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Commentaires de la Commission ontarienne des droits de la personne au sujet de la Déclaration de principes provinciale de 2005

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La Commission ontarienne des droits de la personne (la CODP) remercie le ministère des Affaires municipales et du Logement (le MAML) de la possibilité qui lui est offerte de communiquer ses commentaires sur la Déclaration de principes provinciale de 2005 (la DPP). La province de l'Ontario (la Province) sollicite des observations dans le cadre de l'examen quinquennal de la DPP. La CODP axera ses commentaires sur les articles qui concernent les droits de la personne, et en particulier sur les aspects qui touchent à l'inclusion ou à l'exclusion de personnes appartenant à des groupes protégés par le Code des droits de la personne de l'Ontario.

La CODP fonde ses commentaires sur son expérience d'organisme de protection des droits de la personne, dont le vaste mandat lui enjoint de protéger et de promouvoir les droits de la personne en conformité avec les principes reconnus à l'échelle internationale. Le mandat et les obligations de la CODP sont énoncés dans le Code des droits de la personne (le Code) de l'Ontario. Les observations figurant dans le présent document découlent des travaux de la CODP dans le domaine du logement qui ont conduit à la rédaction de son rapport intitulé Le droit au logement : Rapport de consultation sur les droits de la personne en matière de logements locatifs en Ontario et de sa Politique concernant les droits de la personne et le logement locatif, à la jurisprudence applicable et aux observations de la CODP adressées au MAML au sujet de sa stratégie en matière de logement abordable.

Le logement, un droit de la personne

La communauté internationale reconnaît depuis longtemps que le logement constitue un droit humain fondamental et universel qui doit être protégé par la loi. Le Canada a ratifié plusieurs documents internationaux relatifs aux droits de la personne qui affirment le droit au logement[1]. Le Canada confirme ainsi son adhésion au principe que le logement est un droit de la personne. Le défi du Canada consiste à faire de ces principes de haut niveau une réalité vécue pour la population canadienne. Les organismes de protection des droits de la personne, ainsi que les gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux, assument une grande responsabilité à cet égard. Les municipalités, y compris les conseils municipaux, les responsables des politiques, les urbanistes et les concepteurs de programmes, ont une occasion unique de veiller au respect des droits de la personne de toute la population dans la conception et la prestation des programmes et des mesures législatives concernant le logement.

La CODP présente ses réflexions au sujet de la DPP car cette dernière a un impact sur le droit au logement de nombreuses personnes marginalisées et de groupes protégés par le Code en Ontario, qui ont besoin de logements abordables tels que des foyers de groupe, des résidences pour personnes âgées, des refuges, des maisons de chambres et des logements sociaux. Le droit à vivre à l'abri de la discrimination dans le domaine du logement, énoncé à l'article 2 du Code, peut être invoqué pour empêcher les restrictions à l'aménagement de logements abordables que peuvent payer les personnes et les groupes protégés par le Code.

Par leurs décisions et leurs plans officiels, les offices d'aménagement du territoire, comme les municipalités, sont responsables de la mise en œuvre des politiques énoncées dans la DPP, y compris les politiques relatives au logement abordable[2]. L'article 3 de la Loi sur l'aménagement du territoire, telle que modifiée par la Loi de 2004 sur le renforcement des collectivités (modification de la Loi sur l’aménagement du territoire), stipule que toutes les décisions rendues par les municipalités et d'autres autorités responsables de l'aménagement du territoire qui concernent la planification du territoire doivent être conformes à la DPP[3].

La Déclaration de principes provinciale de 2005 et les droits de la personne

La CODP considère que la DPP est un outil précieux. Si elle incorpore des principes de protection des droits de la personne et tient compte des dispositions du Code, elle peut encourager la prise de mesures progressives assurant un logement accessible, sain, abordable et équitable dans tout l'Ontario. En particulier, on pourrait utiliser la DPP pour décrire des moyens de prévenir et d'éliminer les obstacles à l'aménagement du territoire qui contribuent à la discrimination contre certains groupes protégés par le Code. L'aménagement du territoire peut porter atteinte aux droits de la personne, et c'est la raison pour laquelle ils devraient faire partie intégrante d'une stratégie d'aménagement complète, intégrée et à long terme.

Le paragraphe 1.1.1 b) de la DPP stipule que pour assurer l’existence de collectivités saines et sûres, où il fait bon vivre, il faut permettre un éventail et une diversité appropriés d’utilisations à des fins résidentielles et d’emploi (notamment à des fins industrielles commerciales et institutionnelles), de loisirs et de plein air pour répondre aux besoins à long terme et améliorer l’accessibilité pour les personnes handicapées et les « personnes âgées » en éliminant ou en prévenant les obstacles liés à l’utilisation du sol qui nuisent à leur participation entière à la société (par. 1.1.1. f)). Les obstacles liés à l'utilisation du sol contribuent à la discrimination s'ils empêchent des membres de ces groupes d'être pleinement intégrés à la société. Toutefois, ces obstacles risquent également de causer de la discrimination pour d'autres groupes protégés par le Code, en particulier si ces obstacles ont des répercussions préjudiciables sur les gens qui vivent dans des logements abordables.

L'opposition discriminatoire de quartier, appelée communément syndrome « d'accord, mais pas dans ma cour », constitue un obstacle majeur à la création de logements abordables. Les attitudes négatives et stéréotypes envers les résidents pressentis d'un projet de logement causent des retards inutiles dans l'aménagement des logements, voire même un arrêt des travaux ou l'imposition de restrictions. Dans un sondage mené en 2001 par la Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHL) et la Fédération canadienne des municipalités (FCM), des municipalités de différentes tailles ont décrit l'opposition « d'accord, mais pas dans ma cour » comme le principal obstacle à l'aménagement de logements abordables[4].

Au cours des consultations de la CODP sur le logement, un grand nombre de personnes ont évoqué la question de savoir si les protocoles et règlements municipaux, dont les règlements de zonage, contribuaient peut-être à l'opposition des quartiers à la construction de logements abordables. Elles ont émis la possibilité que les règlements et protocoles municipaux causent des restrictions ou imposaient des conditions supplémentaires pour les logements destinés à des groupes protégés par le Code, ce qui empêcherait les gens de vivre dans les quartiers de leur choix. Si des politiques ou pratiques liées à la planification du territoire visent des groupes protégés par le Code ou leur causent un préjudice disproportionné, il se pourrait qu'elles violent le Code.

La résistance à l'aménagement de logements abordables se traduit par l'impossibilité d'atteindre le but énoncé dans la DPP d'augmenter le nombre de logements abordables. Il est donc impérieux de renforcer la DPP. Il faudrait réviser les décisions concernant l'aménagement de logements abordables afin de s'assurer qu'elles ne produisent pas d'obstacles à l'aménagement du territoire (qu'il s'agisse d'attitudes, de politiques ou de dispositions législatives préjudiciables) ayant un impact discriminatoire sur des groupes protégés par le Code.

L'une des solutions à ce problème serait de constamment rappeler la corrélation entre les droits de la personne et les politiques et procédures régissant le logement.

Modifications recommandées à la Déclaration de principes provinciale

Pour que la DPP protège plus efficacement les droits de la personne, la CODP recommande ce qui suit :

1. Modifier la DPP afin de renforcer l'engagement envers les droits de la personne.

Dans l'exercice de leurs obligations en vertu de la DPP, de la Loi de 2001 sur les municipalités et de la Loi sur l'aménagement du territoire, ainsi que des politiques et programmes applicables, les municipalités doivent veiller à ne pas enfreindre le Code. En tant que loi quasi constitutionnelle, le Code a primauté sur toute autre loi de l’Ontario, à moins que cette autre loi n’énonce expressément qu’elle s’applique malgré le Code.

Le préambule de la DPP stipule que la « Déclaration de principes provinciale permet d’encadrer un aménagement approprié tout en protégeant les ressources d’intérêt provincial, la santé et la sécurité publiques ainsi que la qualité de l’environnement naturel ». La CODP convient qu'un aménagement efficace doit tenir compte de la viabilité environnementale, de la santé publique et de la sécurité ainsi que des ressources d'intérêt provincial. La CODP recommande d'ajouter la « protection des droits de la personne » à cette liste de facteurs à prendre en considération. En intégrant ce facteur au préambule de la DPP, la Province affirmerait dès le début qu'elle reconnaît l'impact que la réglementation de l'aménagement du territoire et de la planification peut avoir sur les droits de la personne. Elle proclamerait également que la protection des droits de la personne est un objectif clé de la province qui contribue à l'amélioration de la qualité de vie de la population ontarienne.

Exprimer clairement cette perspective va dans le sens de l'objet du Code, qui, entre autres, est de reconnaître la dignité et la valeur de chacun. Modifier le préambule de la DPP à cette fin serait également conforme aux travaux menés récemment par la CODP en collaboration avec le MAML en vue de la publication d'un guide à l'intention des municipalités qui contient des exemples de bonnes pratiques susceptibles de renverser l'opposition discriminatoire à la création de logements abordables et de promouvoir un logement à l'abri de la discrimination.

Par ailleurs, la Province pourrait rédiger un addenda à la DPP décrivant en détail la corrélation entre logement abordable et droits de la personne. Le but de cet addenda serait d'aider les offices d'aménagement à mieux comprendre l'impact des « commentaires, observations ou conseils relatifs à l'aménagement du territoire » sur les droits de la personne, leurs droits et obligations respectifs en vertu du Code, et la primauté du Code sur les lois régissant le logement. Cet addenda pourrait contenir les principes suivants :

  • Chaque résident de l'Ontario a le droit à vivre à l'abri de la discrimination fondée sur l'appartenance à un groupe protégé par le Code dans le domaine du logement;
  • Chacun devrait pouvoir vivre dans la communauté de son choix sans discrimination;
  • Les gens n'ont pas le droit de choisir leurs voisins;
  • Les locateurs, fournisseurs de logement, associations de résidents, municipalités, organismes d'appel comme la Commission des affaires municipales et les tribunaux, ont tous l'obligation de veiller à ce que nul ne soit victime de discrimination dans le domaine du logement;
  • L'opposition à des projets de construction de logements abordables peut prendre la forme de politiques, de dispositions législatives, d'actions, d'attitudes ou de langage utilisés pour créer des obstacles contre des personnes protégées par le Code ou des groupes défavorisés.

2. La DPP devrait énoncer clairement que les municipalités doivent examiner et éliminer les obstacles à la création de logements abordables susceptibles de causer de la discrimination contre les groupes protégés par le Code des droits de la personne.

La DPP devrait énoncer l'obligation, pour les municipalités, d'examiner les règlements municipaux, politiques, règles ou restrictions qui régissent le logement abordable et la construction de logement abordable, en vue d'éliminer toute restriction qui conduit à un accès inégal au logement pour les personnes marginalisées protégées par le Code. Cette clause s'ajouterait à l'obligation d'éliminer et de prévenir les obstacles pour les personnes handicapées et les « personnes âgées », en vertu du par. 1.1.1. f) de la DPP. La Loi de 2001 sur les personnes handicapées de l’Ontario (LPHO)[5] impose aussi des obligations procédurales aux municipalités, qui complètent cette clause de la DPP.

L'article 11 de la LPHO exige des municipalités qu'elles préparent chaque année un plan d'accessibilité. « Le plan d’accessibilité traite du repérage, de l’élimination et de la prévention des obstacles pour les personnes handicapées dans les règlements municipaux, les politiques, les programmes, les pratiques et les services de la municipalité. »[6] La loi prévoit aussi le devoir de consultation[7] et l'obligation de mettre le plan d’accessibilité à la disposition du public[8].

Par exemple, la CODP et d'autres intervenants ont exprimé leur inquiétude à l'égard de l'utilisation arbitraire de distances de séparation minimales entre les foyers de groupe. Ils ont démontré comment ces obstacles à l'aménagement du territoire limitent la construction de logement abordable pour les personnes handicapées dans une municipalité. Ces questions font l'objet d'une requête en matière de droits de la personne déposée au Tribunal des droits de la personne de l'Ontario. En outre, les règlements municipaux excluant ou limitant les maisons de chambres de certaines zones résidentielles ou de toutes les zones résidentielles peuvent empêcher des personnes handicapées ou des bénéficiaires de l'aide sociale de vivre là où ils le souhaitent dans la municipalité. Les types de restrictions au logement abordable qui sont inutiles doivent être débattus dans le cadre de consultations générales auprès du public sur la création de logements auxquels ont droit les groupes protégés par le Code ou faire l'objet d'exigences de modifications de conception, comme l'ajout de clôtures ou de fenêtres opaques, pour empêcher que les résidents n'observent leurs voisins[9].

Ce ne sont pas toutes les restrictions imposées aux logements abordables qui sont discriminatoires. Les municipalités pensent souvent que des règlements ou des politiques qui créent des restrictions aux logements abordables sont légitimes et pris de bonne foi. Dans ce cas, la municipalité devrait procéder à une analyse de ses règlements et politiques d'une perspective des droits de la personne. Elle devrait être en mesure de démontrer que la règle ou la restriction a été adoptée de bonne foi, qu'il y avait un lien rationnel entre l'objectif qu'elle visait et la règle ou restriction en cause, et qu'elle ne pouvait pas composer davantage avec les personnes visées sans subir une contrainte excessive[10].

Une décision récente de la Commission des affaires municipales de l'Ontario (CAMO) confirme cette approche. Une décision du mois de janvier 2010 de la CAMO[11] déclare clairement que les municipalités sont liées par le Code, et qu'elles doivent tenir compte des besoins de tout le monde, y compris des personnes handicapées et des bénéficiaires de l'aide sociale, lorsqu'elles promulguent des règlements. Dans cette affaire, la CAMO a conclu que lorsqu'une municipalité limite les perspectives de logement pour des personnes handicapées ou des personnes qui reçoivent l'aide sociale, elle doit procéder à une analyse suffisante de la planification. Cette analyse devrait tenir compte des principes véhiculés par le Code et se demander si la ville de Kitchener a commis du « zonage par habitant », ce qui est interdit[12].

Même si cette affaire concernait des personnes handicapées et des foyers monoparentaux, à faible revenu, il s'agit de principes de grande envergure qui doivent s'appliquer à tout examen des règlements susceptibles d'avoir des répercussions négatives sur des groupes protégés par le Code, y compris des immigrants, des jeunes, des personnes âgées, des membres de groupes racialisés et de communautés autochtones, des célibataires, des femmes et des gens ayant des enfants.

3. La DPP devrait énoncer des mécanismes de responsabilisation en vue de l'élimination des obstacles discriminatoires à l'aménagement de logements abordables.

La DPP devrait être modifiée afin de préciser que les municipalités devraient examiner leurs règlements en vue d'éliminer les obstacles à l'aménagement de logements abordables. La CODP recommande que la DPP impose également aux municipalités l'obligation de présenter un rapport sur ses efforts à cet égard, soit au public soit à la Province.

La Province devrait énoncer d'autres méthodes de responsabilisation conformes à l'article 4.10, en vue d'établir des indicateurs de la performance avec les municipalités pour suivre le processus de mise en œuvre des principes et d'élimination des obstacles discriminatoires.

Par ailleurs, il faut renforcer l'obligation qui pèse sur le MAML d'affirmer les droits de la personne. Comme elle l'a exposé dans ses observations concernant la stratégie à long terme du MAML en matière de logement abordable, la CODP estime que ce ministère devrait agir en vue de trouver une solution aux atteintes aux droits de la personne commises dans le domaine du logement qui risquent d'empêcher l'accès au logement. Étant donné que le MAML est principalement responsable du logement, il est le mieux placé pour veiller à ce que les planificateurs et les fournisseurs de logement soient au courant de leurs droits et responsabilités en vertu du Code, et à ce que ces droits et responsabilités soient respectés.

La CODP recommande donc de modifier l'article 4.4 afin de stipuler que le ministre des Affaires municipales et du Logement peut tenir compte d'autres considérations, y compris du Code des droits de la personne de l'Ontario, lorsqu'il prend des décisions visant à soutenir des collectivités fortes, un environnement propre et sain et la vitalité économique de la province.

4. La DPP devrait encourager clairement les municipalités à augmenter le nombre de logements abordables dans leurs collectivités.

La Politique concernant les droits de la personne et le logement de la CODP a établi un lien étroit entre la pauvreté, les droits de la personne et l'accès au logement. Les groupes qui ont subi des désavantages historiques et qui sont protégés par le Code sont plus susceptibles d’être relégués à un statut socio-économique inférieur. La pauvreté est étroitement liée aux inégalités, surtout pour les femmes (en particulier les femmes chefs de famille monoparentale et les femmes âgées), les Autochtones, les personnes racialisées et les personnes handicapées. Par conséquent, les politiques et les pratiques qui ont pour effet de désavantager les personnes à faible revenu sont susceptibles de désavantager les membres des groupes visés par le Code[13]. Dans son rapport Le droit au logement : Rapport de consultation sur les droits de la personne en matière de logements locatifs en Ontario, la CODP a recommandé à la Province d'adopter une stratégie provinciale en matière de logement qui, entre autres, établirait des cibles mesurables, et octroierait suffisamment de fonds pour accélérer les efforts d'élimination de l'itinérance et assurer à tous les Ontariens et Ontariennes l'accès à un logement adéquat [14].

Le gouvernement de l'Ontario a également reconnu la corrélation entre pauvreté et droits de la personne. L'alinéa 2 (2) 3 de la Loi de 2009 sur la réduction de la pauvreté[15] stipule ce qui suit : « Tous les groupes sociaux ne courent pas le même risque face à la pauvreté. La stratégie de réduction de la pauvreté doit reconnaître le risque accru couru par des groupes tels que les immigrants, les femmes, les mères célibataires, les personnes handicapées, les peuples autochtones et les groupes victimes de racisme. »

L'alinéa 2 (3) 3 de cette loi précise que le « logement » est l'un des facteurs de pauvreté et qu'en conséquence il faut faire rapport chaque année sur des indicateurs servant à mesurer le degré de réussite de la stratégie en matière de logement. Dans ses observations sur la stratégie à long terme du MAML en matière de logement abordable, la CODP déclare que pour contribuer à l'élimination de la pauvreté en Ontario, il faut augmenter le nombre de logements adéquats et abordables[16].

Les dispositions de la DPP concernant le logement abordable sont indispensables, mais il est nécessaire de les renforcer. La CODP comptera sur les spécialistes pour formuler des recommandations précises sur la façon dont les municipalités peuvent augmenter les niveaux de logement abordable. La CODP appuie les observations du Centre ontarien de défense des droits des locataires et du Wellesley Institute, qui ont présenté des mémoires approfondis recommandant comment modifier la DPP de façon à encourager les municipalités à augmenter les niveaux de logement abordable.

En particulier, la CODP soutient les commentaires formulés par ces organismes qui visent à renforcer la DPP et portent sur les aspects suivants :

  • Fournir un parc de logement suffisant pour répondre au besoin, ressenti par des personnes de tous les niveaux de revenu, d'avoir accès à un logement qu'elles peuvent payer[17];
  • Prévenir la perte de logements locatifs[18];
  • Énoncer l'obligation des municipalités d'utiliser leurs pouvoirs et ressources d'une façon proactive pour fournir des logements abordables[19];
  • Établir des cibles justes, mesurables en matière de logement abordable pour chaque municipalité[20] ;
  • Tenir les municipalités responsables de l'atteinte de leurs cibles, notamment par la mise en place, par la province, de normes communes de mesures du rendement et l'assujettissement des municipalités à des règles claires et uniformes[21].

À cet égard, le Wellesley Institute révèle qu'à l'heure actuelle les municipalités peuvent établir leurs propres cibles en matière de logement abordable sans aucune ligne directrice ou règle claire et uniforme de la province. Au mieux, cette situation crée un labyrinthe de cibles arbitraires et contradictoires. Au pire, elle permet aux municipalités de contourner leurs obligations[22].

La CODP convient que des cibles doivent être mises en place de façon à tenir les municipalités responsables d'adhérer à une série de normes communes de mesure du rendement. Les cibles doivent prévoir que les municipalités respectent une part équitable de logements abordables.

5. Le libellé de la DPP devrait être modifié pour être plus inclusif.

L'examen de la DPP fournit à la Province l'occasion d'utiliser un libellé qui reflète mieux les principes de droits de la personne et encourage la dignité et le respect pour toute personne. La CODP formule les recommandations suivantes :

Le Préambule de la DPP, à la Partie 1, déclare ce qui suit : « À titre de composante essentielle du système ontarien d’aménagement fondé sur des politiques, la Déclaration établit le fondement des politiques régissant l’aménagement et l’utilisation du territoire. Elle appuie également l’objectif provincial visant à améliorer la qualité de la vie de la population de l’Ontario » (italiques ajoutés). La version anglaise du terme mis en italiques est la suivante : « the quality of life for the citizens of Ontario » (italiques ajoutés).

La CODP est satisfaite que la Province reconnaisse l'importance de réglementer l'aménagement et l'utilisation du territoire pour l'amélioration de la qualité de la vie de la population ontarienne. Toutefois, pour rendre cette phrase plus inclusive, la CODP recommande de modifier l'énoncé de la version anglaise de la façon suivante : remplacer « the quality of life for the citizens of Ontario » (améliorer la qualité de la vie de la population de l’Ontario), par « the quality of life for all the citizens of Ontario » (italiques ajoutés) (« améliorer la qualité de la vie de toute la population de l’Ontario » (italiques ajoutés). L'Ontario compte des millions d'habitants, dont certains sont des citoyens canadiens alors que d'autres sont des immigrants récents cherchant à acquérir la citoyenneté canadienne.

Toutefois, le terme « citizens » (« citoyens ») dans la version anglaise du Préambule de la DPP peut être interprété comme affirmant que la réglementation de l'aménagement et de l'utilisation du territoire ne doit viser à améliorer la vie que des Ontariens qui possèdent la citoyenneté canadienne. Ce libellé ne reflète pas la situation démographique actuelle et projetée de la province, ni probablement l'intention véritable de la DPP.

Par ailleurs, le terme « elderly » (« personnes âgées ») utilisé dans la version anglaise de la DPP devrait être remplacé par le terme « older persons »[23]. Voir la Politique sur la discrimination fondée sur l'âge à l'endroit des personnes âgées, à www.ohrc.on.ca, pour plus de détails.

Pour terminer, l'article 1.4.3 renvoie à « offices d’aménagement ». La CODP recommande d'inclure une définition d'« offices d’aménagement » à l'article des définitions de la DPP, pour décrire clairement ce que ce terme englobe.

Conclusion

La CODP est heureuse d'avoir eu l'occasion de communiquer les recommandations ci-dessus au MAML, dans le cadre de l'effort provincial en vue de rendre la DPP plus efficace et sensible aux enjeux émergents de l'aménagement du territoire en Ontario. La CODP espère que la corrélation entre le logement, la pauvreté, la discrimination et les droits de la personne sera prise en compte dans la version finale de la DPP.

Les activités de la CODP dans le domaine du logement lui ont permis de mieux comprendre les mesures susceptibles de régler certains des enjeux en matière de logement dans la province. La CODP continuera à se tenir à la disposition du MAML pour lui fournir ses conseils et son savoir-faire sur l'intégration des principes de droits de la personne dans la DPP. La CODP poursuivra sa collaboration avec le MAML sur la préparation d'un guide, que les offices d'aménagement, dont les municipalités, pourront consulter avant de prendre des décisions en matière d'aménagement du territoire et pour assurer la conformité à la DPP.

Les politiques de la CODP sur l'accommodement mettent l'accent sur les principes de dignité, d'individualisation et de participation entière à la collectivité. D'un point de vue des droits de la personne, une DPP efficace et sensible doit également promouvoir ces concepts de façon à ce que les politiques en matière de logement répondent aux besoins individuels, favorisent la pleine participation à la vie sociale et encouragent un niveau élevé de dignité.


[1] T.S. 1976 No. 46. L'Assemblée générale des Nations Unies a adopté et proclamé la Déclaration universelle des droits de l'homme, en 1948. Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels a été adopté par les Nations Unies en 1966 et est entré en vigueur en 1976. Le Canada a ratifié ce Pacte en 1976. Le Canada est également signataire d’autres conventions internationales qui affirment le droit au logement, notamment la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes et la Convention relative aux droits de l'enfant; Déclaration universelle des droits de l'homme, signée le 10 décembre 1948, G.A. Res. 217A (III), U.N. Doc. Al810, p. 71 (1948); Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, (1976) 993 U.N.T.S. 3, Can.
[2] Déclaration de principes provinciale de 2005, en ligne : http://www.mah.gov.on.ca/Asset3407.aspx, article 4.5 (DPP).
[3] Ibid, art. 4.2.
[4] Sondage auprès de municipalités canadiennes : mesures de réglementation favorisant l'abordabilité, SCHL, Série socio-économique, 87, 2001.
[5] Loi de 2001 sur les personnes handicapées de l’Ontario, en ligne, à : http://www.e-laws.gov.on.ca/html/statutes/french/elaws_statutes_01o32_f.htm.
[6] Ibid, par. 11 (2).
[7] Ibid, par. 11 (1).
[8] Ibid, par. 11 (4).
[9] Commission ontarienne des droits de la personne, Le droit au logement : Rapport de consultation sur les droits de la personne en matière de logements locatifs en Ontario, 2008, (Toronto: Queen’s Park Printer), p. 80 et 82.
[10] Pour établir l'exigence de la bonne foi, la Cour suprême a énoncé ce critère en trois volets dans l'arrêt Colombie-Britannique (Public Service Employee Relations Commission) c. BCGSEU, [1999] 3 R.C.S. 3,. par 68 [“Meiorin”].
[11] Advocacy Centre for Tenants Ontario v. Kitchener (City) (2010) O.M.B.D. Case No. PL050611.
[12] La CAMO a fondé son analyse du « zonage par habitant » sur la décision de la Cour suprême du Canada dans l'arrêt R. c. Bell (1979), (C.S.C.), 98 D.L.R. (3rd) 255, dans laquelle la Cour a annulé un règlement limitant les occupants d'une habitation à des membres de la famille.
[13] CODP, Politique concernant les droits de la personne et le logement (2009), en ligne : www.ohrc.on.ca, p. 34 [Politique de la CODP en matière de logement]. La corrélation entre l’appartenance à un groupe protégé par le Code et la probabilité d’avoir un
faible revenu a été reconnue par le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario dans plusieurs
causes, de même que par les cours de justice : voir, à titre d’exemple, Kearney c. Bramalea Ltd.
(no 2) (1998), ibid.
[14] CODP, Le droit au logement : Rapport de consultation sur les droits de la personne en matière de logements locatifs en Ontario, 2008, (Toronto: Queen’s Park Printer), recommandation 6, p. 86.
[15] Loi de 2009 sur la réduction de la pauvreté, L.O. 2009, chap.10 : http://www.ontla.on.ca/bills/bills-files/39_Parliament/Session1/b152ra.pdf.
[16] OHRC, Mémoire de la Commission ontarienne des droits de la personne concernant la consultation du ministère des Affaires municipales et du Logement sur la stratégie à long terme de logement abordable (23 décembre 2009), en ligne : http://www.ohrc.on.ca/fr/resources/submissions/house, p. 3.
[17] Centre ontarien de défense des droits des locataires. Examen de la Déclaration de politiques provinciale, p. 7.
[18] Ibid, p. 6.
[19] Le Wellesley Institute, Strengthen Ontario’s Provincial Policy Statement as one tool to meet the province’s housing needs – Submission by Wellesley Institute to PPS five-year review, en ligne : www.wellesleyinstitute.com/wp-content/uploads/PPSsubmissionfinal-edit.pdf, p. 5 (Wellesley Institute).
[20] Ibid.
[21] Ibid.
[22] Ibid.
[23] Le terme « âgé » n’entend pas dénoter la « vieillesse » ni stigmatiser les personnes d’aucune façon. Il est utilisé simplement comme concept relatif, c’est-à-dire qu’il qualifie des personnes plus âgées que celles qui sont moins susceptibles de subir les types particuliers de discrimination qui sont traités. Voir CODP, Politique sur la discrimination fondée sur l'âge à l'endroit des personne âgées, en ligne : www.ohrc.on.ca, p. 6.