recommandations :

36. Le gouvernement de l’Ontario devrait mettre en œuvre des règles provinciales et des mécanismes de surveillance pour assurer le recours uniforme à la contention auprès des personnes aux prises avec des troubles mentaux ou dépendances, avec pour objectif d’utiliser la contention en dernier recours seulement.

37. Le Bureau du coroner en chef de l’Ontario devrait mener une enquête dès qu’un patient meurt dans un hôpital ou établissement psychiatrique pendant qu’il faisait l’objet d’une contention chimique ou environnementale (isolement).

  • Protection des droits de la personne au sein du système psychiatrique

Des représentants d’hôpitaux et d’établissements de santé mentale, y compris l’OHA, ont indiqué que les attitudes à l’égard des personnes aux prises avec des troubles mentaux avaient connu un « virage fondamental » au sein du système psychiatrique. Par exemple, des organisations ont dit qu’elles tiennent maintenant compte de la philosophie du rétablissement, participent à l’élaboration de chartes des droits des patients, et financent des conseils composés de patients et de familles et capables d’intervenir au nom de personnes dont les droits ont été violés. Des fournisseurs de services ont évoqué certaines lois comme la Loi de 2010 sur l’excellence des soins pour tous, qui fait la promotion de soins « axés sur le client » et exige que l’on obtienne les commentaires des récipiendaires de services sous forme de sondages sur la satisfaction des clients, de façon à évaluer et à améliorer les soins. Certains hôpitaux ont rapporté avoir élaboré une série de politiques et de séances de formation qui favorisent le respect des droits (Ontario Shores). Enfin, l’OMCO a élaboré plusieurs politiques et procédures, y compris une procédure de traitement des plaintes, qui prennent en compte les responsabilités professionnelles et obligations en matière de droits des patients.

Malgré ces développements positifs, on nous a dit qu’il était extrêmement difficile de faire clairement valoir ou de connaître ses droits au sein du système psychiatrique. Pour que des changements systémiques soient apportés au sein du système, les personnes consultées étaient d’avis qu’il fallait contester les attitudes négatives, particulièrement dans les facultés médicales, en faisant davantage de sensibilisation. Parmi les suggestions sur la façon d’accroître le respect des politiques et procédures figuraient :

  • surveiller la satisfaction des clients et évaluer les inégalités dont pourraient faire l’objet les membres de groupes protégés aux termes du Code
  • faire le suivi des efforts déployés par les hôpitaux pour mettre en œuvre les chartes des droits des patients
  • appuyer la participation de défenseurs des droits des clients
  • appuyer davantage l’entraide au sein du système de santé mentale
  • veiller à ce que les usagers des services soient représentés dans tous les aspects de la prise de décisions, du conseil d’administration de l’hôpital aux services de première ligne
  • faire du respect des politiques et pratiques de droits de la personne une exigence de l’agrément des hôpitaux et des évaluations du personnel.

Selon l’Empowerment Council, le respect des droits des personnes aux prises avec des troubles psychiques et des dépendances devrait être mesuré au moyen d’un mécanisme intégré d’évaluation et de déclaration. Dans l’ensemble, les représentants des hôpitaux et du secteur médical appuyaient la collecte de données additionnelles relatives aux motifs de discrimination interdits par le Code à des fins d’évaluation des inégalités sur le plan des traitements.

Recommandations :

38. Tous les hôpitaux devraient passer en revue et surveiller le système de privilèges en collaboration avec des groupes de personnes handicapées et le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques, afin de veiller à ce que les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale soient traitées équitablement et avec dignité en ce qui a trait aux motifs prévus dans le Code, et qu’aucune autre violation des droits de la personne ne survienne.

39. Les hôpitaux abritant des unités psychiatriques devraient déterminer comment recueillir des données relatives aux motifs prévus dans le Code si des membres des groupes protégés aux termes du Code sont traités différemment que les autres patients en matière d’isolement et de contention, à la suite de leur décès ou en ce qui a trait à d’autres questions de santé pertinentes touchant les personnes ayant des problèmes de santé mentale, de concert avec la CODP, le ministère de la Santé et des Soins de longue durée, le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques, des groupes d’usagers/de survivants et d’autres intervenants appropriés. Le guide de la CODP, Comptez-moi! Collecte de données relatives aux droits de la personne, peut être utile à ce chapitre. Les mesures de collecte de données doivent respecter la dignité des gens et protéger le caractère privé de leurs renseignements.

40. Comme l’exige la LAPHO, tous les hôpitaux devraient élaborer des politiques en matière de droits de la personne et d’accommodement, et des procédures de dépôt de plaintes régissant l’offre de services aux personnes ayant des handicaps psychosociaux et autres membres de groupes protégés aux termes du Code, et l’embauche de ces personnes.

41. Les hôpitaux devraient régulièrement promouvoir les politiques sur les droits de la personne et offrir au personnel et aux patients une formation sur ces politiques de façon à ce que tout le monde comprenne ses droits et responsabilités.

42. Les hôpitaux devraient collaborer avec les patients, les groupes de patients et le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques afin de cerner et d’éliminer les obstacles au dépôt de plaintes internes en milieu hospitalier.

43. Le gouvernement de l’Ontario et tous les hôpitaux abritant des unités de santé mentale devraient créer un système de protection du citoyen indépendant qui peut recevoir les plaintes relatives à de la discrimination ou autres questions plus générales de droits fondamentaux des personnes évoluant au sein du système psychiatrique, faire enquête sur ces plaintes et émettre des conclusions.

44. Les hôpitaux devraient faire en sorte qu’aucune personne compétente ne soit forcée de suivre un traitement psychiatrique, conformément à la Loi sur le consentement aux soins de santé et à la CRDPH.

Engagements de la CODP :

E22. La CODP invitera un établissement psychiatrique provincial et d’autres partenaires possédant de l’expertise en matière de droits de la personne en lien avec la santé mentale, y compris des organisations d’usagers/survivants à entreprendre un processus de changement organisationnel d’envergure visant à aborder les questions de droits de la personne soulevées durant la prestation de services aux personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances et membres d’autres groupes protégés aux termes du Code. Entre autres, un tel processus pourrait inclure un examen des politiques et pratiques internes de façon à cerner et à éliminer tout obstacle discriminatoire.

E23. La CODP collaborera avec les hôpitaux, le MSSLD, des groupes d’usagers/de survivants et d’autres intervenants appropriés pour déterminer comment recueillir des données en lien avec les droits de la personne de façon à mesurer les disparités entre les groupes protégés aux termes du Code en ce qui a trait à l’isolement, à l’usage de contention et à d’autres questions de santé pertinentes. Les mesures de collecte de données adoptées doivent respecter la dignité des gens et protéger le caractère privé de leurs renseignements.

e) Système de justice pénale

Services policiers

De nombreuses personnes et organisations ont commenté le rôle des services de police lorsqu’il s’agit d’intervenir auprès des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances. D’après le Comité provincial de coordination des services à la personne et des services juridiques (CSPSJ), plus de ressources communautaires doivent être mises en place dans les régions urbaines et rurales pour veiller à ce que les services de police ne soient pas, par défaut, les services chargés d’intervenir auprès des personnes ayant des troubles mentaux qui sont en situation de crise. En 2011, l’Association des chefs de police de l’Ontario a adopté une résolution appuyant la réduction de l’importance accordée au rôle des services de police dans les cas de santé mentale et de dépendances parce que les professionnels de la santé locaux sont les plus aptes à aider les personnes touchées[169]. Selon un représentant des services de police, le fait que des agents de police interviennent auprès des personnes ayant des troubles mentaux renforce le stéréotype selon lequel ces personnes représentent un danger pour autrui.

D’autres participants à la consultation ont déclaré que les agents de police avec lesquels ils avaient eu des rapports leur avaient fourni des services inadéquats ou avaient agi envers eux de façon inappropriée, en raison de leur handicap. Par exemple, de nombreux usagers/survivants ont fait remarquer que les policiers ont tendance à faire fi d’allégations ou à ne pas prendre de mesures appropriées s’ils savent que l’auteur de ces allégations a un problème de santé mentale.

S’ils savent que vous avez une maladie mentale, les [services de police] font fi de ce que vous dites. Je ne les appelle plus pour obtenir de l’assistance (j’habite dans un très mauvais quartier). Je garde des bâtons de baseball à la porte pour nous protéger, mon fils et moi.

            – Participant(e) au sondage

De plus, on nous a dit que les services de police n’étaient pas adéquatement formés pour désamorcer des situations de crise en lien avec la santé mentale. Comme l’a indiqué la Metro Toronto Chinese and Southeast Asian Legal Clinic (MTCSALC), depuis qu’Edmond Yu, une personne aux prises avec un problème de santé mentale, a été abattu par balle en 1997, « les pratiques policières à cet égard ont peu changé. Les rapports de harcèlement policier, l’usage de force excessive et l’interpellation démesurée des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale restent inchangés. » L’ACSM – Ontario a dit que les personnes aux prises avec une maladie mentale sont plus susceptibles que les autres d’être interpellées ou arrêtées pour des infractions mineures comme l’« accès non autorisé » ou l’« inconduite », en ajoutant que « le nombre de personnes atteintes de troubles mentaux qui ont des démêlés avec le système judiciaire augmente de 10 p. 100 par année, malgré que le nombre d’interaction jugées violentes soit en déclin[170]. »

De nombreuses personnes ont soulevé des inquiétudes à propos de l’intervention policière, particulièrement de l’usage de force, auprès de personnes en situation de crise qui doivent être transportées à l’hôpital aux termes de la Loi sur la santé mentale [171]. En mai 2012, après que plusieurs personnes aux prises avec des troubles mentaux ont été tuées par balles par des agents de police, le ministère de la Sécurité communautaire et des Services correctionnels a annoncé la tenue d’une enquête gouvernementale interne sur la façon dont les services de police réagissaient aux situations de crise des personnes aux prises avec des troubles mentaux[172].

Quand j’étais malade et que j’avais besoin d’être hospitalisé, la police qui a répondu à l’appel au 911 m’a traité d’une façon que je qualifierais de brutale. J’étais malade et pas en train de commettre un acte criminel. En tant que personne malade, j’aurais dû être transportée en ambulance, par du personnel médical, et non menottée et conduite en autopatrouille.

      – Participant(e) au sondage

J’ai appelé les services de police pour qu’ils viennent chercher mon fils et l’amener à l’hôpital (j’avais une ordonnance de la cour) […] Ils sont arrivés avec des pistolets Taser et m’ont dit qu’ils les utiliseraient au besoin […] Que pensez-vous qu’il se passe quand quatre ou cinq agents de police se présentent avec un pistolet Taser à la main pour venir chercher une personne ayant une maladie mentale (qui a très peur)?

      – Participant(e) au sondage

L’ACSM – Ontario se préoccupait de la tendance qu’ont les services de police d’utiliser des pistolets Taser (armes à impulsion) sur des personnes vivant un épisode de trouble mental ou en situation de détresse émotive. En plus de faire appel à des équipes d’intervention d’urgence pour aborder la situation de façon appropriée, elle recommande de faire en sorte que les services de police de l’Ontario limitent leur usage des pistolets Taser aux situations où la seule autre option constitue l’utilisation de force létale, et qu’ils surveillent et rendent publics les cas d’utilisation de ces pistolets et les résultats obtenus. De plus, l’ACSM – Ontario demande la conduite de recherches indépendantes sur la sécurité associée à l’utilisation des pistolets Taser, y compris les effets de ces armes sur les personnes vivant un épisode de trouble mental[173].

De nombreuses personnes consultées ont apporté leur appui à la formation d’équipes d’intervention d’urgence. Plusieurs services de police partout en Ontario collaborent avec des organismes communautaires pour mettre ces équipes sur pied, dont les membres interviennent avec les agents de police dans des cas d’urgences d’ordre psychiatrique afin de désamorcer la situation. Le York Support Services Network et le service régional de police de York nous ont dit que leur équipe d’intervention d’urgence avait un effet considérable sur les attitudes des agents de police à l’égard des personnes aux prises avec des troubles mentaux, ainsi que sur celles de la collectivité locale à l’égard des services policiers. En général, les policiers peuvent jouer un rôle important lorsqu’il s’agit de tenir compte des besoins des personnes handicapées en évitant que les personnes ayant des handicaps psychosociaux ne soient happées par le système de justice pénale lorsqu’elles commettent des infractions mineures manifestement liées à un trouble psychique.

D’autres personnes consultées ont fait état d’inconvénients associés à ces équipes. On nous a dit que la tension pouvait monter entre une personne en situation de crise et des policiers en uniforme si ces policiers interviennent en premier, avant l’arrivée du membre de l’équipe d’intervention d’urgence. De plus, des équipes d’intervention d’urgence ne sont pas de service dans toutes les régions à toutes les heures de la journée. On nous a également dit que le type de formation offerte à ces équipes devrait être fourni à tous les agents de police étant donné qu’un volet fondamental de leur emploi consiste à intervenir auprès de personnes en détresse psychique et que le fait de former des agents spécialisés renforce l’idée que les usagers/survivants sont distincts du reste de la population.

On nous a dit que les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances peuvent être prises à partie par les services de police, harcelées et traitées de façon agressive pour avoir afficher des comportements liés à leur handicap ou parce qu’il est connu qu’elles ont un problème de santé mentale. Une personne a raconté avoir été accusée « de façon agressive » d’avoir pris de la cocaïne parce qu’elle reniflait, alors qu’il s’agissait d’un tic associé au syndrome de Tourette. Elle a ajouté :

J’ai tout de suite compris que cet agent se fiait à sa première impression sans se poser trop de questions. Pour moi, c’est comme être en présence d’une personne diabétique. Son insuline peut chuter et elle peut se mettre à se comporter comme si elle avait bu. Les policiers doivent mieux connaître les symptômes.

– Participant(e) au groupe de consultation

Certains corps policiers, comme les services de police de Toronto, ont mis sur pied des groupes consultatifs sur la santé mentale pour donner à la collectivité voix au chapitre relativement aux questions de maintien de l’ordre associées aux personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale. S’ils héritent d’un mandat approprié, ces comités peuvent jouer un rôle puissant en examinant les thèmes et les tendances, en émettant leur point de vue relativement aux questions complexes et en aidant à assurer la prestation de services qui respectent les droits de la personne.

Recommandations :

45. Le Collège de police de l’Ontario et les services de police devraient offrir aux nouvelles recrues et agents chevronnés une formation sur les droits de la personne et l’obligation d’accommodement des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances. Tous les agents de police, y compris les nouvelles recrues et agents chevronnés, devraient aussi suivre une formation sur les techniques de désamorçage des situations de crise utilisées par les équipes d’intervention d’urgence.

46. Les services de police devraient mettre sur pied des comités communautaires, dont des usagers/survivants et des personnes aux prises avec des dépendances, pour leur fournir des conseils sur des questions en lien avec la santé mentale et la prestation de services policiers.

47. Les services de police devraient élaborer des politiques et protocoles de maintien de l’ordre qui abordent les questions liées aux droits fondamentaux des personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances.

48. Les services de police devraient recueillir des données de façon à cerner tout cas de traitement inéquitable des personnes ayant des troubles mentaux ou des dépendances déclarés ou perçus, comparativement aux autres personnes.

Engagement de la CODP :

E24. Dans son travail auprès des services de police de l’Ontario, la CODP soulèvera des questions de discrimination à l’endroit des personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances en matière de prestation de services, et collaborera avec les services de police pour créer la capacité requise pour régler ces questions.

Tribunaux et représentation par un avocat

Oui, les gens vous préviennent : « N’allez pas devant les tribunaux, le stress est trop grand ». Et les gens vous exploitent parce qu’ils savent que vous n’êtes pas à votre meilleur.

– Participant(e) au sondage

Le fait qu’il est difficile pour certaines personnes ayant des handicaps psychosociaux d’obtenir un soutien juridique, parce qu’elles ne peuvent pas se payer d’avocat ou n’arrivent pas à mener à terme le processus de dépôt d’une demande d’aide juridique fait partie des préoccupations soulevées à propos de l’accès à la justice au moyen des tribunaux. Sans représentation juridique, les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale peuvent faire face à un double préjudice si elles se présentent devant les tribunaux alors qu’elles ont des symptômes psychiques. Cette question préoccupait également les personnes impliquées dans des procédures judiciaires.

Le juge a demandé : « Comprenez-vous ce que nous vous demandons? » J’avais un problème [de santé] mental et je faisais face à des accusations criminelles. Il posait des questions qui duraient 20 minutes. Je ne comprenais pas ce qu’il disait.

– Participant(e) à la table ronde de Toronto

D’autres questions ont été soulevées à propos du traitement équitable au sein du système juridique. Certaines personnes se préoccupaient du fait que l’avocat de la partie adverse puisse exploiter le problème de santé mentale d’un témoin, ce qui accroît le sentiment de victimisation du témoin et le risque que la personne perdre sa cause. On nous a fait remarquer que le manque d’éducation et de sensibilisation des décideurs et membres du personnel des tribunaux à l’égard des problèmes de santé mentale et des dépendances posait aussi problème.

La plupart de mes clients ont des démêlés avec le système judiciaire. Ça fait peur de se retrouver devant un juge et de devoir lui expliquer les problèmes de santé mentale de votre client lorsqu’il ne connaît même pas les différents types de troubles mentaux existants, comme le CCA [trouble déficitaire de l’attention], le TOC [trouble obsessivo-compulsif] ou le TOP [trouble oppositionnel avec provocation].

            – Participant(e) au sondage

Selon un représentant du système judiciaire de l’Ontario, des efforts ont été entrepris pour rendre les tribunaux plus accessibles. Par exemple, des coordonnateurs de l’accès aux tribunaux peuvent accepter des demandes d’accommodement. Les documents clés fournis aux membres du public sont de plus en plus rédigés en langage simple et des aires plus tranquilles ont été prévues à proximité des comptoirs de services bruyants pour favoriser la discussion. Moyennant une approbation judiciaire, des audiences peuvent être reportées au besoin pour tenir compte des symptômes des gens. Parmi les autres types de mesures d’adaptation pouvant être requis en cour ou dans le cadre d’un processus de décision figurent la tenue d’audiences privées ou de conférences préparatoires, l’ajournement d’audiences, et l’offre de soutien humain en vue de l’obtention de services juridiques[174].

  • Programmes de déjudiciarisation

Malgré que les programmes varient d’une région à l’autre, des programmes de déjudiciarisation de la santé mentale et des tribunaux de traitement de la toxicomanie ont été mis sur pied pour fournir des services de santé mentale et soutiens connexes aux personnes ayant des besoins en matière de santé mentale et de dépendances qui ont des démêlés avec le système judiciaire. Une personne peut être admissible aux services de déjudiciarisation si les infractions qu’elle est accusée d’avoir commises sont jugées à faible risque et si ses besoins en matière de santé peuvent être comblés par des services communautaires. Les services de déjudiciarisation sont conçus pour « déjudiciariser » le processus et éviter que les personnes aux prises avec des troubles mentaux intègrent le système correctionnel, qui n’est pas en mesure de combler adéquatement leurs besoins en matière de santé mentale.

Les clients peuvent participer au programme de façon volontaire. Selon un penseur du domaine juridique, cependant, les tribunaux de santé mentale ont été créés parce que les soutiens offerts au sein de la collectivité étaient inadéquats et sont le fruit d’un système de justice pénale dont le climat est discriminatoire. Selon l’Empowerment Council, on doit encore démontrer de façon empirique la capacité des services de déjudiciarisation de respecter les droits de la personne.

De nombreuses personnes nous ont dit que les services de déjudiciarisation avaient eu un effet positif en réorientant avec succès les gens du système de justice pénale vers le système de santé mentale. Cependant, selon la MTCSALC, certaines personnes qui pourraient bénéficier des services de déjudiciarisation n’y ont pas accès, parce qu’elles ne sont pas repérées par les agents de police ou les avocats de la Couronne. D’expliquer la MTCSALC, « les personnes dont les problèmes de santé mentale n’ont pas été diagnostiqués aboutiront devant une cour criminelle ordinaire et feront face à des peines pouvant être plus sévères ».

Le Comité provincial de coordination des services à la personne et des services juridiques nous a confié que les programmes de soutien aux tribunaux n’ont pas la capacité de traiter les cas plus complexes comme les personnes ayant des toxicomanies concomitantes ou un diagnostic double co-occurrent (déficience intellectuelle). Il laisse entendre que 80 p. 100 des personnes aiguillées par le système judiciaire vers des services de santé mentale on une dépendance ou un trouble concomitant.

La nature « distincte » du système de services de déjudiciarisation inquiétait aussi certaines personnes, qui étaient d’avis que la résolution des questions de mesures d’adaptation requises dans le cadre d’un procès ordinaire constituerait une approche davantage intégrée et équitable. On nous a également fait part de préoccupations à propos de l’étendue des évaluations individuelles des gens menées par les tribunaux et de la mesure dans laquelle ces derniers établissent des plans de traitement appropriés. D’après une personne représentant une initiative d’usagers/de survivants, les gens ne participent pas aux décisions relatives à leurs besoins, et les plans de traitement peuvent limiter le type de services auxquels la personne peut avoir recours.

Recommandations :

49. Le Conseil canadien de la magistrature et l’Institut national de la magistrature devraient offrir une formation à tous les juges en matière de droits de la personne et d’accommodement des personnes ayant des handicaps psychosociaux durant le processus d’audience.

50. Le ministère du Procureur général, le Barreau du Haut-Canada et l’Association du Barreau de l’Ontario devraient planifier des formations pour les juristes et le personnel des tribunaux en matière de droits de la personne et d’accommodement des personnes ayant des handicaps psychosociaux durant le processus d’audience.

51. Le ministère du Procureur général et Aide juridique Ontario devraient examiner leurs politiques, processus et pratiques, y retirer les obstacles à l’accès et y améliorer les mesures d’adaptation offertes aux usagers aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances.

Système correctionnel

Les prisons sont les pires endroits où avoir des troubles mentaux. Elles ne sont pas équipées pour composer avec la situation. Une personne pourrait avoir une crise maniaque, se mettre à hurler ou autre. La seule chose que le gardien peut faire, c’est de lui dire de la fermer et de la mettre en isolement cellulaire, ce qui ne fait qu’empirer les choses. Durant une de mes crises en prison, ils ne s’avaient plus quoi faire avec moi. J’étais en isolement et ma situation s’est aggravée. En bout de ligne, ils m’ont envoyé dans un centre où ils offrent des soins de santé aux détenus. Cet endroit a sauvé ma vie.

            – Participant(e) au groupe de consultation

Dans son rapport annuel de 2008-2009, le Bureau de l’enquêteur correctionnel du gouvernement fédéral, qui agit à titre de protecteur du citoyen pour les contrevenants des établissements correctionnels fédéraux, a rappelé les propos du ministre fédéral de la Sécurité publique, qui a indiqué qu’au cours des 30 dernière années, le Canada s’était graduellement orienté vers un système communautaire et ambulatoire de « désinstitutionalisation » des résidents des établissements provinciaux aux prises avec des troubles mentaux, pour découvrir qu’il ne fait que les « ré-institutionnaliser » dans le système carcéral, ce qui laisse entendre que le Canada « criminalise la maladie mentale »[175]. Le rapport poursuit en affirmant que 39 p. 100 des détenus des établissements de l’Ontario ont un diagnostic de maladie mentale, ont une ordonnance de médication en vigueur ou font l’objet d’une évaluation psychiatrique ou d’un traitement psychologique continu. Dans le système judiciaire fédéral, 50 p. 100 des contrevenants canadiens ont rapporté des problèmes de surconsommation d’alcool à l’origine de leur infraction[176].

Les personnes consultées se souciaient du fait que beaucoup de personnes ayant des handicaps psychosociaux soient en prison pour des infractions relativement mineures. Le fait que certaines populations protégées aux termes du Code, comme les hommes afro-canadiens et racialisés, les Autochtones et les personnes atteintes de troubles d’apprentissage et de troubles causés par l’alcoolisation fœtale, soient hautement représentées au sein du système correctionnel alarmait beaucoup de personnes, compte tenu que cela peut être le reflet de discrimination systémique à l’endroit de ces personnes[177].

Le manque de disponibilité de services de santé mentale adéquats pour les détenus du système correctionnel (OHA) et l’accès limité de ces personnes à des médecins et des traitements est un problème important. On nous a aussi fait part de préoccupations par rapport au fait que les personnes ayant certains problèmes psychiques pouvaient ne pas obtenir des mesures d’adaptation appropriées au sein du système carcéral sous forme d’interruptions non justifiées de leurs traitements, comme la non-administration des médicaments dont ils on besoin. Les personnes consultées craignaient que ces types de pratiques soient dangereux pour la situation des gens. La CODP est consciente des inquiétudes par rapport au fait que les détenus des établissements correctionnels pourraient avoir un accès limité aux médicaments couramment prescrits et voir leur traitement existant modifié sans évaluation en face à face par un médecin.

Selon le Comité provincial de coordination des services à la personne et des services juridiques, l’Ontario compte plus de clients en détention provisoire que de personnes reconnues coupables d’actes criminels, et bon nombre de ces détenus provisoires ont des problèmes de santé mentale ou des dépendances, ou les deux. Cependant, ces personnes ne reçoivent pas d’évaluations psychiatriques prescrites par la cour, ou des services de santé mentale ou de toxicomanie adéquats pendant qu’elles attendent leur procès, et ce, surtout en milieu rural.

En juin 2012, le Comité contre la torture des Nations Unies a soulevé des préoccupations par rapport à l’état des détenus canadiens aux prises avec une maladie mentale. Pour se conformer aux normes des Nations Unies, il somme le Canada de prendre, entre autres, les mesures suivantes : renforcer la capacité des centres de traitement pour les prisonniers atteints de problèmes de santé mentale intermédiaires et graves, et ne plus recourir à l’isolement cellulaire pour les personnes atteintes de graves maladies mentales[178].

Engagement de la CODP :

E25. Dans le cadre de son travail en matière de droits de la personne auprès du ministère de la Sécurité communautaire et des Services correctionnels (MSCSC), la CODP inclura au nombre des questions prioritaires le manque de mesures d’adaptation offertes aux personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances, surtout en cas d’intersection avec d’autres motifs de discrimination interdits par le Code, dont la race et les motifs connexes, d’autres formes de handicap et le sexe.

Casier judiciaire

Les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances peuvent obtenir un casier judiciaire à la suite de démêlés avec les tribunaux en lien avec leur handicap, comme une accusation d’inconduite ou une infraction plus grave. Beaucoup de préoccupations ont été soulevées à propos des profondes répercussions du fait d’avoir un casier judiciaire sur la capacité d’obtenir un logement, un emploi, un travail bénévole, comme une éducation postsecondaire ou d’autres services, ou un médecin, un psychiatre ou un programme communautaire de santé mentale (OHA, Provincial Health and Services Justice Coordinating Committee). Le Code interdit la discrimination en emploi contre les personnes qui ont un casier judiciaire mais ont obtenu un pardon. Ce type de protection a une portée restreinte et ne s’étend à aucun autre aspect social couvert par le Code.

Selon la Metro Toronto Chinese and Southeast Asian Legal Clinic, les répercussions du casier judiciaire sont encore plus grandes chez les personnes racialisées. Les résidents permanents peuvent se faire déporter même si le casier judiciaire est le résultat de comportements en lien avec un handicap. Les personnes à faible revenu peuvent avoir de la difficulté à obtenir un pardon, ce qui peut aussi avoir des effets néfastes sur les personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances.


 

[125] Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, supra note 6; Gouvernement de l’Ontario, supra note 6.

[126] Pour plus de renseignements sur ce sujet, voir Yona Lunsky et Jennifer Puddicombe, Dual Diagnosis in Ontario’s Specialty (Psychiatric) Hospitals: Qualitative Findings and Recommendations. Phase II Summary Report, décembre 2005. Accessible en ligne : Centre de toxicomanie et de santé mentale www.camh.net/Care_Treatment/Program_Descriptions/Mental_Health_Programs/....

[127] Par exemple, en 2008, le vérificateur général de l’Ontario a déterminé que le financement accordé aux services de traitement de la toxicomanie et services de santé mentale communautaires était inférieur aux cibles établies et aux niveaux requis pour satisfaire la demande de ces services. Bureau du vérificateur général de l’Ontario, Rapport annuel 2008 du Bureau du vérificateur général de l’Ontario, Toronto, Imprimeur de la Reine pour l’Ontario, 2008. Accessible en ligne : Bureau du vérificateur général de l’Ontario, http://www.auditor.on.ca/fr/rapports_fr/fr08/ar_fr08.pdf, à 199.

[128] Commission sur l’avenir des soins de santé au Canada, Guidés par nos valeurs : L’avenir des soins de santé au Canadarapport final, novembre 2002, à 194 (commissaire : Roy J. Romanow). Ministère de la Santé et des Soins de longue durée, Chaque porte est la bonne porte. Vers une stratégie décennale de santé mentale et de lutte contre les dépendances. Document de travail, Toronto, Imprimeur de la Reine pour l’Ontario, 2009.  

[129] Les dépenses publiques dans le secteur de la santé mentale représentaient 6,1 p. 100 des dépenses publiques en santé, lesquelles s’élevaient à 91,4 milliards de dollars. Ce niveau de financement est supérieur au seuil de 5 p. 100 fixé par le Réseau européen de l’économie de la santé mentale, mais inférieur à celui de la plupart des pays développés. Une proportion de moins de 5 p. 100 peut représenter un financement inéquitable de la santé mentale (Santé mentale Europe, 2004). P. Jacobs et coll. « Expenditures on mental health and addictions for Canadian provinces from 2003 and 2004 », Can.J.of Psychiatry, vol. 53, no 5, 2008, p. 33, tel que cité dans Institute of Health Economics, How Much Should we Spend on Mental Health? septembre 2008, à la p. 25.

[130] Commission de la santé mentale du Canada, supra note 93, à la p. 13.

[131] Auton (Tutrice à l’instance de) c. Colombie-Britannique (Procureur général), [2004] 3 R.C.S. 657, 2004 CSC 78, à 41.

[132] Hogan v. Ontario (Ministry of Health & Long-Term Care), 2006, HRTO 32 (CanLII); L’allocation de ressources aux services de santé mentale dépend de beaucoup de facteurs. Les recherches effectuées laissent entendre que la perception de responsabilité personnelle est le plus important corrélat des valeurs à l’origine des décisions en matière d’allocation de ressources. Les perceptions à propos de la responsabilité des gens à l’égard de leurs propres problèmes de santé mentale peuvent avoir une influence sur le financement des services de santé mentale, et pourraient expliquer pourquoi ces programmes ont un niveau de financement moindre que les autres services. Pour une analyse documentaire, voir Patrick W. Corrigan et Amy C. Watson, « Factors that Explain how Policy Makers Distribute Resources to Mental Health Services », Psychiatric Services, vol. 54, no 4, 2003, p. 501.   

[133] Pour de plus amples renseignements sur les initiatives de lutte contre la stigmatisation à l’échelle du Canada, voir Commission de la santé mentale du Canada, Changer les mentalités. Accessible en ligne : Commission de la santé mentale du Canada, http://www.mentalhealthcommission.ca/Francais/Pages/Campagneanti_stigmate.aspx.

[134] CRDPHsupra note 9, par. 24(2).

[135] Loi sur l’éducation, L.R.O. 1990, C. E.2, Règl. de l’Ont. 181/98 (Identification et placement des élèves en difficulté), par.17(1); Commission ontarienne des droits de la personne, Directives concernant l’éducation accessible, Toronto, Imprimeur de la Reine pour l’Ontario, 2004. Accessible en ligne : CODP, http://www.ohrc.on.ca/fr/directives-concernant-l%C3%A9ducation-accessible.

[136] Ministère de l’Éducation, Note Politique/Programmes no 119. Accessible en ligne : Ministère de l’Éducation http://www.edu.gov.on.ca/extra/fre/ppm/119f.html.

[137] Ontario, ministères des Services à l’enfance et à la jeunesse, de la Santé et des Soins de longue durée et de l’Éducation, Amélioration des soutiens en matière de santé mentale destinés aux enfants et aux familles, communiqué de presse, le 22 juin 2011; Gouvernement de l’Ontario, supra note 6, à 12 et 14.

[138] Ontario au travail reconnaît que les risques de rechute peuvent nuire à l’atteinte des objectifs en matière de traitement et met de l’avant des mesures progressives visant à promouvoir le respect du traitement. En bout de ligne, cependant, les absences répétées à un programme de traitement peuvent mener à la décision de cesser ou de réduire le soutien en raison de l’inobservation du traitement. Ministère des Services sociaux et communautaires, Directives du programme Ontario au travai 8.4. Initiative de traitement de la toxicomanie, février 2009. Accessible en ligne : MCSS, http://www.mcss.gov.on.ca/documents/fr/mcss/social/directives/ow/0804Fr1.pdf, à 5 et 6.

[139] CRDPHsupra note 9, paragraphes 25(a), (b),(d) et (f).  

[140] Selon le CAMH, « les patients atteints de maladie mentale grave qui ont un infarctus sont considérablement moins susceptibles que la population générale de recevoir un traitement médicamenteux éprouvé. Ils ont moins tendance à subir un cathétérisme cardiaque, une angioplastie d’urgence ou un pontage aortocoronarien. » J. Newcomer et C. Hennekens, « Severe Mental Illness and Risk of Cardiac Disease », J.A.M.A., vol. 298, no 15, 2007, p. 1794. Le CAMH a aussi cité une étude qui estimait à 35 p. 100 le nombre de personnes ayant des troubles mentaux graves qui ont au moins un trouble médical non diagnostiqué. Bazelon Centre for Mental Health Law, Get it Together: How to Integrate Physical and Mental Health Care for People with Serious Mental Disorders, 2004. Le CAMH a aussi fait remarquer que le taux de mortalité des suites du cancer est de 65 p. 100 supérieur chez les personnes ayant des troubles mentaux.. André Picard, « Cancer death rate 65% higher among the mentally ill », The Globe & Mail, le 9 avril 2009. Accessible en ligne : The Globe & Mail, www.theglobeandmail.com/life/article965397.ece.

[141] En 2008, plusieurs organismes du secteur de la santé mentale et des dépendances ont indiqué au ministère de la Santé et des Soins de longue durée que l’Échelle canadienne de triage et de gravité incluait les « problèmes psychiatriques » (à l’exception des idées suicidaires/tentatives de suicide) au « niveau V » de triage, le niveau le moins urgent. Ces organismes recommandaient d’examiner les effets de ce niveau sur les temps d’attente et la qualité des soins, et d’apporter les remèdes nécessaires. Addictions Ontario et coll. Addressing Emergency Department Wait Times and Enhancing Access to Community Mental Health & Addictions Services and Supports, mémoire au ministre de la Santé et des Soins de longue durée, mai 2008, à 5; Les critères de l’Échelle canadienne de triage et de gravité touchant les problèmes de santé mentale ont été revisés; Voir Michael J. Bullard et coll. « Révision des lignes directrices de l’Échelle canadienne de triage et de gravité (ÉTG) pour les adultes », C.J.E.M., vol. 10, no 2, 2008, p. 143. Accessible en ligne : CJEM, http://www.cjem-online.ca/sites/default/files/pg143(1)(1).pdf.

[142] Le BIPEP nous a dit que cette question avait été soulevée durant l’enquête sur le décès de Ryan Coulter qui, selon le BIPEP, pourrait ne pas avoir reçu de soins médicaux durant son séjour à l’hôpital psychiatrique parce qu’on aurait attribué ses symptômes physiques à son état psychique et ses dépendances multiples.

[143] Comité spécial de la santé mentale et de la lutte contre les dépendances, Sur le chemin du mieux-être : Le plan d’action compréhensif sur la santé mentale et les dépendances à l’intention des Ontariens et Ontariennes, Rapport final, 2e session, 39e Parlement, Elizabeth II, Toronto, Imprimeur de la Reine pour l’Ontario, 2010, p. 59. Accessible en ligne : Assemblée législative de l’Ontario, http://www.ontla.on.ca/committee-proceedings/committee-reports/files_pdf/Select%20Report%20FR.pdf, recommandation 12, à 12.

[144] Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario, Accepting New Patients, politique no 1-09, avril 2009. Accessible en ligne : CPSO, www.cpso.on.ca/policies/policies/default.aspx?ID=2506 , à 2.

[145] Loi sur la santé mentale, L.R.O. 1990, chap. M.7., art. 15.

[146] Avant l’entrée en vigueur de la CRDPH, l’Assemblée générale avait adopté (Résolution 46/119 du 17 décembre 1991) des normes et directives relatives aux soins et traitements prodigués aux personnes hospitalisées dans un établissement de santé mentale (appelées Principes des Nations Unies pour la protection des personnes atteintes de maladie mentale et pour l’amélioration des soins de santé mentale). La CRDPH a préséance sur ces principes.

[147] « Les personnes handicapées sont souvent isolées de la société : elles sont placées dans des institutions, y compris des prisons, des centres de soins sociaux, des orphelinats et des établissements de santé mentale. Elles sont privées de leur liberté pendant de longues périodes, parfois même pendant toute leur vie, soit contre leur volonté soit sans leur consentement libre et éclairé. Dans ces institutions, elles sont souvent victimes d’indicibles humiliations, de négligences, de formes extrêmes de contention et d’isolement, ainsi que de violences physiques, mentales et sexuelles. » Rapport d’activité du Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, UN GAOR 63e session, Document des Nations Unies A/63/175, 2008, p. 9, par. 38.

[148] « Le Rapporteur spécial constate qu’il ne saurait y avoir de justification thérapeutique de l’utilisation prolongée des moyens de contention qui peut constituer un acte de torture ou un mauvais traitement [...] Dans les établissements, les personnes handicapées sont souvent mises à l’isolement ou au secret, deux méthodes employées comme moyens de contrôle ou comme traitement médical, bien qu’injustifiables pour des motifs thérapeutiques, ou encore comme forme de châtiment. » Note du Secrétaire général, ibid., par. 55-56.

[149]Note du Secrétaire général, ibid., page 16, par. 63.  

[150] CRDPHsupra note 9, alinéa 14(1)b).

[151] Haut-Commissariat aux droits de l’homme des Nations unies et rapports du Haut-Commissariat et du Secrétaire général, Thematic Study by the Office of the United Nations High Commissioner for Human Rights on enhancing awareness and understanding of the Convention on the Rights of Persons with Disabilities, Conseil des droits de l’homme, 10e session, UN GAOR, doc. no A/HRC/10/48, 2009, à 49.

[152] Commission du droit de l’Ontario, Promouvoir l’égalité des personnes handicapées par l’entremise des lois, des politiques et des pratiques : Cadre provisoire, mars 2012.

[153] Étude thématique sur la participation des personnes handicapées à la vie politique et à la vie publique, établie par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, UN GAOR, Conseil des droits de l’homme, 19e session, document des Nations Unies A/HRC/19/36, 2011, à 30.

[154] Ibid., à 68.

[155] Le Canada se réserve aussi le droit de ne pas soumettre toutes ces mesures à un contrôle périodique effectué par un organe indépendant, étant donné qu’il dispose de son propre mécanisme d’appel. CRDPHsupra note 9, Déclaration et réserves du Canada. Accessible en ligne : Collection des traités des Nations unies http://treaties.un.org/pages/ViewDetails.aspx?src=TREATY&mtdsg_no=IV-15&....

[156] Loi de 1992 sur la prise de décisions au nom d’autrui, L.O. 1992, chap. 30; Loi sur le consentement aux soins de santé, L.O. 1996, c. 2, Annexe A.

[157] Nicole Chammartin, Christine Ogaranko, Beverly Froese, supra note 152, à 68.

[158] Michael Bach et Lana Kerzner, Un nouveau paradigme pour protéger l’autonomie et le droit à la capacité juridique, octobre 2010. Accessible en ligne : CDO, www.lco-cdo.org; Le World Network of Users and Survivors of Psychiatry soutient que les organismes comme les banques, les juges et le personnel médical qui traitent souvent de questions nécessitant l’exercice de la capacité juridique doivent fournir des mesures de soutien à titre de mesures d’adaptation. World Network of Users and Survivors of Psychiatry, supra note 23, à 17; Le commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe recommande de « créer une obligation juridique contraignant les autorités gouvernementales et locales, l'appareil judiciaire, les services de santé, les services financiers, les assurances et les autres prestataires de services à mettre en place des aménagements raisonnables en faveur des personnes handicapées désireuses de recourir à ces services. La notion d’aménagement raisonnable implique de fournir des informations dans un langage clair et d'accepter qu'un auxiliaire communique la volonté de la personne concernée. » Commissaire aux droits de l’homme, Conseil de l’Europe, À qui appartient-il de décider? Le droit à la capacité juridique des personnes ayant des déficiences intellectuelles et psychosociales, Strasbourg, 2012, CommDH/IssuePaper(2012)2. Accessible en ligne : Conseil de l’Europe, https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?id=1908565, recommendation 9.

[159] Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, supra note 6, à 230.

[160] Fleming v. Reid, [1991] O.J. No. 1083, 1991 CanLII 2728 (ON CA), par. 33 et 34.

[161] Toute personne est capable à l’égard d’un traitement, de son admission à un établissement de soins ou d’un service d’aide personnelle si elle est apte à comprendre les renseignements pertinents à l’égard de la prise d’une décision concernant le traitement, l’admission ou le service d’aide personnelle, selon le cas, et apte à évaluer les conséquences raisonnablement prévisibles d’une décision ou de l’absence de décision. Loi sur le consentement aux soins de santé, L.O. 1996, chap. 2, Annexe A, par. 4(1).

[162] Dreezer and Dreezer Inc. Rapport sur le processus d’examen des ordonnances de traitement en milieu communautaire en vertu de l’article 33.9 de la Loi sur la santé mentale, préparé pour le ministère de la Santé et des Soins de longue durée en décembre 2005, à 7.

[163] Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario, Norme d’exercice : La contention, Toronto, Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario, 2009. Accessible en ligne : OIIO, http://www.cno.org/Global/docs/prac/51043_restraints.pdf, à 4.

[164] La Loi de 2001 sur la réduction au minimum de l’utilisation de la contention sur les malades, L.O. 2001, chap. 16, fait la promotion des principes de réduction au minimum de l’utilisation de la contention et oblige les hôpitaux et autres établissements à élaborer des politiques en matière de contention. Cependant, la loi ne s’applique pas dans les circonstances où la Loi sur la santé mentale régit l’utilisation de moyens de contention sur les malades ou autres personnes qui se trouvent dans des établissements psychiatriques (voir le par. 2(2)).

[165] Les maisons de soins infirmiers qui ont une plus grande proportion d’infirmières autorisées à temps plein ont recours à la contention moins fréquemment que les maisons qui ont une plus grande proportion d’infirmières autorisées contractuelles et à temps partiel. Robert Weech-Maldonado, Louise Meret-Hanke, Maria C. Neff et Vince Mor, « Nurse Staffing Patterns and Quality of Care in Nursing Homes », Health Care Man Rev., vol. 29, no 2, 2004. P. 107.

[166] Les mesures de contention utilisées incluent : contrôle médicamenteux en phase aiguë, contention physique, contention mécanique et isolement. Institut canadien d’information sur la santé, Mesures de contention et autres interventions de contrôle pour les patients hospitalisés en santé mentale en Ontarioaoût 2011. Accessible en ligne : Institut canadien d’information sur la santé, www.cihi.ca, à 1.

[167] Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario, supra note 163.

[168] Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario, supra note 163, à 39.

[169] Association des chefs de police de l’Ontario, Resolution 2011-01: Mental Health and Addictions, 29 juin 2011. Accessible en ligne : Association des chefs de police de l’Ontario, www.oacp.ca/content/resolutions/view_resolution.html?id=132.

[170] Association canadienne pour la santé mentale – Ontario, Justice and Mental Health, Accessible en ligne : Association canadienne pour la santé mentale – Ontario, www.ontario.cmha.ca/justice.asp, téléchargé le 31 janvier 2012.

[171] L’article 17 de la Loi sur la santé mentale de l’Ontario donne à un agent de police l’autorité requise pour amener quelqu’un dans un centre médical à des fins d’évaluation si l’agent de police a « des motifs raisonnables et probables » de croire qu’une personne a agi « de façon désordonnée » et qu’il a des motifs valables de croire que cette personne souffre d’un trouble mental tel qu’elle s’infligera probablement des lésions corporelles graves, qu’elle en infligera probablement à une autre personne ou qu’elle subira un affaiblissement physique grave, ou qu’elle a menacé ou tenté de s’infliger des lésions corporelles ou menace ou tente de le faire, qu’elle s’est comportée ou se comporte avec violence envers une autre personne ou de manière à lui faire craindre qu’elle lui causera des lésions corporelles, ou qu’elle a fait ou fait preuve de son incapacité de prendre soin d’elle-même.

[172] Carys Mills, « Ontario to review how police respond to the mentally ill », The Globe and Mail, le 2 mai 2012. Accessible en ligne : The Globe and Mail www.theglobeandmail.com/news/national/toronto/ontario-to-review-how-police-respond-to-the-mentally-ill/article2420940/.

[173] « Le taux d’utilisation de l’AI [par la GRC] de 49,6 % dans les cas liés à la santé mentale est beaucoup plus élevé que pour les autres types de cas liés à la santé (39,2 %). […] de tous les types d’incidents, c’est dans des cas liés à la santé mentale que l’AI a été déployée le plus souvent […] il n’y a aucune donnée probante selon laquelle les cas liés à la santé mentale présentent un risque plus élevé que les autres types d’incidents. » Commission des plaintes du public contre la GRC, Utilisation de l'arme à impulsions (AI) à la GRC du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2009, le 24 juin 2010. Accessible en ligne : Commission des plaintes du public contre la GRC, http://www.cpc-cpp.gc.ca/prr/rep/sir/cew-ai-10-fra.pdf, p. 52-53.

[174]Anita Barnes, Accommodating people with mental health issues and addictions in the tribunal system, (présentation faite à la Society of Ontario Adjudicators and Regulators, le 1er juin 2011). Accessible en ligne : Society of Ontario Adjudicators and Regulators, www.soar.on.ca/docs/Accommodating%20people%20at%20tribunals.pdf.

[175] Howard Sapers, Rapport annuel du Bureau de l’enquêteur correctionnel 2008-2009, le 29 juin 2009. Accessible en ligne : Bureau de l’enquêteur correctionnel, http://www.oci-bec.gc.ca/rpt/pdf/annrpt/annrpt20082009-fra.pdf.

[176] Comité spécial de la santé mentale et de la lutte contre les dépendances, supra note 143, à 13.

[177] Des statistiques colligées par l’Enquêteur correctionnel Canada montrent que le taux d’incarcération des Canadiennes et des Canadiens d’origine africaine au sein du système fédéral augmente, et qu’il est passé de 6,27 p. 100 du nombre total de détenus en 2000-2001 à 8,4 p. 100 de leur nombre total en 2010-2011. Données fournies à la CODP par le Bureau de l’enquêteur correctionnel du Canada.

[178] Observations finales du Comité contre la torture : Canada, Nations unies, Comité contre la torture, version avancée et non éditée, 48e session, documents des Nations Unies, CAT/C/SR.1087 et 1088, 2012, à 19.

 

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