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Lettre à l’honorable Sylvia Jones sur la transmission de la COVID-19 dans les établissements correctionnels

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Le 17 mars 2020

L’honorable Sylvia Jones
Ministère du Solliciteur général
18e étage, édifice George Drew
25, rue Grosvenor
Toronto ON  M7A 1Y6

Madame la Solliciteure générale,

OBJET : COVID-19 – Services correctionnels et droits de la personne

J’espère que votre famille et vous êtes en sécurité malgré la situation difficile soulevée par la COVID-19. 

Comme vous le savez peut-être, la Commission ontarienne des droits de la personne a récemment publié un énoncé de politique sur le respect des droits de la personne durant la pandémie de COVID-19. Je vous écris aujourd’hui au nom de la CODP pour vous fournir des conseils sur les mesures que peut prendre le gouvernement afin de fonder sur une perspective de droits de la personne les efforts déployés pour réduire la transmission de la COVID-19 dans les établissements correctionnels et centres de détention de l’Ontario.

La CODP vous félicite d’avoir pris des mesures pour permettre aux détenus intermittents de demeurer au sein de la collectivité. La CODP est consciente que le ministère du Solliciteur général (SOLGEN) travaille fort pour gérer cette situation en constante évolution et a aimé collaborer à ce dossier avec les membres de son personnel et de sa direction, y compris la sous-ministre adjointe Suzanne McGurn.

Compte tenu de cette collaboration, la CODP demande au gouvernement de prendre des mesures additionnelles pour aider à réduire la transmission de la COVID-19, comme l’ont recommandé avec urgence les experts des questions pénitentiaires, y compris l’organisme Penal Reform International (PRI) et le Vera Institute for Justice, et l’ont fait d’autres territoires comparables à l’Ontario. Ces mesures incluent ce qui suit :

  • Plus grande transparence et communication
  • Soutien aux rapports familiaux
  • Allègement de la surpopulation carcérale
  • Collecte de données

Nous encourageons le SOLGEN à prendre les mesures ci-après, qui reposent sur une approche de gestion de la COVID-19 axée sur la santé publique plutôt que sur le risque et comprennent l’allègement de la surpopulation carcérale.

Transparence et communication

L’adoption d’une approche axée sur la santé publique inclut la communication transparente des plans d’intervention d’urgence existants et leur examen et approbation par les responsables de la santé publique avant leur adoption définitive. De plus, le SOLGEN devrait veiller à ce que de l’information sur la santé publique et des lignes directrices à jour et pertinentes sur les protocoles à suivre soient diffusées à grande échelle au personnel et aux détenus. Les responsables de la santé publique pourraient se charger de transmettre l’information pertinente aux employés et détenus pour faire en sorte qu’elle soit jugée à jour et objective. Le SOLGEN devrait également installer les détenus atteints ou soupçonnés d’être atteints de la COVID-19 dans des unités d’isolement, et installer de façon proactive dans des unités séparées les détenus qui sont vulnérables ou qui courent un risque élevé de subir des conséquences négatives de la COVID-19.

Rapports familiaux

Bien qu’il puisse être légitime d’imposer des restrictions aux visites avec et sans contact des personnes en détention pour prévenir les éclosions de COVID-19, l’organisme PRI fait remarquer que les administrations qui prennent ce genre de mesures doivent disposer d’une politique de prise de décisions exhaustive et transparente. Toute restriction imposée doit être proportionnelle à l’objectif de prévention (ou de gestion) d’une éclosion. Les visites avec contact doivent être remplacées par des mesures et des possibilités accrues de communication avec l’extérieur (p. ex. appels téléphoniques ou vidéo, ou courriels).

Le fait de pouvoir effectuer des appels sans frais à des téléphones fixes ou cellulaires de la collectivité favorisera le maintien des rapports familiaux, surtout si les visites en personne sont suspendues. Les détenus voudront communiquer avec leurs familles à intervalles réguliers pour s’assurer qu’elles sont en sécurité et leur faire part de leur propre état. Ces mesures aideraient le SOLGEN à tenir compte des besoins protégés par le Code des droits de la personne au motif de l’état familial. 

Surpopulation carcérale

Conformément aux conseils des responsables de la santé publique en matière de distanciation sociale et compte tenu de la perturbation probable des poursuites au criminel, le SOLGEN devrait déployer tous les efforts raisonnables possibles pour réduire la population carcérale en utilisant de façon créative toutes les mesures discrétionnaires de libération prévues dans la Loi sur le ministère des Services correctionnels, y compris les placements à l’extérieur, permissions de sortir, mises en liberté pour des raisons de compassion et mises en liberté pour des raisons médicales.

De nombreuses autres administrations, comme celles des comtés Cuyahoga et de Los Angeles aux États-Unis, ont déjà pris des mesures pour libérer des détenus qui ne constituent pas un risque pour les membres du public ou réduire leur peine. Les autorités carcérales du Royaume-Uni envisagent des mesures semblables. Par conséquent, le SOLGEN devrait également examiner la possibilité de libérer les personnes condamnées à la prison qui ne constituent pas un risque pour les membres du public, y compris les personnes dont la peine encore à purger est de moins de 60 jours et les personnes condamnées pour des infractions mineures et non violentes (liées aux stupéfiants par exemple). Des mises en liberté devraient également être accordées pour des raisons de compassion aux détenus vulnérables, y compris les personnes âgées, les femmes enceintes, les personnes immunosupprimées et les personnes ayant des troubles mentaux. L’accroissement des ressources offertes au sein de la collectivité aux personnes en probation, y compris grâce au redéploiement des agents correctionnels (par téléphone), aiderait à réduire la population carcérale. On devrait fournir un moyen de rentrer à la maison aux détenus libérés, tout particulièrement aux membres de collectivités éloignées.

Le SOLGEN devrait également travailler avec le gouvernement fédéral pour libérer les personnes en détention liée à l’immigration qui ne posent aucun risque aux membres du public. 

Collecte de données

Enfin, les experts ont reconnu de façon universelle le besoin de standardiser la collecte de données, particulièrement à ce moment-ci. Le SOLGEN devrait prendre des mesures en vue de standardiser la collecte de données relatives aux cas de COVID-19, y compris en ce qui a trait à l’utilisation connexe du confinement aux cellules, du placement en isolement et autres, désagrégées selon le motif de protection des droits de la personne inscrit au Code des droits de la personne.

La CODP reconnaît l’évolution constante des circonstances entourant la COVID-19 et comprend que le gouvernement travaille à la résolution de nombreuses questions en même temps. Cependant, comme l’ont noté de nombreux experts, la propagation de la COVID-19 dans les établissements carcéraux de l’Ontario pourrait s’avérer catastrophique. L’adoption des mesures recommandées le plus rapidement possible pourrait aider à limiter la transmission du virus tout en respectant les obligations de l’Ontario en matière de droits de la personne.

 

Veuillez agréer, Madame la Solliciteure générale, mes salutations distinguées. La commissaire en chef,

Renu Mandhane, B.A., J.D., LL.M.

c.         L’honorable Doug Downey, procureur général
            L’honorable Christine Elliot, ministre de la Santé
            Irwin Glasbert, sous-procureur général (intérimaire), ministère du Procureur général
            Melanie Fraser, sous-ministre adjointe, ministère de la Santé
            Suzanne McGurn, sous-ministre adjointe – Services en établissement,
            ministère du Solliciteur général