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2. Pourquoi se pencher sur la question du profilage racial?

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Le profilage racial est une forme particulière de discrimination raciale associée au maintien de la sureté et la sécurité. La CODP définit actuellement le profilage racial de la façon suivante :

[T]oute action prise pour des raisons de sûreté, de sécurité ou de protection du public qui repose sur des stéréotypes fondés sur la race, la couleur, l’origine ethnique, l'ascendance, la religion ou le lieu d’origine, plutôt que sur un soupçon raisonnable, dans le but d’isoler une personne à des fins d’examen ou de traitement particulier[22].

Le profilage racial n’est souvent pas considéré comme un grave problème de droits de la personne, au même titre que les autres formes de discrimination raciale. De nombreuses personnes et organisations comprennent généralement que le fait de refuser un emploi ou un logement à quelqu’un au motif de sa race, de sa couleur ou de son ascendance, ou de harceler un collègue de travail en raison de sa foi constitue une atteinte aux droits de la personne.

Aujourd’hui comme par le passé, beaucoup d’institutions, de dirigeants des services de police et de membres du grand public nient l’existence du profilage racial ou y voient une pratique justifiée. Avant par exemple, certains organismes de maintien de l’ordre adoptaient activement des pratiques qui soumettaient les membres des communautés racialisées et autochtones à un contrôle excessif au nom de la sureté et la sécurité[23].

Encore aujourd’hui, la croyance en l’efficacité et la légitimité du profilage racial persiste, même si la société comprend mieux qu’il enfreint la loi et a des effets néfastes sur les communautés racialisées et autochtones. Certaines pratiques pouvant constituer du profilage racial reçoivent encore l’appui d’institutions et de membres du grand public qui les croient utiles, inoffensives et (ou) justifiées comparativement à d’autres formes de discrimination raciale[24]. Par exemple, en 2015, au moment de se prononcer sur le débat sur le fichage[25], l’ancien chef du Service de police de Hamilton a donné un aperçu de ce qui constituait, selon lui, une approche discrétionnaire acceptable de collecte d’information :

Lorsque nos agents sont envoyés dans la zone des tirs, leur objectif est d'interpeller, de questionner et d'enquêter sur des jeunes hommes noirs. Nous avons l'intention d'interpeller et de parler avec autant de personnes que possible car nous ignorons qui pourrait être un suspect, une personne d'intérêt, une victime, un témoin ou un particulier susceptible de vouloir jouer le rôle d'informateur honorable dans l'enquête. Nous l'ignorons tant que nous ne recueillons pas de renseignements[26].

La CODP a qualifié les propos du chef de police de « description typique de profilage racial ». Si on adoptait cette approche, il serait légitime d’interpeller et de questionner à tout moment, sans preuve ni soupçon de méfait, n’importe quel jeune homme noir, et pour la seule raison qu’il s’agit d’un jeune homme noir[27].

La CODP a axé sa consultation spécifiquement sur le profilage racial étant donné la tendance à en minimiser la gravité, comparativement aux autres formes de discrimination raciale. Ce travail peut aider les communautés touchées à comprendre ce qui constitue du profilage racial et comment ce profilage diffère des autres formes de discrimination raciale. Il est important que les institutions sachent quels types de pratiques peuvent constituer du profilage racial et quelles approches spécifiques peuvent être adoptées pour y mettre fin. Le fait de présenter l’expérience des participants en matière de profilage racial illustre les effets préjudiciables du profilage sur les membres des communautés racialisées et autochtones, ainsi que son importance en tant qu’enjeu urgent de droits de la personne en Ontario.

2.1. Portée du rapport

Lorsque nous avons entrepris cette consultation, nos avions pour but de jeter une lumière sur les rapports de profilage racial et points de vue sur la question. Or, au fil de nos travaux, nous avons compris l’importance d’examiner le profilage racial dans un contexte plus large de façon à refléter adéquatement l’expérience des personnes touchées. D’autres formes de discrimination raciale et de racisme, comme l’inégalité en matière de traitement, le harcèlement, la discrimination systémique, le racisme de tous les jours et les activités haineuses, sont monnaie courante pour les personnes racialisés et autochtones, en plus du profilage racial[28]. De nombreux participants à la consultation ont donné des exemples multiples de ces autres formes de discrimination.

Bon nombre de ces situations pourraient constituer une atteinte aux droits de la personne reconnus aux termes du Code, mais ne correspondent à ce que la CODP qualifie habituellement de « profilage racial » étant donné qu’elles ne surviennent pas en contexte de sureté et sécurité. Elles pourraient cependant créer des conditions favorables au profilage racial, et survenir de façon concomitante.

En emploi, j’ai de la chance si je franchis l’étape de présélection étant donné que mon nom laisse entendre que je suis membre d’une minorité. Dans les magasins, on me prend pour un voleur à l’étalage possible. Dans la rue, on me prend pour un voleur de femme ou un cambrioleur possible. (Homme noir, 45 à 54 ans)

La question du profilage racial comporte aussi une « zone grise ». Les participants à la consultation ont cité de nombreux exemples de discrimination raciale qui, selon les faits de l’affaire, pourraient équivaloir à ce que la CODP qualifie de profilage racial. La définition du profilage racial s’articule autour de la notion de gestes posés pour assurer la sureté, la sécurité ou la protection du public. Certaines situations de discrimination raciale pourraient équivaloir à du profilage racial alors qu’à première vue, elles ne donnent pas l’impression de constituer du profilage racial.

Bien que ce rapport porte sur le profilage racial, nous avons décidé d’y parler également d’incidents et de perceptions d’autres formes de discrimination raciale de façon à mieux refléter les préoccupations d’ensemble des différentes communautés. En agissant ainsi, nous espérons dresser un portrait plus global de la manière dont toutes ces formes de discrimination créer des obstacles à l’accès équitable à l’emploi, au logement et aux services en Ontario. Nous avons identifié ces autres expériences de discrimination raciale dans plusieurs sous-sections de la section (3.1.2.) Rapports qualitatifs de profilage racial dans différents secteurs.

Bien que nous utilisions l’expression « profilage racial », nous reconnaissons que le profilage racial et le profilage fondé sur la croyance peuvent parfois se recouper. Les musulmans et les membres d’autres confessions font souvent l’objet de ces deux types de profilage. Il peut s’agir de profilage fondé sur la croyance quand des personnes sont soumises à des mesures de sécurité, de contrôle et de surveillance accrues en raison de leur apparence extérieure, de leur adhérence perçue à une certaine croyance (en raison de stéréotypes à propos des adeptes de cette croyance) ou encore de leur association à des communautés raciales et ethniques particulières.

Ce rapport porte sur les organisations et secteurs d’activité régis par les lois provinciales, qui doivent se conformer au Code. Il couvre également certains secteurs non régis par le Code, comme les aéroports et les agences de services frontaliers et de sécurité nationale. Ces derniers sont soumis à la Loi canadienne sur les droits de la personne[29].

[22] Commission ontarienne des droits de la personne, Politiquesupra, note 5, à 21.

[23] Par exemple, dans le cadre de la « guerre contre les drogues » des années 1980 aux États-Unis, la Drug Enforcement Agency a mis en application un profil de passeur de drogues « centré sur la race » utilisé pour enseigner aux agents de la section des stupéfiants à effectuer des contrôles routiers sous de faux prétextes à la recherche de stupéfiants. David M. Tanovich, « Using the Charter to Stop Racial Profiling: The Development of an Equality-Based Conception of Arbitrary Detention », Osgoode Hall LJ, vol. 40, no 2 (2002) p. 145, à 151; Sheri Lyn Johnson, « Race and the Decision to Detain a Suspect », Yale LJ, vol. 93, no 2 (1983), p. 214. Voir aussi Alejandro Del Carmen, Racial Profiling in America (New Jersey, Pearson Prentice Hall, 2008), à 10-13; Jennifer Preston, « Trooper Says State Police In New Jersey Discriminate », The New York Times (6 février 1999). En ligne : The New York Times www.nytimes.com/1999/02/06/nyregion/trooper-says-state-police-in-new-jersey-discriminate.html (consulté le 23 février, 2017).

[24] Par exemple, la majorité des répondants à un sondage américain étaient opposés au recours aux pratiques de profilage racial. Cependant, un tiers (33,5 %) se sont dits d’accord à ce que les agents de police fouillent les sacs ou paquets des personnes correspondant à des profils de suspect à caractère racial ou ethnique dans le but de prévenir les actes criminels. Devon Johnson et coll., « Attitudes Toward the Use of Racial/Ethnic Profiling to Prevent Crime and Terrorism », Criminal Justice Policy Rev, vol. 22, no 4 (2011), p. 422.

[25] Les contrôles de routine et le fichage sont « des interpellations policières sans arrestation qui ont pour objectif de demander, de consigner et (ou) d’obtenir des renseignements personnels, renseignements identificatoires et (ou) renseignements sur les circonstances d’une personne, et (ou) qui incluent de telles activités ». Réponse conjointe sur le règlement sur le fichage, supra, note 11. La CODP était signataire de la réponse conjointe.

[26] Voir Ruth Goba, commissaire en chef intérimaire, Lettre à la rédactionThe Spec (29 Octobre 2015). En ligne : Commission ontarienne des droits de la personne www.ohrc.on.ca/fr/centre_des_nouvelles/
article-publi%C3%A9-dans-le-hamilton-spectator-en-r%C3%A9ponse-%C3%A0-%C2%AB-carding-basic-police-work-hamilton-officers.

[27] Idem.

[28] Pour obtenir davantage de renseignements sur les différentes formes de discrimination raciale et le racisme en général, voir la Politique de la CODP, supra, note 5.

[29] Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. 1985, chap. H-6.


 

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