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10. Cas particuliers

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10.1 Congés payés ou sans solde et observances rituelles en lien avec la croyance

En Ontario, les horaires de travail et heures d’ouverture ont de tout temps été articulés autour du calendrier chrétien. Beaucoup de croyances exigent que leurs adhérents se soumettent à des célébrations et actes d’adoration spécifiques à des moments particuliers de la journée, de la semaine ou de l’année. Lorsque ces observances ne coïncident pas avec les horaires de travail, heures d’ouverture, pauses et congés existants, les personnes qui doivent s’y soumettre peuvent se heurter à un effet préjudiciable.

Les organisations ont l’obligation de tenir compte des observances sincères rattachées à la croyance, jusqu’au point de préjudice injustifié, notamment en accordant des permissions et des congés en vue de la célébration de fêtes religieuses, la récitation des prières rituelles, l’observance du Sabbat et autres.

Exemple : L’une des premières décisions relatives aux droits de la personne portant sur l’accommodement des besoins en matière de congés pour observances religieuses est l’arrêt de la Cour suprême dans l’affaire Commission ontarienne des droits de la personne c. Simpsons-Sears[412]. Le magasin à rayons Sears exigeait que ses employés à temps plein travaillent à tour de rôle le vendredi soir et le samedi. Après être devenue adventiste du septième jour, Mme O’Malley, une employée de magasin, ne pouvait plus travailler durant son Sabbat (du soleil couchant le vendredi au soleil couchant le samedi). Elle a été forcée d’accepter un poste à temps partiel, ce qui entraînait une réduction de son salaire et de ses avantages sociaux. La Cour suprême du Canada a conclu que le magasin n’avait pas démontré qu’il aurait pu faire davantage pour tenir compte des besoins de Mme O’Malley Elle a ajouté que la discrimination peut découler de règles et d’exigences qui, bien que neutres, ont un effet préjudiciable intentionnel ou non sur des personnes visées par un motif du Code.

Un employeur devrait offrir à ses employés des mesures d’adaptation permettant d’observer leurs pratiques rattachées à la croyance sans perte de salaire[413]. Ces mesures pourraient inclure des congés rémunérés spéciaux ou pour raisons familiales, le réaménagement de l’horaire de travail, des possibilités de surtemps ou d’utilisation de congés compensatoires, des semaines de travail comprimées et, si l’employeur est en activité durant un congé férié, la possibilité de travailler pendant le congé (conformément aux exigences de la Loi sur les normes d’emploi relatives au salaire pour jour férié)[414]. Il est toujours préférable d’offrir le choix entre plusieurs mesures, au moyen d’une « série d’options » Le fait de forcer un employé à utiliser ses jours de vacances au lieu d’explorer d’autres options serait probablement discriminatoire[415].

Lorsque le milieu de travail ou les circonstances particulières de l’employé sont telles que ce dernier risque une perte de salaire en raison d’heures de travail perdues parce qu’il doit s’absenter pour des motifs religieux, l’employeur doit envisager d’autres formes d’accommodement. Cela pourrait inclure l’offre d’un nombre de congés payés équivalent au nombre de congés fériés rattachés au calendrier chrétien et offerts par l’employeur (généralement deux ou trois)[416].

Exemple : La Cour suprême du Canada a examiné la demande d’enseignants juifs voulant se prévaloir d’une disposition de leur convention collective qui prévoyait des congés spéciaux payés et leur permettrait de prendre congé sans perte de salaire pour célébrer Yom Kippur[417]. L’employeur a plutôt indiqué aux enseignants qu’ils pouvaient prendre un congé sans solde. La Cour a fait remarquer que les fêtes religieuses chrétiennes de Noël et du Vendredi saint sont prévues au calendrier scolaire et que les employés chrétiens peuvent donc célébrer leurs fêtes religieuses avec rémunération. Les enseignants juifs, dont ce n’est pas le cas, feraient donc l’objet de discrimination à moins qu’une mesure d’adaptation ne soit offerte par l’employeur. Il n’est pas possible de tenir compte des besoins des enseignants en modifiant leur horaire de travail puisque l’enseignement peut uniquement se faire lorsque les écoles sont ouvertes. Par conséquent, l’employeur est tenu de leur offrir les congés payés prévus dans la convention collective.

En même temps, personne n’a de droit automatique à des jours de congé rémunérés pour célébrer des fêtes ou respecter leurs observances religieuses[418].

Exemple : La Cour d’appel de l’Ontario a examiné le grief d’un membre de l’Église universelle de Dieu qui demandait 11 jours de congé payés par année pour des fêtes religieuses[419]. La politique de l’employeur offrait deux jours de congés payés, en permettant aux employés d’honorer le reste de leurs obligations religieuses en modifiant leur horaire de travail. L’employeur a fait à l’employé diverses propositions d’accommodement de ses besoins en matière d’observance religieuse, mais ce dernier les a toutes refusées sous prétexte qu’il avait droit à 11 jours de congé payés. La Cour d’appel a conclu que la politique de l’employeur respectait son obligation d’accommodement[420].

Personne ne devrait être pénalisé de quelque façon que ce soit, ou perdre d’avantages ou de possibilités, par suite d’un accommodement.

Exemple : Un employé qui n’était pas en mesure de travailler le jour du Sabbat alléguait que le programme de reconnaissance de l’assiduité établi par son employeur était discriminatoire à son endroit puisque les employés ayant une parfaite assiduité recevaient une prime à laquelle il n’avait pas accès en raison de ses absences les jours de Sabbat. Le TDPO a conclu que le fait que l’employeur exige qu’il soit présent tous les jours de travail prévus pour avoir une parfaite assiduité et recevoir une prime équivalait à de la discrimination fondée sur la croyance [421].

Des congés pourraient également être nécessaires pour la pratique d’autres observances, comme la participation à un pèlerinage, à des rites de passage ou à des rituels funéraires ou de deuil en lien avec la croyance.

Exemple : La « Shiva » juive est une période de deuil d’une semaine que doivent observer après le décès les membres immédiats de la famille. Les sept jours suivant l’enterrement, les endeuillés doivent « s’asseoir pour la Shiva » au domicile du disparu. Les élèves et membres du personnel d’une école qui doivent observer la Shiva ont droit aux congés requis pour effectuer leur deuil. 

L’obligation de tenir compte des besoins sur le plan du temps de prière, du Sabbat, des fêtes religieuses et des autres observances liées à la croyance s’applique à l’emploi mais aussi à tous les autres domaines sociaux prévus dans le Code.

Exemple : Un agriculteur de l’Ontario a allégué que son droit de vivre à l’abri de la discrimination fondée sur la croyance en matière de contrat a été enfreint par la politique de la Commission ontarienne de commercialisation du lait à l’égard des agriculteurs qui, pour des motifs religieux, n’acceptent pas de livrer de lait le dimanche. La Commission de commercialisation a permis aux agriculteurs de ne pas offrir de service le dimanche et a pris des mesures pour que le lait soit ramassé le samedi et le lundi, moyennant des frais supplémentaires. La Commission d’enquête de l’Ontario (qui a précédé le TDPO) a conclu que cette mesure d’adaptation n’offrait pas d’accommodement suffisant aux agriculteurs qui, pour des motifs religieux, n’acceptaient pas de livrer de lait le dimanche. La Commission d’enquête a comparé cette mesure à celle d’obliger les personnes à mobilité réduite à payer pour l’installation d’une rampe d’accès aux fauteuils roulants. Le fait de répartir le coût de cette mesure d’adaptation sur l’ensemble des producteurs laitiers ou de trouver d’autres moyens d’absorber les coûts de la mesure par l’entremise du cadre réglementaire de la Commission de commercialisation du lait ne créerait pas de préjudice injustifié[422].

Les enfreintes aux convictions ou pratiques rattachées à la croyance ne déclenchent pas toutes une obligation d’accommodement. Dans certains cas, on pourrait juger qu’une pratique se rattache davantage à la vie culturelle ou politique qu’à une religion ou à une croyance. Des convictions ou pratiques qui n’ont qu’un effet marginal sur la croyance ou qu’un lien périphérique avec elle peuvent également ne pas déclencher d’obligation d’accommodement[423].

Un employeur peut prendre des mesures proactives pour gérer et anticiper les fêtes religieuses, par exemple en élaborant un calendrier, une politique, une directive ou une ressource similaire qui établit les fêtes ou observances religieuses de diverses communautés de croyance pouvant nécessiter un accommodement, et en y renvoyant ses employés. Cependant, de telles listes ne devraient pas être jugées complètes ou considérées comme un compte rendu exhaustif de tous les besoins en matière d’accommodement. Elles ne devraient pas non plus servir à se soustraire à son obligation d’accommodement des besoins des personnes qui se soumettent à des observances peu connues ou encore à des observances connues, de manière sincère mais particulière et individuelle[424]. Le respect de l’individualité est au cœur de la notion de dignité de la personne qui adhère à une croyance et du concept de l’accommodement. Les règles « générales » qui ne permettent la prise en compte d’aucune circonstance ou d’aucun besoin individuel ne sont pas en mesure de satisfaire les besoins individuels et sont susceptibles d’être jugées discriminatoires.

Les organisations sont libres de consulter des autorités religieuses ou dirigeants de communautés de croyance au moment de s’efforcer d’intégrer les différents besoins en matière d’accommodement à leurs mesures de conception inclusive, mais elles devraient s’assurer de ne pas laisser les points de vue de ces dirigeants éclipser ou nier leur obligation d’accommodement des convictions sincères et besoins individuels rattachés à la croyance qui pourraient s’avérer divergents[425]. Des renseignements additionnels peuvent cependant être requis dans le cas où il est difficile d’établir un lien clair entre une observance et un droit relatif à la croyance protégé par le Code[426].

Exemple : Un conseil scolaire reconnaissait les « fêtes confessionnelles importantes » rattachées aux religions connues et la légitimité de leur accommodement, mais ne procédait pas à l’accommodement des fêtes religieuses rattachées à une croyance ne figurant pas sur sa liste. Un arbitre du travail a déterminée qu’il s’agissait de discrimination. Cependant, l’arbitre a accepté la pratique du conseil scolaire visant à présumer que les demandes de congé en lien avec les « fêtes confessionnelles importantes » connues étaient légitimes, et à demander des renseignements additionnels à ses employés lorsqu’il s’agissait de croyances moins connues afin de vérifier la légitimité du besoin d’obtenir un congé[427].

10.1.1 Observance de la prière

Certaines croyances exigent que leurs adeptes observent de courtes périodes de prière à certains moments précis de la journée.

Certaines personnes de confession musulmane récitent la prière cinq fois par jour à des heures précises qui peuvent changer tout au long de l’année, selon la position du soleil et l’heure à laquelle il se lève et se couche. Certains enfants commencent à prier à un jeune âge. La récitation de la prière peut se faire de façon individuelle ou en communauté. En règle générale, les hommes et les femmes prient séparément. Les musulmans assistent aussi à des prières collectives toutes les semaines, les vendredis après-midi. Avant le souper, les musulmans entreprennent un processus de purification physique et spirituelle appelé « ablutions », qui inclut le nettoyage du visage, des mains, de la tête et des pieds[428].

Certaines personnes de confession juive prient trois fois par jour, le matin, l’après-midi et le soir. Beaucoup de personnes juives essaient de prier en minyane (communauté), une assemblée publique qui permet la récitation de prières spécifiques. On peut réciter les prières du matin du lever du soleil au milieu de l’avant-midi, approximativement, et les prières de l’après-midi du milieu de l’après-midi (un peu après) au coucher du soleil. Le Sabbat, que l’on doit consacrer à ses propres besoins spirituels, commence le vendredi au crépuscule et se termine à la tombée de la nuit le samedi[429].

Lorsqu’une personne fait l’objet d’un effet préjudiciable et est privée de l’observance d’une conviction rattachée à sa croyance en raison d’une règle, pratique, norme ou exigence organisationnelle, l’organisation a l’obligation de procéder à l’accommodement de l’observance jusqu’au point de préjudice injustifié. Cette obligation s’étend aux situations ou l’observance des prières entre en conflit avec les habitudes quotidiennes de travail et heures d’ouverture régulières.

L’accommodement des observances de la prière qui ont lieu à des moments précis peut s’effectuer d’une variété de façons, y compris en :

  • modifiant les politiques relatives aux pauses et horaires de travail ou politiques de participation à un service pour assurer leur flexibilité
  • permettant aux employés de travailler durant l'heure du repas ou les pauses afin de pouvoir quitter le travail plus rapidement ou d’échelonner leurs heures de travail dans le but de participer à un service religieux (p. ex. activités scolaires)
  • prévoyant des heures d'arrivée et de départ différentes les jours où la personne ne peut pas travailler ou satisfaire aux exigences du service pendant toute la période
  • faisant appel à des congés compensatoires ou en ne prévoyant pas d’heures de travail les jours où les convictions rattachées à la croyance des gens ne leur permettent pas de travailler durant la journée ou à certaines heures.

Exemple : Un conseil scolaire informe ses administrateurs scolaires qu’ils doivent procéder à l’accommodement des élèves et du personnel qui récitent la prière à des moments précis de la journée, y compris lorsque cela coïncide avec la tenue des cours. Il avise les enseignants de tenir compte de l’observance de la prière au moment de prévoir les examens, sorties scolaires et nuits passées à l’extérieur du domicile. Il donne en exemple les mesures d’adaptation suivantes : la désignation d’espaces privés ou de salles en vue de la récitation de la prière, l’aménagement d’une salle de bains privée pour se laver les mains avant la prière ou, si cela n’est pas possible, la désignation d’une salle de bains à cette fin, la dispense de participation aux activités scolaires durant les moments de récitation obligatoire de la prière en communauté et l’octroi aux élèves et au personnel du temps de préparation nécessaire à l’observance du Sabbat, surtout les jours où le soleil se couche tôt[430].

Les employeurs devraient offrir aux employés des options leur permettant de s’absenter du travail sans perte de salaire ou d’avantages sociaux. En règle générale, les absences d’une durée négligeable qui sont requises pour l’observance de la prière ne devraient pas mener à une perte de salaire, et ne devraient pas faire l’objet d’une attention supérieure à celle que reçoivent les autres courtes pauses du travail[431]. Les employeurs devraient offrir des possibilités d’horaires flexibles dans la mesure du possible, lorsque cela ne crée pas de préjudice injustifié (conformément à the Loi sur les normes d’emploi, mais s’en s’y restreindre)[432].

Exemple : Les employés d’un milieu de travail ont droit à deux pauses de 15 minutes (une le matin et une l’après-midi) par jour, en plus d’une pause pour le repas. Certains employés profitent de ce temps pour prendre une collation ou une cigarette, tandis que d’autres le consacre à la récitation de la prière. 

L’accommodement de l’observance de la prière peut parfois exiger que l’on procure un espace privé approprié en vue d’actes de dévotion individuelle ou communautaire, à moins que cela ne cause de préjudice injustifié.

Au moment de prévoir un espace pour les actes de dévotion et d’observance de la croyance, il est recommandé aux organisations de concevoir ces espaces le plus inclusivement possible, afin de tenir compte de la diversité des croyances des personnes qui utiliseront éventuellement cet espace, et ainsi éviter d’engager des coûts dans l’avenir. Les mesures prises devraient respecter la dignité et la vie privée des personnes adhérant à une croyance.

Le Multi-Faith Centre for Spiritual Study and Practice de l’Université de Toronto tient compte d’une grande diversité de pratiques rattachées à la spiritualité et à la croyance et encourage l’intégration d’un dialogue multiconfessionnel et du développement spirituel dans l’expérience d’apprentissage de tous les étudiants. Le centre bénéficie du soutien de l’association des aumôniers du campus, qui offre des services d’aumônerie aux personnes bouddhistes, chrétiennes (catholiques, orthodoxes et protestantes), hindoues, humanistes, jains, juives, musulmanes, autochtones, païennes et sikhes. Conçu de façon inclusive, le centre compte cinq salles de tailles variées, qui sont mises à la disposition des croyants pour la prière et d’autres pratiques spirituelles, ainsi que pour des activités éducatives, des forums et des réunions. Le système de ventilation de la salle d’activités principale est conçu de façon à permettre les célébrations autochtones, hindoues et autres qui incluent de la fumée et (ou) des feux. Un des murs de la salle principale est également orienté vers l’Est pour favoriser la récitation communautaire des prières. Les salles de recueillement et de méditation incluent des tapis de yoga et de prière, et des coussins de méditation. Le centre compte aussi des installations pour les ablutions. 

Occasionnellement, des espaces désignés pour l’observance des pratiques rattachées à la croyance peuvent se heurter aux revendications contradictoires d’adhérents à des croyances différentes ou de personnes ayant d’autres besoins en matière de droits de la personne. Dans de tels cas, la CODP recommande aux organisations d’appliquer son cadre de conciliation des droits contradictoires[433].

Les observances rattachées à la religion ou à la croyance prennent parfois des formes collectives[434]. Une organisation pourrait offrir de prévoir un espace sur place pour l’observance des formes collectives d’adoration, dans le cadre d’une approche de conception inclusive, lorsque des personnes nécessitent des mesures d’adaptation pour satisfaire leurs besoins en matière d’adoration collective durant les heures régulières de travail/d’ouverture.

Exemple : Une école secondaire permet l’utilisation d’un espace privé pour la pratique des observances de la prière collective de sa grande population d’élèves musulmans.

Il est généralement préférable d’adopter une approche de conception inclusive qui tient compte des besoins du groupe plutôt que d’éliminer les obstacles après qu’ils deviennent manifestes ou que d’assurer l’accommodement au cas par cas. Cela est dû au fait que la première option favorise l’accessibilité et l’inclusivité dès le début, répond aux besoins de nombreuses personnes de façon proactive et minimise la nécessité d’effectuer des demandes individuelles d’accommodements[435].

Bien qu’il existe une obligation d’accommodement des observances et besoins en matière d’adoration collective rattachés à la croyance, la façon de combler et d’accommoder ces besoins peut varier d’une organisation à l’autre, ou d’une situation à l’autre. L’accommodement des besoins du groupe au moyen de mesures de conception inclusive comme la mise à leur disposition sur place d’un espace pour la pratique des observances collectives n’est peut-être pas toujours possible[436]. De plus, cela peut parfois être compliqué, surtout lorsque la diversité au sein du groupe et les divergences d’opinion quant à la façon de pratiquer les observances collectives sont considérables. Une organisation pourrait choisir une forme de conception inclusive qui répondrait le mieux aux besoins du plus grande nombre de personnes possible, mais ne doit pas s’immiscer dans les questions et formes d’adoration purement religieuses[437]. Elle doit aussi assurer l’accommodement de toute personne dont les besoins ne sont pas satisfaits par les mesures de conception inclusive mises en place pour répondre aux besoins du groupe.

Les organisations doivent également faire preuve de diligence raisonnable pour veiller à ce que l’on protège tous les droits contradictoires éventuels, et que l’on élabore les mesures d’adaptation les plus susceptibles de respecter les droits de toutes les parties (pour en savoir davantage sur la conciliation des droits contradictoires, voir la Politique sur les droits de la personne contradictoires de la CODP).

Au moment de procéder à un accommodement ou à la conception inclusive dans le but de répondre aux « besoins du groupe », les organisations doivent :

  • indiquer clairement à toutes les parties prenantes ou touchées qu’il ne s’agit pas d’une activité parrainée par l’organisation ou de l’appui de l’organisation envers une croyance particulière, mais plutôt d’une façon de satisfaire les besoins de personnes en matière d’accommodement de la religion
  • être conscientes de la façon dont pourrait être perçue la participation des personnes en position de pouvoir ou d’autorité, et éviter d’exercer une pression indue ou de sembler partisanes
  • élaborer et fournir la mesure d’adaptation de la façon la plus inclusive possible en consultant le plus de personnes directement touchées possible et en restant attentives aux dynamiques de groupe internes et différences sur le plan des besoins en matière d’accommodement
  • traiter les membres de toutes les communautés de croyance nécessitant un accommodement de façon égale, y compris les groupes minoritaires au sein de communautés de croyance, sans en avantager ou en désavantager, en appuyer ou en prôner une plus que l’autre 
  • maintenir un environnement libre de pression ou de coercition en lien avec la religion ou la croyance
  • ne pas s’ingérer ou s’enliser dans des questions qui ont purement trait à une religion ou à une croyance  
  • prendre en compte et concilier tout droit contradictoire auquel on pourrait faire entrave (conformément à la Politique sur les droits de la personne contradictoires de la CODP).

10.2 Code vestimentaire, apparence et exigences

Les milieux de travail, fournisseurs de services et installations ont souvent des règles sur la façon de se vêtir ou l’apparence à adopter. Cela peut inclure le fait de devoir porter un uniforme ou des vêtements protecteurs, ou encore d’interdire le port de la barbe ou d’un voile. De telles règles peuvent contrevenir directement à des exigences religieuses. En pareil cas, on doit tenir compte des besoins de la personne, à moins que cela ne cause de préjudice injustifié.

Exemple : La politique d’une entreprise de services de sécurité, qui exige que tous les gardiens de sécurité portent un casque de sécurité et se rasent de près, est jugée discriminatoire à l’endroit d’un homme sikh portant le turban qui désire travailler comme gardien pour le compte de l’entreprise. En concluant que l’entreprise aurait pu procéder à l’accommodement de l’homme sans créer de préjudice injustifié, la Commission d’enquête de l’Ontario (comme on appelait le TDPO à l’époque) a rejeté l’argument de l’entreprise selon lequel les membres du public seraient mal à l’aise de composer avec un gardien de sécurité portant la barbe et le turban[438].

Les facteurs à prendre en considération en matière de code vestimentaire incluent ce qui suit :

  • Quelle est la nature exacte de l'observance religieuse?
  • Quelle est la raison motivant l'uniforme ou le code vestimentaire?
  • Quelles mesures peuvent être prises pour tenir compte des besoins de la personne jusqu’au point de préjudice injustifié?
  • Y a-t-il d'autres solutions possibles?
  • La situation fait-elle intervenir des questions de santé et de sécurité [439]?

Les exigences relatives à la tenue vestimentaire ont parfois un effet préjudiciable sur des personnes en raison de leur croyance parce qu’elles entrent en conflit avec des exigences relatives à la modestie rattachées à la croyance.

Exemple : Les directives sur l’accommodement religieux du Conseil scolaire de district de la région de York incluent (au moment de rédiger cette politique) de nombreux exemples d’accommodement de la tenue vestimentaire. Parmi les exemples de mesures d’adaptation en lien avec les vêtements à porter pour l’éducation physique figurent : 

  • l’accommodement des élèves qui n’ont pas le droit de porter des shorts ou des t-shirts à l’école en leur permettant de porter d’autres vêtements sécuritaires et confortables
  • l’accommodement d’élèves qui ne peuvent se changer devant d’autres personnes avant et après le cours d’éducation physique en mettant une cabine à leur disposition dans le vestiaire, en leur permettant de se changer dans un endroit privé ou en leur accordant assez de temps pour leur permettre de se changer en privé
  • l’accommodement des élèves qui n’ont pas le droit de participer à un cours de natation en raison du type de tenue requis pour la baignade en leur permettant de porter une tenue autre, fournie par la famille et conforme aux exigences de sécurité de la piscine (comme une combinaison de natation isothermique ou de protection solaire)[440].

En règle générale, les normes en matière d’apparence et les règles relatives aux uniformes qui n'ont pas de lien logique avec la santé et la sécurité peuvent être facilement modifiées pour tenir compte des besoins des personnes en matière d’observance de la croyance. Les préférences de l’organisation ou les coutumes, conventions et traditions culturelles ne constituent pas des motifs légitimes pour refuser d’assurer l’accommodement d’exigences relatives à la tenue vestimentaire ou à la conduite et rattachées à la croyance.

Exemple : Un magasin à rayons de vêtements a pour politique d’interdire les tatouages, le perçage corporel et l’art corporel de toutes les sortes. Une employée hindoue porte un bindi (pastille) rouge sur le front dans le cadre de l’observance de sa religion. Un autre employé qui se qualifie de praticien de la Religion Traditionnelle Africaine porte des cicatrices au visage, également pour des motifs religieux. Le magasin a une obligation d’accommodement des expressions corporelles relatives à la croyance lorsqu’on peut établir un lien entre ces expressions et l’observance d’une conviction sincère rattachée à la croyance. 

En même temps, les organisations sont uniquement tenues de prendre en compte les besoins réels rattachés à une croyance et non les préférences de style.

Exemple : Il a été établi qu’un employeur avait le droit de demander à une employée s’il était possible de porter une « forme de hijab (voile musulman recouvrant la tête) acceptable sur le plan religieux » qui respectait davantage son code vestimentaire. Sur contrôle judiciaire, la Cour divisionnaire de l’Ontario a établi une distinction entre les préférences vestimentaires de « style » et les exigences vestimentaires fondées directement sur la croyance, ne consentant de protection en matière de droits de la personne qu’aux secondes[441].

Les organisations invoquent souvent des considérations de sécurité lorsqu’elles traitent de conduites ou de vêtements religieux[442]. Si une mesure d’adaptation est susceptible d’entraîner des risques considérables pour la santé et la sécurité, il pourrait s’agir d’un « préjudice injustifié ». Les employeurs, fournisseurs de logements et fournisseurs de services ont l’obligation de protéger la santé et la sécurité de tous les employés, clients et locataires, y compris les personnes qui adhèrent à une croyance, dans le cadre d’activités d’affaires sûres et conformément aux exigences de la Loi sur la santé et la sécurité au travail[443]. Voir la section 9.9.3 pour un complément d’information sur la façon de composer avec les risques pour la santé et la sécurité.

Dans certains cas, les vêtements ou accessoires qu'il faut porter pour des raisons de santé ou de sécurité peuvent constituer une exigence de bonne foi de l'emploi.

Exemple : Un homme sikh a perduré son poste dans une usine de pâte à papier parce qu’il ne peut porter de masque de sécurité en cas d’urgence en raison de la barbe qu’il porte pour respecter un précepte de sa religion. À titre d’« opérateur à la caustification », il supervisait la zone de l’usine ou sont acheminés des gaz toxiques sous conduite et était responsable des arrêts d’urgence en cas de une fuite de gaz toxique dans la zone. Un tribunal des droits de la personne a conclu que la mise en application d’un règlement de la commission des accidents du travail exigeant que toute personne pouvant être exposée à des gaz toxiques porte le masque de sécurité constitue une exigence de bonne foi. Il a également conclu que le fait d’exempter les travailleurs qui portent la barbe pour des motifs religieux, comme le demandait le requérant, constituerait un préjudice injustifié en ce qu’il nuirait à l’étanchéité du masque et minerait la raison même du règlement, soit de protéger les travailleurs contre l’exposition à des gaz toxiques. Dans le présent cas, le risque ne menaçait pas seulement l’opérateur à la caustification, mais aussi les autres travailleurs. Si l’opérateur était frappé d’incapacité soudaine en raison de son exposition à des gaz toxiques, ses collègues de travail seraient tenus de le secourir, ce qui les mettrait également en danger. De plus, l’opérateur ne pourrait pas exercer ses fonctions consistant à procéder à un arrêt d’urgence. Par conséquent, son employeur n’était pas obligé de tenir compte de ses besoins[444].

Même lorsqu’une exigence vestimentaire est jugée de bonne foi pour des raisons de santé et de sécurité, l’employeur ou le fournisseur de services peut conserver l’obligation de chercher à procurer des mesures d’adaptation à l’employé, par exemple en examinant la possibilité de le muter à un autre poste vacant qui n’exige pas le port du vêtement ou de l’appareil en cause.

Le respect inégal des normes de santé et de sécurité (même lorsqu’elles sont de bonne foi), par exemple en les appliquant de façon sélective dans des cas ayant trait à la croyance, peut entraîner un verdict de discrimination[445].

10.2.1 Kirpans

Les organisations doivent tenir compte des besoins des personnes portant des objets religieux jusqu’au point de préjudice injustifié.

Les décisions des tribunaux administratifs et judiciaires sur le port du kirpan au sein des institutions publiques et des milieux de travail se sont articulées autour de préoccupations relatives à la sécurité.

Qu’est-ce que le kirpan?

Objet religieux fait de fer ou d’acier, le kirpan est une représentation stylisée d’une épée (ressemblant à un poignard). Sa taille peut varier, allant généralement de 15 à 22 cm (6 à 9 po). Les femmes et les hommes sikhs initiés (amritdhari) doivent porter le kirpan contre le corps en tout temps. Le kirpan doit être placé dans un fourreau et enveloppé dans une ceinture de toile portée contre le corps. Le kirpan est l’un de cinq articles de foi sikhs, souvent appelés les 5K. Il symbolise la sagesse spirituelle et le devoir de s’opposer à l’injustice[446].

En contexte d’éducation, les tribunaux des droits de la personne ont généralement rejeté les arguments mis de l’avant par les conseils scolaires pour interdire le port du kirpan cérémonial pour des raisons de sécurité, d’avis que le port du kirpan ne soulève pas de préoccupations suffisamment convaincantes en matière de sécurité[447].

Exemple : La décision de la Commission d’enquête de l’Ontario, maintenue par la Cour divisionnaire, a établi que la politique d’un conseil scolaire interdisant le port du kirpan contrevenait aux droits des élèves et enseignants aux termes du Code. La commission a rejeté l’argument du conseil scolaire voulant qu’il ne puisse prévoir l’accommodement du kirpan sans causer de préjudice injustifié[448]. La Cour suprême du Canada s’est penchée sur la même question en 2006[449] et déterminé elle aussi que le fait d’interdire un élève de porter un kirpan à l’école, sous aucune condition, contrevenait à sa liberté de religion en lui privant dans les faits de son droit de fréquenter une école publique. L’atteinte à son droit n’a pas été jugé légitime aux termes de l’art. 1 de la Charte compte tenu qu’elle ne représentait pas une entrave minimale à l’exercice de son droit religieux. Le conseil scolaire pouvait en effet répondre aux besoins religieux de l’élève en lui permettant de porter le kirpan pourvu qu’il respecte certaines conditions visant à assurer la sécurité.

La jurisprudence indique clairement que les politiques scolaires ne peuvent pas interdire le port du kirpan à l’école, mais qu’elles peuvent assujettir cette pratique à certaines conditions.

En matière de port du kirpan, les organisations doivent adopter une approche individualisée d’accommodement des besoins religieux des personnes.

Exemple : La Cour suprême du Canada a rejeté l’argument d’un conseil scolaire selon lequel il n’a pas contrevenu à la liberté de religion d’un élève sikh qui croyait devoir porter un kirpan de métal. Le conseil scolaire a plaidé sans succès que le requérant aurait dû accepter de porter un kirpan en plastique parce que d’autres élèves sikhs de la même école avaient accepté de le faire[450].

Le port du kirpan peut être interdit ou restreint dans certaines circonstances. Dans l’arrêt Multani[451], la Cour suprême a souligné l’importance de prendre en compte le contexte et le milieu au moment d’appliquer des règles relatives au kirpan. Les avions et milieux judiciaires sont bien différents des milieux scolaires et de travail, et soulèvent des questions de sécurité bien différentes.

Exemple : Dans l’affaire Nijjar c. Lignes aériennes Canada 3000 Ltée [452], le Tribunal canadien des droits de la personne a rejeté la plainte déposée par un homme au motif qu’on lui avait refusé le droit de porter son kirpan à bord d’un avion des Lignes aériennes Canada 3000, entre autres parce qu’il n’avait pas démontré que le fait de porter le kirpan d’une manière conforme aux politiques de Canada 3000 serait contraire à ses convictions religieuses[453].

En règle générale, les récents jugements et règlements de causes portées devant les tribunaux ont permis le port du kirpan dans les palais de justice, sous réserve de certaines limitations et de l’évaluation des risques au cas par cas[454].

10.3 Affichage de symboles religieux ou liés à la croyance

Aucune disposition du Code n’interdit nécessairement l’affichage de symboles religieux ou liés à la croyance dans l’espace « laïque » ou « public »[455]. En fin de compte, on doit adopter une approche au cas par cas pour déterminer si l’affichage d’un symbole lié à la croyance pourrait déclencher, promouvoir ou violer les protections prévues au Code.

Le fait de permettre à quelqu’un d’afficher un symbole personnel religieux ou rattaché à la croyance en contexte de travail, de logement ou de services peut constituer une pratique inclusive ou équitable. Cela peut également être requis dans le cadre de l’obligation d’accommodement des convictions et pratiques rattachés à la croyance des personnes, à laquelle sont soumises les organisations.

Exemple : Une employée qui subit beaucoup de stress à la maison et au travail installe un petit miroir octogonal (« ba gua » ou « huit trigrammes ») dans son bureau, face à la porte. L’employée, qui pratique le taoïsme, a pour conviction que le miroir l’aidera à rétablir l’équilibre dans son bureau en repoussant l’énergie négative, ce qui protégera sa santé et son bien-être. L’employeur lui ordonne de retirer son miroir sur la base d’une politique non officielle d’interdiction de la religion dans le milieu de travail. Cela cause chez l’employé une angoisse considérable. Le geste de l’employeur pourrait s’avérer discriminatoire aux termes du Code.

Le fait d’assurer l’accommodement des besoins en matière de croyance d’une personne en lui permettant de porter ou d’afficher un symbole lié à la croyance ne signifie pas nécessairement que l’organisation avalise ou privilégie une croyance au détriment des autres[456].

Exemple : La Cour fédérale a rejeté l’allégation selon laquelle la décision du commissaire de la GRC de permettre à ses agents sikhs de porter le turban portait atteinte à la capacité des agents sikhs et de la GRC de sembler « neutre » aux yeux du public. La Cour a souligné que les interactions entre un membre du public et un agent de police n’avaient pas de composante religieuse, et que le port du turban ne contraignait pas les membres du public à adopter ou à partager les convictions ou pratiques religieuses de l’agent, ni à s’y soumettre. Le seul geste imposé aux membres du public est de constater l'appartenance religieuse de l’agent de police. Il a été déterminé que cela ne créait pas de biais religieux au sein de la GRC à titre d’organisation, et ne contrevenait pas à la liberté de religion et aux droits à l’égalité de membres individuels du public[457].

En même temps, les expressions de la religion ou de la croyance ne bénéficient pas toutes des protections prévues au Code et ne déclenchent pas toutes une obligation d’accommodement.

Exemple : Le TDPO a rejeté l’allégation d’un requérant selon laquelle un service de ventes en ligne avait violé ses droits relatifs à la croyance en exigeant qu’il retire son avatar de « poisson chrétien » (qui contenait les mots « Jésus-Christ », « Fils de Dieu » et « Sauveur ») de son forum de discussions en ligne. Les règles relatives au forum de l’entreprise interdisaient l’utilisation de contenu pouvant s’avérer controversé, y compris les messages religieux ou politiques. La décision du TDPO établissait que les manifestations personnelles de la croyance d’une personne ne déclenchent pas toutes les protections prévues au Code. Le requérant n’avait pas fait valoir que l’utilisation du poisson chrétien constituait sur le plan objectif ou subjectif une exigence de sa religion, ou qu’elle lui permettait d’établir un lien personnel profond ou significatif avec l’ordre divin. Il a plutôt davantage qualifié le poisson chrétien de signe extérieur de ses convictions religieuses et l’a comparé à un t-shirt ou à un tatouage. Bien que cela lui eût procuré un bien-être et lui eût rappelé sa foi, le TDPO a conclu qu’il ne s’agissait pas d’un aspect suffisamment significatif de ses convictions ou pratiques religieuses pour mériter la protection du Code en matière de discrimination fondée sur la croyance[458].

Il existe une différence considérable entre une personne qui exprime ses convictions rattachées à la croyance en utilisant un symbole en sa capacité personnelle et une organisation qui affiche ou avalise un symbole lié à une croyance. La question de savoir si l’affichage d’un symbole lié à la croyance dans un domaine social respecte le Code peut dépendre de plusieurs facteurs, y compris : qui affiche le symbole et pourquoi[459], l’emplacement du symbole et sa visibilité[460], sa signification contemporaine, c’est-à-dire dans quelle mesure il peut être associé à l’organisation dans son ensemble plutôt qu’à un membre individuel[461], et si ou non l’affichage a un effet négatif significatif (par exemple, en créant de la pression, de l’exclusion ou de la discrimination en lien avec la croyance)[462].

Exemple : Une municipalité a un grand nombre de panneaux de rue portant le nom de saints de l’Église catholique. Ces panneaux peuvent n’être qu’un artefact de la réalité démographique et du patrimoine traditionnels locaux, plutôt que le reflet de l’affiliation ou d’un biais religieux actuel de la municipalité[463].

Les organisations et personnes qui agissent en une capacité organisationnelle officielle ont la responsabilité de traiter toutes les personnes de façon égale sur le plan religieux et de maintenir un environnement libre de toute pression ou discrimination fondée sur la croyance. Dans certains cas, la meilleure façon d’y parvenir est d’interdire aux organisations d’afficher des symboles liés à la croyance (même si cela pourrait ne pas éliminer l’obligation d’accommodement des observances rattachées à la croyance des personnes).

Exemple : Pour conserver sa neutralité religieuse, un tribunal n’affiche aucun symbole religieux sur les murs de sa salle d’audience.

Par ailleurs, une organisation pourrait promouvoir l’égalité au moyen d’une conception inclusive et de la reconnaisse et l’inclusion égales de symboles variés liés à la croyance.

Exemple : Un centre récréatif affiche à part égale une variété de symboles et d’information rattachés à des systèmes de convictions diverses (religieuses et non religieuses) et, par le fait même, reflète la diversité de sa clientèle sur le plan de la culture et de la croyance.

Qu’il s’agisse de l’action d’un employé ou d’une organisation, l’affichage de symboles liés à la croyance en contexte de travail, de services ou de logement pourrait se voir restreint ou interdit, s’il peut être démontré qu’il nuit à une exigence de bonne foi, crée un préjudice injustifié ou contrevient aux droits d’autrui, par exemple en :

  • créant un environnement inéquitable pour ses employés, résidents ou usagers de services (par exemple, une organisation qui privilégie ou désavantage une croyance par rapport à une autre, ou procure un milieu accueillant ou non à des gens, en fonction de leur croyance)
  • créant une atmosphère empoisonnée pour les membres d’un groupe protégé par le Code
  • exerçant une pression en lien avec la religion ou la croyance sur des personnes afin qu’elles se conforment ou donnent leur accord à une conviction, une pratique ou un système de convictions donné, rattaché à la croyance.

Les cas d’exposition à un symbole lié à la croyance dans un domaine social ne seront pas tous considérés comme exerçant de la pression ou portant atteinte à l’égalité religieuse ou aux droits à la liberté d’autrui[464].

Le fait d’exiger qu’une personne affiche un objet ayant une signification religieuse ou liée à une croyance dans un domaine social du Code pourrait contrevenir aux droits relatifs à la croyance ou à d’autres motifs du Code, selon les circonstances.

Exemple : Un employeur exige qu’un employé installe un présentoir de poinsettias dans un magasin, même si l’employé lui indique que cela va à l’encontre de sa foi. Lorsque l’employé refuse, l’employeur lui dit que s’il veut garder son emploi, il lui faut obéir. Aucune preuve n’indique qu’il était impossible pour l’employeur de tenir compte des besoins de l’employé. Cependant, plutôt que d’exempter l’employé de l’activité, l’employeur le force dans les faits à choisir entre sa foi et son emploi. Cela entraîne un verdict de discrimination[465].

10.4 Photos et information biométrique

Le fait d’exiger qu’une personne se fasse photographier pour avoir droit à un service, un emploi ou un avantage pourrait contrevenir au Code si l’on manque à l’obligation d’accommodement (jusqu’au point de préjudice injustifié) des personnes dont les convictions rattachées à la croyance ne permettent pas qu’elles soient photographiées.

Exemple : Un arbitre du travail a conclu qu’une entreprise aurait pu tenir compte de l’opposition de ses employés pentecôtistes au balayage biométrique de la main effectué à des fins de sécurité sans créer de préjudice injustifié. La compagnie a manqué à son obligation procédurale d’accommodement car elle n’a pas fait d’efforts suffisants pour explorer les mesures qu’elle aurait pu prendre pour répondre aux besoins des auteurs du grief. En ce qui a trait à l’obligation de fond, l’arbitre a rejeté l’argument de l’entreprise selon lequel il lui faudrait complètement abandonner le balayage biométrique si les auteurs du grief en étaient dispensés pour des motifs religieux[466].

Les organisations qui exigent la prise de photos devront se demander s’il s’agit d’une exigence de bonne foi (légitime) aux termes du Code[467]Cela exige de déterminer, entre autres, si l’objectif de la photographie peut être atteint autrement, sans créer de préjudice injustifié.

Exemple : Les services gouvernementaux de l’Ontario qui exigent des formes d’identification avec photo prévoient des exemptions pour une variété de raisons, dont l’existence de convictions religieuses interdisant la prise de photos. Service Ontario à une relation de longue date avec la communauté mennonite et a mis en place une exemption générale visant à exempter les membres orthodoxes ou âgés de la communauté de la prise de photos[468]. Pour la prise de la photo en vue de l’obtention de la carte Santé, Service Ontario offre aussi diverses mesures d’adaptation aux femmes musulmanes qui portent un voile, selon la nature de leur conviction sincère rattachée à la croyance[469].

Les considérations de santé, de sécurité et de coûts prévues au Code et les préoccupations de sécurité prévues à l’art. 1 de la Charte peuvent limiter l’obligation d’accommodement de la croyance au moyen d’une exemption de la prise de photo à des fins d’identification.

Exemple : En 2003, la province de l’Alberta a adopté de nouveaux règlements qui obligent tous les détenteurs d’un permis à se faire photographier, sans exception. Les photos devaient être versées dans une banque provinciale de données de reconnaissance faciale. Les membres des colonies huttérites, qui croient que le deuxième commandement leur interdit de se faire photographier volontairement, ont contesté la nouvelle loi devant les tribunaux. La Cour suprême a reconnu que l’obligation universelle de se faire photographier constituait une atteinte à la liberté de religion[470]. Cependant, la majorité des juges ont conclu que cette exigence était justifiée aux termes de l’art. 1 de la Charte.

10.5 Exemptions fondées sur la croyance

Dans les cas où une personne pourrait subir un préjudice en raison de sa croyance, l’obligation d’accommodement peut parfois obliger une organisation à exempter des personnes de la participation à des activités qui contreviendraient à leurs convictions ou pratiques rattachées à la croyance. Les exemptions sont un type de mesure d’adaptation.

Exemple : Un employeur a contrevenu au Code des droits de la personne de Terre-Neuve lorsqu’il a suspendu un employé qui avait refusé, pour des motifs religieux, de vendre des billets pour une activité sociale lors de laquelle serait vendu de l’alcool[471]. L’employé était un membre actif de l’Église pentecôtiste et affirmait qu’un précepte de sa foi voulait que ses membres s’abstiennent de consommer de l’alcool et d’en encourager la consommation de quelconque façon. Selon le tribunal de Terre-Neuve, lorsque l’employeur a pris connaissance des objections religieuses de l’employé, il aurait dû tenir compte de ses besoins en demandant à quelqu’un d’autre de vendre les billets, plutôt que de le suspendre.

En règle générale, les organisations devraient chercher en premier lieu une manière d’accommoder les convictions et pratiques rattachées à la croyance des gens à l’aide de la mesure d’adaptation qui favorise le plus leur intégration et pleine participation, à moins qu’elles puissent démontrer que la ségrégation ou l’exemption complète de l’activité est la meilleure façon d’assurer l’égalité dans les circonstances[472].

Exemple : Plutôt que devoir s’abstenir de participer à un programme artistique parascolaire administré par la ville, un élève à qui il n’est pas permis de dessiner ou de peindre des visages humains pour des motifs religieux obtient le droit d’employer la silhouette et (ou) le masque, ou d’appliquer des éléments graphiques de façon non représentative. Un autre enfant qui, pour des motifs religieux, n’a pas le droit d’inclure des symboles nationalistes à ses œuvres est encouragé plutôt à concevoir une œuvre qui reflète son appréciation d’un élément de la vie au Canada[473].

Les personnes qui sont exemptées de participer à une activité en raison de leur croyance ne devraient pas être pénalisées ou désavantagées, ou perdre des privilèges offerts aux autres, compte tenu de leur exemption. Le processus d’accommodement et les mesures d’adaptation prises doivent préserver la dignité et la vie privée de la personne en quête d’un accommodement[474].

L’accommodement d’une personne au moyen d’exemptions peut être limité si cela causerait un préjudice injustifié ou refusé si l’activité constitue une exigence de bonne foi. S’il peut être démontré que la participation à une activité est une exigence de bonne foi, l’organisation conserve l’obligation d’assurer l’accommodement jusqu’au point de préjudice injustifié (par exemple, en offrant à un employé une affectation de rechange ou en le mutant ailleurs dans l’organisation).

Exemple : Après être devenue témoin de Jéhovah, une infirmière de l’Ontario ne voulait plus exécuter certaines étapes d’une transfusion sanguine. Elle travaillait dans une unité de soins intensifs et, après des études bibliques intensives, a conclu qu’elle ne pouvait plus « suspendre du sang » en vue de transfusions sanguines[475]. Son employeur soutenait qu’il s’agissait de fonctions essentielles du personnel infirmier et l’a congédiée[476]. Une majorité des arbitres du conseil d’arbitrage en matière de travail a conclu que l’employeur aurait dû procéder à son accommodement, plutôt que de simplement la congédier, en lui offrant un poste dans une autre unité de l’hôpital où un autre membre du personnel infirmier aurait pu suspendre le sang[477]. Cependant, le conseil a également conclu que l’employeur n’était pas tenu de permettre à la femme de demeurer dans son poste actuel dans l’unité de soins intensifs (ou de travailler dans la salle des urgences) étant donné qu’il était raisonnablement nécessaire d’exiger que le personnel infirmier travaillant dans ces unités soit en mesure de suspendre du sang en cas d’urgence pour assurer la santé et la sécurité des patients de ces unités.

Au moment de procéder à un accommodement sous forme d’exemption, les organisations doivent aussi tenir compte des droits contradictoires des autres. Il peut ne pas être possible d’exempter une personne d’une activité qui contrevient à ses convictions rattachées à la croyance si cela nuit considérablement à l’exercice de droits contradictoires et (ou) entraîne un préjudice ou risque significatif.

Exemple : Un établissement médical procède à l’accommodement d’un médecin qui ne prescrit pas de contraceptifs oraux en raison de ses convictions rattachées à la croyance, tout en prenant en considération le droit contradictoire des patients à un accès égal à des services de santé. L’établissement prend des mesures proactives pour s’assurer que tout service non fourni par le médecin en question est offert par l’établissement aux patients qui en ont besoin. 

Les demandes d’exemption peuvent parfois être faites en milieu scolaire par des parents, élèves ou enseignants qui se préoccupent du contenu et des activités du programme d’études qui vont à l’encontre de leurs convictions ou sont jugés non appropriés pour des motifs liés à la croyance.

Le paragraphe 18(4) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques somme les États partis (dont le Canada) « à respecter la liberté des parents et, le cas échéant, des tuteurs légaux, de faire assurer l’éducation religieuse et morale de leurs enfants conformément à leurs propres convictions »[478]. La liberté de religion prévue aux termes de la Charte s’étend au droit des parents d’élever leurs enfants conformément à leurs propres convictions religieuses, sans coercition ou endoctrinement en matière d’éducation relativement à la religion, à la croyance ou à la moralité de leurs enfants[479].

L’obligation d’accommodement des besoins en matière de croyance d’une personne pourrait inclure l’offre d’exemptions de volets du programme d’études qui ont un effet préjudiciable sur certaines personnes en raison de leur croyance.

Exemple : Une école intègre des activités d’Halloween dans son programme d’études de l’automne. Les enfants participent à une parade costumée qui défile dans l’école. Les élèves qui ne célèbrent pas l’Halloween pour des motifs religieux sont exemptés de la parade et participent plutôt à des activités de rechange, toutes aussi agréables et éducatives, qui sont prévues pour éviter qu’ils ne se sentent pas isolés et exclus. 

Comme l’indique la section 7.4, il n’existe pas de droit général de ne pas être exposé aux points de vue et convictions qui contredisent les siens ou diffèrent de ceux-ci, y compris en matière de programmes d’études[480]

 « En tant que membres d’un corps scolaire hétérogène, les enfants y sont exposés tous les jours [à certaines dissonances cognitives] dans le système d’enseignement public. À l’heure des repas, ils voient leurs camarades de classe, et peut-être aussi leurs professeurs, manger des aliments qui leur sont interdits, que ce soit en raison des restrictions religieuses de leurs parents ou d’autres croyances morales. Ils voient leurs camarades porter des vêtements dont leurs parents désapprouvent les caractéristiques ou les marques. Et ils sont également témoins, dans la cour d’école, de comportements que leurs parents désapprouvent. La dissonance cognitive qui en résulte fait simplement partie de la vie dans une société diversifiée. Elle est également inhérente au processus de croissance. C’est à la faveur de telles expériences que les enfants se rendent compte que tous ne partagent pas les mêmes valeurs. On peut soutenir que l’exposition à certaines dissonances cognitives est nécessaire pour que les enfants apprennent ce qu’est la tolérance ». – Cour suprême du Canada[481]

Les décisions judiciaires prises jusqu’à présent laissent entendre que les parents qui souhaitent faire exempter leurs enfants de programmes d’études allant à l’encontre de leur croyance doivent démontrer comment l’exposition aux idées et points de vue véhiculés contrevient objectivement à la liberté de religion de leurs enfants, par exemple en :

  • nuisant à l’habileté des parents et des enfants de pratiquer, d’exprimer, d’observer ou de transmettre leur foi (y compris l’habileté des parents de transmettre leur foi à leurs enfants)
  • constituant de l’endoctrinement ou de la coercition en matière de croyance
  • créant un environnement inégal, par exemple en privilégiant ou en désavantageant une croyance par rapport à une autre, ce qui contrevient au principe de la neutralité et de la non-discrimination.

Exemple : La Cour suprême du Canada a rejeté l’allégation de certains parents du Québec selon laquelle l’exposition de leurs enfants à un nouveau cours portant sur une variété de traditions morales, religieuses et laïques nuirait à leur habileté à transmettre leur foi catholique à leurs enfants et causerait préjudice à ces derniers[482]. La Cour a confirmé que le gouvernement ne pouvait pas établir un système d’éducation qui favorisait une religion ou vision de la religion en particulier, ou y nuisait, et a reconnu le droit des parents d’élever leurs enfants dans leur propre foi sans coercition. Cependant, elle a aussi conclu que les requérants n’avaient pas démontré comment le programme faisait objectivement entrave au fait d’élever leurs enfants dans la foi catholique, et a rejeté l’allégation selon laquelle le programme n’était pas neutre et que le fait d’être exposé à une présentation exhaustive de convictions différentes entraînerait l’endoctrinement des élèves. Elle a également déterminé que l’exposition des enfants dès le plus jeune âge à différentes réalités est un fait de la vie au sein de la société canadienne multiculturelle, qu’on pourrait même qualifier de passage obligé pour apprendre aux enfants ce que la tolérance signifie vraiment.

Dans certaines situations, la participation à un programme, à un cours ou à un programme d’études peut constituer une exigence de bonne foi en vue d’atteindre des objectifs d’apprentissage requis et obtenir une reconnaissance ou un crédit. Dans un tel cas, les organisations devraient chercher à mettre en place des solutions de rechange permettant d’atteindre les objectifs d’apprentissage. Il n’est cependant pas toujours possible d’assurer l’accommodement des élèves afin qu’ils puissent atteindre ces objectifs d’une autre façon, sans créer de préjudice injustifié. Dans un tel cas, les élèves devraient continuer d’être traités avec dignité et respect.

10.6 Interdits alimentaires rattachés à la croyance

Certaines religions peuvent imposer des pratiques ou interdits sur le plan alimentaire à leurs adhérents. Les interdits alimentaires peuvent toucher la production, l’entreposage, la transformation, la manutention, le transport ou la consommation d’aliments. Les organisations doivent tenir compte des besoins sincères des personnes sur le plan alimentaire qui sont rattachés à la croyance, jusqu’au point de préjudice injustifié. Le non-accommodement de ces besoins peut contrevenir au droit d’une personne de jouir d’un accès et de possibilités égales en matière de logement, de services, d’emploi, de contrat ou d’adhésion à un syndicat ou à une association professionnelle.

Exemple : Une personne hospitalisée dans un centre de santé mentale a besoin de choix de repas végétariens en raison de sa croyance. On ne lui permet pas de quitter les lieux pour trouver de la nourriture appropriée, et elle n’est pas en mesure de préparer sa propre nourriture. L’établissement a l’obligation de procéder à l’accommodement des besoins sur le plan alimentaire de la personne jusqu’au point de préjudice injustifié en lui offrant des aliments appropriés pour lui permettre de demeurer dans l’établissement.

Exemple : Pour tenir compte des besoins des employés qui ne peuvent pas manipuler de produits du porc pour des motifs religieux, une usine de transformation des aliments affecte ces employés à des postes qui ne nécessitent pas la manipulation de tels aliments.

La meilleure façon de composer avec les interdits alimentaires rattachés à la croyance consiste à élaborer des choix de repas à l’avance, de façon à satisfaire équitablement les besoins sur le plan alimentaire rattachés à la croyance.

Les directives sur l’accommodement religieux du Conseil scolaire de district de la région de York (CSDRY) offre (au moment de rédiger cette politique) de nombreux exemples de mesures de conception inclusive traitant des interdits alimentaires rattachés à la croyance. Ces directives conseillent aux enseignants et au personnel de la cafétéria de porter attention aux interdits alimentaires, de prendre soin de garder les aliments végétariens et non végétariens dans des endroits séparés, et de s’assurer d’utiliser pour chacun des cuillères et ustensiles de service différents. Elles leur conseillent également de bien étiqueter les aliments et goûters préparés au moyen de sous-produits animaux (p. ex. lard et suif de bœuf) et de ne pas en servir aux élèves qui ne peuvent pas consommer de tels aliments pour des motifs religieux. Le CSDRY conseille aussi aux enseignants et aux écoles de songer à mettre à la disposition des élèves des aliments et goûters du commerce dont l’emballage porte un sceau fiable de certification halal ou casher, dans la mesure du possible. Il encourage aussi les enseignants ou les écoles à modifier leurs goûters, journées pizza, fêtes foraines et programmes de repas afin de tenir compte des interdits alimentaires religieux (et autres) des élèves.

Les adhérents à une même croyance peuvent se soumettre de différentes façons et à différents degrés aux interdits alimentaires rattachés à leur croyance. Les organisations ont l’obligation d’assurer l’accommodement de la conviction sincère rattachée à la croyance de la personne. Elles doivent donc s’informer de la nature précise des besoins des personnes qui affirment avoir des interdits alimentaires rattachés à la croyance, afin d’éviter de se fier à des idées préconçues ou des généralisations à propos de la nature de ces interdits.

L’obligation d’accommodement pourrait ne pas s’appliquer aux situations qui changeraient la nature intrinsèque des services d’une organisation.

Exemple : Un restaurant spécialisé dans les grillades qui sert uniquement des produits animaliers et n’offre pas de mesures d’adaptation aux clients végétariens ne fait pas de discrimination. L’offre d’un menu composé de produits animaliers peut être considérée comme faisant partie de la nature intrinsèque du service offert par le restaurant de grillades. Cependant, un restaurant qui offre déjà des choix alimentaires végétariens peut être tenu d’assurer l’accommodement d’un client qui doit suivre un régime alimentaire végétarien en raison de sa croyance en préparant le repas végétarien de cette personne à l’aide d’ustensiles propres, qui ne contiennent aucune trace de viande, à moins de pouvoir démontrer que cela entraîne un préjudice injustifié.

S’il peut être établi que l’organisation a une obligation d’accommodement des besoins d’une personne, l’organisation a également l’obligation d’assumer les coûts des mesures d’adaptation mises en place.

Exemple : Une locataire juive habitant dans un logement avec services de soutien de 10 locataires se soumet aux lois relatives à l’alimentation casher, lesquelles ne lui permettent pas d’accompagner un repas de viande d’un verre de lait, ou d’entreposer, de préparer ou de servir du lait et des viandes en même temps. En raison des frais exorbitant que la locataire juive serait tenue d’assumer en achetant des repas de commerce cashers déjà cuits pour satisfaire ses besoins, le fournisseur de logements achète un second réfrigérateur de petite taille, ainsi que des casseroles, des assiettes et des ustensiles pour lui permettre d’acheter et de préparer ses propres aliments, comme le font les autres locataires.

Les organisations qui prévoient des mesures d’adaptation pour tenir compte des interdits alimentaires devraient offrir des aliments qui ont une valeur nutritive comparable à celle des aliments offerts aux autres[483]. Elles devraient également s’assurer de traiter de façon égale les personnes qui ont besoin de mesures d’adaptation[484].

10.6.1 Jeûne

Les adhérents à certaines croyances sont tenus de jeûner ou de s’abstenir de consommer des aliments à certains moments. Lorsque ce genre d’exigence nuit à la capacité d’une personne d’exécuter une tâche ou de respecter quelconque règle ou horaire de travail, des adhérents à une croyance peuvent subir un effet préjudiciable. 

Les organisations ont une obligation d’accommodement des observances sincères rattachées à la croyance de leurs employés, usagers de services ou locataires, y compris le jeûne, jusqu’au point de préjudice injustifié.

Exemple : Durant le mois de Ramadan, certains musulmans s’abstiennent de manger ou de boire avant le lever du soleil jusqu’à son coucher. Certains s’adonnent aussi à de longues prières durant la nuit. Ces prières, jumelées au jeûne et à la consommation de repas avant le lever du soleil, peuvent avoir un effet physique sur la personne. Les personnes qui se soumettent au jeûne du Ramadan peuvent devoir rajuster leur horaire pour observer le début et la fin du jeûne au lever et au coucher du soleil, et (ou) pour se soumettre aux prières de nuit. Par exemple, dans la mesure du possible, les employeurs pourraient permettre à leurs employés qui jeûnent de travailler durant l’heure du dîner pour pouvoir quitter tôt en soirée et se rendre à la maison en temps pour interrompre le jeûne au coucher du soleil.

L’interprétation et la pratique du jeûne peuvent varier d’une personne à l’autre, tout comme l’effet du jeûne sur leur vie et les mesures d’adaptation dont elles peuvent avoir besoin.

L’observance du jeûne peut parfois s’avérer exigeante sur le plan de la santé physique et mentale. Le jeûne peut également coïncider avec d’autres formes d’observance religieuse intensive, qui ont un effet sur la santé physique. Selon la personne, sa constitution physique et son interprétation sincère des exigences de sa foi, le jeûne peut plus ou moins nuire à la capacité de s’adonner à des activités exigeantes sur le plan physique et mental. Les fournisseurs de mesures d’adaptation peuvent s’informer du niveau de flexibilité de la conviction de la personne sur le plan de l’observance du jeûne[485].

Lorsque le jeûne a un effet préjudiciable sur la capacité d’une personne d’exécuter une tâche ou une fonction, ou de se conformer à une norme, pratique ou exigence, les organisations ont une obligation d’accommodement jusqu’au point de préjudice injustifié, à moins de pouvoir démontrer que la règle ou l’activité constitue une exigence de bonne foi. Les mesures d’adaptation mises en place devraient répondre aux besoins individuels en matière d’accommodement, qui peuvent varier d’une personne à l’autre. Lorsque la pratique rattachée à la croyance d’une personne a un effet sur un handicap préexistant, l’obligation d’accommodement jusqu’au point de préjudice injustifié peut être fondé sur les motifs combinés de la croyance et du handicap (voir la section 7.6.3).

Comme c’est le cas pour toutes les situations d’accommodement, la meilleure approche consiste à anticiper les besoins en matière d’accommodement de la croyance à l’avance, au moyen d’une conception inclusive.

Exemple : Une école met un espace séparé (p. ex. la bibliothèque) à la disposition des élèves qui observent le jeûne dans le cadre de leur croyance afin qu’ils puissent éviter la cafétéria sur l’heure du lunch. L’école évite d’organiser des événements de soirée ou articulés autour de la consommation de nourriture (p. ex. journées pizza, voyages scolaires) si un nombre considérable d’élèves observent le jeûne. Elle exempte aussi les élèves qui observent le jeûne des activités physiques exigeantes et tente de convoquer les examens à des périodes de l’année où la plupart des élèves ne jeûnent pas. Si cette dernière mesure est impraticable, elle convoque les examens tôt le matin et permet aux élèves qui jeûnent de les reporter à un moment où ils ne jeûnent pas. De plus, afin d’assurer l’accommodement des élèves, l’école s’efforce de sensibiliser davantage la population étudiante et le personnel au jeûne, pour aider à dissiper tout malentendu[486].


[412] [O’Malley]supra, note 74.

[413] Smith v. Network Technical Services Inc., 2013 HRTO 1880 (CanLII), au par. 19, explique l’obligation qu’a l’employeur de tenir compte des besoins de s’absenter des employés pour l’observance de pratiques religieuses sans encourir de pertes d’heures de travail régulières ou de salaire en vue :

Dans l’arrêt Markovic v. Autocom Manufacturing Ltd., 2008 HRTO 64 (CanLII), le tribunal affirme :

« Parfois, les exigences de l’emploi entrent en conflit avec la capacité des employés de pratiquer leur religion, souvent en raison de l’établissement d’horaires de travail qui, bien qu’ils aient été adoptés pour des motifs d’affaires valides, nuisent involontairement à l’observance de pratiques religieuses. La jurisprudence abonde de décisions de tribunaux administratifs et judiciaires traitant de la conciliation des exigences d’emploi et de la liberté de pratiquer sa religion. Il y a de nombreuses années, la Cour suprême du Canada, dans Commission canadienne des droits de la personne c. Simpsons-Sears, 1985 CanLII 18 (SCC), [1985] 2 R.C.S. 536 [Simpsons-Sears], a déterminé que l’employeur avait l’obligation de prendre des mesures raisonnables pour tenir compte des besoins d’un employé incapable, en raison de convictions religieuses, de respecter l’horaire de travail établi. L’obligation d’accommodement exige qu’un employeur examine les façons de tenir compte des besoins du demandeur de s’absenter pour des motifs religieux. Cette obligation peut donc exiger que l’employeur rajuste les fonctions du demandeur afin de lui permettre d’accumuler les heures de travail qui seraient autrement à sa disposition s’il n’avait pas besoin de s’absenter pour des motifs religieux. L’objectif doit être de donner au demandeur la possibilité d’accumuler la totalité de ses heures de travail, sans porter entrave à ses convictions religieuses, que l’accommodement sans préjudice injustifié prenne la forme d’affectation de tâches compensatoires ou d’autres réaménagements de l’horaire »

[414] En Ontario, la Loi de 2000 sur les normes d'emploi, L.O. 2000, chap. 41, prévoit diverses options concernant le travail et le droit à une rémunération de jour férié. Elle prévoit la majoration du salaire des employés qui travaillent les jours fériés. Si les dispositions du Code et de la Loi sur les normes d’emploi sont contradictoires, cependant, le Code devrait avoir préséance en raison de son statut quasi-constitutionnel.

[415] Shapiro v. Peel (Regional Municipality)(No. 2) (1997), 30 C.H.R.R. D/172 (Ont. Bd. Inq.). Le fait que l’employeur insiste pour que Mme Shapiro utilise des jours de vacances ou des congés compensatoires, ou qu’elle prenne un congé sans solde pour des fêtes juives était discriminatoire. La proposition de Mme Shapiro de travailler des heures supplémentaires pour compenser était raisonnable et aurait pu être acceptée sans entraîner de préjudice injustifié. Le fait que le temps supplémentaire n’était pas offert à tous les employés n’est pas pertinent puisque les mesures d’adaptation sont fondées sur une évaluation individualisée et qu’il n’est pas nécessaire d’offrir la même mesure d’adaptation à tous les employés.

[416] De cette façon, les membres des communautés de croyance minoritaires ne risquent pas de faire l’objet d’un traitement préjudiciable ou d’un désavantage injuste en raison de leur religion ou de leur croyance, en étant forcés d’utiliser les jours de vacances prévus dans leurs avantages sociaux pour l’observance des fêtes religieuses, tandis qu’on reconnaît aux fêtes religieuses des membres de groupes religieux dominants le statut de congés fériés.

[417] Chambly (Commission scholaire régionale) c. Bergevin, [1994] 2 R.C.S. 525.

[418]Par exemple, dans Koroll v. Automodular Corp., 2011 HRTO 774 (CanLII), un membre de l’Église du Dieu vivant a allégué que son employeur avait porté atteinte à ses droits en ne lui donnant pas de congé payé pour observer les sabbats annuels. Le TDPO a adopté la même position que dans l’affaire Markovic v. Autocom Manufacturing Ltd. (2008), supra, note 413, et a rejeté la prétention du requérant selon laquelle il avait automatiquement droit à des congés payés pour les fêtes religieuses. Dans l’affaire Markovic, le TDPO s’est penché sur le cas d’un employeur n’ayant pas offert à un employé le nombre (2) de jours de congé payés correspondant à ceux prévus pour les fêtes religieuses chrétiennes. La politique de l’employeur offrait plutôt une gamme de mesures d’adaptation, comprenant la possibilité de reprendre le temps, de changer de quart avec un autre employé, de travailler un jour férié laïque lorsque l’entreprise est ouverte (sous réserve de la Loi sur les normes de travail), de réaménager l’horaire des quarts, d’utiliser des jours de vacances ou de prendre un congé sans solde. Selon M. Markovic le refus d’Autocom de lui accorder un congé payé pour célébrer la fête de Noël selon le rite de l’Église orthodoxe serbe était discriminatoire. Le TDPO a conclu qu’en offrant un processus permettant aux employés de prendre des dispositions pour avoir congé afin d’observer des fêtes religieuses au moyen d’options d’aménagement de leur horaire, sans perte de salaire, l’employeur avait établi une politique appropriée et non discriminatoire. Le TDPO a indiqué :

[L]’obligation de l’employeur consiste à concevoir des normes relatives au milieu de travail qui reconnaissent les différences sur le plan religieux de ses divers employés, et tiennent compte de ces différences. Sa tâche consiste à inclure les besoins d’un effectif diversifié aux règles du milieu de travail dans le but d’accroître la participation et l’inclusion. Dans le cas des observances religieuses, il est possible d’atteindre ces objectifs en permettant la modification de l’horaire de travail sans perte de salaire (au par. 47).

Le TDPO a fait la distinction avec l’arrêt de la Cour suprême dans l’affaire Chambly parce que la modification de l’horaire n’était pas possible dans cette situation en raison de la nature du milieu de travail et que, même si la convention collective permettait trois jours de congés spéciaux payés, l’employeur avait pris pour position qu’ils ne pouvaient pas être utilisés à des fins d’observance religieuse. Cependant, le TDPO a observé qu’il pourrait y avoir des personnes pour lesquelles aucune des options d’aménagement de l’horaire ne pourrait convenir et que, en pareille situation, il faudrait explorer d’autres mesures d’adaptation.

[419] Ontario (Ministry of Community and Social Services) v. Grievance Settlement Board (2000), 50 O.R. (3d) 560 (C.A.).

[420] Idem. Les options de réaménagement de l’horaire prévues dans la politique ont été jugées « une mesure d’adaptation viable pour les employés qui avaient besoin de congés supplémentaires au-delà des deux jours déjà prévus. Cela leur permet de planifier l’accumulation des heures de travail qui leur sont affectées d’une façon qui ne les oblige pas à choisir entre, d’une part, la perte de salaire ou l’utilisation de leurs acquis existants [c’est-à-dire des jours de vacances], et de l’autre, l’observance de leurs fêtes religieuses sacrées ». Le tribunal a aussi noté que dans Chambly, la Cour suprême a trouvé significatif qu’il serait impossible pour un enseignant de reprendre un congé utilisé pour observer une fête religieuse en travaillant un jour de plus. Elle a donc conclu que les employeurs pouvaient satisfaire à leur obligation d’accommodement en offrant un réaménagement approprié de l’horaire de travail, sans devoir au préalable prouver que le fait d’accorder un congé payé entraînerait un préjudice injustifié de nature économique ou autre.

[421] Koroll v. Automodular Corp., supra, note 418. Le TDPO a accordé 2 000 $ en dommages-intérêts pour atteinte à la dignité et à la fierté, et a ordonné à l’intimé de réviser son programme de reconnaissance de l’assiduité pour enlever l’effet discriminatoire qu’il a sur les employés qui ont des convictions religieuses exigeant qu’ils s’absentent du travail.

[422] Janssen v. Ontario (Milk Marketing Bd.) (1990), 13 C.H.R.R. D/397 (Ont. Bd.Inq.).

[423] Voir la section 9.5.1.

[424] Voir la section 9.3.2 pour en savoir davantage sur le besoin d’adopter une approche individualisée. Voir la section 9.5.3. pour en savoir davantage sur le besoin d’accommodement des convictions sincères individuelles.

[425] Voir la section 9.6 pour en savoir davantage sur les renseignements qui pourraient être exigés et les formes appropriées de demandes d’information.

[426] Voir la section 9.6. Il pourrait être davantage nécessaire d’obtenir des renseignements additionnels dans le cas de demandes d’accommodement de croyances peu connues (voir York Region District School Board v. Ontario Secondary School Teachers’ Federation, District 16 (Faith Day Grievance)supra, note 329. Un des exemples de la section 10.1 aborde cette affaire.

[427] Idem. Dans cette affaire, le syndicat du district 16 de la FEESO a déposé un grief relatif à une politique au nom d’un membre qui allègue que la mise en application, par l’employeur, des dispositions sur les fêtes confessionnelles prévues dans la convention collective contrevenait au Code, entre autres. Selon l’arbitre du travail, tout employé qui a une conviction sincère pouvant être liée à une religion et qui croit honnêtement devoir, en raison d’une exigence de la foi ou d’une coutume, observer une fête religieuse devrait être jugé admissible à un congé pour motifs religieux, que cette fête religieuse soit ou non incluse dans la liste de fêtes confessionnelles connues du conseil. De plus, il n’est pas nécessaire que la conviction de l’employé s’appuie sur les dogmes officiels ou la position des autorités religieuses pour que la demande de congé soit légitime. En même temps, l’arbitre a indiqué que l’employeur n’était pas tenu d’« accepter aveuglément » les demandes de congés de plusieurs journées pour motifs religieux quand les adeptes de la foi du demandeur ne sont pas généralement requis d’éviter de travailler. L’arbitre a mentionné qu’un requérant était toute de même tenu de faire la preuve de sa prétention de droit, même si les convictions religieuses des personnes peuvent être personnelles et privées.

[428] Pour obtenir plus d’information, voir The Multifaith Information Manual, Conseil multiconfessionnel ontarien des services spirituels et religieux, 2000.

[429] Source : Directives sur l’accommodement religieux de 2014 du Conseil scolaire de district de la région de York supra, note 280, élaboré en consultation avec le Conseil multiconfessionnel ontarien des services spirituels et religieux.

[430] Cet exemple est basé sur les directives sur l’accommodement religieux de 2014 du Conseil scolaire de district de la région de York, supra, note 280.

[431] Voir la section 10.1 pour en savoir davantage sur les situations d’observances de la croyance nécessitant de longues absences.

[432] Lorsque l’accommodement d’un droit aux termes du Code contrevient à un règlement ou à une loi de la province, comme la Loi sur les normes d’emploi, L.O. 2000, le Code a préséance et l’emporte, à moins que la loi en indique autrement (article 47 du Code).

[433] Pour obtenir un complément d’information, voir la section 9.10.2 et la Politique sur les droits de la personne contradictoires de la CODP. Les facteurs à considérer incluent (sans s’y limiter) l’évaluation de la portée de l’entrave à la conviction ou la pratique rattachée à la croyance, le cas échéant, le lien entre l’entrave et un droit protégé par le Code, et le type d’entrave, c’est-à-dire si elle touche un élément fondamental ou périphérique du droit. Les organisations peuvent aussi tenir compte du niveau de souplesse de la pratique rattachée à la croyance par rapport à son observance (p. ex. de la mesure dans laquelle elle doit être observée à un moment précis).

[434] Comme il est mentionné précédémment, la Cour suprême du Canada a reconnu les dimensions communautaires et collectives de l’expression de la religion dans plusieurs de ses jugements (plus récemment dans Loyola, supra, note 8, au par. 60).

[435] Voir la section 9.1. pour en savoir davantage sur le principe de conception inclusive.

[436] Dans certaines circonstances, d’autres mesures d’adaptation pourraient satisfaire aussi bien des besoins individuels sur le plan religieux tout en représentant un fardeau moindre pour chacune des parties et en ne créant pas de préjudice injustifié. Si on a le choix entre deux mesures d’adaptation qui comblent les besoins de la personne en matière d’accommodement et respectent tout autant sa dignité, le fournisseur de la mesure d’adaptation peut choisir la solution la moins coûteuse ou celle qui entraîne le moins de perturbation pour l’organisme.

[437] Cela est conforme aux principes de neutralité de l’état et de non-ingérence en matière de conviction, de doctrine et de pratique religieuses. La Cour suprême du Canada a indiqué dans Amselemsupra, note 5 que le fait de « [s]tatuer sur des différends théologiques ou religieux ou sur des questions litigieuses touchant la doctrine religieuse amènerait les tribunaux à s’empêtrer sans justification dans le domaine de la religion ». Cependant, les organisations ne doivent pas étendre la protection du Code aux pratiques et observances qui sont haîneuses, incitent à la haîne ou à la violence à l’endroit d’autres personnes ou groupes, ou contreviennent au droit criminel (voir la section 4.2).

[438] Singh (Ishar) v. Security and Investigation Services Ltd., Commission d’enquête sur les droits de la personne de l’Ontario, décision non publiée du 31 mai 1977.

[439] Voir la section 9.9.3 pour obtenir plus de renseignements sur les considérations relatives à la santé et à la sécurité.

[440] Directives sur l’accommodement religieux du Conseil scolaire de district de la région de York (tableau d’exemples de mesures d’adaptation en lien avec le programme d’études), supra, note 280.

[441] Voir Saadi v. Audmaxsupra, note 331.

[442] Voir la section 9.9.3 pour obtenir plus de renseignements sur les considérations relatives à la santé et à la sécurité.

[443] Supra, note 352.

[444] Pannu v. British Columbia (Worker’s Compensation Board) (No. 2) [2000], 38 C.H.R.R. D/494, 2000 BCHRT 56. Il importe cependant de souligner que, dans cette affaire, l’employeur avait activement cherché d’autres fonctions pour le requérant. La question en litige était de savoir s’il avait droit à une mesure d’adaptation dans le cadre de son poste d’opérateur en caustification particulier.

[445] Loomba v. Home Depot Canada 2010 HRTO 1434 (CanLII). La CODP a scindé la cause, mais en fin de compte n’a pas rendu de jugement sur le second aspect de l’affaire, soit la relation entre l’obligation d’accommodement du Code et les exigences de sécurité de la Loi sur la santé et la sécurité au travail.

[446] Le mot Kirpan signifie miséricorde ou grâce. L’information fournie ici est adaptée de www.worldsikh.org/what_is_the_kirpan (extrait le 20 juin 2015).

[447] Voir Pandori v. Peel Board of Education (1990), 12 C.H.R.R. D/364, confirmé dans (1991), 3 O.R. (3d) 531 (Ont. Div. Ct.), autorisation d’appel à la Cour d’appel refusée.

[448] Idem.

[449] Multani, supra, note 183.

[450] Idem. Pour un complément d’information sur l’obligation d’accommodement du kirpan, voir la section 10.2.1.

[451] Idem.

[452] (1999), 36 C.H.R.R. D/76 (Can. Trib.). Un homme sikh a témoigné du fait que le port d’un type particulier de kirpan plutôt que d’un autre était affaire de préférence personnelle et non de conviction religieuse.

[453] Il est à noter que cette affaire a été tranchée avant que des règles de sécurité encore plus strictes ne soient entrées en vigueur à la suite des événements du 11 septembre.

[454] Dans R. v. Hothi (1985), [1985] 3 W.W.R. 256 (Man. Q.B.), confirmé dans [1986] 3 W.W.R. 671 (Man. C.A.), un tribunal du Manitoba a maintenu la décision d’un juge interdisant le port du kirpan dans une salle d’audience. Cependant, le juge dans cette affaire entendait une cause où le prévenu était accusé de voies de fait. Des développements plus récents ont fait de cette décision une exception à la règle. Par exemple, une entente conclue en 2012 entre la Commission ontarienne des droits de la personne, les services de police de Toronto, le Conseil de services policiers de Toronto et le ministère du Procureur général permet aux personnes de confession sikhe de porter le kirpan dans toutes les aires publiques des palais de justice de Toronto. Cependant, une nouvelle procédure de sécurité dans les salles d’audience prévoit une certaine discrétion pour assurer la sécurité publique. Cela inclut la conduite d’évaluations individualisées des risques portant sur des facteurs comme la raison pour laquelle la personne est présente, le type de cause entendu et tout modèle notable de comportements précédents pouvant occasionner une menace de violence. D’autres services de police et organismes de maintien de la paix dans les palais de justice ont suivi le pas en adoptant des politiques qui permettent aux gens de porter le Kirpan dans les salles d’audience, y compris à Windsor et en Colombie-Britannique.

[455] Voir la section 9.11.6.

[456] Cela est particulièrement le cas quand le port ou l’affichage d’un symbole religieux découle du respect, par l’organisation, de l’obligation d’accommodement d’une personne.

[457]Grant c. Canada (Procureur général), [1995] 1 CF 158.

[458] Clipperton-Boyersupra, note 284. Dans cette décision, la CODP a conclu (s’inspirant de la décision de la Cour suprême dans Amselemsupra, note 5, au par. 69) que « pour bénéficier de la protection du Code contre la discrimination fondée sur la croyance, le requérant doit démontrer qu’il croit sincèrement qu’une certaine pratique ou conviction possède, suivant son expérience, une nature religieuse, en ce :

  1. qu’elle est objectivement prescrite par la religion
  2. qu’il croit subjectivement que la religion le prescrit ou
  3. qu’il croit sincèrement que la pratique crée un lien personnel subjectif avec l’ordre divin ou avec le sujet ou l’objet de sa foi spirituelle, dans la mesure où la pratique en question est liée à la religion » (par. 16).

[459] Par exemple, Il y a une différence entre le fait, pour une organisation, d’afficher un symbole lié à une croyance et celui, pour une personne, en sa qualité personnelle, d’afficher un symbole par suite d’un besoin d’accommodement.

[460] Par exemple, le fait d’afficher un symbole lié à une croyance bien en vue dans un endroit caractérisé par l’interaction fréquente de personnes, comme le hall principal, la salle de conférence ou la réception d’une organisation, peut soulever des questions et préoccupations diverses qui n’interviendraient pas si le symbole était affiché dans un endroit davantage privé, comme le poste de travail d’un employé, où on serait moins susceptible de l’associer à l’organisation dans son ensemble.

[461] Par exemple, aux termes de l’al. 2(a) de la Charte, les organisations d’État ont un devoir de neutralité auquel elles pourraient contrevenir si elles professaient, adoptaient ou favorisaient une conviction à l’exclusion des autres, sans bénéficier d’exemption aux termes de la loi (Saguenaysupra, note 41, au par. 83).

[462] Par exemple, un symbole pourrait empoisonner l’environnement d’autres groupes protégés aux termes du Code, ou ne pas bénéficier de protection aux termes du Code parce qu’il véhicule un message de haine (per section 4.2).

[463] Bien qu’elle reconnaisse dans Saguenay « que l’on trouve dans le paysage culturel canadien de nombreuses pratiques traditionnelles et patrimoniales à caractère religieux [et] que ce ne sont pas toutes ces manifestations culturelles qui violent l’obligation de neutralité de l’État », la Cour suprême du Canada met également en garde contre le fait de pousser ce principe trop loin. Le patrimoine culturel ne saurait excuser l’instrumentalisation par l’État d’une pratique discriminatoire à des fins religieuses. C’est ce qui caractérise la prière de la Ville (supra, note 41, au par.116).

[464] Le fait d’être exposé à des symboles liés à une croyance en contexte d’emploi, de services, d’installations ou de logement ne pourra généralement pas être jugé, à lui seul, de la pression à caractère religieux (voir la section 7.4).

[465] Jones v. C.H.E. Pharmacy Inc. (2001), 39 C.H.R.R. D/93, 2001 BCHRT 1. Le tribunal a ordonné à l’intimé de payer à l’employé des dommages-intérêts pour la perte de salaire et d’avantages sociaux ainsi que pour l’atteinte à sa dignité et à son respect de soi.

[466] 407 ETR Concession Company v. National Automobile, Aerospace, Transportation and General Workers Union of Canada, CAW-Canada, 2007 CanLII 1857 (ON LA).

[467] Voir la section 9.5.2.

[468] Bien que certains mennonites ne s’opposent pas à la prise de photos, bon nombre de mennonites orthodoxes ou plus âgés le font. Ces personnes bénéficient d’une exemption générale et n’ont pas besoin de se soumettre au processus d’examen de l’admissibilité à l’Assurance-santé. Une simple lettre des autorités religieuses de leur communauté permet de les exempter de la prise de photos.

[469] Par exemple, les femmes musulmanes qui ont besoin d’accommodement peuvent prendre la photo dans un endroit privé à la fin de la journée quand peu de personnes sont présentes, ou être accompagnée dans une salle privée où une femme, membre du personnel, prendra la photo, comblant ainsi leur besoin d’accommodement.

[470] Hutterian Brethren, supra, note 106.

[471] Warford v. Carbonear General Hospital (1988), 9 C.H.R.R. D/4947 (Nfld. Comm. Inq.).

[472] Voir la section 9.3.3.

[473] Exemple adapté des directives sur l’accommodement religieux de 2014 du Conseil scolaire de district de la région de York (Tableau d’exemples de mesures d’adaptation en lien avec le programme d’études), supra, note 280.

[474] Cela inclut le fait de veiller à ce que les renseignements qui se rapportent à l’accommodement de la croyance d’une personne soient uniquement mis à la disposition des personnes qui en ont besoin pour mettre en œuvre et fournir les mesures d’adaptation requises (voir la section 9.4).

[475] Re Peterborough Civic Hospital and Ontario Nurses’ Association, [1981] O.L.A.A. No. 97, 3 L.A.C. (3d) 21 [QL].

[476] L’infirmière acceptait d’exécuter de nombreuses autres étapes de la procédure : consigner les signes vitaux du patient, insérer l’aiguille de transfusion, faire couler la solution saline dans la veine, commander le sang du laboratoire et l’apporter à la chambre du patient, entrer les données au registre et effectuer les vérifications requises. Elle n’était pas disposée à « suspendre le sang », ce qui consiste à ouvrir le sac contenant le sang, à y insérer le tube de transfusion, à fermer la valve de solution saline, à ouvrir la valve de sang et à accrocher le sac au support de transfusion.

[477]Le conseil a déterminé qu’il n’était pas nécessaire que tous les membres du personnel infirmier de l’hôpital soit en mesure du suspendre du sang (d’ailleurs, 15 % n’étaient pas qualifiés pour le faire). Comme les règles exigeaient qu’il y ait toujours deux infirmières présentes auprès d’un patient qui nécessitait une transfusion, il y avait toujours une autre personne qui pouvait suspendre le sang.

[478] L’article 26 de la Déclaration universelle des droits de l’homme des Nations Unies, de laquelle le Canada est signataire, affirme également :

2. L'éducation doit viser au plein épanouissement de la personnalité humaine et au renforcement du respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle doit favoriser la compréhension, la tolérance et l'amitié entre toutes les nations et tous les groupes raciaux ou religieux, ainsi que le développement des activités des Nations Unies pour le maintien de la paix.

3. Les parents ont, par priorité, le droit de choisir le genre d'éducation à donner à leurs enfants [nous soulignons].

[479] Voir les décisions de la Cour suprême dans Loyola (supra, note 8) et S.L. (supra, note 153). Voir également l’arrêt B. (R.) c. Children’s Aid Societysupra, note 384, dans laquelle la Cour suprême a conclu que la liberté de religion s’étend aux droit des parents d’élever leurs enfants conformément à leurs convictions religieuses.

[480] Voir La décision de la Cour suprême dans Loyola, idem, S.L., idem, et Chamberlainsupra, note 168.

[481] Chamberlain, idem, aux par. 65-66; cité dans S.L., idem, au par. 39.

[482] S.L., idem.

[483] Par exemple, une organisation demande des renseignements sur des restrictions alimentaires rattachées à la croyance et autres besoins en matière d’accommodement lorsqu’elle envoie des invitations à ses activités, afin de pouvoir prévoir des mesures d’adaptation appropriées à l’avance. Si de la viande est offerte, l’organisation s’efforce d’offrir des choix de viande qui respectent les restrictions alimentaires à caractère religieux (qui lui sont communiquées à l’avance). Un choix de repas nutritif équivalent est offert aux personnes qui suivent un régime végétarien en raison de leur croyance. Cela permet à toutes les personnes intéressées de participer aux activités de l’organisation de façon inclusive et efficace.

[484] Par exemple, une entreprise de haute technologie exige que ses employés prennent part à des réunions hebdomadaires tenues à l’heure du lunch et financées par la haute direction. Elle offre des choix de repas qui conviennent aux personnes ayant des allergies alimentaires (p. ex. sans gluten et végétalien) mais refuse de tenir compte des restrictions alimentaires à caractère religieux. Selon l’entreprise, la religion relève d’un choix, contrairement aux allergies alimentaires. Même si les membres du personnel adhérant à une religion peuvent combler leurs besoins alimentaires par leur propre moyen (p. ex apporter de la nourriture appropriée de la maison), l’organisation peut être reconnue coupable de discrimination en omettant de tenir compte de leurs besoins et en les traitant de façon inéquitable en raison d’une hiérarchisation inappropriée des motifs de discrimination interdits (c’est-à-dire l’accommodement d’un handicap mais non de la croyance).

[485] Par exemple, les règles d’une croyance peuvent permettre à une personne de se soustraire aux pratiques de jeûne habituelles dans certaines situations, comme lorsqu’elle doit effectuer un travail manuel exigeant dans le cadre de son travail. Si la conviction sincère de la personne permet de faire une telle exception, qui aurait davantage de répercussions négatives sur son travail, cette personne pourrait être tenue de ne pas observer la pratique du jeûne ou de la modifier, pourvu que cela ne porte pas atteinte à ses convictions sincères rattachées à la croyance.

[486] Adapté des directives sur l’accommodement religieux de 2014 du Conseil scolaire de district de la région de York, supra, note 280, dans ce dernier cas.

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