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VI. Logement

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1. Introduction

À titre de signataire de plusieurs instruments internationaux relatifs aux droits de la personne, le Canada a reconnu que le logement constitue un droit humain fondamental. En ratifiant le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, il s’est engagé à prendre les mesures nécessaires pour assurer la réalisation du droit à un logement adéquat[72]. Bien que le Code ne protège pas le vaste éventail de droits sociaux et économiques énoncés dans les instruments internationaux, il confirme le droit à un traitement égal en matière d’occupation d’un logement, sans discrimination fondée sur l’état familial, ou d’autres motifs, et les valeurs reflétées dans les lois internationales sur les droits de la personne facilitent l’interprétation de la législation en matière de droits de la personne.

On sait que pour de nombreuses familles avec de jeunes enfants ces droits au logement internationaux et nationaux sont une promesse non réalisée. Les familles continuent d’avoir des difficultés sur le marché du logement locatif et se retrouvent parfois dans un logement qui est ni abordable ni adéquat. Les problèmes de logement affectent particulièrement les familles monoparentales, les bénéficiaires de l’aide sociale, les familles appartenant à des communautés racialisées, autochtones, les familles des nouveaux arrivants et les familles avec de jeunes enfants.

Il est très difficile d’obtenir un logement subventionné à Toronto. Les listes d’attente sont longues, les immeubles sont peu nombreux et souvent situés à l’extérieur du centre-ville de Toronto. L’appartement dans lequel nous vivons est sûr et bien situé, mais il est presque inabordable pour moi.
Mère seule

Les personnes consultées– groupes de propriétaires, groupes de défense des droits des locataires, propriétaires de logements sans but lucratif et milieu de l’enseignement – représentaient plusieurs points de vue mais elles ont convenu que les familles vulnérables continuent d’avoir des difficultés sur le marché du logement locatif. Cependant, elles avaient des opinions différentes quant aux raisons et aux façons d’y remédier.

Le rôle de la pauvreté

Les personnes consultées étaient d’avis que le problème est largement attribuable à la pauvreté. Les familles avec de jeunes enfants, les familles monoparentales, les parents handicapés ou ayant des enfants handicapés, les familles autochtones, les familles appartenant à des communautés racialisées et les familles des nouveaux arrivants sont plus portées à avoir des revenus peu élevés. En outre, deux parents qui vivent séparément mais partagent la garde des enfants peuvent avoir beaucoup de difficulté à trouver des logements abordables adéquats à deux endroits. La Commission d’enquête a reconnu le lien entre l’appartenance à un groupe visé par le Code et la probabilité d’avoir un faible revenu dans l’affaire Kearney c. Bramalea[73] lorsqu’elle a jugé que les critères revenu-loyer avaient un effet discriminatoire. Les mesures qui désavantagent les personnes à faible revenu sont aptes à causer un désavantage disproportionné aux membres des groupes identifiés dans le Code.

En décembre 2005, plus de la moitié des personnes recevant l’aide sociale par l’intermédiaire du Programme Ontario au Travail (OT) étaient membres de familles monoparentales[74]. Les allocations au logement très peu élevées placent ces personnes et les autres familles bénéficiaires d’aide sociale dans une position intenable puisqu’elles les obligent à choisir entre le logement et les autres nécessités de l’existence[75]. L’Advocacy Centre for Tenants Ontario (ACTO) a fait remarquer que presque tous les prestataires d’OT (96 p. 100) sont des locataires, mais que 17 p. 100 d’entre eux seulement vivent dans un logement subventionné. Les autres tentent de trouver un logement adéquat abordable sur le marché locatif privé. Or, dans de nombreuses régions de la province, le marché locatif privé n’offre pas de logements adéquats aux familles dans les limites de l’allocation au logement. Bon nombre de mémoires ont insisté sur l’importance d’augmenter l’allocation au logement des prestataires d’aide sociale pour qu’elle corresponde aux loyers actuels.

Le ministère des Services sociaux et communautaires (MSSC) a informé la Commission des mesures qu’il a prises récemment pour permettre aux prestataires d’aide sociale de payer leur loyer. Par exemple, en mars 2004, il a mis en place le Programme provincial de banques d'aide au loyer pour permettre aux locataires ayant un loyer arriéré à court terme de rester chez eux. Le MSSC a également créé un Fonds d'aide d'urgence aux impayés d'énergie pour aider les ménages à faible revenu qui sont confrontés à une crise liée à l’énergie. Ce fonds fournit une aide d’urgence unique qui leur permet de payer les factures de services publics en souffrance, les dépôts de garantie et les frais de reconnection. De plus, l’administrateur peut affecter une partie de l’aide sociale au paiement des arriérés des prestataires d’OT ou du POSPH qui n’ont pas respecté leurs obligations financières pour prévenir leur expulsion.

Nombre de logements adéquats abordables 

La majorité des personnes consultées, mais pas toutes, considèrent que les problèmes d’accès au logement des familles sont principalement attribuables au manque de logements adéquats abordables. L’Ontario Non-Profit Housing Association (ONPHA) a mentionné :

En réalité, lorsqu’il n’y a pas de pénurie de logements, les propriétaires sont beaucoup moins portés à faire de la discrimination. Et l’univers du logement social accorde une priorité particulière et exhaustive à une des collectivités désavantagées mentionnées dans le mémoire (les victimes de violence qui sont principalement des femmes avec enfants). L’ONPHA est d’avis que le problème principal (il y en a d’autres) est la pénurie de logements abordables... On doit tout d’abord s’assurer qu’il y a suffisamment de logements adéquats abordables. (Accent dans l’original).

Le ministère des Affaires municipales et du Logement (MAML) a dit à la Commission que le programme de logement de la province vise à augmenter le nombre de logements locatifs à l’aide d’initiatives qui renforceront les tenances à bail pour permettre aux locataires de rester chez eux et à créer des nouveaux programmes pour accroître le nombre de logements abordables et aider les personnes qui ont des besoins spéciaux en matière de logement. Par exemple, un nouveau Programme de logement abordable Canada-Ontario créera plus de 15 000 unités résidentielles abordables, y compris des nouveaux logements avec services de soutien et des logements pour les victimes de violence conjugale. Le programme offrira également une allocation au logement à 5 000 familles ontariennes à faible revenu.

On a suggéré plusieurs moyens de régler la pénurie de logements abordables. Un grand nombre de mémoires sur le logement reçus par la Commission ont proposé le contrôle des loyers. L’ACTO a affirmé :

Depuis la suppression des mécanismes de contrôle des vacances en 1998, les propriétaires ont peu d’incitatif à tenter une médiation avec les locataires qui vivent dans leur logement depuis longtemps et tous les incitatifs à tenter de les expulser pour augmenter le loyer; il s’ensuit une diminution du nombre de logements abordables. Le loyer moyen en Ontario a continué d’augmenter en dépit d’une augmentation des taux d’inoccupation. La suppression des mécanismes de contrôle des vacances a mis le logement abordable hors de la portée de nombreuses familles à faible revenu. L’ACTO a demandé instamment au gouvernement provincial de rétablir la réglementation des loyers de toutes les unités résidentielles, vacantes ou occupées, afin de préserver les unités résidentielles abordables.

D’un autre côté, la Federation of Rental Housing Providers of Ontario (FRPO) a avancé que le contrôle des loyers crée un obstacle à l’accès parce qu’il entraîne des pénuries de logement. Le résultat de ces pénuries, selon la FRPO, est le suivant : « De nombreux propriétaires se disputent un nombre insuffisant d’appartements. Dans cette situation, ce sont souvent les ménages les plus pauvres et vulnérables qui sont pénalisés. Les résultats pour la société peuvent être dévastateurs. » Selon la FRPO, la suppression des mécanismes de contrôle des vacances a entraîné une hausse des taux d’inoccupation, particulièrement au bas de l’échelle, ce qui permet aux familles pauvres et vulnérables de l’Ontario d’avoir plus de choix.

Le ministère des Affaires municipales et du Logement a mentionné à la Commission que le gouvernement est déterminé à élaborer un système de contrôle des loyers qui offrirait une meilleure protection aux locataires.

Les auteurs des mémoires reçus par la Commission et les participants à la table ronde sur le logement ont également débattu l’effet des règlements de zonage qui excluent ou limitent les deuxièmes logements. Certains craignent que les normes de santé et de sécurité ne soient pas respectées dans les deuxièmes logements; d’autres font toutefois remarquer que ce genre de logement est une importante source de logements abordables. En outre, des préoccupations ont été soulevées à propos des règlements qui limitent ou interdisent les établissements de services sociaux, les maisons de refuge ou les grands ensembles d’habitation. Les intervenants ont déclaré à la Commission que ces règlements ont pour effet d’exclure les gens du logement à cause de leurs circonstances personnelles, notamment pour des motifs prévus par le Code, à savoir un handicap, l’état familial et l’état d’assisté social.

Les mémoires soulèvent également des préoccupations concernant le réaménagement du parc d’immeubles locatifs pour d’autres usages, notamment pour créer des copropriétés, car elle a pour effet de diminuer rapidement le nombre de logements abordables. Le ministère des Affaires municipales et du Logement a dit à la Commission qu’il s’est engagé à faire en sorte que les municipalités aient le droit d’empêcher la démolition abusive ou la transformation en copropriétés du parc d’immeubles locatifs.

Attitudes discriminatoires et stéréotypes

Les commentaires qui précèdent confirment que la discrimination contre les familles au sein du marché locatif doit être examinée dans le contexte de vastes préoccupations sociales et économiques comme le revenu inadéquat et le nombre insuffisant de logements abordables.

S’ajoute à ces problèmes systémiques la pratique continue et courante des fournisseurs de logements locatifs d’exercer de la discrimination directe à l’égard des familles avec de jeunes enfants. Un grand nombre de personnes consultées ont souligné que le manque de sensibilisation des propriétaires et des locataires aux droits et responsabilités prévus par le Code a un impact majeur sur les familles. Selon le Landlord’s Self Help Centre, on estime que le marché locatif secondaire représente 40 p. 100 des fournisseurs de logements locatifs en Ontario et entre 15 et 20 p. 100 du parc de logements locatifs de Toronto. En général, ces propriétaires de logement ne sont pas des professionnels et ils possèdent très peu d’expérience en gestion immobilière. Par conséquent, ils ne connaissent pas leurs obligations en vertu du Code. En fait, comme l’a fait remarquer le Centre pour les droits à l’égalité au logement, bon nombre de propriétaires ne savent pas qu’ils n’ont pas le droit de refuser de louer à des particuliers ou à des familles parce qu’ils sont prestataires d’aide sociale et disent ouvertement au personnel du Centre qu’ils ne louent pas aux assistés sociaux.

Le manque de sensibilisation va au-delà du manque de connaissance du Code. Il y a également des stéréotypes et des mythes profondément ancrés au sujet des prestataires d’aide sociale, des familles monoparentales et des nouveaux arrivants, entre autres. L’importance d’entreprendre une campagne de sensibilisation et d’éducation des propriétaires visant à abolir les mythes et à les informer du Code est sans doute le message le plus fort que la Commission ait reçu à la table ronde sur le logement.

Les propriétaires ont tendance à considérer nos clients comme des locataires inappropriés en dépit des protections prévues par le Code en ce qui a trait au handicap, à l’état familial et à la source de revenu. Les propriétaires et le public doivent être avisés que nos clients proviennent de toutes les couches de la société et ne forment pas un groupe homogène. Ils ne sont pas plus susceptibles que les autres citoyens d’éviter de payer leur logement... L’augmentation du parc de logements locatifs ou même des taux d’aide sociale ne règlera pas le problème de la discrimination exercée par les propriétaires.
MSSC

Pareillement, la Commission a appris que les locataires ignorent souvent leurs droits. Les locataires les plus vulnérables sont également les personnes les moins susceptibles de connaître leurs droits ou de les faire respecter, particulièrement étant donné la complexité et les échéanciers du processus de dépôt d’une plainte en vertu du Code.

Lorsqu’on envisage l’impact de l’état familial sur le logement, il importe de garder à l’esprit l’effet supplémentaire des motifs de discrimination qui s’entrecroisent. Ainsi, le Centre de la défense des personnes handicapées a rappelé à la Commission que les personnes handicapées et leur famille éprouvent des difficultés particulières sur le plan de l’accès au logement parce qu’elles doivent trouver des logements qui sont à la fois accessibles aux personnes handicapées et favorables aux familles; ces impératifs multiplient les difficultés par deux. La Commission a également été informée des problèmes de logement des parents qui élèvent des enfants atteints de troubles de comportement. Les propriétaires et les locataires n’ont souvent aucune patience pour les problèmes de ces parents. L’OFIFC a dit à la Commission :

Certains propriétaires ne veulent pas louer de logements aux Autochtones parce qu’ils sont racistes. En outre, c’est un fait que les Autochtones ont le taux le plus élevé de mères célibataires chefs de famille (27 p. 100 de toutes les familles) et que bon nombre d’entre elles sont adolescentes. Les membres de ce groupe ont beaucoup de difficulté à trouver des logements; les pères célibataires autochtones ont eux-mêmes de la difficulté à trouver un logement adéquat pour eux et leurs enfants et ce, pour les mêmes raisons.

L’analyse des expériences des familles sur le marché locatif doit, par conséquent, tenir compte de l’effet des multiples aspects de l’identité, non seulement à la lumière des stéréotypes et de la discrimination directe, mais également de l’impact des facteurs systémiques.

Les participants à la table ronde sur le logement ont proposé plusieurs façons créatives d’informer les locataires de leurs droits; par exemple, on pourrait obliger les propriétaires à afficher des copies du Code dans l’entrée des bâtiments, inclure des renseignements sur les droits de la personne dans les formules de demande de logement et les baux ou fournir une accréditation aux propriétaires qui peuvent démontrer qu’ils ont suivi une formation en droits de la personne.

2. Refus de louer un logement aux familles avec de jeunes enfants

Comme on l’a mentionné précédemment, en dépit des protections prévues par le Code, une forte proportion de propriétaires continuent de refuser de louer un logement aux familles avec de jeunes enfants.

Ce n’est pas facile pour un parent seul, car les propriétaires préfèrent une famille à deux revenus. Quand je cherchais un logement, j’ai essuyé de nombreux refus parce que les propriétaires craignaient que le loyer ne soit pas payé, même si mes antécédents étaient bons.
Mère seule prestataire d’aide sociale

Je cherche un logement depuis deux ans. Chaque demande a été refusée. Plusieurs propriétaires potentiels m’ont affirmé que leur appartement ne convenait pas aux enfants.
Mère seule

Le refus catégorique de louer aux familles avec de jeunes enfants est perpétué par l’existence continue d’immeubles réservés aux adultes. D’autres expressions utilisées pour décourager les familles de présenter une demande incluent « destiné aux jeunes professionnels » ou « conviendrait aux étudiants ».

Le Code autorise les restrictions au logement fondées sur l’âge dans certaines circonstances. Par exemple, l’article 15 permet d’accorder un traitement préférentiel aux personnes âgées de 65 ans ou plus. Il permet donc que des logements soient réservés aux personnes de plus de 64 ans. L’article 14 permet la mise en oeuvre de programmes spéciaux qui visent à alléger un préjudice ou un désavantage tel que les projets de logement sans barrière destinés aux personnes âgées atteintes de handicaps. L’article 18 crée un moyen de défense pour les organismes ou groupement religieux, philanthropique, éducatif, de secours mutuel ou social dont le principal objectif est de servir les intérêts des personnes âgées et qui offrent notamment des logements. En revanche, le Code ne prévoit aucun moyen de défense destiné à autoriser que des logements soient « réservés aux adultes » puisqu’ils entraînent l’exclusion des enfants ou des personnes qui n’ont pas atteint un certain âge[76]. La FRPO a fait remarquer que les exceptions énoncées dans le Code pourraient créer de la confusion parmi les propriétaires au sujet de ce qui est permis par la loi.

Le seuil d’âge relatif aux bâtiments réservés aux personnes âgées peut causer de la confusion sur le marché car tous les gens ne définissent pas les personnes âgées de la même manière. Bon nombre de personnes prennent leur retraite avant 60 ans. Certaines personnes considèrent les personnes de 55 ans et plus comme des personnes âgées, d’autres les personnes de 60 ans et plus.

Étant donné cette confusion, la FRPO, à l’instar de nombreux autres intervenants, a demandé instamment à la Commission de mener une campagne d’éducation et de sensibilisation auprès des propriétaires.

Le MSSC a dit à la Commission que les personnes handicapées sont particulièrement vulnérables aux effets des politiques d’occupation réservée aux adultes.

Bon nombre de nos clients requièrent des logements appropriés à leur handicap particulier. Or, la plupart de ces types de logements sont réservés aux personnes âgées ou se trouvent dans des bâtiments réservés aux adultes en vertu des exceptions prévues par le Code. Il faut reconnaître que bon nombre de nos clients tombent sous le coup du handicap et de l’état familial – ils sont handicapés et ont une famille. Les exceptions autorisant les logements réservés aux adultes et aux personnes handicapées font de la discrimination contre les parents handicapés de jeunes enfants.

Selon l’ONPHA, un grand nombre de propriétaires permettent aux jeunes célibataires d’occuper des bâtiments antérieurement réservés aux personnes âgées, reconnaissant que la demande de logement est limitée dans ce groupe d’âge. Cependant, ces changements ont mis en lumière les problèmes causés par l’intégration de populations ayant des attentes et des besoins différents.

3. Critères de location

Les personnes consultées ont fait part à la Commission de certaines politiques et pratiques de location couramment utilisées par les propriétaires qui posent des obstacles systémiques aux familles qui cherchent un logement.

Information sur le revenu
L'emploi de ratios pour déterminer la capacité de payer un appartement et d'exigences relatives au revenu minimum en Ontario a été jugé enfreindre le Code. La Commission d’enquête dans Kearney c. Bramalea[77] a conclu que les éléments de preuve avaient établi que ces pratiques avaient un effet disparate sur les groupes protégés sous le régime du Code, notamment ceux identifiés par l'état familial. Elle a également conclu que ces politiques étaient injustifiées puisqu'elles ne permettaient pas de prévoir si un locataire allait faillir à ses obligations.

Par la suite, le Code a été modifié par l’ajout d’une disposition permettant au propriétaire d'avoir recours, de la manière prescrite dans le Code et dans les règlements, aux renseignements sur le revenu, aux vérifications du crédit et aux références en la matière, aux antécédents en matière de logement, aux garanties et autres pratiques de commerce semblables pour choisir les locataires éventuels. Le Règlement 290/98 autorise les propriétaires à :

  • Demander à un locataire éventuel des références en matière de crédit ou des antécédents en matière de logement, ou les deux, et à lui demander l’autorisation de procéder à des vérifications de son crédit.
  • Prendre en considération les références en matière de crédit, les antécédents en matière de logement et les vérifications de crédit, soit isolément, soit en une combinaison quelconque, pour évaluer la situation du locataire éventuel et à choisir ou non celui-ci en conséquence.
  • Demander à un locataire éventuel des renseignements sur son revenu s’il demande également les renseignements susmentionnés (références en matière de crédit et vérifications, antécédents en matière de logement).
  • Prendre en considération les renseignements sur le revenu du locataire éventuel pour évaluer la situation de celui-ci et choisir ou non celui-ci en conséquence seulement s’il prend les renseignements sur le revenu en considération conjointement avec tous les autres renseignements qu’il a obtenus, ou si, après avoir demandé les renseignements concernant le crédit et les antécédents en matière de logement, il n’obtient que les renseignements sur le revenu. Une exception autorise l’utilisation des renseignements sur le revenu d’un locataire éventuel pour déterminer l’admissibilité de ce dernier à un loyer indexé sur le revenu.
  • Exiger que le locataire éventuel obtienne une garantie pour le loyer ou verse un dépôt de garantie conformément à la Loi de 1997 sur la protection des locataires.

Le Règlement réaffirme qu’il n’a pas pour effet d’autoriser le propriétaire à refuser un logement à une personne pour des motifs énoncés dans le Code.

La Commission estime que les propriétaires doivent examiner les critères prescrits d’une manière significative et valable, et s’efforcer de bonne foi d’effectuer une évaluation valable des locataires potentiels. Ils ne peuvent pas appliquer les critères arbitrairement pour un motif discriminatoire interdit qui tenterait de faire échec aux fins du Code.

Les personnes consultées ont dit à la Commission que l’utilisation des renseignements sur le revenu continue de poser un problème et que les propriétaires interprètent ou appliquent erronément les dispositions du Code et le Règlement 290/98 et continuent d’appliquer des ratios pour déterminer la capacité de payer un appartement.

L'emploi de ratios revenu-loyer et d'exigences relatives au revenu minimum continue de poser un obstacle de taille aux familles à faible revenu avec enfants qui cherchent un logement approprié. En dépit des décisions de la Commission d’enquête et du Tribunal des droits de la personne affirmant que l’utilisation de ces critères pour éliminer des locataires éventuels est interdite en vertu du Code, les propriétaires utilisent régulièrement ces règles d’abordabilité comme excuse pour refuser un logement aux familles à faible revenu... un grand nombre de propriétaires (et d’autres personnes) assimilent l’emploi de renseignements sur le revenu à l’approbation de l’usage des ratios revenu-loyer.
Centre pour les droits à l’égalité au logement

Le ministère des Services sociaux et communautaires a également mentionné que ces pratiques posent des obstacles aux prestataires du POSPH, affirmant que l’élimination des critères de revenu et des questions sur la source du revenu sur les formules de demande de logement profiterait aux prestataires du POSPH. Les propriétaires devraient se fier davantage aux références et aux antécédents en matière de paiement.

Antécédents en matière de crédit

Tel que mentionné précédemment, le Règlement 290/98 autorise les propriétaires à réclamer des références en matière de crédit et à procéder à des vérifications de crédit (avec la permission du locataire éventuel) et à prendre en considération ces renseignements pour choisir ou non un locataire. Comme on l’a vu précédemment, la Commission estime que les propriétaires qui prennent en considération ces renseignements doivent s’efforcer de bonne foi d’effectuer une évaluation valable des locataires potentiels.

Les personnes consultées ont également mentionné à la Commission que des antécédents défavorables en matière de crédit peuvent découler de l’éclatement de la famille et qu’un grand nombre de femmes ont de mauvais antécédents en matière de crédit pour cette raison. Cependant, certains propriétaires ont une politique globale de ne pas louer un logement aux personnes qui ont des antécédents défavorables en matière de crédit, ce qui peut avoir un effet disproportionné fondé sur l’état familial.

En outre, un grand nombre de jeunes, de nouveaux arrivants et de femmes retournant sur le marché du travail après une longue période consacrée à la prestation de soins ont peu ou point d’antécédents en matière de crédit. Dans l’affaire Ahmed c. Shelter Canadian Properties Limited[78], une Commission d’enquête sur les droits de la personne a jugé que la pratique d’exiger les antécédents en matière de crédit peut avoir un impact disproportionné sur les nouveaux arrivants et a souligné que le manque d’antécédents en matière de crédit n’équivaut pas à des antécédents négatifs en matière de crédit. Le propriétaire a reçu l’ordre de cesser et de s’abstenir de rejeter les demandes de location des nouveaux arrivants qui n’ont aucuns antécédents en matière de crédit.

Co-signataires

La Commission a appris que de nombreux propriétaires exigent automatiquement que les demandeurs à faible revenu (particulièrement les prestataires d’aide sociale) aient un co-signataire ou un garant. En outre, il arrive souvent qu’ils imposent aux co-signataires des ratios revenu-loyer restrictifs, ce qui pose un obstacle majeur pour ces familles, car rares sont celles qui peuvent trouver un co signataire ou un garant, surtout s’il doit respecter les ratios revenu loyer demandés.

L’utilisation de co-signataires ou de garants peut être appropriée lorsqu’un locataire a de mauvaises références ou des antécédents de défaut de paiement, mais le fait d’exiger des co-signataires ou des garants uniquement parce qu’un demandeur reçoit l’aide sociale pourrait contrevenir au Code. Bien que le paragraphe 2 (1) du Règlement 290/98 autorise un propriétaire à exiger qu’un locataire potentiel ait un garant, l’article 4 de ce Règlement interdit la discrimination fondée sur les motifs énoncés dans le Code, y compris l’état d’assisté social.

Antécédents en matière de logement

Certains groupes protégés par le Code ont peu ou point d’antécédents en matière de location, par exemple les femmes qui se réinstallent après l’échec de leur mariage ou les nouveaux arrivants au Canada. La Commission a appris que le traitement d’un propriétaire à l’égard de locataires potentiels n’ayant pas d’antécédents en matière de location peut avoir un impact négatif sur les groupes identifiés par le Code.

Les nouveaux immigrants et réfugiés font l’objet d’une discrimination systémique lorsqu’ils sont incapables de fournir des références (on leur demande généralement d’obtenir des références au Canada) pour obtenir un logement locatif. Certains propriétaires demandent à ces demandeurs de déposer un dépôt de garantie important équivalant dans certains cas à 12 mois de loyer.
Conseil ontarien des organismes de service aux immigrants

Le Code et le Règlement 290/98 autorisent les propriétaires à demander des renseignements sur les antécédents en matière de logement d’un locataire potentiel. Mais la décision dans l’affaire Ahmed [79] confirme que le manque d’antécédents en matière de logement ne doit pas être traité comme des antécédents négatifs en matière de logement.

Antécédents en matière d’emploi

La Commission a appris que certains propriétaires exigent que les demandeurs aient un emploi stable à long terme et que cela crée des obstacles fondés sur les motifs prohibés par le Code, notamment l’âge, le sexe, l’état familial et matrimonial et un handicap.

Ces exigences ont des effets nettement négatifs sur les jeunes qui arrivent sur le marché du travail. Elles peuvent également poser des problèmes aux femmes avec enfants qui interrompent une relation après être restées à la maison pendant longtemps pour prendre soin de leur famille. À la fin d’une relation, ces femmes doivent réintégrer le marché du travail pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs enfants et elles ont souvent des antécédents irréguliers et apparemment instables associés à la recherche d’un lieu de travail qui leur permettra de s’occuper le mieux possible de leur famille.
Centre pour les droits à l’égalité au logement

Dans la cause Sinclair c. Morris A. Hunter Investments[80], une Commission d’enquête a jugé que les politiques de location obligeant les demandeurs à travailler en permanence ou à satisfaire des critères minimums d’ancienneté auprès d’un employeur constituaient de la discrimination contre les demandeurs de logement fondée sur l’âge, les experts ayant démontré qu’il y a une relation très étroite entre l’âge et la durée d’occupation d’un emploi et entre l’âge et la probabilité d’avoir un emploi permanent.

4. Politiques liées à l’occupation du logement

Politiques d’occupation

Les personnes consultées s’inquiétaient des politiques d’occupation. Par exemple, une mère seule a mentionné qu’on lui disait souvent qu’elle avait besoin d’un logement plus grand parce que sa famille comptait trois personnes, alors qu’un couple avec un enfant pouvait louer un logement avec deux chambres à coucher sans problème. Le Centre pour les droits à l’égalité au logement a dit ce qui suit :

Les fournisseurs de logement hésitent considérablement à louer un logement aux familles lorsqu’un parent doit partager une chambre à coucher avec un ou plus d’un enfant, que des enfants doivent partager une chambre (particulièrement s’ils sont de sexe opposé), qu’un membre de la famille doit dormir dans le salon, etc... Ces politiques privent effectivement les familles de l’accès aux logements qu’elles peuvent se payer.

L’OFIFC a mentionné à la Commission que certaines familles doivent parfois prendre soin d’un parent éloigné, d’un ou des enfants d’un ami et que le propriétaire se plaint que ces personnes ne figurent pas sur le bail et que le nombre d’occupants autorisés dans le logement a été dépassé.

La Commission a appris que le manque de logements libres et abordables pour les familles plus nombreuses peut créer un surpeuplement, parce que ces familles n’ont pas d’autres options.

Selon plusieurs personnes consultées, même si les questions de santé et de sécurité peuvent être utilisées pour justifier des normes d’occupation, elles ne doivent pas servir à imposer des restrictions sur le partage des chambres à coucher par des enfants de sexe opposé ou par les parents et leurs enfants. Le Centre pour les droits à l’égalité au logement a fait valoir que les normes d’occupation municipales ou les règlements en matière de surpeuplement constituent des normes d’occupation suffisantes et acceptables.
La FRPO n’était pas d’accord.

Pratiquement toutes les entreprises établies en Ontario ont des politiques qui prévoient l’imposition de frais correspondant à la quantité consommée... Il n’y a aucune raison de traiter le secteur du logement locatif différemment des autres. Une grande partie de nos coûts varient en fonction de la taille du ménage. Par exemple, les frais des services publics tels que l’électricité, l’eau chaude et les services d’adduction d’eau et d’égouts sont généralement assumés par le propriétaire en Ontario car ils sont facturés collectivement. Le propriétaire doit récupérer ces coûts au moyen des loyers chargés aux occupants. Or, ces coûts augmentent en fonction du nombre d’occupants... en ayant des politiques qui visent à prévenir le surpeuplement dans une unité résidentielle, l’industrie s’assure qu’il y a un lien plus étroit entre les loyers imposés et les frais engagés.

L’ONPHA a déclaré à la Commission que, à un certain point, le surpeuplement devient inacceptable et même contraire aux normes des biens-fonds. « Un immeuble qui compte des unités résidentielles très encombrées devient impossible à administrer, ce qui a des conséquences négatives pour tous les locataires. » L’ONPHA a poursuivi en disant :

La position de l’ONPHA n’est pas que les propriétaires devraient avoir le droit d’être rigides et de refuser l’accès aux petits logements si cela, en fait, réduirait les périodes d’attente ou améliorerait l’abordabilité. Mais il faut examiner la situation dans son ensemble. La loi adopte souvent une perspective trop étroite sur certaines questions; en effet, une seule décision de permettre le surpeuplement n’aurait pas des conséquences majeures, mais un grand nombre de décisions à cet effet nuiraient gravement à la santé de la collectivité et, partant, de toutes les personnes qui y vivent.

Dans l’affaire Desroches c. Québec (Commission des droits de la personne)[81], la Cour d’appel du Québec a déterminé que les politiques concernant le nombre d'occupants par pièce ou par chambre à coucher peuvent avoir des retombées négatives pour les familles avec enfants. Lorsqu’une politique a un impact négatif sur un groupe protégé par le Code, le fournisseur de logement doit démontrer qu’elle est une exigence de bonne foi, en ce qu’elle est reliée à un objectif valable, a été adoptée de bonne foi et pourrait être conçue de manière à accommoder sans occasionner un préjudice indû.

Définition de « locataire »

La Loi de 1997 sur la protection des locataires[82], définit le terme « locataire » comme suit : « Personne qui paie un loyer en échange du droit d’occuper un logement locatif, y compris ses héritiers, ayants droit et représentants personnels. » La définition exclut les conjoints et les membres de la famille qui vivent dans le logement locatif. Par conséquent, lorsque le locataire décède ou quitte le logement, les conjoints ou les membres de la famille n’ont aucun droit. Les familles peuvent donc être sérieusement désavantagées. L’ACTO a porté à l’attention de la Commission un cas où un propriétaire a entamé une procédure d’expulsion contre une femme et ses trois enfants après le départ de son mari, qui signait les chèques de loyer. Avant de partir, il avait signé un avis de résiliation à la demande du propriétaire. La femme vivait dans ce logement depuis 17 ans. Au bout du compte, l’affaire a été réglée et le propriétaire a accepté de laisser la famille rester pour le même loyer modéré.

Politiques interdisant les transferts

Certains propriétaires ont adopté des politiques interdisant les transferts entre les unités résidentielles dans le même bâtiment. Ces politiques ont des répercussions négatives sur les familles avec enfants, parce que leurs besoins changent à mesure que leur famille grandit. Elles obligent ces familles à quitter le bâtiment pour obtenir un logement plus grand.

La FRPO a soutenu que les politiques interdisant les transferts ne sont pas discriminatoires, à moins qu’elles ne s’appliquent qu’aux familles, et qu’elles se fondent sur des pratiques commerciales valables :

Les entreprises adoptent ce genre de politique pour des raisons d’affaires valables. Par exemples, les transferts occasionnent des frais de transaction et augmentent les frais administratifs. Mais, ce qui importe davantage, les frais de roulement de chaque logement peuvent être énormes, particulièrement à la lumière des conditions du marché actuelles en Ontario... Un transfert au sein d’un même bâtiment crée deux roulements au lieu d’un, ce qui augmente considérablement les coûts du propriétaire.

Dans l’affaire Ward c. Godina[83], une Commission d’enquête a jugé que les politiques interdisant les transferts ont des retombées négatives pour les familles avec enfants et enfreignent le Code.

Motifs de santé et de sécurité 

La Commission a appris que certains propriétaires ont pour pratique de refuser de louer des appartements situés aux étages supérieurs aux familles avec de jeunes enfants pour des motifs de santé et de sécurité. Le ministère des Affaires municipales et du Logement a dit à la Commission que les propriétaires n’ont aucune raison d’invoquer la sécurité des enfants pour interdire aux familles de louer des logements dans les tours d’habitation, car la Loi de 1997 sur la protection des locataires les oblige à entretenir leurs bâtiments et leurs logements et à veiller au respect des normes en matière de santé, de sécurité et d’entretien. D’autres intervenants ont fait remarquer que les locataires devraient prendre des mesures positives pour accommoder les familles avec de jeunes enfants.

Le manque d’appartements au rez-de-chaussée ne devrait pas servir de prétexte pour refuser de louer un logement à une famille avec de jeunes enfants... Il incombe au propriétaire d’accommoder les différences entre les gens dans leurs conditions de logement et cela inclut les besoins des familles en ce qui concerne la sécurité et la jouissance raisonnable.
Federation of Metro Tenants Associations (FMTA)

Accès aux installations récréatives et aux aires communes 

Au fil des ans, la Commission a régulièrement entendu parler de cas où les propriétaires ou les syndicats de copropriété empêchent les enfants et les jeunes d’utiliser les installations récréatives ou les aires communes.

Le MSSC a dit à la Commission que les règlements qui restreignent l’accès aux installations pour des motifs reliés à l’état familial ont un effet disproportionné sur les familles qui ont des membres handicapés.

Nos clients et leur famille ont grandement besoin de logements qui ont une piscine, de l’équipement de conditionnement physique et une buanderie. Les activités récréatives et les services appuient leurs efforts en vue de participer à la vie de la société. Bon nombre de ces installations récréatives sont interdites aux enfants – et partant à leurs parents, tandis que les buanderies accessibles uniquement aux résidents ont pour effet d’empêcher nos clients handicapés d’embaucher des soignants non résidents.
MSSC

La FMTA a fait remarquer que les propriétaires adoptent parfois des règlements contre le vagabondage ou le bruit, en réaction aux attitudes négatives envers les jeunes, particulièrement les jeunes racialisés.

Les familles avec des enfants plus âgés, c’est-à-dire des adolescents, constatent parfois que leurs enfants font l’objet d’attitudes négatives ou de stéréotypes. C’est particulièrement le cas pour les jeunes de couleur qui sont vus comme des criminels, des instigateurs de désordre, etc. En fait, les propriétaires adoptent souvent des règlements contre le vagabondage et le bruit pour éloigner les jeunes des aires communes des bâtiments.

La FMTA a mentionné ce qui suit : « Il est vrai que le bruit et certains comportements des jeunes peuvent entraver la jouissance raisonnable des locataires du bâtiment mais, d’un autre côté, les jeunes sont également des locataires dans le bâtiment et ils ont le droit de se servir des aires communes. »

Dans la cause Leonis c. Metropolitan Toronto Condominium Corporation[84], une Commission d’enquête a déterminé qu’une politique restreignant l’accès aux installations récréatives pour les enfants de moins de 16 ans constituait de la discrimination fondée sur l’état familial.

Autres questions

L’ACTO a soulevé le manque de mécanismes externes pour interjeter appel des décisions de refuser et de révoquer des subventions au logement en vertu de la Loi de 2000 sur la réforme du logement social[85]. La révocation des subventions peut entraîner des expulsions lorsque le loyer est arriéré. L’ACTO a déclaré ce qui suit :

Les locataires du logement social, dont bon nombre sont des mères seul soutien de famille, des personnes handicapées et des immigrants risquent de devenir des sans-abri parce que le seul mécanisme d’appel est un examen interne. Or, ces examens internes sont effectués par le propriétaire qui a pris la décision considérée. Les propriétaires de logement social renversent rarement les décisions lors d’un examen interne. Lorsque l’examen est injuste, la seule procédure éventuellement disponible est la révision judiciaire.

On a également soulevé le problème de l’administration de la disposition de la Loi de 2000 sur la réforme du logement social qui oblige les occupants à signaler tout changement au revenu ou à la taille du ménage. Les gestionnaires peuvent prolonger le délai à leur gré, mais tous ne le font pas et les familles qui ne signalent pas rapidement l’ajout d’un enfant au ménage risquent de perdre leur subvention.

5. Enfants bruyants

Les enfants bruyants sont un des problèmes les plus souvent soulevés au regard du logement. Les personnes qui habitent un logement loué vivent à proximité les unes des autres. Or, les enfants, de par leur nature, peuvent être bruyants. Les bébés pleurent, les jeunes enfants parlent fort et les enfants courent, sautent et s’amusent. Les conflits sont inévitables. Malheureusement, ils aboutissent trop souvent au harcèlement ou à l’éviction des familles qui font ce genre de bruit normalement associé aux enfants. Durant la table ronde sur le logement, la Commission a entendu dire que, même lorsque les familles ne sont pas menacées d’éviction, le harcèlement concernant le bruit normalement associé aux enfants peut empoisonner la vie de ces locataires. Par exemple, les familles se sentent parfois obligées de quitter leur appartement le soir et la fin de semaine pour éviter les conflits avec les autres locataires.

La FRPO a fait remarquer qu’il peut y avoir des cas où le bruit produit par une famille est exceptionnel :

Il n’est pas exagéré de dire que le bruit peut ruiner la vie des voisins. Il n’est pas raisonnable de présumer que les parties pourront toujours coopérer pour régler le problème. Dans certaines circonstances, il vaudra mieux que la famille trop bruyante trouve un environnement qui lui convient mieux.

De nombreuses personnes consultées ont souligné que le bruit des enfants est différent des autres bruits et ne peut être assujetti à la même norme que, par exemple, un stéréo qui joue trop fort. Les jeunes enfants font naturellement du bruit et celui-ci ne peut être contrôlé comme les autres bruits. Le parentage doit être raisonnable; mais il faut également reconnaître que les enfants ont le droit d’être des enfants.

Tout en respectant le Code, les propriétaires de logement doivent garder à l’esprit qu’il faut s’attendre à ce que les familles avec de jeunes enfants fassent du bruit. Ils ne doivent donc pas assujettir ces familles à la même norme que les autres ménages, notamment les couples sans enfant. Dans bien des cas, les familles avec enfants feront plus de bruit. Pourvu que les parents fassent des efforts raisonnables pour minimiser les dérangements, le propriétaire du logement ne doit pas cibler la famille ou la menacer d’éviction à cause du bruit.
Centre pour les droits à l’égalité au logement

Les participants à la table ronde sur le logement ont également débattu le lien entre le traitement des familles par le marché du logement locatif et l’intolérance générale de la société à l’égard des familles et des enfants. On percevait que l’intolérance générale à l’égard des enfants incite les locataires à déposer des plaintes liées au bruit.

Le Tribunal du logement de l’Ontario règle souvent des différends causés par le bruit. Le ministère des Affaires municipales et du Logement a déclaré à la Commission que le Tribunal peut refuser une demande d’éviction lorsque le motif invoqué est la présence d’enfants dans le logement loué, pourvu que l’occupation des enfants ne constitue pas du surpeuplement. Toutefois, la Commission a appris que les adjudicateurs siégeant au Tribunal ont peu d’expérience de l’application du Code et que les décisions de ce Tribunal ne sont pas nécessairement conformes à ce dernier.

Selon de nombreux intervenants, lorsque le bruit des enfants dérange vraiment les autres locataires, les propriétaires devraient prendre des mesures pour résoudre la question. Ils pourraient, par exemple, tenter une médiation entre les locataires, envisager un déménagement du plaignant dans un autre appartement ou une amélioration de l'insonorisation si cela ne cause pas de difficultés indues. Les propriétaires, a souligné le Centre pour les droits à l’égalité au logement, devraient prendre des mesures concrètes contre les locataires qui harcèlent les familles même si le bruit fait par leurs enfants est raisonnable, comme ils le feraient si les locataires étaient harcelés pour d’autres motifs énoncés dans le Code. D’un autre côté, les organismes de propriétaires ont dit à la Commission que les propriétaires se retrouvent dans une situation difficile dans ces circonstances et qu’ils ne possèdent pas nécessairement les compétences en médiation pour la régler. Par exemple, un locataire qui se plaint du bruit pourrait menacer de réclamer un abattement de loyer en conséquence. La FMTA a déclaré :

Nous encourageons les familles avec enfants d’essayer de collaborer avec leurs propriétaires et leurs voisins à la recherche de solutions pour réduire le bruit. Ils pourraient envisager, par exemple, une insonorisation, du tapis ou un déménagement dans un autre appartement. La FMTA reconnaît que le bruit peut entraver la jouissance raisonnable des locataires des immeubles d’habitation, mais elle estime que les évictions ne devraient absolument pas être une façon de contrôler le bruit.

Au chapitre de l’insonorisation, l’ONPHA a affirmé :

En principe, l’insonorisation est une solution potentielle, probablement partielle. Mais, dans bien des cas, il est impossible de réaménager les logements pour les insonoriser. Et même si cela était physiquement possible, le coût de l’insonorisation serait prohibitif pour la majorité des propriétaires de logement social si elle était effectuée sur une grande échelle... Il y a une tension, en l’occurrence, entre les approches juridiques susceptibles de régler les problèmes d’un particulier et l’utilisation des ressources financières restreintes des propriétaires de logement social au bénéfice de tous les locataires.

En vertu du Code, les propriétaires ont le devoir de s’assurer que le logement qu’ils fournissent englobe les personnes identifiées par les motifs du Code (y compris l’état familial) et de prendre des mesures pour éliminer les obstacles qui existent, à moins que ces mesures ne causent un préjudice indû. Les coûts causeront un préjudice indû s’ils sont quantifiables, démontrés être liés à l’accommodement et tellement importants qu’ils modifieraient la nature essentielle de l’entreprise ou affecteraient considérablement sa viabilité.

Principales Conclusions 

Les familles avec enfants qui cherchent un logement adéquat abordable continuent d’être gravement et systématiquement désavantagées. Cette situation est particulièrement vraie pour les familles les plus vulnérables, notamment les familles monoparentales, racialisées, nouvellement arrivées, les familles autochtones et celles qui incluent des personnes handicapées. Les facteurs posant problème incluent le nombre insuffisant de logements abordables, les attitudes discriminatoires de la part des propriétaires et le faible revenu, particulièrement dans le cas des prestataires d’aide sociale.


[72] 16 décembre 1966, 993 R.T.N.U. 3, Can. T.S. 1976 No. 46 (date d’entrée en vigueur : le
3 janvier 1976, date d’adhésion du Canada : le 19 août 1976). L’Observation générale sur le droit à un logement suffisant rédigé par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels (Observation générale no 4 du CESC sur le paragraphe 11(1), 13/12/91) précise qu’il s’agit d’un droit à un logement suffisant qui tient donc compte notamment de considérations quant au droit au maintien dans les lieux, à l’accessibilité, à l’habitabilité et à un coût abordable. Le coût financier d’un logement ne devrait pas être tel qu’il compromette ou menace la réalisation et la satisfaction d’autres besoins fondamentaux. Le droit à un logement suffisant a également été reconnu par la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (18 décembre 1979, Résolution de l’Assemblée générale 34/180 (date d’entrée en vigueur : le 3 septembre 1981), date d’adhésion du Canada : le 9 janvier 1982) et par la Convention relative aux droits de l’enfant (20 novembre 1989, Résolution de l’Assemblée générale 44/25 (date d’entrée en vigueur : le 2 septembre 1990), date d’adhésion du Canada : le 12 janvier 1992), article 18 que le Canada a aussi ratifiées.
[73] (1998) 34 C.H.R.R. D/1; confirmé (2001), 39 C.H.R.R. D/111 (Cour supérieure de justice de l’Ontario)
[74] Ministère des Services sociaux et communautaires, Programme Ontario au travail : Rapport statistique trimestriel, www.gov.on.ca
[75] Les taux d’aide sociale ont été augmentés de 3 % pour les bénéficiaires du Programme Ontario au travail et du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées. L’allocation-logement maximale aux termes du Programme Ontario au travail va de 335 $ par mois pour une personne célibataire à 694 $ par mois pour une famille de six personnes ou plus. Un parent seul de deux enfants recevrait une allocation-logement de 571 $ par mois, plus une allocation pour besoins essentiels de jusqu’à 627 $ par mois (selon l’âge des enfants), pour un revenu mensuel maximal total de 1198 $ (mémoire du MSSC).
[76] Pour un examen détaillé de la position de la Commission sur le logement et les personnes âgées, consulter le document intitulé Politique sur la discrimination fondée sur l'âge à l'endroit des personnes âgées (Commission ontarienne des droits de la personne, mars 2002), en ligne : Commission ontarienne des droits de la personne : www.ohrc.on.ca .
[77] Supra, note 73.
[78] Commission d’enquête de l’Ontario, 2 mai 2002, inédit
[79] Ibidem
[80] Commission d’enquête de l’Ontario, 5 novembre 2001, inédit
[81] (1997), 30 C.H.R.R. D/345 (Cour d’appel du Québec)
[82] L.O. 1997, chap. 24, art. 1
[83] (1994) C.H.R.R. Doc. 94-130 (Ont. Bd. Inq.)
[84] (1998), 33 C.H.R.R. D/479 (Ont. Bd. Inq.)
[85] L.O. 2000, chap. 27

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