Approuvé par la Commission le 30 mars 2005
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Introduction
La Commission ontarienne des droits de la personne (la « Commission ») estime qu’il serait un temps opportun de réfléchir sur les questions des droits de la personne qui sont lier aux relations, notamment l’état familial, et de mieux sensibiliser le public à ces questions.
Ces dernières années, on a accordé relativement peu d’attention à la protection des droits de la personne relatifs à l’état familial aux termes du Code des droits de la personne de l’Ontario (le « Code »)[1]. De fait, les questions reliées à l’état familial sont rarement associées à des questions de droits de la personne. Ce sujet motif de discrimination illicite soulève diverses questions : comment est-ce que la société valorise et favorise-t-elle nos relations, et comment peut-on éviter le désavantage systémique qui s’y rattache souvent? Un examen de l’état familial fait ressortir les importantes répercussions que nos relations peuvent avoir sur l’accès au logement à l’emploi et aux services.
Le public s’est particulièrement intéressé, au cours des dernières années, à la question de la difficulté croissante à maintenir un équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée, les particuliers s’efforçant de remplir leurs engagements à la fois envers leur employeur et envers leur famille. Des expressions telles que « conciliation travail-vie » et « environnement de travail flexible » sont devenues des expressions-clés, et les gouvernements ont commencé à prendre certaines mesures en vue de protéger les employés qui ont des responsabilités « parentales ». Malgré les longues discussions sur ces questions, celles-ci n’ont généralement pas été associées à des questions touchant les droits de la personne. La Commission a de nouveau dû se pencher sur cette question à la suite des consultations publiques qu’elles a tenues, en 2000, sur la discrimination fondée sur l’âge, au cours desquelles sont devenus évidents le besoin croissant en matière de soins pour les personnes âgées – la prestation de ces soins incombant essentiellement aux membres de la famille – et les répercussions que cela engendrait à la fois pour ceux qui reçoivent de tels soins et pour ceux qui les dispensent. La Commission s’est donc engagée à formuler en matière de services aux aînés un énoncé de principes qui définisse les problèmes relatifs aux questions des droits de la personne, ainsi qu’à instruire les plaintes des employés qui fournissent des soins à des parents, conjoints ou partenaires du même sexe[2] âgés ou malades et qui font l’objet d’une discrimination fondés sur l’état familial ou l’état matrimonial ou sur le partenariat avec une personne de même sexe[3].
Récemment, la jurisprudence portant sur la grossesse et l’allaitement naturel, ainsi que les politiques de la Commission et ses travaux de sensibilisation du public en la matière, a fait ressortir les répercussions qu’a sur les femmes leur rôle de fournisseurs de soins et a permis de conclure qu’il incombait aux employeurs, aux locateurs et aux fournisseurs de services de tenir compte de l’importance du lien mère-enfant[4]. L’examen du motif de discrimination fondé sur l’état familial représente le prolongement logique de ces travaux.
Les familles canadiennes se sont considérablement diversifiées au cours des dernières années. Le nombre de parents célibataires et de familles reconstituées continue à s’augmenter. Les familles peuvent (de moins en moins) compter sur un de leurs membres pour s’occuper à temps plein des autres : dans la plupart des familles avec enfants, tous les adultes travaillent à l’extérieur du foyer. Ce n’est par ailleurs qu’au cours des dernières années qu’ont dans une certaine mesure été reconnues les familles dirigées par des parents du même sexe. Les employeurs, les locateurs et les fournisseurs de services n’ont pas nécessairement adapté leurs politiques, programmes et pratiques à ces nouvelles réalités. Les personnes faisant partie d’une famille non-traditionnelle risquent, en matière d’accès à l’emploi, au logement ou aux services, d’être exclues ou désavantagées.
Les rapports faisant état d’une discrimination répandue en matière d’accès au logement locatif préoccupent la Commission, de même que le fait que les familles avec de jeunes enfants sont susceptibles d’être marginalisées au sein du marché du logement locatif, particulièrement lorsqu’il y a recoupement entre l’état familial et l’état matrimonial, la réception de prestations d’aide sociale ou les motifs de discrimination liés à la race aux termes du Code. Les conséquences de cette marginalisation peuvent être très graves et soulèvent d’importantes questions en matière de droits de la personne.
Il se peut qu’il y ait d’autres questions reliées à l’état familial que la Commission n’a pas encore cernées. La Commission considère le présent document de travail comme une première étape de l’examen qu’elle entend poursuivre sur la question des droits de la personne et de l’état familial, et comme une occasion de sensibiliser le public aux protections fondées sur l’état familial qui sont offertes en matière de droits de la personne. La Commission souhaite lancer le débat, explorer la direction à prendre en vue de renforcer ces protections, obtenir de la rétroaction et stimuler la discussion sur ces questions au sein de la collectivité. La Commission a l’intention d’élaborer un énoncé de principes sur la discrimination fondée sur l’état familial. Les énoncés de principes de la Commission établissent des normes sur la manière dont les particuliers, les employeurs, les fournisseurs de services et les responsables des politiques devraient agir pour s’assurer qu’ils respectent le Code. Ces énoncés sont importants puisqu’ils fournissent des renseignements sur l’interprétation du Code retenue par la Commission au moment de leur publication. Bien qu’ils ne lient pas les commissions d’enquête ni les tribunaux, ces derniers leur accordent souvent une très grande importance, les appliquent aux faits de l’espèce et les citent dans leurs décisions.
[1] L.R.O. 1990, chap. H.9.
[2] Les expressions « partenaire de même sexe » et « partenariat avec une personne de même sexe » ont récemment été supprimées du Code. Auparavant, le Code définissait le terme « conjoint » comme étant « la personne à qui une personne de sexe opposé est mariée ou avec qui elle vit dans une union conjugale hors du mariage », tandis que la définition d’« état matrimonial » visait le « fait d’être marié, célibataire, veuf, divorcé ou séparé », y compris « le fait de vivre avec une personne de sexe opposé dans une union conjugale hors du mariage » (par. 10(1)). Par suite de la décision rendue en 1999 dans l’affaire M. c. H., [1999] 2 R.C.S. 3, dans laquelle la Cour suprême du Canada a jugé que la définition de « conjoint » (qui visait une personne de sexe opposé) figurant dans la Loi sur le droit de la famille était inconstitutionnelle, le Code a été modifié de manière à accorder une protection au « partenariat avec une personne de même sexe ». Le Code définissait l’expression « partenaire de même sexe » comme étant « la personne avec qui une personne de même sexe vit dans une union conjugale hors du mariage ». En 2005, le projet de loi 171 (L.O. 2005, chap. 5) modifiait le Code à nouveau. Les expressions « partenaires de même sexe » et « partenariat avec une personne de même sexe » ont alors été supprimées. Les définitions de l’expression « état matrimonial » et du terme « conjoint » ont été modifiées par substitution de « une personne » à « une personne du sexe opposé ». Sauf indication contraire, le présent document renvoie à la définition courante de l’expression « état matrimonial » et du terme « conjoint ».
[3] Commission ontarienne des droits de la personne, Il est temps d’agir : Faire respecter les droits des personnes âgées en Ontario (2001), en ligne : Commission ontarienne des droits de la personne, <www.ohrc.on.ca/>.
[4] Commission ontarienne des droits de la personne, Politique concernant la discrimination liée à la grossesse et à l’allaitement naturel (2001), en ligne : Commission ontarienne des droits de la personne, <www.ohrc.on.ca/>.