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Les appels en cour de la Commission font progresser le droit des droits de la personne (fiche)

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13 juin 2006

Au cours des dix dernières années, la Commission ontarienne des droits de la personne (la « Commission ») a participé à nombreuses causes qui ont reçu une décision d'une cour supérieure : 72 contrôles judiciaires d'une décision, 32 décisions rendues en appel à la Cour divisionnaire, 40 décisions rendues par la Cour d'appel, et 17 décisions rendues par la Cour suprême du Canada. Â compter du 31 mars 2006, la Commission poursuivait 462 affaires au Tribunal, huit affaires devant la Cour divisionnaire, trois au Cour d'appel, et deux devant la Cour suprême du Canada.

Au cours de l'exercice financier se terminant le 31 mars 2006, la Commission a renvoyé 143 dossiers devant le Tribunal des droits de la personne de l'Ontario (le « Tribunal »). Elle a renvoyé 27 autres dossiers devant le Tribunal après révision d'une décision précédente. Depuis cinq ans, 81 % des causes portées devant le Tribunal ont été réglées grâce à l'engagement actif des avocats de la Commission. Dans presque tous ces règlements, la Commission a obtenu des correctifs d'intérêt public pour prévenir une répétition des pratiques discriminatoires.

La Commission assiste le plaignant ou plaignante tout au long du litige en préparant les témoins, les plaidoyers, les motions, et la production des preuves. Au moment de l'audience, les avocats de la Commission représentent l'intérêt public, cherchant des correctifs qui vont prévenir les actions discriminatoires, comme les programmes de formation, la création des politiques sur le harcèlement ou anti-discriminatoire, la mise en place de mécanismes de plainte internes, et de monitoring. La recherche des correctifs d'intérêt public significatifs et l'examen des plaintes déposées par la Commission sont des éléments centraux de la stratégie judiciaire de la Commission.

Les règlements et décisions que rend le Tribunal ou, en cas d'appel, celles des instances supérieures, peuvent créer des précédents et imprimer une nouvelle orientation au droit des droits de la personne en Ontario et ailleurs. Au fil des ans, la Commission a pris part à nombreuses affaires marquantes qui ont renversé les décisions du Tribunal ou les autres cours, et ont enrichi la jurisprudence dans ce domaine. 

Race

Dans Ford Motor Co. of Canada c. Ontario (Commission des droits de la personne) (Naraine), dont la décision a été rendue en 2002, M. Naraine, un ressortissant des Indes orientales, a fait l'objet de graffitis et de propos racistes pendant les neuf ans où il a travaillé dans une usine Ford et a été en dernier ressort licencié.

À l'époque, le tribunal (alors appelé « commission d'enquête ») a conclu que le licenciement de M. Naraine était injustifié, du fait que Ford avait négligé de tenir compte des répercussions sur M. Naraine de l'atmosphère de travail empoisonnée et a ordonné à Ford de le réintégrer. La Cour d'appel a écarté l'ordre de réintégration après avoir conclu que, si le milieu de travail était bel et bien empoisonné, trop de temps s'était écoulé depuis le licenciement pour que la réintégration constitue un recours approprié dans ce cas. La Cour suprême du Canada a confirmé la décision de la Cour d'appel, établissant ainsi un précédent en ce qui concerne la bonne utilisation de la réintégration comme recours dans les cas de protection des droits de la personne.

Autre cas important portant sur la race : Smith c. Ontario (Commission des droits de la personne), dont la décision a été rendue en 2005. M. Smith a allégué avoir fait continuellement l'objet d'injures et de propos racistes sur les lieux de travail pendant qu'il était à l'emploi d'une franchise de Mr. Lube, jusqu'à sa cessation d'emploi.

Au départ, le Tribunal avait conclu que M. Smith avait été soumis à un environnement de travail empoisonné mais que le harcèlement n'était ni intentionnel ni malicieux, et n'avait pas été un facteur dans son licenciement. La Commission a porté la décision en appel devant la Cour divisionnaire, qui a conclu qu'en fait la race de M. Smith avait joué un rôle dans son congédiement. Cet appel a conduit le Tribunal à étudier des formes subtiles de racisme lors de l'évaluation des plaintes de discrimination raciale.

Croyances

Dans Ontario (Commission des droits de la personne) c. Simpsons-Sears Ltd. (O'Malley), un cas qui a laissé sa marque, la décision a été rendue en appel en 1985. D'après sa politique, un magasin au détail obligeait ses commis à travailler le samedi, contrairement aux croyances religieuses de l'une d'entre elles. Comme le magasin refusait de prendre des mesures d'aménagement à son égard en sa qualité de commise à temps plein, l'employée a été obligée de prendre un emploi à temps partiel et a déposé une plainte alléguant qu'elle faisait l'objet de discrimination.

Le tribunal (alors appelé « commission d'enquête ») a rejeté la plainte, décision qui a été confirmée jusqu'à la Cour suprême du Canada. Celle-ci a toutefois invalidé les décisions précédentes et a prononcé trois importantes décisions qui font aujourd'hui intégralement partie des droits de la personne au Canada, à savoir qu'il n'est pas nécessaire d'établir une intention pour prouver q'il y a discrimination ; une politique en matière d'emploi appliquée universellement peut néanmoins se révéler discriminatoire ; l'employeur a désormais l'obligation de prendre des mesures raisonnables pour répondre aux besoins de son personnel à moins que cela ne lui cause une contrainte excessive.

Une autre affaire importante portant sur les croyances est celle du Peel Board of Education c. Pandori, dont la décision a été rendue en 1991. Le conseil scolaire avait adopté une politique, en vertu de laquelle le port du kirpan, un petit poignard cérémonial, était interdit. Le tribunal a conclu que cette politique était discriminatoire contre les Sikhs.

Le conseil scolaire a interjeté appel, mais la Cour divisionnaire et la Cour d'appel de l'Ontario ont confirmé cette décision, créant ainsi un précédent en ce qui concerne l'acceptation des observances religieuses dans les écoles de l'Ontario. L'an dernier, la Commission est intervenue dans le cas Multani à la Cour suprême du Canada, une décision d'une affaire similaire à Montréal qui a réitéré la position de l'Ontario dans tout le Canada.

Handicap

Dans Ontario (Commission des droits de la personne) c. Gaines Pet Foods Corp, dont la décision a été rendue en 1993, une employée, dont l'absentéisme était répétitif, a manqué encore six mois de travail, car elle avait un cancer. À son retour, son employeur lui a indiqué qu'elle devait maintenir un niveau de présence égal à celui des autres employés. Comme elle ne le fit pas, elle fut licenciée. Un tribunal a conclu que, compte tenu du dossier de présence de l'employée, le licenciement n'était pas discriminatoire.

La Commission a fait appel devant la Cour divisionnaire, laquelle a rejeté la décision du tribunal et a jugé qu'en dépit de l'absentéisme de l'employée, celle-ci avait fait l'objet d'une discrimination fondée sur son absence liée à sa maladie et que ses mauvais antécédents de travail ne peuvent pas justifier le traitement discriminatoire d'une employée.

Dans Imperial Oil Ltd. c. Ontario (Commission des droits de la personne) (Re Entrop), dont la décision a été rendue en 1998, un employeur appliquait une politique en vertu de laquelle ses employés étaient tenus de révéler s'ils avaient eu des problèmes antérieurs de toxicomanie ou d'alcoolisme. Après qu'un employé âgé avec 18 ans d'expérience lui eut dévoilé un problème préalable, l'employeur l'avait retiré de son poste critique pour la sécurité et soumis régulièrement à des tests.

Le tribunal a conclu que l'employé avait fait l'objet de discrimination fondée sur un handicap perçu, décision appuyée par la Cour divisionnaire et la Cour d'appel et qui permet qu'une toxicomanie ne soit plus aujourd'hui considéré comme un handicap.

Sexe et grossesse

Dans le cas de 1992 de Zurich Insurance Co. c. Ontario (Commission des droits de la personne), une plainte a été déposée contre un assureur qui appliquait des taux d'assurance automobile plus élevés aux jeunes conducteurs célibataires. Le tribunal a conclu qu'il s'agissait d'une pratique discriminatoire fondée sur le sexe.

En appel, toutefois, la Cour divisionnaire, la Cour d'appel et la Cour suprême du Canada ont conclu que cette pratique était acceptable. Toutefois, cette affaire a provoqué un débat sur la discrimination dans l'assurance et a permis de préciser certaines exceptions se fondant sur le sexe et l'âge.

Dans Crook c. Ontario (Cancer Treatment and Research Foundation) (No. 3), dont la décision a été rendue par un tribunal en 1996, une femme qui avait eu des complications après son accouchement, n'avait pas pu reprendre le travail comme prévu. Son employeur avait refusé de lui accorder ses prestations de congé de maladie. Un tribunal a conclu qu'il s'agissait d'une discrimination fondée sur la grossesse et le sexe.

En appel, la Cour divisionnaire a confirmé la décision du tribunal, ce qui rendait la décision applicable aux autres instances à l'avenir.

Âge

Dans Ontario (Commission des droits de la personne) c. Etobicoke (Municipalité), dont la décision a été rendue en 1982, deux pompiers ont déposé une plainte, car leur convention collective établissait qu'ils devaient prendre leur retraite à l'âge de 60 ans. Un tribunal a conclu qu'il s'agissait d'une pratique discriminatoire, mais la Cour divisionnaire et la Cour d'appel ont invalidé sa décision.

Quand la Commission a interjeté appel devant la Cour suprême du Canada, celle-ci a déterminé que les dispositions du Code des droits de la personne de l'Ontario ne peuvent être modifiées par une convention collective, et que les parties ne peuvent pas se dégager de leurs obligations prévues dans le Code des droits de la personne obligations.

Le cas de 1995 de Large c. Stratford (ville) est semblable au précédent (Etobicoke). Un policier a déposé une plainte après avoir été forcé de prendre sa retraite à 60 ans, comme l'établissait sa convention collective. Dans cette affaire, un tribunal a aussi conclu qu'il s'agissait d'une pratique discriminatoire et cette fois la Cour divisionnaire et la Cour d'appel se sont rangées à sa décision.

Toutefois, la Cour suprême du Canada a contesté la décision et a conclu que, dans ce cas, la retraite obligatoire se justifiait comme une qualité raisonnable et de bonne foi. Même si cette décision a infirmé celle plus progressive du tribunal, ce cas a provoqué un débat approfondi sur les seuils acceptables de discrimination.

Dans Ontario (Commission des droits de la personne) et Roberts c. Ontario (Ministère de la Santé) (No. 2), dont la décision a été aussi rendue en 1995, un homme âgé de 71 ans qui était aveugle au sens de la loi a fait une demande d'aide financière auprès du gouvernement en vertu d'un programme spécial pour acheter un appareil qui lui aurait permis de lire. Toutefois, comme seules les personnes de moins de 18 ans avaient droit à une aide financière pour l'achat d'aides visuelles, l'homme a déposé une plainte pour discrimination fondée sur l'âge.

Un tribunal a rejeté la plainte, décision qu'a secondée la Cour divisionnaire. La Commission a interjeté appel devant la Cour d'appel, laquelle a annulé la décision du tribunal. La Cour d'appel a restreint les exclusions du Code et a déterminé qu'un lien rationnel doit exister entre la discrimination d'un programme spécial et l'objectif du programme lui-même. Elle a conclu que l'âge en tant qu'élément restrictif de l'aide était discriminatoire.

Situation de famille état matrimonial

Dans B. c. Ontario (Commission des droits de la personne), dont la décision a été rendue en 2002, le plaignant travaillait pour son beau-frère et a été licencié en raison d'accusations d'abus portées par sa famille contre lui. Un tribunal a conclu que le plaignant avait fait l'objet de discrimination fondée sur sa situation familiale, tandis que la Cour divisionnaire invalidait cette décision, en donnant une interprétation plus limitée de ce motif.La Commission a interjeté appel devant la Cour d'appel, laquelle a rétabli la décision du tribunal, et la Cour suprême du Canada a par la suite endossée l'approche de la Cour d'appel. Ce cas a mené à l'établissement d'une définition large de « situation de famille », laquelle fait autorité dans tout le pays.