Language selector

Social Media Links FR


Facebook CODP Twitter CODP Instagram logo Link to OHRC Instagram page

Mémoire de la CODP sur la Loi visant à accélérer la construction de plus de logements : Location avec option d’achat

Page controls

Page content

9 décembre 2022

 

Mémoire de la CODP : Sollicitation de commentaires sur les accords de location avec option d'achat

La CODP salue les efforts déployés par le gouvernement pour affronter la crise du logement. À mesure que se poursuit la mise en œuvre du plan Accélérer la construction de plus de logements, nous devons nous assurer que les lois, les politiques, les programmes et les règlements municipaux relatifs au logement s’articulent autour du respect des droits de la personne. Cela inclut le respect des obligations de l’Ontario aux termes du Code des droits de la personne (Code) et la reconnaissance du droit au logement, tel qu’il est affirmé dans la Loi sur la stratégie nationale sur le logement.

 

Le logement et les droits de la personne :

L’accès à un logement adéquat est un élément essentiel du sentiment de dignité, de sécurité et d’inclusion de la personne, et de sa capacité de contribuer au mieux-être de nos quartiers et de la société dans son ensemble[1]. Le droit international et le Code des droits de la personne affirment tous les deux l’importance du logement pour la dignité humaine, ainsi que son statut de droit de la personne. Le Canada a reconnu le caractère fondamental du droit à un logement adéquat en ratifiant le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC). L’article 11 du PIDESC reconnaît le droit de toute personne à un logement adéquat, dont l’importance et le lien à l’interdiction de la discrimination sous toutes ses formes ont été confirmés dans les rapports et énoncés subséquents des Nations Unies.

En Ontario, le Code inclut des mesures spécifiques de protection contre la discrimination en matière de logement, qui reconnaissent l’important rôle social qu’occupe le domicile. Toutes les facettes du droit au logement doivent être exercées sans discrimination[2].

Le domicile n’est pas uniquement un bien à gérer, mais l’espace dans lequel les personnes se créent une vie. Les locateurs et les promoteurs immobiliers jouent un rôle important dans l’économie ontarienne, mais ce rôle est assujetti aux restrictions prévues au Code, lesquelles assurent qu’on attribue au domicile une importance supérieure à sa seule valeur de produit.

La CODP reconnaît la réalité changeante du logement. Or, tout changement opéré demeure assujetti au Code, qui a préséance sur toutes les autres lois provinciales. Au cours des deux dernières décennies, la nature des marchés immobiliers a évolué de façon draconienne à mesure que de nouveaux acteurs, y compris des locateurs financiarisés, se sont mis à dominer le marché. Ces changements ont nui de façon disproportionnée aux personnes vulnérables, y compris les groupes protégés par le Code[3].

 

Contexte des accords de location avec option d'achat :

Les accords de location avec option d'achat prennent généralement la forme d’une entente conclue entre un fournisseur de logements (propriétaire ou locateur, société de location avec option d'achat, etc.) et un client, dans le but que le client loue le domicile pendant une période de location définie et qu'il l'achète à la fin de la période de location.

Bien que les accords de location avec option d'achat puissent varier en fonction d'un ensemble de facteurs, ceux-ci exigent généralement que les clients paient des frais de location mensuels, ainsi qu'un montant supplémentaire en guise de mise de fonds pour l’achat de la propriété. À la fin de la période de location, si le client souhaite acheter la propriété, il peut utiliser la mise de fonds accumulée pour tenter d’obtenir l'approbation du prêt hypothécaire requis.

Les clients et les fournisseurs de logements qui ont conclu un accord de location avec option d'achat signent généralement deux contrats distincts. Le premier contrat est un contrat de location équivalent au contrat de location standard. Le second est un contrat de location avec option d'achat. Ce contrat permet aux parties de déterminer les détails de l'achat de la propriété à l’expiration du bail.

 

Proposition

Le gouvernement de l'Ontario a entrepris l’exploration du rôle que peut avoir le modèle de financement immobilier de location avec option d’achat sur l'accès au logement dans la province. À cette fin, le gouvernement a posé quatre questions (voir les réponses de la CODP ci-après).

 

Recommandations de la CODP

L’élaboration de programmes de location avec option d’achat devra impérativement tenir compte de l’important rôle social du domicile, que reconnaissent les mesures spécifiques de protection contre la discrimination en matière de logement prévues dans le Code. Tous les efforts possibles doivent être déployés sans discrimination afin d’offrir des voies novatrices d’accès à la propriété3.

Les accords de location avec option d’achat sont un outil puissant d’atténuation des décennies de discrimination en matière de logement qui ont empêché les groupes protégés par le Code de se constituer un patrimoine multigénérationnel.

 

Questions :

1. Pensez-vous que les accords de location avec option d'achat constituent un moyen viable de favoriser l'accessibilité au logement en Ontario?

Les groupes protégés par le Code affichent des taux faibles d’accession à la propriété. Jumelées au syndrome « pas dans ma cour », des décennies de discrimination en matière de logement exercée par les établissements de crédit, sociétés immobilières et locateurs ont eu pour effet d’ériger des barrières à la constitution d’un patrimoine multigénérationnel chez une variété de personnes et de groupes protégés par le Code.

À cette discrimination historique s’ajoutent des obstacles économiques à l’accès au logement qui nuisent tout particulièrement aux groupes protégés par le Code. Le Rapport du Groupe d'étude ontarien sur le logement abordable publié récemment par le gouvernement montre que la hausse des prix du logement au cours de la dernière décennie a fait s’écrouler le rêve de l’accession à la propriété de beaucoup d’Ontariennes et d’Ontariens. Bien que 73 % de la population canadienne soient propriétaires, ce pourcentage passe à 48 % chez les personnes noires et à 47 % chez les membres de la communauté LGBTQ (Statistique Canada étudie le pourcentage de propriétaires au sein d’autres populations, y compris les comunautés autochtones, qui se heurtent à un manque criant d’accès au logement). Chez les jeunes adultes, une étude de 2021 a montré que seulement 24 % des résidents de Toronto âgés de 30 à 39 ans étaient propriétaires.

La CODP appuie les efforts déployés par l’Ontario en vue de renforcer la capacité des locataires de se constituer un patrimoine intergénérationnel en concluant des accords de location avec option d’achat. L’accumulation de richesse par l’accession à la propriété peut aider à rompre le cycle de la pauvreté tout en favorisant la dignité et le bien-être. La CODP souligne le fait que la recommandation 41 du Rapport du Groupe d'étude ontarien sur le logement abordable appelle à « [f]inancer les projets pilotes qui créent des voies d’accession à la propriété novatrices pour les personnes noires, autochtones et marginalisées et les propriétaires de première génération » et que la recommandation 42 appelle à « [o]ffrir des garanties de prêt provinciales et fédérales pour les projets de logements voués à la location, de location abordable et de propriété abordable ».

 

2. Y a-t-il des obstacles à l'égard des accords de location avec option d'achat qui, selon vous, découragent les fournisseurs de ce type de logement?

La CODP encourage le MAML à fournir des mesures visant à inciter les fournisseurs de logements à conclure des accords de location avec option d’achat avec des membres de groupes protégés par le Code.  En raison de la discrimination en matière de logement, y compris ses effets sur la capacité de groupes protégés par le Code de faire l’acquisition de logements, les gouvernements, les fournisseurs de services et les fournisseurs de logements ont l’obligation aux termes du Code de prendre des mesures positives favorisant l’égalité matérielle[4]. Cela signifie que les organisations doivent s’employer à cerner les effets disproportionnés des lois, des politiques ou des systèmes sur les groupes vulnérables, et à y remédier de façon proactive[5].

Par conséquent, afin de résoudre des décennies de discrimination en matière de logement, la CODP recommande fortement que le MAML offre aux fournisseurs de logements le soutien et les incitatifs requis afin qu’ils comblent les écarts spécifiques en matière d’accession à la propriété qu’affichent les groupes protégés par le Code au moyen de la conclusion d’accords de location avec option d’achat. De tels accords en font bien plus que de simplement donner accès à un logement. L’accession à la propriété peut avoir des effets positifs sur la santé mentale en plus d’offrir un sentiment de sécurité et de dignité. Les politiques et programmes de location avec option d’achat devraient reposer sur des intentions clairement établies et avoir pour but explicite d’aider les groupes protégés par le Code.

 

3. Y a-t-il des problèmes avec les accords de location avec option d'achat existants qui font qu'il est difficile ou défavorable pour les clients, comme les locataires, de s'y engager?

Le manque de logements abordables, accessibles et convenables crée un obstacle social systémique à l’échelle de l’Ontario.  Par exemple, bon nombre de personnes handicapées et de familles s’occupant d’enfants handicapés ont de la difficulté à trouver et à conserver un logement accessible et abordable.

Parce que chaque personne a le droit à un traitement équitable en matière de logement, et ce, sans discrimination, il est crucial de faire clairement et en tout temps le lien entre les droits de la personne et les règlements municipaux, les politiques et les procédures qui régissent le logement, y compris les accords de location avec option d’achat. Les gestionnaires de services et fournisseurs de logements sont tenus aux termes du Code d’assurer l’accès au logement sans discrimination.

La CODP recommande que le MAML offre du soutien et des incitatifs afin d’appuyer les efforts déployés par les gestionnaires de services pour collaborer avec les communautés touchées en vue de conclure des accords de location avec option d’achat ciblés, adaptés aux groupes protégés par le Code comme les personnes handicapées. Cela doit inclure du soutien en matière d’accommodement des besoins et d’adaptation afin que les fournisseurs de logements puissent faire en sorte que les logements répondent aux besoins particuliers du groupe visé, par exemple qu’ils soient pleinement accessibles et qu’ils répondent aux besoins de la famille au fil du temps.  

 

4. Y a-t-il des mesures que le gouvernement pourrait envisager pour faciliter ces accords, comme les rendre plus viables pour les fournisseurs de logements, améliorer la protection des clients, sensibiliser le public à cette forme de propriété?

Les accords de location avec option d’achat sont un outil puissant de soutien aux groupes vulnérables et protégés par le Code afin qu’ils se constituent un patrimoine multigénérationnel et rompent le cycle de la pauvreté. La CODP recommande que le gouvernement conçoive tout particulièrement ces accords de façon à ce qu’ils ciblent les groupes protégés par le Code.

Les accords de location avec option d’achat qui sont conçus de façon à tenir compte des besoins uniques des groupes protégés par le Code pourraient inclure des mesures particulières pour les familles monoparentales, les femmes, les personnes autochtones et les nouveaux arrivants, entre autres groupes. La CODP recommande de collaborer avec les groupes protégés par le Code et leurs organisations pour élaborer des programmes spécifiques de location avec option d’achat. Cette mise à profit des partenariats communautaires aidera également à promouvoir les programmes mis en œuvre.

 


 

[1] CODP, Le droit au logement : Rapport de consultation sur les droits de la personne en matière de logements locatifs en Ontario, 2008, p. 8. La Cour d’appel du Québec a indiqué que le logement, encore davantage que l’emploi, est un besoin fondamental de l’ensemble des membres de la société. Voir Desroches c. Québec (Commission des droits de la personne), 1997, 30 CHRR D/345 (QC, CA).

[2] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Pheneus et une autre) c Fornella, 2018 QCTDP 3.

[3] Manuel Aalbers, The Financialization of Housing: A Political Economy Approach (New York : Routledge, 2016); Elvin Wyly et coll., « American Home: Predatory Mortgage Capital and Neighbourhood Spaces of Race and Class Exploitation in the United States », Georgrafiska Annal, vol. B88, n1 (2006), p. 105; Elvin Wyly et coll., « Cartographies of Race and Class: Mapping the Class-Monopoly Rents of American Subprime Mortgage Capital », Int J Urban Reg, vol. 33, n2 (2009), p. 332; Elvin Wyly et coll., « Gender, Age, and Race in Subprime America », Housing Policy Debate, vol. 21, n4 (2011), p. 529; Loretta Lees et Elvin Wyly, Gentrification (New York : Routledge, 2008); Raquel Rolnik, « Late Neoliberalism: The Financialization of Homeownership and Housing Rights », Int J Urban Affairs, vol. 37, n3 (2013), p. 1058.

[4] Association of Ontario Midwives v Ontario, 2018 HRTO 1335, au par. 309, confirmé par l’appel auprès de la Cour d’appel de l’Ontario 2020 ONSC 2839.

[5] Association of Ontario Midwives, supra, au 309, Fraser c. Canada (Procureur général), 2020 CSC 28 (CanLII)

Book Prev / Next Navigation