Contexte
Les services de transport en commun dans les villes de l’Ontario jouent un rôle fondamental dans la capacité de nombreuses personnes à participer utilement à la vie de leur collectivité. De fait, les transports en commun offrent un moyen d’accès à l’emploi, à l’éducation, aux services publics et sociaux et aux activités communautaires.
Le droit des personnes handicapées à un traitement égal en matière de services est protégé par le Code des droits de la personne[1] de l’Ontario (le Code). Malheureusement, l’égalité d’accès aux services de transport en commun est loin d’être une réalité pour une vaste proportion de la population ontarienne et certains obstacles persistent malgré l’importance qu’ils revêtent dans nos vies quotidiennes.
Ces dernières années, la Commission ontarienne des droits de la personne a reçu de nombreuses plaintes à l’encontre de fournisseurs de services de transport en commun de l’Ontario, selon lesquelles certains aspects de leurs activités respectives, y compris le service parallèle de transport adapté, portent atteinte au droit à un traitement égal en matière de services pour les personnes handicapées. Bien souvent, les fournisseurs de services de transport en commun arguent alors du fait que le service parallèle de transport adapté desservant leur collectivité est un « programme spécial » en vertu de l’article 14 du Code.
En 2002, la Commission a statué sur une série de plaintes à l’encontre de la Commission de transport de Toronto (CTT) eu égard à son service parallèle de transport adapté Wheel-Trans et aux frais facturés aux usagers de Wheel-Trans[2]. En réponse à ces plaintes, la CTT a allégué que Wheel-Trans était un « programme spécial » au sens de l’article 14 du Code. Plus récemment, en décembre 2004, la Commission a statué sur une série de plaintes à l’encontre de la ville de Hamilton eu égard à son service parallèle de transport adapté DARTS (Disabled and Aged Regional Transit System)[3]. Comme la CTT, la ville de Hamilton a fait valoir que son programme de services de transport en commun accessibles, dans lequel s’inscrit le service DARTS, était un « programme spécial » au sens de l’article 14 du Code. Aucun de ces cas n’a tranché la question de savoir si les services parallèles de transport adapté concernés étaient ou non des « programmes spéciaux ».
Ces dernières années, la Commission a mis en œuvre diverses initiatives importantes pour favoriser le débat public et contribuer à l’amélioration des transports en commun accessibles. En février 2001, la Commission a publié le Document de travail sur les services accessibles de transport en commun en Ontario visant à favoriser le débat public sur l’accessibilité des réseaux de transport local de passagers en Ontario. Après sa publication, une période de consultation publique a été organisée auprès des parties intéressées, notamment de fournisseurs de services de transport, de groupes de consommateurs handicapés et de groupes de défense des droits, d’organismes de personnes âgées, de syndicats et de nombreux particuliers. Ces consultations ont abouti à l’élaboration du rapport de consultation de la Commission intitulé Les droits de la personne et les services de transport en commun en Ontario et publié en avril 2002, qui instaure le cadre théorique pour les travaux de la Commission dans le domaine des transports en commun accessibles.
Comme indiqué dans ce document, la Commission est d’avis que les services parallèles de transport adapté sont une forme d’adaptation qui peut être exigée pour satisfaire à l’obligation d’adaptation énoncée dans le Code :
Lorsque des personnes sont incapables d’avoir accès aux réseaux réguliers de transport en commun, que ce soit en raison de leurs limitations fonctionnelles ou du manque d’adaptation de nombreux réseaux de transport en commun relativement anciens, les fournisseurs de services de transport en commun ont le devoir de répondre à leurs besoins, à moins que cela n’entraîne un préjudice injustifié. Bien que certains fournisseurs de services de transport en commun soutiennent que les services parallèles de transport adapté constituent un programme spécial volontaire au sens de la législation relative aux droits de la personne, la Commission est d’avis que les services parallèles de transport adapté sont une forme d’adaptation qui peut être exigée pour satisfaire à l’obligation d’adaptation énoncée dans le Code[4].
Les consultations portant sur les transports en commun ont permis de mettre en évidence une divergence d’opinions entre la Commission et bon nombre de fournisseurs de services de transport en commun quant à l’interprétation et à l’application de l’obligation d’adaptation énoncée dans le Code et à la prestation des services parallèles de transport adapté. La Commission est convaincue qu’il est important de résoudre directement cette question, dans l’intérêt public.
En vertu de l’article 14 du Code, la Commission peut enquêter sur un programme de son propre chef et a tout pouvoir de déclarer, par ordonnance, si ce dernier satisfait ou non aux exigences du paragraphe 14(1) du Code qui a trait aux programmes spéciaux.
Par conséquent, la Commission a habilité les membres de son personnel à enquêter sur les « programmes » suivants :
- le service parallèle de transport adapté Wheel-Trans de la ville de Toronto;
- le service parallèle de transport adapté DARTS (Disabled and Aged Regional Transit System) de la ville de Hamilton;
- le service parallèle de transport adapté Handi-Transit de la ville de Windsor;
- le service parallèle de transport adapté fourni par la London Community Transportation Brokerage dans la ville de London.
Dans le cadre de cette enquête, le présent exposé de position est diffusé afin d’inviter les parties intéressées à présenter leurs observations, dans l’optique d’aider la Commission à déterminer si elle doit exercer son pouvoir déclaratoire aux termes de l’article 14 du Code eu égard aux programmes susmentionnés.
Article 14
L’article 14 du Code stipule ce qui suit :
14.(1) Ne constitue pas une atteinte à un droit reconnu dans la partie I la mise en œuvre d’un programme spécial destiné à alléger un préjudice ou un désavantage économique ou à aider des personnes ou des groupes défavorisés à jouir ou à essayer de jouir de chances égales, ou qui favorisera probablement l’élimination d’une atteinte à des droits reconnus dans la partie I.
(2) La Commission peut :
a) de sa propre initiative;
b) à la demande d’une personne qui cherche à mettre en œuvre un programme spécial en vertu de la protection prévue au paragraphe (1);
c) à la réception d’une plainte contre laquelle est invoquée la protection prévue au paragraphe (1),
faire enquête sur le programme spécial et, à sa discrétion, déclarer, au moyen d’une ordonnance :
d) soit que le programme spécial, tel qu’il est défini dans l’ordonnance, ne satisfait pas aux exigences du paragraphe (1);
e) soit que le programme spécial, tel qu’il est défini dans l’ordonnance, avec les modifications que la Commission juge opportunes, le cas échéant, satisfait aux exigences du paragraphe (1).
(3) La personne qui se sent lésée par une ordonnance rendue en vertu du paragraphe (2) peut demander à la Commission de réexaminer son ordonnance. Dans ce cas, l’article 37 s’applique avec les adaptations nécessaires.
(4) Le paragraphe (1) ne s’applique pas à un programme spécial si une ordonnance est rendue en vertu de l’alinéa (2) d) ou si une ordonnance est rendue en vertu de l’alinéa (2) e) et que les modifications relatives au programme spécial ne sont pas mises en œuvre.
(5) Le paragraphe (2) ne s’applique pas à un programme spécial mis en œuvre par la Couronne ou par un de ses organismes.