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Objet : Mise en œuvre des recommandations formulées par le Comité des Nations Unies sur la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes

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3 février 2017

L’honorable Indira Naidoo-Harris
Ministre de la Condition féminine
11e étage, 80, rue Grosvenor
Toronto (Ontario)  M7A 1E9

Madame,

Je vous écris conformément au mandat de la Commission ontarienne des droits de la personne visant à promouvoir et à protéger les droits de la personne en Ontario. Permettez-moi, tout d’abord, de vous adresser mes félicitations pour votre récente nomination en tant que nouvelle ministre de la Condition féminine de l’Ontario.

Le mandat de votre ministère couvre de nombreuses questions traitées par le Code des droits de la personne de l’Ontario. Comme vous le savez, le Code interdit la discrimination et le harcèlement fondés sur des motifs tels que, entre autres, le sexe et l’identité sexuelle, et ce, dans les domaines de l’emploi, du logement, des services, des associations professionnelles et des contrats. En règle générale, le Code a préséance sur les autres textes législatifs de l’Ontario.

Vous savez sans doute qu’en novembre 2016, le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (le Comité) qui supervise la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) a publié ses observations finales concernant les huitième et neuvième rapports périodiques du Canada[1]. Le Comité a formulé un certain nombre de recommandations qui concernent aussi bien votre mandat que le nôtre. Parmi ses recommandations, le Comité demande aux gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux du Canada de mettre en place à l’échelle nationale un plan relatif à l’égalité des sexes, ainsi qu’un mécanisme de contrôle de la mise en œuvre et de la surveillance des recommandations du Comité et de la Convention. De nombreux organismes, tels que l’Alliance canadienne féministe pour l’action internationale, demandent également à l’ensemble des gouvernements du Canada de mettre en place ces recommandations[2]. Nous invitons instamment votre gouvernement à mettre en place un mécanisme de contrôle de la mise en œuvre et de la surveillance des obligations de l’Ontario en vertu de la Convention. Nous demandons en outre la mise en place d’un mécanisme coordonné sur l’ensemble des provinces et territoires du Canada.

Le nouveau plan stratégique de la CODP souligne le rôle essentiel que joue le respect des droits de la personne et de la responsabilité dans notre mission. L’éducation, la bienveillance et même les modifications législatives ne sont pas suffisantes. Bien que le motif du « sexe » ait été ajouté au Code vers 1970, tous les indicateurs socio-économiques montrent que les femmes continuent, 47 ans plus tard, d’être confrontées à de nombreuses inégalités. L’Ontario a besoin d’un mécanisme de contrôle de la mise en œuvre et de la surveillance des obligations nationales et internationales en matière de droits de la personne afin de s’assurer que des progrès notables sont réellement réalisés.

Parmi les autres recommandations du Comité, nombreuses sont celles qui se rapportent directement aux mandats et aux travaux, entre autres, de votre nouveau ministère. Parmi ces recommandations figurent :

  • l’amélioration des efforts en matière de lutte contre la violence fondée sur le sexe, en particulier lorsqu’elle est faite à des femmes autochtones ou racialisées (par. 25);
  • la collecte de données ventilées relatives à la violence fondée sur le sexe, comprenant notamment les renseignements portant sur le sexe, l’âge, le groupe ethnique, l’identité autochtone et la relation entre la victime et l’agresseur (par. 25);
  • l’élaboration d’un plan de surveillance de la mise en œuvre des 37 autres recommandations formulées dans le rapport 2015 du Comité sur la CEDAW concernant les femmes et les jeunes filles autochtones disparues ou assassinées (par. 27);
  • l’élaboration d’un plan spécifique et intégré couvrant la situation socio-économique particulière des femmes autochtones, tant dans les réserves qu’à l’extérieur, et traitant notamment les questions relatives à leur pauvreté, leur état de santé médiocre, leurs mauvaises conditions de logement, leur faible taux de réussite scolaire, leur faible taux d’emploi et de revenu et le taux de violence élevé dont elles sont victimes (par. 29);
  • la prise de toutes les mesures nécessaires pour réduire l’écart salarial (par. 39) ;
  • l’adoption de mesures efficaces en vue d’atteindre l’égalité de fait entre les femmes et les hommes sur le marché du travail (par. 39);
  • la prise en considération des besoins des femmes appartenant à des groupes défavorisés sur le marché du travail, notamment les femmes handicapées, racialisées et autochtones (par. 39);
  • la garantie que les stratégies en matière de logement et de réduction de la pauvreté intègrent une approche fondée sur le sexe et les droits de la personne qui protège les droits des femmes (par. 47);
  • le traitement de la question du taux de détention anormalement élevé chez les femmes afro-canadiennes et autochtones (par. 49);
  • la suppression de l’isolement cellulaire (par. 49);
  • la restriction du recours à l’isolement préventif et disciplinaire à une mesure de dernier recours, avec des durées les plus courtes possibles et en évitant l’isolement de femmes ayant de graves problèmes de santé mentale (par. 49);

Ces recommandations concernent également les domaines du plan stratégique de la CODP mettant l’accent sur la réconciliation avec les peuples autochtones, sur le système de justice pénale et sur la pauvreté. Parmi les travaux que nous avons réalisés l’année passée sur ces questions figurent notamment : la déclaration de la CODP sur l’écart salarial entre les sexes à l’occasion de la Journée de l’équité salariale; la position de la CODP sur les codes vestimentaires sexualisés et fondés sur le sexe; la participation de la CODP à la Table ronde de l’Ontario sur la lutte contre la violence faite aux femmes; le soutien de la CODP à l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, ainsi que les déclarations et les mémoires que nous avons rédigés à propos des réformes nécessaires concernant les enquêtes, la détention, l’isolement et la surveillance dans le système de justice pénale.

Nous savons que votre ministère, de même que d’autres ministères, a également entrepris un certain nombre d’initiatives connexes, notamment des stratégies et des plans visant à remédier à l’écart salarial entre les sexes, à la sous-représentation des femmes au sein des conseils d’administration, à la violence et au harcèlement sexuels, à la violence familiale, à la violence faite aux femmes autochtones, à la traite des personnes et à la pauvreté. La dernière lettre de mandat adressée à votre ministère reconnaît également qu’il a pour mission de « garantir la prise en compte d’une composante sexospécifique dans l’élaboration des politiques et programmes gouvernementaux ». Nous croyons en l’importance du point de vue de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes dans l’orientation des travaux de votre ministère.

Nous encourageons votre ministère, en collaboration avec d’autres ministères chargés de questions liées aux droits à l’égalité des femmes et des filles, à examiner avec attention les droits et obligations énoncés en vertu de la Convention, ainsi que l’ensemble des recommandations du Comité, compte tenu des travaux déjà en cours et des progrès qu’il reste à accomplir. Nous recommandons donc que l’Ontario élabore une stratégie et un plan d’action exhaustifs concernant l’égalité des sexes, à l’échelle de la province. Par ailleurs, nous demandons la mise en place d’une stratégie relative à l’égalité des sexes à l’échelle du Canada.

Je serais heureuse de vous rencontrer à tout moment afin de discuter de ces questions et des travaux considérables que chacun de nos organismes mène en vue de faire progresser les droits à l’égalité des femmes et des filles en Ontario.

Je vous prie d’accepter, Madame, l’expression de mes sentiments distingués.

Renu Mandhane, B.A., J.D., LL.M.
Commissaire en chef
Commission ontarienne des droits de la personne

c.c. :    L’honorable Kathleen Wynne, première ministre de l'Ontario

L’honorable Yasir Naqvi, procureur général de l’Ontario

Shelagh Day, Alliance canadienne féministe pour l’action internationale

Commissaires de la CODP


[1] Le Canada a ratifié la CEDAW en 1981. Les droits et obligations énoncés dans la Convention s’appliquent à tous les niveaux d’un état fédéral, soit l’ensemble des compétences territoriales, provinciales et fédérales du Canada. Pour obtenir de plus amples renseignements sur la Convention et sur le Comité, ainsi que pour consulter le rapport du Canada et les documents connexes, veuillez vous rendre sur : http://www.ohchr.org/FR/HRBodies/CEDAW/Pages/CEDAWIndex.aspx

[2] L’AFAI et ses partenaires ont récemment tenu une conférence de presse portant une attention particulière à la recommandation du Comité qui demande au Canada d’élaborer un plan national relatif à l’égalité des sexes et de mettre en place un mécanisme de contrôle. Pour obtenir de plus amples renseignements, rendez-vous sur http://fafia-afai.org/fr/