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L’inclusion réelle doit être le point de départ de notre système éducatif

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Septembre 2, 2018

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Le premier jour de la rentrée est un moment de retrouvailles et l’occasion de commencer l’année avec une énergie nouvelle et l’envie d’apprendre. Pourtant, pour les élèves ayant un handicap et leurs familles, le jour de la rentrée est souvent synonyme d’anxiété. Seront-ils acceptés par leurs camarades de classe? Recevront-ils tout le soutien dont ils ont besoin auprès du personnel enseignant? Pourront-ils s’épanouir pleinement?

Que ce soit à la maison ou à l’école, tous les enfants veulent se sentir inclus. Les élèves ayant un handicap ont, de par la loi, le droit de participer à tous les aspects du système éducatif. L’inclusion a des effets positifs sur le développement social et cognitif de l’enfant. Malheureusement, l’approche ontarienne à l’égard de l’« enfance en difficulté » repose sur l’exclusion. Elle consiste à qualifier les élèves handicapés comme étant « en difficulté » avant même de veiller à répondre à leurs besoins. Paradoxalement, l’étiquette « en difficulté » exclut de nombreux troubles mentaux, intellectuels et d’apprentissage courants, si bien que les élèves concernés ont encore plus de mal à obtenir l’aide nécessaire. Aux yeux des familles, le processus d’identification et d’accompagnement des élèves ayant un handicap s’avère à la fois bureaucratique, déroutant, aliénant, inutilement accusatoire et, en fin de compte, épuisant.

Qui plus est, la législation ontarienne laisse aux directrices et aux directeurs d’école le pouvoir discrétionnaire de refuser d’accueillir les élèves dont la présence pourrait « nuire au bien-être physique ou mental des élèves ». Dans une enquête récemment menée auprès de parents d’élèves ayant une déficience intellectuelle, l’ARCH Disability Law Centre a constaté que de nombreux élèves étaient carrément exclus de l’école et privés de leur droit à l’éducation, et ce, sans suivi officiel ni procédure équitable. Un quart des parents ont ainsi indiqué avoir reçu pour consigne de ne pas amener leur enfant à l’école, tandis que plus de la moitié des parents (54 p. 100) ont déclaré que leur enfant était régulièrement contraint de quitter l’école plus tôt dans la journée.

Comment en sommes-nous arrivés là? Le problème trouve en partie son origine dans la Loi sur l’éducation, qui considère le handicap comme une anomalie plutôt que comme une variation inhérente et anticipée de la condition humaine. La législation renforce le capacitisme, c’est-à-dire les attitudes négatives, la stigmatisation et les stéréotypes auxquels les personnes handicapées sont confrontées chaque jour.

Cette situation nuit à l’inclusion sociale. À un âge où ils sont facilement impressionnables, les élèves ayant un handicap apprennent qu’ils ne sont pas « normaux », qu’ils devront composer avec des processus accusatoires et bureaucratiques en vue de leur inclusion, et qu’ils courront toujours le risque d’être exclus de la société. Dans un tel contexte, il n’est guère étonnant que les personnes handicapées affichent de moins bons niveaux de réussite scolaire, des taux de chômage plus élevés et des revenus inférieurs, et qu’elles déposent le plus grand nombre de requêtes pour violation des droits de la personne.

Le système éducatif de l’Ontario pour l’enfance en difficulté date de près de 40 ans. Son articulation autour du principe d’« anomalies » contraste nettement avec les changements progressifs intervenus dans le droit et dans la société en faveur de l’inclusion et de la conception universelle. Le moment est venu de repenser notre manière d’accompagner et d’inclure réellement tous les enfants et de garantir des milieux d’apprentissage et de travail positifs.

Dans sa nouvelle Politique sur l’éducation accessible aux élèves handicapés, la Commission ontarienne des droits de la personne (CODP) énonce les droits et les responsabilités juridiques des élèves et du personnel enseignant, et formule des recommandations pour créer un système éducatif qui passe avant tout par une inclusion réelle. Nous réclamons la prévention et la suppression des obstacles systémiques, ainsi que la mise en œuvre de la conception universelle. Nous réclamons que tous les intervenants placent les élèves ayant un handicap au centre du processus décisionnel et éliminent les freins aux mesures d’adaptation, comme les retards persistants dans les évaluations professionnelles ou l’inefficacité des processus de résolution des conflits. Nous réclamons également des formations qui préparent le personnel enseignant à répondre aux besoins des différents élèves. Nous réclamons une meilleure responsabilisation. Nous réclamons, enfin, l’abolition de la pratique punitive consistant à exclure du milieu scolaire les élèves ayant un handicap.

Les recommandations de la CODP ont reçu l’approbation des principaux organismes communautaires et groupes de défense des intérêts. Leur mise en œuvre contribuerait à contrer la hausse du nombre de demandes d’adaptation individualisée, à réduire le fardeau administratif pesant sur le personnel enseignant et à rétablir la confiance du public à l’égard du système. Une telle initiative marquerait l’abandon des solutions de fortune, au profit de réponses proactives garantissant la réussite des élèves ayant des capacités et des besoins différents.

Les enfants qui reprennent le chemin de l’école ne devraient pas avoir à se demander s’ils recevront le soutien dont ils ont besoin pour l’année à venir. Les membres de leurs familles ne devraient pas non plus avoir à attendre des années avant d’obtenir une évaluation, ni à s’absenter du travail pour faire face aux dédales de la bureaucratie. Tous les enfants devraient éprouver un sentiment d’appartenance. Nous demandons au gouvernement, aux conseils scolaires et au personnel enseignant de mettre en œuvre nos recommandations. L’inclusion réelle doit être le point de départ de notre système éducatif.

Renu Mandhane est la commissaire en chef de la Commission ontarienne des droits de la personne.

Article publié le 2 septembre 2018, par le Toronto Star (an anglais).