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Mémoire de la CODP sur la Loi visant à accélérer la construction de plus de logements : Zonage d’inclusion

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9 décembre 2022

 

Mémoire de la CODP : Règlement de l’Ontario 232/18 sur le zonage d’inclusion

La CODP salue les efforts déployés par le gouvernement pour affronter la crise du logement. À mesure que se poursuit la mise en œuvre du plan Accélérer la construction de plus de logements, nous devons nous assurer que les lois, les politiques, les programmes et les règlements municipaux relatifs au logement s’articulent autour du respect des droits de la personne. Cela inclut le respect des obligations de l’Ontario aux termes du Code des droits de la personne (Code) et la reconnaissance du droit au logement, tel qu’il est affirmé dans la Loi sur la stratégie nationale sur le logement.

 

Contexte du zonage d’inclusion :

Le zonage d’inclusion est un outil d’aménagement du territoire autorisé par la Loi sur l’aménagement du territoire que les municipalités peuvent utiliser pour exiger que des logements abordables soient inclus dans les ensembles domiciliaires de 10 logements ou plus érigés dans des zones protégées de grande station de transport en commun (ZPGSTC) ou dans des zones du système de délivrance de permis de planification communautaire (SDPPC) ordonnées par le ministre. Le ministre a également le pouvoir d’ordonner aux municipalités d’adopter des politiques autorisant l’utilisation du zonage d’inclusion dans les plans officiels. Le zonage d’inclusion peut s’avérer un outil utile pour faciliter l’offre de logements abordables dans les zones généralement dotées de caractéristiques telles que des pressions liées à la croissance, une demande supérieure de logements et la disponibilité des transports en commun de niveau supérieur.

La Loi sur l’aménagement du territoire et le Règlement de l’Ontario 232/18 établissent les exigences législatives et réglementaires de mise en œuvre municipale du zonage d’inclusion, y compris le pouvoir pour les municipalités d’adopter des politiques de zonage d’inclusion dans les plans officiels et d’adopter des règlements municipaux relatifs au zonage d’inclusion. Au-delà des exigences minimales prescrites, les municipalités ont la souplesse et la discrétion nécessaires pour adapter leurs politiques relatives au zonage d’inclusion à leur contexte local. Actuellement, le règlement accorde aux municipalités le pouvoir discrétionnaire d’établir une période d’abordabilité, de déterminer le pourcentage total de logements à rendre abordable et d’élaborer une méthode pour fixer les prix et les loyers abordables des logements assujettis au zonage d’inclusion.

 

Proposition :

Les modifications proposées au Règlement de l’Ontario 232/18 créeraient une limite maximale du nombre de logements à rendre abordables, fixée à 5 % du nombre total de logements (ou à 5 % de la superficie de plancher maximale du total des logements, à l’exception des aires communes). Elles établiraient aussi une période maximale de 25 ans au cours de laquelle les logements abordables seraient tenus de rester abordables. Les modifications prescriraient également la méthode de détermination du prix ou du loyer le plus bas qui peut être exigé pour les logements assujettis au zonage d’inclusion, fixé à 80 % du prix moyen de revente des logements de propriétaires-occupants ou à 80 % du loyer moyen du marché des logements locatifs. Ces modifications proposées ne s'appliqueraient qu'aux terres situées à l'intérieur des ZPGSTC.

Les modifications proposées permettraient d’accroître la certitude quant aux coûts d’aménagement et d’uniformiser les exigences en matière de zonage d’inclusion dans l’ensemble de la province.

Le logement et les droits de la personne :

L’accès à un logement adéquat est un élément essentiel du sentiment de dignité, de sécurité et d’inclusion de la personne, et de sa capacité de contribuer au mieux-être de nos quartiers et de la société dans son ensemble[1]. Le droit international et le Code des droits de la personne affirment tous les deux l’importance du logement pour la dignité humaine, ainsi que son statut de droit de la personne. Le Canada a reconnu le caractère fondamental du droit à un logement adéquat en ratifiant le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC). L’article 11 du PIDESC reconnaît le droit de toute personne à un logement adéquat, dont l’importance et le lien à l’interdiction de la discrimination sous toutes ses formes ont été confirmés dans les rapports et énoncés subséquents des Nations Unies.

En Ontario, le Code inclut des mesures spécifiques de protection contre la discrimination en matière de logement, qui reconnaissent l’important rôle social qu’occupe le domicile. Toutes les facettes du droit au logement doivent être exercées sans discrimination[2].

Le domicile n’est pas uniquement un bien à gérer, mais l’espace dans lequel les personnes se créent une vie. Les locateurs et les promoteurs immobiliers jouent un rôle important dans l’économie ontarienne, mais ce rôle est assujetti aux restrictions prévues au Code, lesquelles assurent qu’on attribue au domicile une importance supérieure à sa seule valeur de produit.

La CODP reconnaît la réalité changeante du logement. Or, tout changement opéré demeure assujetti au Code, qui a préséance sur toutes les autres lois provinciales. Au cours des deux dernières décennies, la nature des marchés immobiliers a évolué de façon draconienne à mesure que de nouveaux acteurs, y compris des locateurs financiarisés, se sont mis à dominer le marché. Ces changements ont nui de façon disproportionnée aux personnes vulnérables, y compris les groupes protégés par le Code[3].

 

Le zonage d’inclusion et le droit au logement :

La CODP appuie les efforts déployés par le ministère des Affaires municipales et du Logement (MAML) en vue de normaliser les règles régissant le zonage d’inclusion et encourage fortement le MAML à articuler ces travaux sur le respect des droits de la personne. Selon la CODP, ces travaux sont une occasion de renforcer le zonage d’inclusion de façon à accroître l’accès au logement abordable permanent, surtout chez les locataires vulnérables généralement protégés par le Code. Par conséquent, la CODP recommande de n’apporter aucun changement qui aurait pour effet d’affaiblir les règles régissant le zonage d’inclusion.

L’approche actuelle exige que les municipalités élaborent des politiques/règlements municipaux en matière de zonage d’inclusion qui tiennent compte des besoins particuliers de leur collectivité. Ces besoins sont établis au moyen de consultations avec des parties prenantes et membres du public, et des études de faisabilité. Par exemple, la ville de Toronto a adopté une politique relative au zonage d'inclusion qui comprend des taux de mise de côté qui sont fondés sur le type d’immeuble et son emplacement, et sont appelés à augmenter progressivement. Dans le cas des copropriétés, les taux de mise de côté sont presque toujours supérieurs à 5 %, quel que soit l’emplacement, et augmentent progressivement. La définition d’« abordable » de la ville de Toronto est  fondée sur le revenu des ménages et le besoin de veiller à ce qu’aucun ménage ne consacre plus de 30 % de ses revenus au logement. Enfin, à Toronto, la période d’abordabilité a été établie à 99 ans, ce qui fait de la politique relative au zonage d’inclusion de la ville un instrument permanent.

 

Recommandations de la CODP

La CODP craint que les modifications proposées au Règl. de l’Ont. 232/18 limitent de façon significative la capacité des municipalités de mettre au point des cadres d’action fondés sur les besoins locaux. Fait encore plus préoccupant, les modifications proposées semblent menacer et affaiblir l’efficacité du zonage d’inclusion comme outil de création et de maintien de logements abordables à long terme au bénéfice des nombreux membres de la population ontarienne qui peinent à se loger.

Par conséquent, la CODP encourage fortement le MAML à inclure ce qui suit à ses modifications proposées et règles standardisées :

  • définition de l’abordabilité fondée sur le pourcentage de revenu du ménage (30 %) consacré au logement plutôt que sur un pourcentage de la valeur de revente des logements destinés à la vente ou du loyer du marché moyen des logements destinés à la location;
  • période d’abordabilité permanente, p. ex. 99 ans;
  • taux de mise de côté plus élevés, correspondant à ceux de la plupart des politiques relatives au zonage d’inclusion de l’Amérique du Nord, p. ex. 10 %[4].

Le renforcement des politiques relatives au zonage d’inclusion a le potentiel d’accroître l’accès au logement abordable, surtout chez les personnes à revenu faible qui font de façon disproportionnée partie des groupes protégés par le Code. Cette approche ira dans le sens de la protection du respect de la dignité et de la valeur égale de l’ensemble de la population ontarienne. Le fait d’affaiblir ou d’éliminer les politiques relatives au zonage d’inclusion aura l’effet contraire.

 


 

[1] CODP, Le droit au logement : Rapport de consultation sur les droits de la personne en matière de logements locatifs en Ontario, 2008, p. 8. La Cour d’appel du Québec a indiqué que le logement, encore davantage que l’emploi, est un besoin fondamental de l’ensemble des membres de la société. Voir Desroches c. Québec (Commission des droits de la personne), 1997, 30 CHRR D/345 (QC, CA).

[2] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Pheneus et une autre) c Fornella, 2018 QCTDP 3.

[3] Manuel Aalbers, The Financialization of Housing: A Political Economy Approach (New York : Routledge, 2016); Elvin Wyly et coll., « American Home: Predatory Mortgage Capital and Neighbourhood Spaces of Race and Class Exploitation in the United States », Georgrafiska Annal, vol. B88, n1 (2006), p. 105; Elvin Wyly et coll., « Cartographies of Race and Class: Mapping the Class-Monopoly Rents of American Subprime Mortgage Capital », Int J Urban Reg, vol. 33, n2 (2009), p. 332; Elvin Wyly et coll., « Gender, Age, and Race in Subprime America », Housing Policy Debate, vol. 21, n4 (2011), p. 529; Loretta Lees et Elvin Wyly, Gentrification (New York : Routledge, 2008); Raquel Rolnik, « Late Neoliberalism: The Financialization of Homeownership and Housing Rights », Int J Urban Affairs, vol. 37, n3 (2013), p. 1058.

[4] Selon une étude de 2021 menée par le Grounded Solutions Network, la grande majorité des programmes relatifs au zonage d’inclusion ont un taux minimal de mise de côté d’au moins 10 % des logements.

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