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Déclaration de la commissaire en chef intérimaire de la CODP, Ena Chadha

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La commissaire en chef intérimaire Ena Chadha a formulé les observations suivantes lors de la conférence de presse tenue le 10 août 2020, à l’occasion de la publication du rapport Un impact disparate : Deuxième rapport provisoire relatif à l’Enquête de la Commission ontarienne des droits de la personne sur le profilage et la discrimination raciale par le service de police de Toronto

Sous réserve de modifications

 

Introduction

Je remercie les membres de la communauté et les médias de participer ce matin à cette conférence de presse virtuelle.

Tout d’abord, je tiens à souligner avec gratitude que nous sommes sur les territoires traditionnels de la Première Nation mississauga de New Credit, et à rendre hommage à la longue histoire et à la contribution durable des Premières Nations, des Inuits et des Métis de cette terre.

La Commission ontarienne des droits de la personne tient également à reconnaître qu’il est aujourd’hui impératif de lutter contre le racisme systémique partout dans le monde. Elle se tient ainsi aux côtés des communautés noires de l’Ontario pour combattre et dénoncer le racisme anti-Noirs, qui prend souvent la forme d’un profilage racial pernicieux.

 

Contexte

Aujourd’hui, la CODP publie son deuxième rapport provisoire, intitulé Un impact disparate, dans le cadre de son enquête sur la discrimination raciale et le profilage racial effectués par le service de police de Toronto à l’endroit des personnes noires.

Les incidents de racisme anti-Noirs dans les services policiers à Toronto perdurent depuis plus de 40 ans. Nous devons nous souvenir du nom des nombreuses personnes noires qui, décennie après décennie, ont tragiquement perdu la vie aux mains de la police de Toronto, dont Buddy Evans en 1978, Lester Donaldson en 1988, Albert Moses en 1994, Alexander Manon en 2010, Andrew Loku en 2015, ainsi que tous les autres qui ne sont plus parmi nous.

Nous éprouvons une vive inquiétude chaque fois qu’une intervention policière déclenchée à la suite d’un appel au 911 au sujet d’une personne en souffrance entraîne un décès, comme dernièrement dans le cas de Regis Korchinski-Paquet.

Nous nous souvenons des centaines de manifestants qui ont défilé en 1988, et nous voyons les milliers de manifestants qui défilent à leur tour aujourd’hui.

Tout comme l’équipe de la CODP et, plus globalement, comme de nombreux Ontariens et Ontariennes, je salue l’engagement, le dur labeur et les sacrifices dont font preuve les agents du service de police de Toronto qui interviennent chaque jour dans notre intérêt.

Dans le cadre de son action, la CODP comprend et reconnaît le caractère complexe, exigeant et difficile du travail des policiers de première ligne.

En 2017, lorsque nous avons lancé notre enquête sur le profilage racial, l’objectif était, et demeure à ce jour, de renforcer la confiance entre les communautés noires et la police de Toronto en étudiant de manière empirique les questions problématiques et en formulant des recommandations solides pour remédier à leurs causes profondes.

Dans le cadre de notre enquête, nous avons retenu les services d’un criminologue de renom, Scot Wortley, dont l’analyse professionnelle et les compétences ont constitué un pilier majeur de notre premier rapport provisoire, intitulé Un impact collectif, publié en décembre 2018.

Un impact collectif renferme des conclusions particulièrement troublantes, qui continuent encore aujourd’hui de trouver un écho auprès du public. Récemment, la Cour suprême du Canada a reconnu que le travail accompli par la CODP dans le cadre du rapport Un impact collectif faisait autorité en la matière. Dans ce rapport, Scot Wortley analyse les données obtenues par la CODP auprès de l’Unité des enquêtes spéciales.

Scot Wortley constate notamment qu’entre 2013 et 2017, les personnes noires étaient près de 20 fois plus susceptibles que les personnes blanches d’être abattues lors d’une fusillade par le service de police de Toronto.

Un impact collectif comprend également les résultats de la vaste consultation que nous avons menée auprès des communautés noires de Toronto. Le rapport documente les expériences douloureuses et généralisées vécues par les communautés noires lors de leurs interactions avec les forces de l’ordre.

 

Un impact disparate

Aujourd’hui, dans le deuxième rapport provisoire de la CODP, Un impact disparate, nous publions des conclusions qui soulèvent des préoccupations chroniques concernant les pratiques policières. Les résultats du rapport, très inquiétants, confirment ce que les communautés noires affirment depuis des décennies, à savoir qu’elles pâtissent de mesures policières de façon disproportionnée.

Les recherches de la CODP et de Scot Wortley montrent de façon claire et convaincante que les personnes noires sont non seulement plus susceptibles d’être interpellées, inculpées et victimes d’accusations excessives, mais aussi d’être frappées, visées par des tirs ou tuées par la police de Toronto.

Ces résultats démontrent à quel point il est impérieux de s’attaquer concrètement aux inégalités raciales, de regagner la confiance des communautés et d’instaurer des changements significatifs et contraignants pour transformer le secteur du maintien de l’ordre et mettre fin à la souffrance.

Les Ontariennes et les Ontariens estiment souvent que les disparités raciales dans les cas de recours à la force par la police ne sont pas aussi prononcées à Toronto qu’aux États-Unis. Pourtant, les recherches de Scot Wortley dépeignent un tout autre tableau, qui nous oblige à cesser de perpétuer cette idée erronée. En particulier, une personne noire court autant de risques d’être visée par des coups de feu tirés par des agents de police à Toronto que dans une ville moyenne des États-Unis.

Il n’y a plus lieu de débattre de l’existence ou non d’un racisme systémique ou anti-Noirs. Il est temps à présent d’unir nos efforts pour changer les institutions et les systèmes d’application de la loi qui produisent des résultats aussi disparates. La confiance du public et la sécurité, notamment celle des personnes noires, en dépendent.

 

Appels à l’action

Les conclusions du rapport ne peuvent pas être passées sous silence. C’est pourquoi, aujourd’hui, au nom de la CODP, je vous présente ici nos deux appels à l’action.

Premièrement, nous demandons au service de police de Toronto, à la Commission de services policiers de Toronto et à la Ville de Toronto d’instaurer officiellement, en collaboration avec les organisations et communautés noires et la CODP, un processus permettant d’adopter et d’appliquer des recours juridiquement contraignants. Nous recherchons actuellement des voies de recours exécutoires qui permettront de transformer radicalement la culture et les pratiques policières, et de combattre et d’éliminer le racisme systémique et les préjugés raciaux anti-Noirs dans le secteur du maintien de l’ordre.

La CODP a entamé cette conversation avec le SPT, la CSPT et la Ville. Le SPT et la CSPT nous ont fait part de leur volonté à travailler avec la CODP ainsi qu’avec les communautés pour mettre en place un processus porteur de solutions. Nous espérons que les discussions menées avec le SPT et la CSPT porteront notamment sur l’adoption de réformes globales et structurelles qui garantiront la responsabilisation au moyen de vastes recours juridiquement contraignants.

J’ai informé le SPT, la CSPT et la Ville que, pour produire des changements positifs, les communautés noires doivent être associées à chaque étape du processus. C’est pourquoi nous avons commencé et continuerons de faire participer les communautés noires à ces discussions, afin que leurs points de vue soient pris en compte dans le dispositif qui sera mis sur pied.

Deuxièmement, nous demandons au gouvernement de l’Ontario d’établir un cadre législatif ou réglementaire destiné à lutter directement contre le racisme systémique et les préjugés raciaux anti-Noirs dans le secteur du maintien de l’ordre.

La législation provinciale doit exiger que tous les services de police de l’Ontario s’attachent non seulement à recueillir et à analyser des données raciales complètes et ventilées dans tout l’éventail des activités policières, mais aussi à établir des processus de responsabilisation transparents et efficaces afin que les agents se livrant à des actes de profilage ou de discrimination raciale fassent l’objet d’une prise en charge effective.

Nous nous réjouissons à la perspective de travailler de manière constructive avec la province pour donner suite à cet appel à l’action.

Pour conclure, étant donné l’ampleur des données contenues dans le deuxième rapport provisoire de la CODP, il nous incombe à toutes et à tous de revoir les pratiques, les politiques, les procédures et, surtout, les perceptions qui façonnent les activités policières dans notre ville.

La disproportion et les disparités mises en lumière dans notre rapport ne sont pas que de simples statistiques : elles traduisent des réalités vécues. La vie des personnes noires compte. Nous voulons des actes maintenant.