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Social Areas
Services, biens et installations
Organizational responsibility
obligation d’accommodement

1. Contexte

Quelques mémoires reçus par la Commission ont cerné des obstacles qui empêchent les familles d’accéder aux services, qu’il s’agisse de grands services publics comme le transport, l’éducation et la santé ou de petits services privés.

Outre les préoccupations relatives à la prestation des services existants, on a mentionné à la Commission le manque de services qui répondent aux besoins des familles et, particulièrement, des personnes qui assument la responsabilité de prodiguer des soins à des proches. Comme on l’a mentionné ailleurs dans ce document, les intervenants ont souligné plusieurs besoins urgents qui ne sont pas comblés, notamment dans les secteurs des services de garderie, des soins aux personnes âgées et des soutiens pour les personnes handicapées. Les personnes dont les besoins s’entrecroisent éprouvent des difficultés particulières lorsqu’elles tentent d’accéder aux services. Par exemple, le Centre de la défense des personnes handicapées a fait remarquer qu’il y a peu de soutiens ou de services continus pour les personnes handicapées qui assument des responsabilités comme soignants. Dans le même ordre d’idées, la Coalition pour les droits des lesbiennes et personnes gaies en Ontario a mentionné ce qui suit :

Les structures et les programmes articulés autour des concepts hétérosexuels de la famille et du parentage sont souvent inappropriés aux situations familiales des personnes gaies, lesbiennes et bisexuelles. Peu de services offerts en Ontario répondent aux besoins spécifiques des parents qui sont des personnes gaies, lesbiennes et bisexuelles ou de leurs enfants et c’est particulièrement le cas dans les petites collectivités rurales du Nord et les régions suburbaines de l’Ontario urbain.

Le manque de services appropriés peut avoir un impact significatif sur l’accès à l’emploi et au logement pour les personnes identifiées par leur état familial.

2. Attitudes négatives et stéréotypes

Durant cette consultation, un grand nombre d’intervenants ont mentionné qu’ils étaient préoccupés par les attitudes négatives et les stéréotypes rattachés à certains types de familles. Le phénomène est particulièrement marquant lorsqu’il y a un recoupement entre l’état familial, la race, l’état matrimonial, l’âge, l’orientation sexuelle ou le sexe. Par exemple, les familles monoparentales dirigées par une femme sont fortement stigmatisées, particulièrement lorsqu’elles sont racialisées ou reçoivent l’aide sociale. Ces stéréotypes négatifs peuvent aboutir au harcèlement ou à l’exclusion des services.

Un problème courant concernant l’état familial et les parents seuls se rapporte aux organismes de services sociaux qui dispensent les programmes comme Ontario au travail. Même si les travailleurs doivent s’acquitter de leur mandat, il arrive souvent que leurs attitudes personnelles les poussent à faire des commentaires ou à prendre des décisions discriminatoires. L’OFIFC a rédigé un rapport sur les constatations des prestataires d’OT. Des mères célibataires autochtones ont signalé que certains travailleurs leur ont suggéré d’avoir plus d’enfants pour recevoir plus d’argent, d’autres ont mentionné que les travailleurs leur ont dit de se faire ligaturer les trompes.
OFIFC

Pareillement, plusieurs intervenants ont dit à la Commission que les parents handicapés, autochtones ou membres d’une communauté racialisée qui ont besoin d’aide pour assumer des responsabilités comme soignants et communiquent avec la Société d’aide à l’enfance à cette fin sont soumis à des enquêtes à cause des stéréotypes et des présomptions qui remettent en question leurs compétences parentales. En outre, la Commission a appris que les sociétés de prêts hypothécaires hésitent énormément à offrir des services aux parents seuls, encore une fois à cause des stéréotypes et des présomptions fondés sur leur état familial et matrimonial. La Coalition pour les droits des lesbiennes et personnes gaies en Ontario a dit à la Commission qu’un parent qui met fin à une relation hétérosexuelle et s’engage dans une relation avec une personne de même sexe risque non seulement de connaître des difficultés au sein de sa famille mais également de voir les autorités, notamment les écoles, ne pas reconnaître son nouveau partenaire.

Quelqu’un anciennement en famille d’accueil a mentionné les politiques qui interdisent aux personnes qui ont déjà vécu en famille d’accueil de consulter les dossiers qui les concernent pour éviter de compromettre le bien-être physique ou émotionnel de tierces parties. Il a déclaré : « On présume qu’un pupille de l’État ou un ancien pupille de l’État va commettre un acte violent ou préjudiciable à l’égard de quelqu’un qui appartient à son passé. »

3. Conception universelle et accommodement des besoins

Tout comme les employeurs et les propriétaires de logement, les fournisseurs de services devraient tenter de concevoir des services qui tiennent compte des besoins des personnes identifiées par leur état familial, d’éliminer les obstacles actuels et d’accommoder les besoins restants. Les personnes consultées ont énuméré divers secteurs où la conception universelle bénéficierait aux familles.

Une personne a mentionné comme exemple de conception non universelle son club de conditionnement physique qui interdit aux enfants de plus de quatre ans d’entrer dans les vestiaires destinés aux membres du sexe opposé. Une mère devrait donc envoyer son garçon de cinq ans seul dans le vestiaire des hommes. Le club n’a pas de vestiaires pour les familles. Comme cette mère l’a mentionné, cette politique est ni réaliste ni particulièrement sécuritaire pour des enfants aussi jeunes.

Quelques intervenants ont critiqué la conception du programme Ontario au travail. En particulier, les prestataires d’OT sont tenus de travailler, d’étudier ou de faire du bénévolat mais ne tient pas compte des besoins d’accommodement des personnes qui assument des responsabilités familiales. L’OFIFC a affirmé : « Les services de garde d’enfants peuvent être inaccessibles ou indisponibles. Je crois que le fournisseur de services (le gouvernement) a le devoir d’accommoder les besoins en matière de garderie et de tenir compte des responsabilités familiales du parent lorsqu’il décide quel emploi est approprié. » Le MSSC a indiqué que les conditions de participation peuvent être temporairement repoussées dans certaines circonstances, notamment lorsque le participant est un parent seul soutien de famille avec au moins un enfant à charge et qu’il n’y a pas de programme scolaire subventionné par l’État (p. ex. lorsque les enfants ne sont pas d’âge scolaire). Les organismes de prestation du programme élaborent et mettent en œuvre des plans annuels de services de garderie incluant un budget pour les services de garde pour les prestataires d’OT et les services de garde réguliers. Dans leurs plans, les organismes de prestation prévoient un éventail de services de garde d’enfants en fonction des priorités et des besoins locaux.

La conception universelle devrait tenir compte des familles qui comptent des personnes handicapées, sont composées de personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles ou transgenres ou appartiennent à différentes communautés culturelles. Par exemple, le Centre de la défense des personnes handicapées a mentionné à la Commission que les familles des personnes handicapées ont parfois beaucoup de difficulté à trouver des soutiens à domicile et des services de garderie. Les fournisseurs de services de transport spécialisé autorisent rarement un parent handicapé à voyager avec un enfant. Cela signifie qu’un parent handicapé fait face à des obstacles administratifs lorsqu’il veut déposer un enfant à la garderie et se rendre ensuite à un rendez-vous. Le mémoire d’un particulier a mentionné ce qui suit :

J’ai découvert que les hôtels accessibles aux personnes handicapées présument que la personne voyage seule ou en couple. Peu d’hôtels ont des chambres qui accommodent une famille voyageant avec une personne handicapée.

Plusieurs intervenants ont fait valoir que les familles avec de jeunes enfants, tout comme les personnes handicapées et les personnes âgées, font face à des défis à cause des services physiquement inaccessibles et que l’élimination des obstacles et la conception universelle des bâtiments leur rendraient service. Par exemple, les familles qui utilisent des poussettes ont de la difficulté à entrer et à sortir des stations de métro ou à entrer dans les bâtiments qui ont un grand nombre d’escaliers et de lourdes portes. Le MSSC a précisé que les aires interdites aux poussettes peuvent poser des problèmes particuliers aux parents handicapés, car ils sont incapables de porter leurs enfants même pour une brève période. La Commission avait précédemment fait valoir les avantages des services physiquement accessibles aux familles avec de jeunes enfants dans son Rapport sur l’accessibilité des restaurants et sa consultation sur les services de transport public accessibles.

4. Définitions étroites de la famille

Certains fournisseurs de services ont adopté des définitions restrictives de la famille et celles-ci créent des obstacles.

Par exemple, un particulier a raconté que lui et son partenaire de même sexe avaient pris soin de sa mère âgée pendant de nombreuses années. Or, quand elle était malade et mourante à l’hôpital, les règlements de l’hôpital obligeaient son partenaire à prétendre d’être son frère pour pouvoir lui rendre visite.

L’Adoption Council of Canada a fait remarquer que, même maintenant, il y a des distinctions légales entre les familles formées par l’adoption et celles formées par la naissance. Par exemple, les lois fédérales sur la citoyenneté font une distinction entre un enfant né d’une canadienne et un enfant adopté par une canadienne : le premier reçoit automatiquement la citoyenneté, et le deuxième non. Cet organisme a également déclaré qu’il est préoccupé par le traitement des parents adoptifs en vertu de la Loi sur l’assurance emploi.

5. Endroits sans enfants et limites d’âge

C’est un fait bien connu que, pour des motifs de politique sociale, les mineurs sont traités différemment des adultes dans certaines circonstances. Ainsi, nous ne voulons pas que les jeunes enfants puissent regarder des films destinés aux adultes ou acheter des cigarettes.

Par contre, la jurisprudence a reconnu que les règles interdisant les enfants à certains endroits peuvent constituer un motif illicite de distinction lié à l’état familial. Dans une cause portant sur les droits de la personne en Colombie-Britannique, le tribunal a jugé qu’un restaurant qui refusait de desservir les clients avec enfants sous prétexte que les autres clients n’aimaient pas être dérangés quand les enfants faisaient du bruit exerçait de la discrimination fondée sur l’état familial[86].

Comme l’ont mentionné quelques personnes consultées, il faut créer un équilibre entre la nécessité d’interdire aux enfants l’accès aux services ou aux bâtiments susceptibles de nuire à leur sécurité ou à leur bien être et la protection du droit des familles à l’accès aux services sans discrimination.

On aperçoit parfois des endroits « sans enfants » ou « réservés aux adultes » et il importe qu’ils aient uniquement pour but de protéger les enfants contre les situations susceptibles de nuire à leur santé et leur bien être et non de distinguer les enfants de leurs parents ou des membres de leur famille dans l’accès aux installations.
OFIFC

Lorsque la nature du service offert risque de nuire à la santé ou au bien-être d’un enfant, un fournisseur de services peut avoir un motif bien fondé de le refuser à une famille.

Par ailleurs, dans certains cas, il se peut que les activités des enfants puissent entraver indûment la jouissance du service. Par exemple, lors d'un film, les enfants qui pleurent empêcheront peut-être d'autres spectateurs d'apprécier le spectacle. Le comportement potentiel des enfants ne devrait pas justifier une interdiction générale d’accès à tous les enfants, d’après certains, car les enfants, comme les adultes, sont des individus et leur comportement ne peut pas être jugé à l’avance; toutefois, demander à une famille de quitter la salle peut, dans certaines circonstances, être une exigence justifiée. Il faut évidemment faire une distinction entre l’exclusion des enfants à cause de leur comportement et le refus d’accès fondé sur des préférences restrictives.

Quelqu’un a également fait remarquer que, dans certaines circonstances, il se peut qu’un fournisseur de services souhaite cibler des groupes désavantagés, tels que les enfants, les jeunes, les femmes ou les personnes âgées. Ces efforts méritent d’être appuyés. D’ailleurs, l’article 14 du Code autorise les fournisseurs de services à mettre en œuvre des programmes spéciaux destinés à alléger un préjudice ou un désavantage économique ou à aider des personnes ou des groupes défavorisés à jouir ou à essayer de jouir de chances égales, ou qui favoriseront probablement l’élimination d’une atteinte à des droits reconnus dans le Code.

6. Éducation

L’éducation a fait l’objet d’une attention particulière durant la consultation. C’est sans doute à cause du rôle important de l’éducation dans la vie et les perspectives du public ontarien.

Un grand nombre de personnes consultées ont fait valoir à la Commission que, en dépit des avantages évidents de l’éducation et de la formation pour leur sécurité économique et leurs perspectives, leurs responsabilités en matière de soins, conjuguées aux pressions sur le plan de l’emploi, mettent l’éducation et la formation hors de leur portée.

J’assume un poste de direction depuis plus de quatre ans et j’ai réussi à relever de nombreux défis, mais on me dit que mes chances d’accéder à un poste supérieur sont compromises parce que je n’ai pas de diplôme... Je suis seul pour prendre soin de mes enfants et je ne peux pas les quitter le soir pour poursuivre mes études en ce moment... Mon manque de scolarité dû à des problèmes de garde d’enfants a essentiellement éliminé mes chances d’obtenir une promotion.
Particulier

Certains intervenants ont recommandé que les fournisseurs du secteur de l’enseignement envisagent de rendre leurs services plus accessibles aux personnes qui ont des responsabilités comme soignants. Par exemple, le Réseau des femmes handicapées de l’Ontario a suggéré d’améliorer la qualité et l’ampleur des programmes d’apprentissage à distance parce qu’un grand nombre de femmes choisissent cette option pour pouvoir s’acquitter de leurs responsabilités familiales ou surmonter des problèmes d’accessibilité. Le MSSC a fait valoir l’importance d’améliorer l’accès aux programmes éducatifs pour ses clients et a présenté plusieurs suggestions en vue de rendre les services éducatifs plus accessibles aux personnes responsables de la prestation de soins.

Les services de garderie sur place, un choix de programmes à temps partiel, le jour ou le soir et la capacité de prendre congé pour s’acquitter de ses responsabilités familiales permettraient aux prestataires du POSPH de participer pleinement à la vie de leur collectivité. Les programmes d’études qui n’autorisent pas les congés ni les études à temps partiel, tel que le génie, le droit et la médecine, éliminent effectivement les études menant à des emplois bien rémunérés pour les personnes qui doivent prodiguer des soins à des enfants ou à des membres de leur famille, perpétuant ainsi la pauvreté et la marginalisation.

L’accommodement des besoins des personnes qui ont des responsabilités en matière de soins a été soulevé comme une question importante. À titre d’exemple, la Commission a reçu des plaintes à propos du refus des établissements d’études postsecondaires d’accommoder les besoins des étudiantes qui allaitent. Pour sa part, le Centre de la défense des personnes handicapées a fait valoir que certaines personnes peuvent avoir besoin d’une aide supplémentaire lorsqu’elles ratent un examen à cause de leurs responsabilités familiales et qu’un soignant peut être incapable d’assister à des cours le soir ou de voyager pour ne pas manquer à ses responsabilités. Une personne consultée a raconté ses expériences alors qu’elle essayait de terminer son doctorat tout en assumant une maternité et un congé parental, mentionnant que le manque de souplesse du calendrier avait sérieusement entravé sa capacité de terminer son examen d’admission. Une autre personne a raconté ce qui suit :

Mes études de droit ont été compromises parce que ma sœur est devenue très malade lorsque j’étais en deuxième année et que j’ai dû m’occuper d’elle tout en étudiant. Les études de droit ne sont pas offertes à temps partiel, sauf dans des circonstances exceptionnelles affectant l’étudiant ou un membre de sa famille immédiate – un enfant ou un conjoint – pendant un an seulement. Ma sœur est ma plus proche parente.

Les mémoires ont souligné l’importance de concevoir les programmes d’enseignement de manière à tenir compte de la diversité de la famille d’aujourd’hui. L’Association des enseignantes et des enseignants catholiques anglo-ontariens a déclaré :

La structure de la journée et de l’année scolaire peut nuire aux familles. Les parents ont souvent de la difficulté à assister aux réunions scolaires à cause des heures de travail prévues à l’horaire. Les services de garde d’enfants peuvent imposer un fardeau financier. Les parents sont parfois accusés à tort de ne pas s’intéresser à l’éducation de leurs enfants.

Services à la famille-Canada a souligné que les fournisseurs du secteur de l’enseignement doivent manifester plus d’inclusivité à l’égard des familles lesbiennes ou gaies. Par exemple, les politiques des conseils scolaires concernant les excursions scolaires ou le traitement des urgences médicales ne sont pas inclusives à l’égard des familles lesbiennes, gaies et bisexuelles. D’autres personnes ont mentionné que les écoles devraient élaborer des politiques qui tiennent davantage compte des réalités des enfants en famille d’accueil.

De plus, la Commission a appris que les attitudes négatives et discriminatoires à l’égard des différentes structures familiales se manifestent de diverses façons dans le milieu de l’enseignement; ainsi, les enfants qui proviennent de familles perçues comme « différentes » peuvent être victimes d’intimidation et tournés en ridicule par leurs pairs. Les fournisseurs du secteur de l’enseignement sont responsables du maintien d’un environnement positif, non discriminatoire et devraient prendre des mesures pour sensibiliser les élèves aux droits de la personne et mettre en œuvre des stratégies visant à prévenir la discrimination et le harcèlement.

Principales Conclusions

Les personnes consultées ont cerné un vaste éventail d’obstacles liés à l’état familial qui entravent l’égalité d’accès aux services. Les préoccupations principales concernent les services sociaux et les établissements d’enseignement. Les fournisseurs de services devraient adopter le principe de la conception universelle, accommoder les besoins liés à l’état familial et enrayer les attitudes négatives et discriminatoires.


[86] Micallef c. Glacier Park Lodge Ltd., (1998), 33 C.H.R.R. D/249 (BCHRT)