Parce qu’on importe!

Sommaire

Parce qu’on importe! présente les résultats de la consultation sur les questions de droits fondamentaux touchant les personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances qui a été menée à l’échelle de l’Ontario par la Commission ontarienne des droits de la personne (CODP). Ce rapport offre un sommaire des propos tenus par les 1 500 personnes et organisations sondées partout en Ontario.

Tout au long de la consultation, les participants ont soulevé des préoccupations considérables à propos de la discrimination et du harcèlement auxquels font face les personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances dans de nombreuses sphères de la vie. Les troubles mentaux peuvent inclure la schizophrénie, le trouble bipolaire, la dépression et les troubles anxieux. Les dépendances peuvent inclure les dépendances à l’alcool et aux autres drogues, et le jeu compulsif.

Les participants nous ont dit que les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances se heurtaient à des stéréotypes répandus, comme le fait de constituer un risque pour la sécurité ou d’être incapables de prendre des décisions par elles-mêmes. Ces stéréotypes sont à l’origine d’une discrimination courante en matière de logement, d’emploi et de services, qui est profondément ancrée dans les lois, politiques et pratiques organisationnelles, et attitudes personnelles.

Bon nombre de personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances ne savent pas qu’elles ont le droit de vivre à l’abri de la discrimination aux termes du Code des droits de la personne de l’Ontario (Code). Il semblerait également que les règles, les politiques et les pratiques en matière d’emploi, de logement et de services ne sont pas conçues en fonction des besoins des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances. Des obstacles multiples sont créés qui nuisent à l’accès équitable dans ces secteurs. Par exemple, des services peuvent ne pas convenir aux personnes aux prises avec des handicaps épisodiques, ce qui signifie que seules les personnes dont les handicaps sont jugés permanents pourront y être admissibles.

Beaucoup d’organisations ne semblent pas conscientes de leurs responsabilités aux termes du Code envers la promotion des droits fondamentaux des personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances. Nous avons appris qu’elles étaient nombreuses à nécessiter des conseils sur la façon de respecter leur obligation d’accommodement des besoins individuels des personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances. En ce qui a trait aux droits contradictoires, les personnes consultées trouvaient qu’il pouvait être difficile de concilier les droits des personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances, et ceux des autres personnes.

Parmi les thèmes importants ressortis de la consultation figuraient le respect de la dignité et de la vie privée des gens, des différences individuelles, et du droit à l’autonomie, à la non-discrimination, et à la pleine intégration et participation à la collectivité. Ces principes sont enchâssés dans la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CRDPH) et reflètent l’objectif du Code. Par exemple, beaucoup de personnes ont fait part d’inquiétudes à propos de la vie privée en nous racontant que l’information relative à leur handicap avait été demandée ou retransmise par des employeurs ou des fournisseurs de logements ou de services de façon non appropriée.

On nous a expliqué que des facteurs sociétaux contribuaient à l’exclusion des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances, et à la discrimination à laquelle elles se heurtaient. La pauvreté constitue clairement une source de préoccupations. En Ontario, les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances sont beaucoup plus susceptibles d’être pauvres que les personnes ayant d’autres handicaps ou n’ayant aucun handicap. Nous avons entendu que les obstacles au logement, aux services et aux possibilités d’emploi auxquels se heurtent les personnes à faible revenu nuiront probablement aux personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances.

De plus, on nous a dit que le manque d’options en matière de logements abordables et la grande pauvreté menaient souvent à l’itinérance. Le manque de services de santé mentale, de logements et d’autres soutiens aurait fait grimper indûment le nombre de personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances au sein du système de justice pénale. La discrimination contribue au manque de scolarisation, ainsi qu’aux taux élevés de chômage et de pauvreté.

On nous a également dit que la discrimination fondée sur d’autres handicaps et d’autres motifs de discrimination interdits par le Code avait des répercussions sur la santé et le bien-être des gens. Parmi les autres motifs de discrimination interdits cités figuraient :

  • la race et les motifs connexes, dont l’identité autochtone
  • l’âge
  • le sexe et l’identité sexuelle
  • l’état d’assisté social.

La discrimination fondée sur la maladie et les dépendances peut s’ajouter à d’autres formes de discrimination, ou en chevaucher, et créer ainsi une toute autre série d’expériences et de préjudices. Les personnes aux prises avec des dépendances peuvent faire face à des formes de stéréotypage et à des inégalités particulières, comparativement aux personnes qui ont uniquement des troubles mentaux.

Certaines formes de discrimination sont explicites et directes, tandis que d’autres sont non intentionnelles et subtiles. Certains fournisseurs de logements locatifs, employeurs et fournisseurs de services, y compris des fournisseurs de soins de santé, peuvent refuser des personnes en raison de facteurs liés à leur handicap. Les stéréotypes peuvent mener à du harcèlement à l’endroit des personnes handicapées sous forme de commentaires négatifs, d’isolement social ou de gestes malvenus de la part d’employeurs, de locateurs, de collègues ou de fournisseurs de services. Nous avons aussi appris que des personnes pouvaient se faire refuser un emploi, un service ou un logement parce que des règles d’apparence neutre leur causent en réalité un préjudice. Il pourrait s’agir par exemple de règles touchant la sélection des locataires, l’embauche d’employés ou la vérification du casier judiciaire.

Cependant, certains signes laissent entrevoir des changements sur le plan de la perception qu’a la société des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances. Aux échelles provinciale et fédéral, la santé mentale constitue maintenant une priorité des gouvernements. La Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées présente les personnes handicapées non pas comme des bénéficiaires de charité, mais comme un groupe de personnes ayant des droits. En ratifiant cette convention, le Canada a accepté de prendre des mesures pour assurer le traitement équitable et non discriminatoire de toutes les personnes handicapées dans une variété de sphères de la vie. Partout en Ontario, on constate et reconnaît de plus en plus les obstacles importants auxquels se heurtent les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances. Des personnes et des organisations demandent qu’on sensibilise davantage la population à la santé mentale et qu’on apporte des changements aux lois et politiques afin d’éliminer les stéréotypes négatifs et la discrimination.

La prévention et l’élimination de la discrimination sont une responsabilité partagée. Ce rapport inclut des recommandations de mesures que devraient prendre les gouvernements, fournisseurs de logements, employeurs, fournisseurs de services et autres parties, ainsi qu’une série d’engagements que prend la CODP en vue d’éliminer la discrimination fondée sur la maladie mentale et les dépendances en Ontario.

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Print: 978-1-4606-0099-3 | HTML: 978-1-4606-0100-6 | PDF: 978-1-4606-0101-3
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Partie A : Historique et contexte - 1. Introduction

Parce que j’ai des troubles mentaux les gens semblent penser qu’ils peuvent faire ce qu’ils veulent car je n’ai pas de valeur en tant qu’être humain. Mes troubles mentaux ne devraient pas me définir. 

- Mémoire écrit

Au Canada et ailleurs dans le monde, de nombreux progrès ont été réalisés en matière de protection des droits fondamentaux des personnes handicapées. Toutefois, au cours de notre consultation sur les droits de la personne, les troubles mentaux et les dépendances en Ontario, on nous a fait part d’une situation bien différente.

On nous a dit que les personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances continuent de subir une marginalisation et une exclusion considérables. Nous avons entendu que, bien que les gens bénéficient d’une protection contre la discrimination et le harcèlement aux termes des dispositions du Code des droits de la personne de l’Ontario (Code) interdisant ces dernières sur la base d’un « handicap », la réalité ne traduit pas cela.

En 2009, la CODP a identifié la santé mentale comme « priorité stratégique ». Le présent rapport est le fruit d’une consultation menée partout dans la province sur les problèmes qu’éprouvent les personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances quant au respect de leurs droits fondamentaux. Le but était de repérer les facteurs qui empêchent ces personnes de participer pleinement à la vie économique, sociale et culturelle en Ontario. La consultation orientera le travail futur de la CODP et préparera le terrain pour l’adoption d’une politique sur les droits de la personne et la santé mentale. Les politiques de la CODP traduisent notre interprétation du Code et fournissent des normes, des lignes directrices et des pratiques exemplaires indiquant comment les particuliers, les fournisseurs de services, les fournisseurs de logements, les employeurs et les autres doivent agir pour assurer l’égalité de tous les Ontariennes et Ontariens.

La Commission ontarienne des droits de la personne est un organisme autonome constitué par une loi. Sa mission est de promouvoir, protéger et faire progresser les droits de la personne dans toute la province, tel qu’établi dans le Code des droits de la personne de l’Ontario (Code). Pour ce faire, la CODP cerne et surveille les tendances systémiques en matière de droits de la personne, élabore des politiques, sensibilise le public, effectue des recherches, sonde l’intérêt public et utilise ses pouvoirs légaux pour mettre en place des solutions touchant les droits de la personne qui sont dans l’intérêt du public.

Le présent rapport présente les commentaires de participants sur les obstacles que l’on peut avoir à surmonter, tels que la discrimination directe, le harcèlement, le manque de mesures d’adaptation ou la discrimination systémique pouvant bafouer les droits reconnus dans le Code. Il expliquera également comment de nombreux facteurs sociaux créent des conditions propices à la discrimination. Les expériences des gens peuvent être liées aux droits de la personne protégés par la Charte canadienne des droits et libertés (Charte) ou d’instruments internationaux sur les droits de la personne comme la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées (CRDPH).

Des centaines d’individus et organisations ont identifié de nombreux différents types d’inégalités et de préoccupations ayant mené à une discrimination répandue contre les personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances. Certaines organisations ont trouvé difficile de comprendre leurs obligations aux termes du Code et de s’en acquitter. Elles ont remarqué que c’était le cas en particulier lorsqu’elles interprétaient l’obligation d’offrir des mesures d’adaptation aux personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances au point du préjudice injustifié – surtout dans les situations complexes où les droits fondamentaux de certaines personnes peuvent être en concurrence avec les droits des autres. Comme c’est le cas pour d’autres groupes de personnes protégées aux termes du Code, nous admettons qu’il peut parfois être difficile pour les parties en cause de répondre aux préoccupations à propos des droits fondamentaux des personnes aux prises avec un handicap psychosocial. Le point de vue de chaque partie doit être pris en considération avec soin.

Éliminer les obstacles discriminatoires et assurer l’équité des personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances sont des responsabilités partagées. Un effort concerté est requis des décideurs, des législateurs et des institutions publiques et privées à tous les niveaux. Il est essentiel que les personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances assistent aux discussions et soient représentées dans les démarches visant à instaurer des changements.

Le soutien des pairs, c’est aussi notre représentation aux discussions. 

– Participant(e) à la table ronde d’Ottawa

Le présent rapport contient des recommandations à l’intention du gouvernement, des employeurs, des fournisseurs de logements, des fournisseurs de services et d’autres visant à revoir et éliminer les obstacles qui soulèvent des préoccupations pour les droits de la personne. Il présente également les mesures que prendra la CODP pour s’attaquer à la discrimination et au harcèlement dans ce domaine.

On nous a dit que des directives beaucoup plus concrètes sont nécessaires pour enrayer les attitudes discriminatoires, assurer la reddition de comptes et sensibiliser les gens, les organisations et le grand public aux droits et responsabilités établis dans le Code. La CODP collaborera avec de multiples intervenants pour répondre à ces besoins.

2. Historique

Les tribunaux ont reconnu depuis longtemps l’oppression traditionnellement subie par les personnes aux prises avec des maladies mentales ou des troubles mentaux[1]. Dans l’arrêté de la Cour suprême du Canada dans l’affaire R. c. Swain, le juge en chef Lamer écrivait :

De tout temps, les malades mentaux ont été l’objet d’abus, de négligence et de discrimination dans notre société. L’opprobre de la maladie mentale peut être très lourd à porter. L’intervenant [le C.C.D.P.H.] décrit ainsi la façon dont les malades mentaux ont été traités dans l’histoire :

Pendant des siècles, les personnes souffrant de déficience mentale ont été systématiquement isolées, placées en marge de la société, dévalorisées, ridiculisées et exclues des processus social et politique normaux.

J’estime que cette description est malheureusement exacte; elle semble venir d’une peur irrationnelle de notre société face au malade mental[2].

Les personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances comme la schizophrénie, les troubles bipolaires, la dépression et l’alcoolisme, se sont souvent heurtées à l’incompréhension, l’ignorance et la peur. Depuis les années 1960, des groupes d’usagers/survivants[3] et d’autres organisations travaillent à faire progresser les droits fondamentaux des personnes impliquées dans le système de soins psychiatriques et à remettre en question ces attitudes. En raison de stéréotypes négatifs répandus et du manque d’acceptation sociale de ces handicaps, les personnes ayant des troubles mentaux ou des dépendances peuvent faire face à des difficultés complexes lorsqu’elles assument leurs droits et les font valoir au quotidien.

Toutes les personnes handicapées ont le même droit à l’égalité des chances aux termes du Code, que leur handicap soit visible ou non. Les personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances constituent un groupe diversifié, et elles vivent leur handicap et les obstacles sociaux de différentes façons. Les handicaps sont souvent « invisibles » et épisodiques, dans la mesure où les gens alternent parfois entre des périodes de présence et d’absence de handicap.

Outre le Code, la Loi de 2005 sur l’accessibilité pour les personnes handicapées de l’Ontario (LAPHO)[4] aborde le droit à l’égalité des chances et l’inclusion des personnes handicapées. L’objectif de la LAPHO est de réaliser l’accessibilité intégrale en Ontario d’ici 2025. Elle met en place des normes (service à la clientèle, transports, milieu bâti, emploi et information et communications) que les organismes publics et privés devront mettre en place dans un délai donné.

La LAPHO est une loi importante qui peut améliorer l’accessibilité en matière d’emploi et de services ainsi que de la vie publique pour les personnes handicapées. Cependant, elle peut encore être améliorée pour traduire pleinement l’esprit et les exigences du Code. Par exemple, il faut tenir compte des principes des droits de la personne pour que les exigences de la LAPHO en matière d’accessibilité visent également les personnes ayant des troubles mentaux[5]. Pour lire d’autres commentaires de la CODP sur les normes de la LAPHO, visitez www.ohrc.on.ca.

Faire de la dignité, de la valeur et de l’autonomie des gens à égalité avec les autres une réalité est fondamental pour faire progresser les droits fondamentaux des personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances. Ces principes constituent une part essentielle des traités internationaux sur les droits de la personne tels que la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées (CRDPH - voir l’article 1.6.3 pour plus de détails). La dignité et l’égalité constituent les assises du Code. Le défi est de faire en sorte que les droits et principes légaux deviennent une réalité pour les personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances partout en Ontario.

2.1. Accroître la sensibilité aux disparités

Aux niveaux provincial et fédéral, on accorde une plus grande attention à la suffisance et à la coordination des services de santé mentale et autres services de soutien. En 2003, le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a mené une consultation à l’échelle nationale. En 2006, il a publié De l’ombre à la lumière (le rapport Kirby) et, en 2012, a rendu publique la première stratégie nationale sur la santé mentale, où figurent des recommandations de grande portée pour la réforme des services de santé mentale. En 2008, le ministre de la Santé et des Soins de longue durée de l’Ontario a créé un groupe consultatif chargé d’élaborer une stratégie sur dix ans visant à améliorer les services de santé mentale et de lutte contre les dépendances en Ontario. Il a publié sa stratégie sur la santé mentale et la lutte contre les dépendances en 2011.

En plus d’insister sur la prestation de services, les gouvernements fédéral et ontarien se sont penchés sur l’exclusion sociale et la stigmatisation auxquelles font face les personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances. Les deux paliers de gouvernement ont fait de la santé mentale une priorité, le gouvernement fédéral instituant la Commission de la santé mentale du Canada, alors que le gouvernement de l’Ontario adoptait une stratégie sur la santé mentale et les dépendances. Les deux paliers de gouvernement se sont également engagés à changer les attitudes négatives dans de nombreux secteurs, notamment auprès des jeunes et dans les soins de santé[6].

 

Les gens sont prêts à discuter de santé mentale, mais nous avons du chemin à faire en ce qui concerne les préjugés et stéréotypes à propos de la santé mentale et des dépendances. - Barbara Hall, commissaire en chef, CODP

 

 

[1] Voir Battlefords and District Co-operative Ltd. c. Gibbs, [1996] 3 R.C.S. 566; Fleming v. Reid, [1991] J.O. No 1083, 1991 CanLII 2728 (ON CA) et Granovsky c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), 1 R.C.S. 703 à 68.

[2] R. c. Swain, [1991] 1 R.C.S. 933 aux p. 973-4.

[3] Le terme « usager-survivant » se réfère à la jonction d’au moins deux idéologies. Traditionnellement, le terme « usager » était utilisé pour décrire une approche au système de soins psychiatriques qui faisait place aux notions de choix et de participation aux traitements et à l’amélioration des services, tandis que les termes « survivant » ou « survivant à la psychiatrie » ont été adoptés par le mouvement de rejet de la psychiatrie comme réaction au concept de maladie mentale et pour traduire la volonté de remplacer la psychiatrie par des solutions de rechange dirigées par des survivants. Geoffrey Reaume, « Lunatic to patient to person: Nomenclature in psychiatric history and the influence of patients’ activism in North America », Int. J. of Law and Psychiatry, vol. 25, 2002, p. 419-420. Ces termes peuvent toutefois s’appliquer à des personnes qui peuvent ne pas avoir cherché à obtenir de l’aide pour des troubles mentaux. Kathryn Church, Forbidden Narratives: Critical Autobiography as Social Science, New York, Gordon and Breach, 1995, p. 12.

[4] L.O. 2005, chap. 11.

[5] Lettre du 30 octobre 2009 de la commissaire en chef Barbara Hall à Charles Beer, Examen législatif de la LAPHO, à propos d’un mémoire relatif à l’examen législatif de la LAPHO. Accessible en ligne : Commission ontarienne des droits de la personne http://www.ohrc.on.ca/fr/objet-examen-l%C3%A9gislatif-de-la-lapho. Lors d’un examen indépendant de la LAPHO en 2010, le responsable de cet examen, Charles Beer, a entendu de la part des intervenants communautaires que l’application des normes doit être accompagnée d’investissements substantiels du gouvernement afin de modifier les obstacles liés aux attitudes qui limitent les possibilités des personnes aux prises avec des troubles mentaux et d’autres handicaps. Charles Beer, Tracer la voie de l’avenir : Rapport de l’examen indépendant de la Loi de 2005 sur l’accessibilité pour les personnes handicapées de l’Ontario2010. Accessible en ligne : Ministère des Services sociaux et communautaires http://www.mcss.gov.on.ca/documents/fr/mcss/accessibility/Charles%20Beer/Charles%20Beer%20Fr.pdf, p. 21.

[6] Une partie du mandat de dix ans de la Commission de la santé mentale du Canada est d’élaborer une stratégie nationale de la santé mentale et de contribuer à réduire la stigmatisation et la discrimination auxquelles font face les Canadiennes et Canadiens ayant des troubles mentaux, ainsi que leur famille. Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, De l’ombre à la lumière : La transformation des services concernant la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie au Canada, rapport final, 2006, p. 438 (Président : Michael J.L. Kirby); En juin 2011, le gouvernement provincial a rendu publique sa stratégie sur la santé mentale et la lutte contre les dépendances, qui a inclus la réduction des préjugés et de la discrimination au nombre des éléments de la création de collectivités saines, résilientes et inclusives. Gouvernement de l’Ontario, Esprit ouvert, esprit sain : Stratégie ontarienne globale de santé mentale et de lutte contre les dépendances, Toronto, Imprimeur de la Reine pour l’Ontario, juin 2011, p. 12.

 

3. Méthodologie de la CODP

En 2009, afin d’établir un plan pour lutter contre la discrimination systémique fondée sur la santé mentale, la CODP a élaboré et publié un document de consultation, reçu des mémoires et mené des entrevues en profondeur. Ces commentaires ont poussé la CODP à tenir une consultation préalable à l’élaboration d’une politique sur les droits de la personne et la santé mentale. La consultation sur cette politique s’est déroulée sur plusieurs mois en 2010 et 2011. Elle comprenait des entrevues, des groupes de discussion, des tables rondes (à Toronto, Windsor, Ottawa et North Bay), un appel de mémoires écrits et un sondage en ligne et par courrier. Nous avons reçu environ 1 500 mémoires verbaux et écrits de particuliers et d’organisations, notamment de personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances, d’intervenants, de fournisseurs de logements, de familles, de fournisseurs de services et d’employeurs. Ce rapport tient également compte des mémoires que nous avons reçus en 2009.

 

Nous avons reçu davantage de mémoires au cours de cette consultation que de toute autre consultation sur les politiques menée par la CODP jusqu’à maintenant. Nous tenons particulièrement à souligner la contribution de plus de 1 000 personnes qui se sont identifiées comme étant aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances, ainsi que le travail qu’ont fait des organismes communautaires pour nous aider à recueillir des informations auprès de leur clientèle.

Bien qu’un nombre élevé de personnes et d’organisations soient venues témoigner de leur expérience, beaucoup d’entre elles étaient réticentes à divulguer leur identité en raison de craintes face aux attitudes et stéréotypes négatifs. Par conséquent, nous avons invité ces personnes et certaines organisations à présenter un mémoire oralement ou à en soumettre un par écrit dans l’anonymat. L’annexe comprend une liste d’organisations ayant présenté un mémoire.

Certains points de vue n’ont pas été aussi bien représentés que les autres. Bien que la CODP ait organisé des séances supplémentaires pour assurer la représentation adéquate des employeurs, fournisseurs de services et fournisseurs de logements sociaux et privés, les employeurs ont été sous-représentés par rapport à d’autres groupes. En outre, en réponse à nos questions, les participants ont livré leur perception d’un traitement discriminatoire. Seule une minorité de participants ont décrit n’avoir aucune préoccupation quant à la discrimination. Enfin, bien que les préoccupations des personnes consultées soient expliquées dans le présent rapport, nous n’avons souvent pas été en mesure de faire état d’une réponse à ces préoccupations.

Le présent rapport englobe des citations et des récits de particuliers ainsi que d’organisations. De nombreuses citations proviennent de personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances. Nous comprenons que l’utilisation de récits peut porter à controverse. Les récits personnels d’usagers/survivants et de personnes ayant une dépendance ont été exploités, « aseptisés », sensationnalisés et utilisés pour mousser les programmes d’organisations[7]. Nous avons tenté d’éviter de faire cela en veillant à ce que les gens sachent comment leurs présentations allaient être utilisées et en protégeant leur anonymat. Nous avons interprété ces présentations dans la perspective des droits de la personne. Nous voulions traduire les points de vue des gens dans leurs propres termes, parce que cela peut être un puissant outil pédagogique.

Alors que nous poursuivons notre travail, nous avons hâte de savoir comment le point de vue des gens peut être représenté d’une manière qui continue de respecter la dignité et les droits fondamentaux des gens.

3.1 Recommandations et engagements de la CODP

L’élimination de la discrimination doit mettre à contribution de nombreuses personnes et organisations. Ainsi, nous exhortons le gouvernement, les organismes publics et le secteur privé à agir dès maintenant pour éliminer les préoccupations identifiées comme atteintes aux droits de la personne. Les recommandations ne sont pas exhaustives. Il ne fait aucun doute que l’on peut faire beaucoup plus pour que la transformation des idées sur la santé mentale donne lieu à de réels changements au chapitre des droits de la personne.

La CODP appuiera et conseillera les organisations pour qu’elles mettent en œuvre les recommandations formulées. Parfois, on ne comprenait pas immédiatement quelles recommandations seraient appropriées pour atténuer les préoccupations dans une perspective systémique. Cependant, même si la CODP ne fait pas de recommandation particulière ou ne prend pas d’engagement à la suite d’une section particulière du rapport, les organisations et les individus devraient évaluer leurs propres pratiques et travailler à l’inclusion des personnes ayant un handicap psychosocial. Cela peut aussi aider à éviter d’éventuelles revendications relatives aux droits de la personne.

La CODP prend également des engagements à agir. Ses recommandations et engagements se fondent sur :

  • Les commentaires et recommandations faits par les personnes et organisations consultées
  • L’application sans équivoque du Code ou d’autres instruments relatifs aux droits de la personne (p. ex., la CRDPH) aux préoccupations
  • Si les recommandations ou engagements se fondent sur le travail actuel de la CODP
  • Si les préoccupations soulèvent des questions nouvelles et complexes en matière de droits de la personne ou comportent des iniquités évidentes
  •  Les organisations que la CODP estime être les mieux placées pour répondre à ces préoccupations (qu’il s’agisse de la CODP ou d’autres parties)
  • La compréhension que, dans certains cas, il peut être nécessaire de faire davantage de recherches pour comprendre clairement si les préoccupations sont contraires au Code ou s’il faut tenir compte de multiples points de vue avant d’agir sur la question.

Engagement de la CODP :

E1. La CODP informera les organisations des recommandations qu’elle aura faites, et leur offrira de les aider à les mettre en œuvre, lorsque cela sera possible.


[7] Voir Lucy Costa, Jijian Voronka, Danielle Landry, Jenna Reid, Becky McFarlane, David Reville et Kathryn Church, « Recovering our Stories: A Small Act of Resistance », Studies in Social Justice [parution prévue à l’automne 2012]; Kathryn Church, In Whose Interests? Querying the Use of Stories in Narrative Research, présentation effectuée durant l’événement Recovering Our Stories: How Psychiatric Survivors Can Use Our Stories to Change the World, Université Ryerson, Toronto, le 28 juin 2011.

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4. Portée

Pour définir notre portée, nous nous sommes appuyés sur une conception étendue du handicap tenant compte du Code et d’une approche sociale au handicap se fondant sur les droits de la personne. Cette approche liée aux droits de la personne vise à atteindre l’égalité et l’inclusion des personnes handicapées en éliminant les obstacles et en créant un climat de respect et de compréhension[8]. L’approche sociale est soutenue par la jurisprudence et se reflète dans la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CRDPH).

La CRDPH reconnaît que «  la notion de handicap évolue et que le handicap résulte de l’interaction entre des personnes présentant des incapacités et les barrières comportementales et environnementales qui font obstacle à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l’égalité avec les autres[9]. » La définition comprend notamment les personnes ayant un handicap mental de longue durée[10].

Cette approche aux handicaps se reflète aussi dans une décision historique de la Cour suprême du Canada dans une affaire de droits de la personne (Mercier). La Cour a utilisé un cadre de référence du handicap fondé sur l’égalité qui tient compte des faits nouveaux sur les plans biomédical, social et technologique, et elle a mis en évidence la dignité humaine, le respect et le droit à l’égalité. La cour a indiqué clairement que la notion de handicap doit être interprétée de manière à inclure son aspect subjectif, étant donné que la discrimination peut être basée autant sur des présomptions, des mythes et des stéréotypes que sur l’existence de limites fonctionnelles[11].

À partir de cette approche, la CODP a appliqué une définition élargie aux questions touchant la santé mentale[12] et les dépendances aux fins de cette consultation. Aux termes du Code, un handicap englobe un « trouble mental » ou un « état d’incapacité mentale », mais le Code n’énumère pas toutes les conditions pouvant être considérées comme un handicap[13]. Beaucoup des gens que nous avons entendus avaient reçu un diagnostic de trouble psychique ou de dépendance, ou avaient été aux prises avec ces troubles, avaient été étiquetés comme étant aux prises avec ces troubles, avaient été impliqués avec le système de santé mentale ou s’identifiaient généralement comme étant aux prises avec des troubles mentaux, une maladie mentale ou une dépendance.

Les troubles mentaux et les dépendances couvrent un large spectre, notamment les troubles graves et moins graves et les handicaps émergents. Nous avons entendu des gens souffrant de dépression, de troubles anxieux, de troubles bipolaires, de troubles de l’alimentation, de toxicomanie, d’alcoolisme, de schizophrénie, de dépression post-partum ou de troubles de la personnalité limite, ou de handicaps multiples. Nous avons également entendu des intervenants et des proches de ces personnes.

Nous avons également reçu les mémoires d’individus et d’organisations représentant des personnes qui avaient des troubles neurologiques causant la démence, tels que la maladie d’Alzheimer et la chorée de Huntington. Enfin, nous avons reçu les mémoires de personnes ayant une déficience intellectuelle telle que le trouble du spectre autistique ou l’alcoolisation fœtale, qui s’identifiaient comme étant aux prises avec des troubles mentaux ou de dépendances. Tous n’ont pas dit qu’ils avaient un handicap quelconque. Certaines personnes ont parlé de leurs anciens troubles mentaux ou dépendances ou de la façon dont les autres les considéraient comme ayant un trouble mental ou une dépendance. Le handicap antérieur ou perçu est également un motif de discrimination aux termes du Code.

Nous avons choisi de nous limiter aux expériences des personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances en raison des formes particulières de discrimination subies par ces groupes. Nous savons toutefois que les personnes aux prises avec d’autres types de handicap (comme une déficience intellectuelle ou cognitive) peuvent vivre des expériences similaires de discrimination, la restriction de leurs droits à l’autonomie ou des désavantages historiques, et faire l’objet de stéréotypes quant à leurs compétences et aptitudes. Ces handicaps peuvent aussi recouper les questions de santé mentale (par exemple, dans le cas de personnes ayant fait l’objet d’un diagnostic double).

4.1 Personnes aux prises avec une dépendance

Les personnes aux prises avec une dépendance[14] (par exemple, la toxicomanie, l’alcoolisme ou le jeu compulsif[15]) peuvent subir des formes semblables ou distinctes de marginalisation comparativement aux personnes ayant uniquement des problèmes de santé mentale. Nous avons entendu que les gens sont confrontés à une acceptation sociale généralement déficiente, à des stéréotypes négatifs et à la criminalisation de leurs dépendances.

Les lois et programmes peuvent créer certaines restrictions pour les personnes aux prises avec une dépendance, comparativement à celles qui ont un autre type de handicap. Par exemple, les personnes ayant différents troubles mentaux peuvent être admissibles à recevoir des prestations d’invalidité aux termes du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées (POSPH). Jusqu’à récemment, les critères d’admissibilité au POSPH excluaient les personnes qui se trouvaient handicapées uniquement en raison de leur dépendance à l’alcool ou aux drogues. Cependant, la Cour d’appel de l’Ontario a confirmé les décisions antérieures ayant statué qu’il était discriminatoire et contraire au Code de refuser le soutien de revenu aux personnes aux prises avec une dépendance à l’alcool ou aux drogues en raison de caractéristiques supposées[16]. L’argument du gouvernement, selon lequel le fait de refuser ces prestations d’invalidité avait pour objectif d’aider les personnes ayant un problème de surconsommation d’alcool ou d’autres drogues, a été rejeté.

En raison de ces expériences de discrimination uniques, ce groupe a besoin d’une attention particulière. Les personnes handicapées par une dépendance ont droit à la même protection de leurs droits fondamentaux que celles qui sont aux prises avec d’autres types de handicap. Cependant, le débat se poursuit en matière de droits de la personne quant aux différentes formes de dépendance et à savoir si celles-ci constituent un handicap[17]. Il y a souvent des chevauchements considérables entre les dépendances et les troubles mentaux[18]. Bien que bon nombre d’enjeux touchant les droits de la personne rejoignant ces groupes soient semblables, on nous a fait savoir qu’il était important de reconnaître que les personnes toxicomanes et les personnes ayant des troubles mentaux s’identifient souvent comme groupe distinct.

 

En ce qui concerne la méthadone, il persiste des stéréotypes quant aux substances que l’on prend : On ne peut pas vous faire confiance, vous n’avez pas d’emprise sur la réalité, vous êtes invisible ou vous êtes un problème. Si vous avez ce genre d’antécédents, le problème, ça doit être vous. - Participant(e) à un groupe de discussion


[8] Voir Commission du droit de l’Ontario, La loi et les personnes handicapées, Document de consultation préliminaire : Méthodes de définition de l’incapacité, 2009. Accessible en ligne : Commission du droit de l’Ontario www.lco-cdo.org.

[9] Convention relative aux droits des personnes handicapées, 13 décembre 2006, R.T.N.U. vol. 2515, p. 3 [CRDPH] (entrée en vigueur le 3 mai 2008, accession par le Canada le 11 mars 2010). Accessible en ligne : Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, http://www2.ohchr.org/french/law/disabilities-convention.htm, au paragraphe e) du préambule.

[10] CRDPHibid., article 1.

[11] Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Montréal (Ville); Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Boisbriand (Ville), [1999] 1 R.C.S. 381.

[12] Plusieurs types de définitions existent pour la « maladie mentale ». Une définition donne une approche biomédicale. Dans le rapport du gouvernement du Canada publié en 2006 et intitulé Aspect humain de la santé mentale et de la maladie mentale au Canada, les « maladies mentales » sont définies comme des « altérations de la pensée, de l’humeur ou du comportement (ou une combinaison des trois) associées à un état de détresse et à un dysfonctionnement marqués », Ottawa, ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux du Canada, 2006, p. 2. Toutefois, tel qu’indiqué précédemment, les troubles mentaux ne sont pas des obstacles en eux-mêmes. La société peut créer des obstacles par la voie d’informations ou de communications inaccessibles de même que par l’entremise d’attitudes. Il se peut que des obstacles existent en raison d’interactions entre l’environnement et l’expérience personnelle du handicap vécue par une personne.

[13] Alinéas 10(1)d) et b) du Code.

[14] La CODP reconnaît que les différentes formes de dépendance, comme l’alcoolisme et la toxicomanie, sont considérées comme des handicaps selon la signification qui leur a été donnée dans le Code. Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie souligne que, « la toxicomanie implique la consommation incontrôlable d’une ou de plusieurs substances et il y a apparition de malaises ou d’un sentiment de détresse lorsque cette consommation est interrompue ou grandement réduite. La toxicomanie peut également décrire certains autres problèmes de comportement, comme le jeu compulsif ou pathologique qui peut être considéré comme un processus plutôt qu’une toxicomanie. » rapport provisoire du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, Rapport 1 - Santé mentale, maladie mentale et toxicomanie : Aperçu des politiques et des programmes au Canada, 2004, p. 74 (président : Michael J.L. Kirby). Toutefois, tel qu’indiqué dans la note ci-dessus, les obstacles sociétaux peuvent créer ou aggraver l’expérience du handicap pour une personne aux prises avec une dépendance.

[15] En Ontario, 4,8 p. 100 des adultes (449 000 personnes) ont des problèmes de jeu de modérés à graves. Une autre tranche de 9,6 p. 100 (860 000 personnes) sont jugées « à risque » de devenir joueurs compulsifs. Information sur le jeu compulsif (en anglais). Accessible en ligne : Centre de toxicomanie et de santé mentale, www.camh.net/About_Addiction_Mental_Health/AMH101/top_searched_prob_gambling.html.

[16] Ontario (Programme de soutien aux personnes handicapées) c. Tranchemontagne, 2010 ONCA 593 (CanLII).

[17] La Commission du droit de l’Ontario pose que, dans une certaine mesure, « les différences dans les approches aux dépendances [en ce qui concerne les droits de la personne] peuvent traduire des perceptions voulant que ces conditions impliquent une certaine mesure de prédisposition volontaire qui n’est pas évoquée dans les autres types de handicap – c’est-à-dire qu’il ne s’agit pas d’un véritable handicap ». Commission du droit de l’Ontario, supra note 8, à 34.

[18] Une importante étude épidémiologique menée aux États-Unis a conclu que 37 p. 100 des gens aux prises avec l’alcoolisme avaient au moins un trouble de santé mentale et que 21,5 p. 100 d’entre eux avaient un autre problème de toxicomanie. Chez les personnes avec des antécédents de toxicomanie de longue durée, 53,1 p. 100 avaient aussi un trouble mental. Darrel A. Regier et coll. « Comorbidity of Mental Disorders With Alcohol and Other Drug Abuse: Results From the Epidemiologic Catchment Area (ECA) Study », J.A.M.A. vol. 264, no 19, 1990, p. 2511.

 

5. Utilisation du langage

Le langage est indicateur du climat social et politique actuel pour les personnes handicapées. Nous avons entendu que les termes utilisés peuvent perpétuer les iniquités ou promouvoir l’acceptation et l’inclusion. L’ARCH Disability Law Centre (ARCH) nous a dit que, « au-delà des idéologies particulières reflétées, le langage peut transformer la façon dont nous conceptualisons la santé mentale. »

Les termes décrivant les personnes aux prises avec des troubles mentaux ont évolué en fonction des progrès médicaux, des expériences des gens avec le système de soins psychiatriques et du militantisme rattaché au mouvement pour les droits civiques des ex-patients opposés à la psychiatrie[19].Le modèle médical suppose que les préoccupations pour la santé mentale se trouvent dans la personne et peuvent être surmontées par des experts médicaux qui évalueraient et tenteraient de « corriger » la déficience menant au handicap[20]. Lors de notre consultation, beaucoup de gens ont refusé d’être définis en fonction d’un trouble médical ou en relation avec le système de soins psychiatriques, parce que cela ne capture pas leur expérience comme personne à part entière. Bien qu’elles aient été nombreuses à utiliser un langage médical pour décrire leur handicap, certaines personnes ont jugé que les étiquettes médicales faisaient d’elles des victimes.

Certains participants ne se sont pas identifiés comme ayant un handicap ou un trouble psychique. Cela est attribuable en partie au fait qu’ils n’ont pas eu à surmonter d’obstacle leur ayant nui. Ils ne se reconnaissent pas dans l’étiquette. Ils croyaient que la description sous-entendait qu’ils ont une maladie chronique, qui leur a enlevé tout espoir, ou ils ont rejeté d’emblée le concept de « maladie mentale ».

J’ai fait l’objet d’un diagnostic, mais je ne me considère pas handicapé. La personne à côté de moi pourrait recevoir le même diagnostic et être handicapée. À quel point s’agit-il d’un handicap? – Représentant(e) de l’Ontario Peer Development Initiative (OPDI)

Au cours de notre consultation en 2009, on nous a dit que les termes utilisés devraient :

  • tenir compte des instruments domestiques et internationaux protégeant les droits fondamentaux des personnes handicapées
  • susciter l’approbation des personnes qui peuvent chercher à se faire traiter ou non
  • être ceux qu’utilise le mouvement des usagers/survivants
  • traduire une approche sociale plutôt que médicale au handicap
  • mettre en valeur la santé (au lieu d’insister sur la déficience).

Au cours de notre consultation, des gens se sont identifiés de nombreuses façons différentes. Le débat persiste sur la meilleure façon de décrire les personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances[21]. Après consultation avec les groupes de personnes handicapées, le gouvernement canadien a recommandé d’utiliser le terme « personne ayant un problème de santé mentale »[22].

À l’échelle internationale et dans la documentation universitaire, le terme « handicap psychosocial » est de plus en plus accepté. Le World Network of Users and Survivors of Psychiatry (WNUSP) a adopté ce terme pour se distancier d’un modèle de pathologie individuelle, en soulignant que :

La composante psychologique se réfère à des façons de penser et de traiter nos expériences et notre perception du monde qui nous entoure. La composante sociale et culturelle se réfère aux limites sociales et culturelles aux comportements qui interagissent avec ces différences psychologiques ou cette folie, ainsi qu’à la stigmatisation que la société rattache à nous étiqueter comme personnes handicapées.[23]

Ce terme est compatible avec une approche sociale ou orientée sur les droits de la personne au handicap.

En tenant compte de ces principes, nous ferons référence aux personnes consultées dans les termes qu’elles ont utilisés pour se décrire elles-mêmes. Pour identifier les gens en tant que groupe, nous utiliserons les termes «  troubles mentaux », « problèmes de santé mentale », « troubles psychiques » et « usagers/survivants ». Nous parlerons également de « dépendances » et de « personnes aux prises avec des dépendances », et nous utiliserons le terme « handicaps psychosociaux » pour parler à la fois des troubles mentaux et des dépendances.


 

[19] Geoffrey Reaume, « Lunatic to patient to person: Nomenclature in psychiatric history and the influence of patients’ activism in North America », Int. J. of Law and Psychiatry, vol. 25, 2002, p. 405.

[20] Commission du droit de l’Ontario, supra note 8, à 16.

[21] Geoffrey Reaume, supra note 19.

[22] Ressources humaines et Développement des compétences Canada, Le pouvoir des mots et des images : Conseils généraux pour mieux représenter les personnes handicapées, Ottawa, Sa Majesté la Reine en Droit du Canada, 2006, p. 11.

[23] World Network of Users and Survivors of Psychiatry, Implementation Manual for the United Nations Convention for the Rights of Persons with Disabilities, février 2008. Accessible en ligne : World Network of Users and Survivors of Psychiatry. www.wnusp.net/UnitedNations_MMtmp03630c55/UnitedNationsConventionfortheRightsofPersonswithDisabilities.htm, à 9.

 

6. Protection des droits de la personne

Nous avons entendu que de nombreuses personnes aux prises avec des handicaps psychosociaux ne connaissent pas leurs droits fondamentaux. Certaines personnes ont parlé d’expériences qui dépassaient le droit de ne subir aucune discrimination. Pour cette raison, il est important de comprendre comment les expériences des gens se rapportent aux droits protégés aux termes des instruments nationaux et internationaux en matière de droits de la personne.

6.1. Code des droits de la personne de l’Ontario (Code)

Aux termes du Code, les personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances ont le droit de ne pas subir de discrimination ni de harcèlement fondés sur le handicap dans cinq domaines sociaux : le logement, l’emploi, les biens, les services et les installations, les contrats, et l’appartenance à un syndicat, corps de métier ou association professionnelle. Au cours de cette consultation, nous nous sommes concentrés sur le logement, l’emploi et les services pour comprendre la profondeur des expériences des gens dans ces domaines.

Il existe de nombreuses définitions différentes de la discrimination. La discrimination comprend toute distinction, y compris toute exclusion, restriction ou préférence fondée sur un motif prévu au Code, qui a pour effet de compromettre les droits de la personne et les libertés fondamentales[24]. Elle peut être directe ou indirecte, ou elle peut découler de politiques, qualifications, exigences, normes ou règles neutres en apparence qui, dans les faits, excluent ou désavantagent les personnes aux prises avec un trouble mental ou une dépendance (article 11). Pour déterminer cela, nous devons déterminer s’il est possible de satisfaire aux besoins de mesures d’adaptation de la personne ou du groupe sans subir de préjudice injustifié.[25] Le Code établit aussi une obligation de mesures d’adaptation fondée sur le handicap (article 17). Il n’est pas discriminatoire de refuser un service, un emploi ou un logement parce que la personne handicapée ne peut satisfaire aux exigences fondamentales. Toutefois, une personne ne sera considérée inapte que si les besoins liés à son handicap ne peuvent faire l’objet de mesures d’adaptation sans préjudice injustifié.

Les personnes qui ont un rapport avec une personne ayant un trouble mental ou une dépendance (par exemple, les amis ou la famille) sont également protégées contre toute discrimination fondée sur leur rapport (article 12). De plus, les gens sont protégés contre toutes représailles s’ils exercent leurs droits prévus au Code (article 8).

6.2. Charte canadienne des droits et libertés

La Charte canadienne des droits et libertés garantit les droits civils, politiques et à l’égalité des gens dans les politiques, les pratiques et la législation à tous les niveaux de gouvernement. Certains droits peuvent s’appliquer de façon particulière aux personnes ayant des handicaps psychosociaux dans certaines circonstances, en raison de mesures législatives et de politiques qui se concentrent sur ces groupes.

Aux termes de l’article 7 de la Charte, tous ont droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de leur personne[26]. Cet article a été utilisé pour faire avancer la compréhension actuelle des droits des personnes aptes à refuser de consentir à un traitement[27]. L’article 9 protège les gens contre la détention ou l’emprisonnement arbitraires ou sans raison valable, et l’article 10 dresse la liste des droits des particuliers lors de leur arrestation ou de leur détention. Ces droits doivent être respectés par les organisations qui appliquent les politiques gouvernementales, comme les services de police ou les hôpitaux, qui peuvent vouloir détenir des personnes ayant un trouble mental[28].

L’article 15 garantit le droit à une protection égale aux termes de la loi et à un même bénéfice de la loi, sans discrimination fondée sur un handicap mental ou physique, entre autres motifs. Cet article est semblable à la raison d’être du Code. Les droits aux termes de la Charte sont garantis à moins que leur violation soit justifiée aux termes de l’article 1, qui vise à déterminer si la violation des droits prévus à la Charte est raisonnable dans les circonstances.

6.3. Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées

En 2010, la Canada a ratifié la CRDPH, un traité international ayant pour objet de « promouvoir, protéger et assurer la pleine et égale jouissance de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales par les personnes handicapées et de promouvoir le respect de leur dignité intrinsèque[29]. » Au lieu de considérer les personnes handicapées comme des bénéficiaires de charité, la CRDPH vise plutôt à les considérer comme des titulaires de droits. Elle insiste sur l’absence de discrimination, l’égalité juridique et l’inclusion. Les pays qui ont ratifié ou signé leur acceptation de la CRDPH sont connus comme des États Parties.

Les conventions et traités internationaux ne font pas partie de la législation canadienne à moins d’y avoir été intégrés[30]. » Toutefois, la Cour suprême du Canada a statué que le droit international aide à donner un sens et un contexte à la législation canadienne. La Cour a déclaré que la loi canadienne (qui englobe le Code et la Charte) doit être interprétée de manière à être compatible avec les engagements internationaux du Canada[31]. » La CRDPH est un important outil pour les droits de la personne qui impose des obligations positives au Canada pour qu’il s’assure que les personnes handicapées ont des chances égales dans toutes les sphères de la vie. Pour s’acquitter de leurs obligations aux termes de la CRDPH, le Canada et l’Ontario devraient mettre en place des soutiens et mesures d’adaptation communautaires accordant des chances égales aux personnes handicapées, et devraient évaluer la législation, les normes, les programmes et les pratiques pour s’assurer du respect des droits.

Tous les articles de la CRDPH sont pertinents pour les personnes qui vivent avec des handicaps psychosociaux, mais certains d’entre eux s’appliquent particulièrement aux questions soulevées lors de la consultation. Ce sont notamment les droits à :

  • l’accessibilité (article 9)
  • la reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité (article 12)
  • la liberté et la sécurité de la personne (article 14)
  • l’autonomie de vie et l’inclusion dans la société (article 19)
  • la santé, l’adaptation et la réadaptation (articles 25 et 26)
  • un niveau de vie adéquat et une protection sociale (article 28).

Le Canada n’a pas signé le protocole facultatif à la CRDPH, ce qui signifie que l’on ne peut déposer une plainte directement au Comité des droits des personnes handicapées de l’ONU. Toutefois, la CRDPH prévoit des exigences de reddition de comptes. L’Association canadienne des commissions et conseils des droits de la personne (ACCCDP) a demandé à tous les paliers de gouvernement de s’acquitter de leurs obligations. Celles-ci sont notamment de consulter les personnes handicapées et les organisations qui les représentent, et de les inclure dans la surveillance de la mise en œuvre de la CRDPH, l’identification d’initiatives et l’élaboration de plans pour démontrer comment ils traiteront des droits et obligations prévus dans la CRDPH.

Tout au long de notre consultation, des particuliers et des groupes ont identifié des sujets et des principes pouvant nourrir une approche fondée sur les droits de la personne aux questions touchant les personnes ayant un trouble psychique ou une dépendance. Ils tiennent compte du Code et se fondent sur bon nombre des principes sous-jacents à la CRDPH, notamment :

  • le respect de la dignité
  • l’autonomie personnelle
  • la non-discrimination et l’égalité des chances
  • une participation entière et efficace à la société
  • le respect des différences personnelles.

 

La dignité et le respect sont primordiaux.

- Participant(e) au sondage

Recommandations :

1. Le gouvernement de l’Ontario doit s’acquitter intégralement de ses obligations aux termes de la Convention relative aux droits des personnes handicapées de promouvoir les droits de la personne et les libertés fondamentales pour toutes les personnes ayant un handicap psychosocial. Cela inclut la promotion active d’un environnement où les personnes ayant un handicap psychosocial peuvent être encouragées, et le sont, à jouer un rôle entier dans la conduite des affaires publiques (article 29).

2. Le gouvernement de l’Ontario doit mesurer et faire état au public ontarien des iniquités qui créent les conditions propices à la discrimination contre les personnes ayant un trouble mental ou une dépendance (comme le chômage et un faible revenu) ainsi que sur ses démarches visant à enrayer ces conditions. Un tel rapport doit être soumis au gouvernement fédéral en réponse à ses exigences en matière de reddition de comptes aux termes de l’article 35 de la CRDPH.


 

[24] Conformément à la décision de la Cour suprême du Canada dans l’affaire Andrews c. Law Society of British Columbia, [1989] 1 R.C.S. 143, p. 174, la discrimination dans un champ social peut être décrite comme toute distinction, conduite ou action, intentionnelle ou non, mais fondée sur un motif inscrit au Code, qui crée un désavantage en perpétuant un préjudice ou un stéréotype. Dans la plupart des cas touchant les droits de la personne, si l’on fait la preuve d’une distinction fondée sur un motif de discrimination interdit créant un désavantage, il n’est pas nécessaire de faire la preuve indépendante de stéréotypage ou de préjudice; Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées. c. Tranchemontagne, supra note 16.

[25] Voir aussi Colombie-Britannique (Public Service Employee relations Comm.) c. BCGSEU, [1999] 3 R.C.S. 3 [Meiorin].

[26] Aux termes de l’article 7 de la Charte, une personne ne peut être privée de ces droits, sauf en conformité avec les principes de justice fondamentale.

[27] Loi de 1996 sur le consentement aux soins de santé, L.O. 1996 chap. 2, Annexe A.

[28] Un tribunal de l’Ontario a confirmé que les droits reconnus conformément à la Loi sur la santé mentale doivent être réputés conformes aux droits similaires aux termes de l’article 9 et du paragraphe 10(b) de la Charte; R. c. Webers, 1994 CanLII 7552 (ON CS) à 31. Le tribunal a cité et donné son approbation à une décision de la Commission d’examen qui indiquait que « la Loi sur la santé mentale ne manque pas de mécanismes de protection procéduraux. Ces mécanismes ont été mis en place en reconnaissance du fait qu’un patient qui est détenu en vertu de la Loi sur la santé mentale ou qui perd le contrôle de son propre traitement ou de ses biens a été privé de sa liberté, de son autonomie ou de son droit à l’autodétermination de la même manière qu’une personne ayant été emprisonnée. »

[29] CRDPH, supra note 9, article 1.

[30] Baker c. Canada (Ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 R.C.S., par. 69.

[31] Baker, ibid. à 70; Les Nations Unies ont indiqué que la ratification de la CRDPH crée « une nette préférence en faveur de la Convention. Cela signifie que la magistrature appliquera le droit interne et l’interprétera d’une manière correspondant d’aussi près que possible à la Convention ». Nations Unies, De l’exclusion à l’égalité : Réalisation des droits des personnes handicapées : Guide à l’usage des parlementaires : la Convention relative aux droits des personnes handicapées et son Protocole facultatif, Genève, Nations Unies, 2007, p. 121.

 

Partie B : Commentaires reçus - 7. Stéréotypes à l’égard des personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances

Les gens portent beaucoup de jugements à propos de nous. Ils nous traitent de « paresseux » et de « fous ». Ils pensent que nous « manquons de motivation », que nous devrions « essayer davantage » ou tout simplement « cesser d’être déprimés ».

- People Advocating for Change through Empowerment (PACE)

Les stéréotypes sont des suppositions faites à propos de personnes en raison des qualités présumées du groupe auquel ces personnes appartiennent. Les stéréotypes peuvent entraîner l’évaluation erronée des caractéristiques personnelles des gens. Tout au long de la consultation, les participants nous ont fait part des stéréotypes négatifs auxquels ils ont été exposés en raison de leur handicap, et de la « stigmatisation » dont ils ont fait l’objet en raison de leurs troubles mentaux et dépendances[32]. Les stéréotypes peuvent être à l’origine de gestes discriminatoires. Ils peuvent aussi mener à l’adoption de politiques, de procédures et de processus organisationnels de prise de décisions qui excluent ou marginalisent les personnes aux prises avec des handicaps psychosociaux. Ce genre de mesures organisationnelles constitue un type de « discrimination systémique ».

Les stéréotypes à l’égard des personnes handicapées sont le résultat d’un système répandu de croyances fondées sur la capacité physique. Le « capacitisme » fait référence aux attitudes sociales qui dévalorisent les personnes handicapées et limitent leur potentiel. Selon ce système de croyances, les personnes handicapées sont moins dignes de respect et de considération; elles sont moins aptes à contribuer et à participer à la société, et ont moins de valeur que les autres. Le capacitisme est parfois conscient, parfois inconscient, et fait partie intégrante des institutions, des systèmes ou de la culture générale de la société[33]. Bien que toutes les personnes handicapées puissent faire l’objet de « capacitisme », les personnes aux prises avec des handicaps psychosociaux font face à des formes particulières de stéréotypage[34].

Les stéréotypes courants à propos des personnes aux prises avec des handicaps psychosociaux abondent. Par exemple, beaucoup de gens ont tendance à qualifier toutes les personnes ayant une maladie mentale de personnes violentes et imprévisibles, malgré que la plupart ne le soit pas. Dans son analyse de la documentation, l’Association canadienne pour la santé mentale – Ontario (ACSM – Ontario) souligne les difficultés entourant l’évaluation des taux de violence chez les personnes aux prises avec une maladie mentale en raison de la variabilité des types de méthodes de recherche utilisés. Elle fait aussi remarquer qu’aucun rapport de causalité définitif n’a été établi entre la maladie mentale et la violence[35].

Chaque fois qu’il y a un incident et qu’ils en parlent dans les médias, et qu’ils disent « maniaco-dépression » ou « trouble bipolaire » ça veut seulement dire que je ne peux maintenant plus l’annoncer aux gens. – Participant(e) à la table ronde de Toronto

Selon certains, don le bureau de l’ACSM de Sudbury-Manitoulin, les médias jouent un rôle important lorsqu’il s’agit de véhiculer les stéréotypes et de façonner l’opinion publique. L’ACSM recommande aux médias d’élaborer une approche équilibrée de reportage sur la santé mentale, en s’assurant d’inclure le point de vue des usagers/survivants, membres des familles et fournisseurs de soins[36].

Certains mémoires reçus parlaient de la tendance à qualifier des personnes handicapées de « risque à la sécurité » en raison de suppositions à propos de leur handicap. Lorsqu’il n’existe en réalité aucun signe de « risque », ce genre de comportement pourrait constituer une forme de « profilage » fondé sur la santé mentale. Par exemple, un fournisseur de services se préoccupait du fait que des hôpitaux demandaient couramment au personnel de sécurité d’être présent lorsqu’on examinait des patients dont le dossier faisait état de troubles mentaux.

Parmi les autres stéréotypes véhiculés à propos des personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances figurent le fait qu’elles manqueraient de « crédibilité » et qu’elles seraient incapables d’évaluer correctement les situations et de prendre des décisions concernant leur propre vie. Des personnes ont établi un lien entre ces suppositions et leurs propres préoccupations à l’égard de la façon dont le milieu médical aborde les handicaps. Selon d’autres personnes, le modèle médical attribue une dimension « pathologique » aux personne handicapées et présume qu’elles ne sont pas expertes de leurs propres expériences. Ce genre d’attitude perpétue l’idée que les personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances ont moins de valeur que les autres.

De l’avis de certains participants, des attitudes paternalistes répandues dévaluent les expériences, les pensées et les choix des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances, et sont responsables du peu d’attentes de la société envers ces personnes. On nous a dit qu’il était difficile de se plaindre, de s’affirmer ou de faire valoir ses droits dans un tel contexte étant donné que les expériences de la personne handicapée sont minimisées et attribuées au handicap.

Toute tentative en vue de comprendre ou de remettre en question le diagnostic qui me paraissait complètement erroné m’a valu un sourire de suffisance, une attitude d’« expert » et un rejet. Je n’ai jamais senti autant d’impuissance et de désespoir, ou eu autant d’idées suicidaires. Tous les sentiments, toutes les expériences ou toutes les pensées que je relate et que mon psychiatre n’aime pas, malgré qu’ils soient valides, salutaires ou normaux, perdent sur le champ toute leur pertinence. Je n’ai plus aucune importance.

– Participant(e) au sondage 

Si [vous] n’allez pas bien, et si vous croyez avoir fait l’objet de discrimination, on ne tient pas compte de votre réaction. Par exemple, j’ai entendu du personnel clinique dire qu’une personne atteinte de troubles mentaux n’avait pas de plainte valide, c’est plutôt sa maladie qui avait « déclenché » sa réaction [quelque chose avait causé l’apparition de symptômes liés à son handicap]. C’est très frustrant, parce qu’il est difficile de prouver la validité de ses sentiments.

– Usager(ère)/survivant(e)/intervenant(e) au nom des survivants

Parmi les préjudices à propos des personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances figure aussi le fait qu’elles sont responsables de l’apparition du handicap en raison de leur manque de force morale[37], d’intelligence ou d’« humanité ». De plus, les maladies physiques peuvent être jugées « plus légitimes » que les troubles psychiques ou les dépendances[38]. Toutes ces perceptions erronées peuvent entraîner des attitudes discriminatoires et un traitement inéquitable.

Certains types de handicaps sont davantage stigmatisés que d’autres compte tenu des stéréotypes qui leur sont associés. On nous a dit que les personnes aux prises avec des dépendances sont généralement perçues de façon plus négative que les personnes aux prises avec des troubles mentaux en raison de présomptions à l’endroit de leur responsabilité envers leur handicap et de leur participation à des actes criminels[39].

Les personnes atteintes de schizophrénie ou aux prises avec une dépendance aux drogues peuvent se heurter à des attitudes particulièrement négatives de la part d’autrui en raison de croyances relatives à leur dangerosité ou comportements antisociaux, ou à quelconques risques leur étant associés.

Compte tenu des stéréotypes, bon nombre de personnes ayant pris la parole durant la consultation ont dit craindre de faire part de leur handicap à autrui. Beaucoup ont dit être étiquetées, avoir subi les attitudes négatives d’autrui, avoir perdu leur emploi ou logement, ou avoir fait l’objet de traitements inégaux en matière de services après avoir fait part d’un trouble mental ou d’une dépendance. La peur de la discrimination peut aussi empêcher certaines personnes d’obtenir du soutien pour un problème de santé mentale ou de dépendance[40].

7.1. Stéréotypes rebelles

Bon nombre de personnes recommandent fortement à la CODP et à d’autres organismes d’éduquer le public afin de dissiper les stéréotypes et de sensibiliser la population aux droits de la personne, à la maladie mentale et aux dépendances. Une des façons efficaces de changer les attitudes négatives à propos de la maladie mentale est d’avoir des face-à-face avec des usagers/survivants ou des personnes aux prises avec des dépendances. Un rapport sur la lutte contre la stigmatisation recommande de cibler des groupes définis attentivement comme les fournisseurs de soins de santé, d’établir un leadership organisationnel et de veiller à ce que des usagers/survivants participent à l’élaboration et à la direction des initiatives mises en place[41].

Cependant, d’autres personnes ont souligné l’importance de faire valoir les droits des personnes handicapées. À elle seule, la formation n’apportera probablement pas de changements à l’échelle systémique. La recherche a démontré que l’éducation en matière de santé mentale ne suffit pas à changer à long terme les comportements des gens et devrait être accompagnée d’autres approches[42].

Recommandation :

3. Les organisations et citoyens des quatre coins de l’Ontario devraient collaborer à l’amélioration des efforts de remise en question des stéréotypes à propos des troubles mentaux et des dépendances en mettant en œuvre des campagnes d’éducation et de lutte contre la stigmatisation, et en prenant activement part à ces campagnes.

Engagements de la CODP :  

E2. La CODP collaborera avec les intervenants de la collectivité pour améliorer l’éducation publique sur les droits de la personne et la santé mentale.

E3. La CODP offrira de la formation sur sa politique régissant la maladie mentale et les dépendances dans l’ensemble de la province, aux usagers/survivants, personnes aux prises avec des dépendances, administrations publiques et organisations des secteurs public et privé.

 


 

[32] Le terme « stigmatisation » est utilisé pour rendre une variété de concepts différents en lien avec la maladie mentale et les dépendances. Link et Phelan qualifient les stigmates, ou préjugés, de « convergence de composantes interreliées ». Des stigmates surviennent quand des composantes d’étiquetage, de stéréotypage, de séparation, de perte de statut et de discrimination ont lieu en même temps dans le contexte d’une situation de pouvoir qui permet leur apparition. Bruce G. Link et Jo C. Phelan, « Conceptualizing Stigma », Annul. Rev. Sociol, vol. 27, 2001, p. 377.

[33] Commission du droit de l’Ontario, Promouvoir l’égalité des personnes handicappées par l’entremise des lois, des politiques et des pratiques : cadre provisoire, mars 2012, p. 3.

[34] Par exemple, le terme anglais « sanism » a été utilisé pour décrire les « préjudices irrationnels » dont font preuve la collectivité, et le système juridique en particulier, à l’endroit de certaines personnes en raison de handicaps. Michael Perlin, « International Human Rights and Comparative Mental Disability Law: the Use of Institutional Psychiatry as a Means of Suppressing Political Dissent », Israel Law Review, vol. 39, no 3, 2006, p.73.

[35] La documentation montre que les risques de violence augmentent chez les personnes aux prises avec des troubles mentaux graves qui consomment des drogues. Cependant, selon l’Association canadienne pour la santé mentale – Ontario, les taux de violence parmi les personnes qui ont une maladie mentale mais ne consomment pas de drogues ont tendance à avoisiner ceux de la population générale. Les personnes qui ont des troubles mentaux graves sont plus suseptibles d’être victimes de violence que les membres de la population générale. Association canadienne pour la santé mentale – Ontario, Violence and Mental Health: Unpacking a Complex Issue. A discussion paper, septembre 2011. Accessible en ligne : Association canadienne pour la santé mentale, www.ontario.cmha.ca/backgrounders.asp?cID=1081747.

[36] L’ACSM – Ontario recommande aux médias de se reporter aux lignes directrices sur la couverture médiatique responsable élaborées par des organisations comme l’Association des psychiatres du Canada et le Centre de toxicomanie et de santé mentale, ibid., à 10.

[37] Lors d’un sondage mené en 2008 auprès de 1 000 Canadiennes et Canadiens par la firme Ipsos Reid, près de la moitié (46 %) des personnes sondées étaient d’avis que le terme « maladie mentale » était utilisé pour excuser des mauvais comportements (Association médicale canadienne. 8e Bulletin national annuel sur la santé,2008. Accessible en ligne : Association médicale canadienne, http://www.cma.ca/multimedia/CMA/Content_Images/Inside_cma/Annual_Meeting/2008/GC_Bulletin/National_Report_Card_FR.pdf, à 4.

[38] Gerald B. Robertson, « Mental Disability and Canadian Law », Health L. Rev., vol. 2, no 1, 1993, p. 23; Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, supra note 6 à 40.

[39] Par exemple, un modèle psychiatrique des dépendances couramment adopté entre les années 1940 et 1970 attribuait la dépendance d’une personne à des « défauts » de personnalité. Caroline J. Acker, « Stigma or legitimation? A Historical Examination of the 27 Social Potentials of Addiction Disease Models », J. of Psychoactive Drugs, vol. 25, no 3,1993, p. 202, tel qui cité dans Centre de toxicomanie et de santé mentale, The Stigma of Substance Abuse: A Review of the Literature, 18 Août 1999, à 7.

[40] Neasa Martin et Valerie Johnston, Passons à l’action : Lutte contre la stigmatisation et la discrimination, rapport à la Commission de la santé mentale du Canada, 2007.

[41] Ibid. De plus, durant les dernières années, des organisations privées et publiques comme Bell Canada et la Commission de la santé mentale du Canada se sont  mobilisées autour de vastes campagnes de lutte contre la stigmatisation pour sensibiliser le public aux troubles mentaux et dépendances. Le Globe and Mail a aussi préparé une série sur la santé mentale.

[42] Ibid.

 

8. Statut socioéconomique, maladie mentale et dépendances

Il y a un lien direct entre le soutien de ma famille et ma classe sociale, d’une part, et mes réalisations et ma qualité de vie de l’autre […] Mais retirez-moi cette sécurité et ma santé mentale périclite rapidement. Je pourrais me retrouver sans abri. J’ai connu des périodes où je ne pouvais pas organiser assez mes pensées pour me nourrir correctement. Le fait que des personnes aux prises avec des handicaps invisibles puissent être pénalisées en Ontario parce qu’elles sont malades en dit long sur le manque de respect de nos droits fondamentaux.  – Participant(e) au sondage

Beaucoup de personnes et d’organisations ont parlé du vécu des gens en matière de pauvreté. La pauvreté est une source importante de préoccupations pour les personnes aux prises avec des handicaps psychosociaux de l’ensemble de la province. Chez ces personnes, le chômage, le sous-emploi, la discrimination et le manque de logements abordables sont qualifiés de facteurs de pauvreté importants. Des données de Statistique Canada tirées de l'Enquête sur la participation et les limitations d'activités de 2006 indiquent qu'en Ontario, 27 p. 100 des personnes ayant un handicap « affectif »[43] ont un revenu faible [44] comparativement aux personnes aux prises avec un autre type de handicap (10 p. 100) et aux personnes qui rapportent ne pas avoir de handicap (11 p. 100).

On nous a dit que la discrimination fondée sur le handicap en matière de logement, d’éducation et d’emploi contribuait au faible statut socioéconomique et à la limitation des choix de vie. Le Centre ontarien des droits des locataires (CODL) et bon nombre de personnes consultées ont expliqué que le fait de vivre dans la pauvreté mène à d’autres expériences de discrimination ou d’exclusion sociale, et nuit à la santé mentale et physique des gens. Nous avons appris que les politiques qui nuisent aux personnes à faible revenu (par exemple, le besoin d’utiliser un téléphone pou communiquer avec un fournisseur de services) ont souvent davantage d’effets négatifs sur les personnes aux prises avec des troubles psychiques et des dépendances, que sur le reste de la population. Nous avons aussi appris que les personnes à faible revenu ont beaucoup plus de difficultés à avoir accès aux services, à un logement et à un emploi que le reste de la population.

Il existe des liens clairs entre la pauvreté, la maladie mentale, les dépendances et les autres motifs de discrimination interdits par le Code. En général, les personnes protégées aux termes du Code sont plus susceptibles d’avoir un faible revenu que la population générale. L’Association des infirmières et infirmiers autorisés de l’Ontario (AIIAO) a identifié les groupes qui courent un risque particulièrement élevé d’afficher un faible revenu et ses conséquences sur la santé. Ces groupes incluent les parents seuls soutiens de famille (le plus souvent des mères), les nouveaux immigrants, les personnes ayant un handicap limitant leur capacité de travail, les Autochtones, les femmes, les personnes qui n’ont pas terminé leurs études secondaires et les membres des groupes racialisés[45]. Étant donné le lien étroit qui existe entre le faible statut socioéconomique et l’appartenance à un groupe protégé par le Code, les mesures qui soumettent les personnes à faible statut socioéconomique à un traitement inéquitable peuvent soulever des préoccupations liées aux droits de la personne. Le gouvernement, les responsables des politiques et les organisations devraient veiller à ce que leurs politiques et leurs pratiques n’exercent aucun effet défavorable sur les personnes protégées aux termes du Code.

Le fait que le Canada ne respecte pas ses obligations internationales en ne protégeant pas le droit à un niveau de vie adéquat, qui fait partie des droits sociaux inclus au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, était aussi source de préoccupations. Selon l’AIIAO, ce manquement aux obligations des gouvernements canadien et provincial a été amplement documenté par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels (CDESC) des Nations Unies et par le rapporteur spécial des Nations Unies en matière de droits de la personne, qui a fait part d’inquiétudes sur l’état du logement adéquat au Canada en 2007.

En 2004, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels (CDESC) des Nations Unies a mis en lumière le niveau élevé de pauvreté des personnes marginalisées au Canada, notamment les personnes handicapées[46]. Selon l’Association des hôpitaux de l’Ontario (OHA), le Canada et l’Ontario devraient continuer d’investir dans les efforts visant à éliminer les disparités sociales, perçues comme étant à l’origine d’une majorité des problèmes de santé, dont les troubles mentaux et les dépendances.

La Convention relative aux droits des personnes handicapées reconnaît que les personnes handicapées ont tendance à vivre dans la pauvreté. L’article 28 de la Convention reconnaît le droit à un niveau de vie adéquat et à une protection sociale, notamment en matière d’alimentation, de vêtements et de logement, sans discrimination fondée sur le handicap. En ratifiant la CRDPH, le Canada s’est engagé à protéger ces droits, notamment en assurant l’accès à des programmes de réduction de la pauvreté, à des régimes et prestations de retraite, à des services appropriés et abordables, et à de l’aide financière[47].

Le CODDL et l’AIIAO ont demandé l’inclusion de protections explicites pour les personnes à faible revenu dans les lois sur les droits de la personne actuelles au moyen de l’ajout du « statut socioéconomique » au nombre des motifs de discrimination interdits par le Code.

En 2009, l’Assemblée législative de l’Ontario a adopté la Loi de 2009 sur la réduction de la pauvreté[48] qui engage le gouvernement de l’Ontario à mettre en œuvre sa Stratégie de réduction de la pauvreté (lancée en 2008), à en mesurer l’évolution et à faire rapport sur les progrès accomplis. La Loi stipule que la Stratégie de réduction de la pauvreté doit reconnaître que les personnes handicapées, entre autres groupes, courent un risque accru et que les personnes handicapées doivent être consultées à intervalles réguliers relativement à la stratégie[49]. Bien que la province ait concentré les efforts en priorité sur la réduction de la pauvreté infantile, notamment en augmentant l’accès aux services de santé mentale pour les enfants et les jeunes, on ne sait pas encore clairement si ces mesures ont eu des répercussions sur la vie des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances. Le récent ralentissement économique a entraîné des compressions et des gels budgétaires touchant le logement et les services d’aide aux Ontariennes et Ontariens à faible revenu qui auront probablement une incidence sur les mesures de réduction de la pauvreté[50].

Avec le faible niveau de revenu que fournit le système d’aide sociale, on ne peut pas manger correctement. Se nourrir convenablement est très important pour les personnes ayant des troubles de santé mentale. – Participant(e) à la table ronde de North Bay

On nous a dit que les revenus faibles ne pouvaient pas suivre le rythme de l’accroissement du coût de la vie. ARCH a mis en lumière les différences entre l’allocation de logement fournie dans le cadre du programme Ontario au travail (OT) et du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées (POSPH), et les loyers réels demandés à l’échelle de la province pour un logement adéquat. Selon L’ACSM – Ontario, un grand nombre d’Ontariennes et d’Ontariens aux prises avec des problèmes de santé mentale reçoivent des prestations d’aide sociale qui les placent bien en-dessous du seuil de pauvreté[51]. Les personnes consultées nous ont dit qu’une fois le loyer payé, les bénéficiaires de l’aide sociale ont peu d’argent pour se procurer des articles de première nécessité, comme de la nourriture.

Le système d’aide sociale de l’Ontario est en cours de réexamen (2012) aux termes d’obligations prises en ce sens dans le cadre de la Stratégie de réduction de la pauvreté. Dans notre rapport de consultation sur les droits de la personne et le logement de 2008, Le droit au logement, nous recommandions au gouvernement de l’Ontario de réviser et d’améliorer les taux de financement, les programmes, les lois et les règlements de l’Ontario pour s’assurer que les locataires à faible revenu soient en mesure de s’offrir un loyer moyen, de se nourrir et de combler leurs autres besoins fondamentaux. Les personnes à faible revenu, dont les personnes aux prises avec des troubles psychiques et des dépendances, doivent être en mesure de se procurer les articles de première nécessité dont elles ont besoin.

Recommandations :

4. Dès qu’il envisage d’adopter des mesures budgétaires restrictives qui auront une incidence négative sur les services, le logement et l’emploi des personnes à faible revenu, le gouvernement de l’Ontario devrait tenir particulièrement compte des objectifs énoncés dans la Stratégie de réduction de la pauvreté et des besoins des personnes aux prises avec des troubles psychiques, des personnes vivant dans la pauvreté et des autres groupes protégés aux termes du Code.

5. Le gouvernement de l’Ontario devrait bonifier et améliorer l’aide sociale, ce qui comprend la révision et l’amélioration des prestations offertes, pour veiller à ce que la population puisse se procurer les articles de première nécessité dont elle a besoin, comme de la nourriture, des vêtements et un toit adéquat.


 

[43] Pour déceler les répondants ayant des troubles émotifs, l’Enquête sur la participation et les limitations d’activités incluait la question suivante : « Avez-vous (est-ce que …. a) des troubles émotifs, psychologiques ou psychiatriques qui durent depuis au moins 6 mois ou qui pourraient durer 6 mois ou plus? Ceci inclut les phobies, les dépressions, la schizophrénie, les problèmes d’alcool et de drogues, et autres. » Statistique Canada, Enquête sur la participation et les limitations d’activités – 2006 (Adultes – 15 ans et plus), 2006. Accessible en ligne : Statistique Canada http://www23.statcan.gc.ca/imdb-bmdi/instrument/3251_Q2_V2-fra.pdf.

[44] Dans les données de son Enquête sur la participation et les limitations d’activités que le ministère a transmises à la CODP, Statistique Canada définit ainsi le faible revenu : familles économiques à faible revenu ou personnes seules à faible revenu (après impôt).

[45] Pour consulter une analyse de la recherche, voir l’Association des infirmières et infirmiers autorisés de l’Ontario, Creating Vibrant Communities: OIIO’s Challenge to Ontario’s Political Parties 2011 Provincial Election, Technical Backgrounder, Toronto, AIIAO, 2010. Accessible en ligne : AIIAO, www.OIIO.org/Storage/65/5964_Backgrounder.pdf, à 9. Dans plusieurs décisions, le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario et les tribunaux judiciaires ont reconnu le lien entre l’appartenance à un groupe visé par le Code et la probabilité d’avoir un faible revenu. Par exemple, voir Kearney v. Bramalea Ltd. (No. 2), (1998), 34 C.H.R.R. D/1 (Ont. Bd. Inq.).

[46] Observations finales, Comité des droits économiques, sociaux et culturels, Canada, CDESC, 1er - 19 mai 2006, UN HRCOR, 36e session, documents des Nations Unies. E/C.12/CAN/CO/4 et E/C.12/CAN/CO/5, Accessible en ligne : http://www.unhchr.ch/tbs/doc.nsf/898586b1dc7b4043c1256a450044f331/368b3c2ca5af4de4c12571ae0039e7f0/$FILE/G0642784.pdf, à15.

[47] CRDPHsupra note 9, article 28(2) a-e.

[48] L.O. 2009, chap.10.

[49] Par. 2(2) de la Loi, principe 3, par. 5(2).

[50] Dans son projet de budget initial de 2012, le gouvernement de l’Ontario n’a pas proposé de hausse des taux de l’aide sociale et a repoussé l’augmentation de la Prestation ontarienne pour enfants. Au moment de rédiger ce rapport, la version finale du budget provincial n’avait pas été adoptée. Voir Des mesures décisives pour l’Ontario, Budget de l’Ontario 2012, documents budgétaires, Toronto, Imprimeur de la Reine pour l’Ontario, 2012, p. 44-45. Plusieurs rapports font état du lien entre le financement réduit des services, la réduction de la pauvreté et les répercussions sur la santé et la sécurité alimentaire des Ontariennes et Ontariens à faible revenu. Voir Wellesley Institute, Ontario Budget 2012: Austerity is bad for our Health, 2012. Accessible en ligne : Wellesley Institute, www.wellesleyinstitute.com/wp-content/uploads/2012/03/Ontario-budget-2012-Austerity-is-bad-for-our-health-Will-the-budget-avoid-harm-to-children-lowincome-ontarians-and-women1.pdf; 25 in 5 Network for Poverty Reduction, Common Ground: A Strategy for Moving Forward on Poverty Reduction. Third Annual Progress Report on Poverty Reduction in Ontario, décembre 2011. Accessible en ligne : 25 in 5, 25in5.ca/wp-content/uploads/2011/12/25-in-5-Common-Ground-final.pdf, à 5; Social Planning Network of Ontario, A recovery-free zone: the unyielding impact of the economic downturn on non-profit community social services in Ontario, juillet 2010, à 5; Social Planning Network on Ontario, Hard hit: Impact of the Economic Downturn on Nonprofit Community Social Services in Ontario, octobre 2009.

[51] Dans son deuxième document de discussion, la Commission d’examen du système d’aide sociale en Ontario a indiqué qu’environ 60 p. 100 des 27 600 demandes de POSPH acceptées en 2009-2010 concernaient une maladie mentale comme état principal ou secondaire. Commission d’examen du système d’aide sociale en Ontario, Document de discussion 2 : Méthodes de réforme, Toronto, Imprimeur de la Reine pour l’Ontario, février 2012, à 12.

 

Code Grounds: 

9. Maladie mentale, dépendances et motifs intersectants du Code

Un sujet important abordé au cours de la consultation a été de savoir où se trouvent les intersections de l’identité d’une personne, fondée sur des troubles mentaux ou une dépendance, et d’autres aspects de son identité liés au Code (comme la race, le sexe ou l’âge), qui peuvent être la base de formes uniques ou distinctes de discrimination. On nous a dit qu’il était beaucoup plus difficile d’obtenir un emploi, un logement ou des services en raison de la discrimination fondée sur deux motifs prévus au Code ou plus. Par exemple, nous avons appris que les jeunes Canadiens d’origine africaine ayant un trouble psychique ont plus de difficulté à trouver un logement en raison de stéréotypes liés à la race, à l’âge, au sexe et à un handicap.

Beaucoup d’intervenants ont parlé des conséquences de la discrimination, du harcèlement ou des stéréotypes négatifs sur la santé mentale d’une personne. Ils ont souligné les impacts systémiques profonds – notamment sur la santé physique et mentale – de la discrimination de longue date et de l’exclusion sociale sur les communautés marginalisées. Selon l’Organisation mondiale de la santé :

La vulnérabilité peut conduire à une mauvaise santé mentale. La stigmatisation et la marginalisation engendrent une mauvaise estime de soi, une faible confiance en soi et une perte de motivation et d’espoir pour l’avenir. En outre, la stigmatisation et la marginalisation peuvent mener à l’isolement, qui est un facteur de risque important pour les troubles mentaux futurs. L’exposition à la violence et aux mauvais traitements peut entraîner de graves problèmes de santé mentale, notamment la dépression, l’anxiété, des troubles psychosomatiques et une toxicomanie. De même, la santé mentale est affectée négativement lorsque l’on bafoue les droits civils, culturels, économiques, politiques et sociaux ou quand les gens sont tenus à l’écart des études ou des occasions de tirer un revenu[52].

L’Empowerment Council – un regroupement d’usagers et d’ex-usagers du Centre de toxicomanie et de santé mentale – a souligné l’importance de tenir compte des déterminants sociaux de la santé pour mettre de l’avant une approche fondée sur les droits de la personne. Les déterminants sociaux de la santé expliquent en partie comment les inégalités dans les facteurs sociaux affectent la santé mentale. Ces déterminants comprennent le logement, les soins de santé, la sécurité alimentaire, le sexe, le pays d’origine, l’exposition à la discrimination et au racisme, et l’éducation[53].

On nous a dit qu’il était très difficile d’obtenir des soins de santé et des services de soutien appropriés comprenant des services adaptés sur le plan culturel – c’est-à-dire qui respectent les besoins propres des différentes communautés desservies et y répondent[54]. Les services sont souvent conçus en fonction de modèles généraux qui ne tiennent pas compte des communautés marginalisées ou des différences culturelles dans les perspectives, cadres et définitions de la santé mentale[55]. Cela peut faire en sorte que des organisations pratiquent une discrimination non intentionnelle à l’endroit de membres de communautés immigrantes et racialisées, d’Autochtones, de personnes gaies, lesbiennes, bisexuelles et transgenre, et d’autres personnes protégées par l’inclusion de motifs dans le Code. Il se peut que les services aient des politiques, des procédures et des pratiques décisionnelles exclusives et une culture organisationnelle qui n’est pas inclusive.

Selon l’Ontario Federation of Indian Friendship Centres (OFIFC), un manque de services culturellement appropriés peut mener à des soins de moins bonne qualité, et ainsi contribuer indirectement à la détérioration de la santé mentale. Le stéréotypage racial ou une compréhension déficiente des cultures et communautés particulières au cours de l’admission et de l’évaluation peut entraîner un diagnostic erroné, un diagnostic défaillant ou un traitement de mauvaise qualité des gens de communautés racialisées[56].

On nous a présenté plusieurs cas de traitement différent en raison d’un manque de compétence culturelle. Nous avons entendu que les personnes gaies, lesbiennes et bisexuelles peuvent trouver difficile de divulguer leur orientation sexuelle dans les hôpitaux et programmes de soins psychiatriques en raison d’un environnement non inclusif. Cela peut décourager les gens d’utiliser ces services. Une femme autochtone a déclaré que des médecins n’ont pas tenu compte de sa préférence pour les médicaments propres aux Autochtones et les médecines alternatives. Elle n’est pas retournée les voir et a eu peu de choix de soins alternatifs.

Le représentant d’un organisme francophone à Ottawa a déclaré que, au lieu de fournir des services en français ou de mettre un interprète à leur disposition, certains fournisseurs de services anglophones peuvent voir les clients francophones comme ayant une capacité réduite de communiquer leurs volontés, et ils cherchent quelqu’un pour agir ou parler en leur nom, par exemple, par procuration.

Sauf pour [un organisme communautaire en santé mentale], qui n’est pas couvert par le RAMO, [les conseillers en santé mentale] que j’ai rencontrés jusqu’à maintenant ont très peu de connaissances ou sont très peu disposés à composer avec la sexualité (gaie), et lorsque la question raciale entre en jeu, leurs connaissances étaient étonnamment faibles. Je recherche toujours un professionnel de santé qui pourrait ou qui voudrait vraiment comprendre les intersections de questions (de race, de sexe ou celles qui touchent les nouveaux arrivants) en counselling!

            – Participant(e) au sondage

Nous avons également entendu que des gens ont été la cible de harcèlement ou de commentaires discriminatoires fondés sur des motifs prévus au Code au sein de services.


 

[52] Organisation mondiale de la santé, Mental Health and Development: Targeting People with Mental Health Conditions as a Vulnerable Group, 2010. Accessible en ligne : Organisation mondiale de la santé, www.who.int/mental_health/policy/mhtargeting/en/index.html, p. xxv- xxvi.

[53] Organisation mondiale de la santé, WHO Resource Book on Mental Health, Human Rights and Legislation, Genève, Organisation mondiale de la santé, 2005, cité dans Fédération des programmes communautaires de santé mentale et de traitement des toxicomanies de l’Ontario, Embracing Cultural Competence in the Mental Health and Addiction System, juin 2009. Accessible en ligne : OFCMHAP www.ofcmhap.on.ca/sites/ofcmhap.on.ca/files/CulturalCompetwCp. 10020(4).pdf, p. 24; Juha Mikkonen et Dennis Raphael, Social Determinants of Health: The Canadian Facts, Toronto, York University School of Health Policy and Management, 2010. Accessible en ligne : The Canadian Facts, www.thecanadianfacts.org/The_Canadian_Facts.pdf, p. 9; Groupe de travail sur la diversité de la Commission de la santé mentale du Canada, Améliorer les services en santé mentale pour les immigrants, les réfugiés et les groupes ethnoculturels ou racialisés – Enjeux et options pour l’amélioration des services, le 12 novembre 2009. Accessible en ligne : Commission de la santé mentale du Canada, http://www.mentalhealthcommission.ca/SiteCollectionDocuments/News/fr/frIO.pdf, p. 16.

[54] Bien que les définitions varient, on entend en partie par « compétence culturelle » « le niveau de compétences fondées sur des connaissances requises pour la prestation de services significatifs, coopératifs et respectueux aux clients de divers groupes marginalisés de la société ». Les principes fondamentaux de la compétence culturelle englobent l’inclusivité, la santé holistique, l’opposition à l’oppression et l’appréciation de la diversité. Zine, en cours, cité par Fédération des programmes communautaires de santé mentale et de traitement des toxicomanies de l’Ontario, Embracing Cultural Competence in the Mental Health and Addiction System, juin 2009. Accessible en ligne : Fédération des programmes communautaires de santé mentale et de traitement des toxicomanies de l’Ontario, www.ofcmhap.on.ca/sites/ofcmhap.on.ca/files/CulturalCompetwCp. 10020(4).pdf, p. 22.

[55] Kwasi Kafele, La discrimination raciale et la santé mentale: les communautés racialisées et autochtones, décembre 2004, Mémoire présenté au Colloque sur la politique raciale de la CODP. Accessible en ligne : CODP http://www.ohrc.on.ca/fr/la-discrimination-raciale-et-la-santp. 100C3p. 100A9-mentale-les-communautp. 100C3p. 100A9s-racialisp. 100C3p. 100A9es-et-autochtones, à 13.

[56] Kwasi Kafele, Racism and Mental Health: A compendium of Issues, Impact and Possibilities, 2006. Ressource fournie à la CODP.

 

Code Grounds: 

9.1. Intersections avec d’autres types de handicap

Chaque diagnostic posé crée un autre niveau de discrimination ou un autre obstacle. – Participant(e) à la table ronde de Toronto

Des personnes peuvent être victimes de discrimination fondée sur une combinaison de handicaps liés à la santé mentale et autres. Nous avons entendu que les personnes ayant à la fois des troubles mentaux et une dépendance font souvent l’objet de mépris. Certaines personnes ont affirmé qu’en raison de troubles mentaux, on prend moins au sérieux leur handicap physique[57].

Souvent les services en santé mentale ne sont pas conçus pour servir les personnes ayant plus d’un handicap, empêchant ainsi celles qui ont des handicaps multiples tels que des troubles mentaux et une dépendance, un trouble du développement ou des troubles d’apprentissage, de recevoir des services suffisants ou en temps opportun (Association ontarienne des troubles d’apprentissage). Nous examinons cette question à la section 8. Nous avons également entendu que certains médicaments pour le traitement des troubles psychiques comme la schizophrénie, comportent des effets secondaires qui peuvent amener les gens à contracter des maladies physiques comme le diabète. Les gens pourraient alors avoir besoin d’adaptation pour les deux handicaps.

Selon les personnes consultées, il n’est pas rare que des personnes affichant des comportements associés à un handicap soient perçues comme ayant une dépendance puis traitées comme si elles posaient un risque pour la sécurité. Quelques personnes ont dit que le personnel de sécurité et la police supposaient qu’elles consommaient des drogues ou de l’alcool quand elles avaient des symptômes de handicap physique ou de trouble mental.

Certaines personnes n’ont pas pu obtenir de services ou de logement en milieu supervisé, notamment des services et soutiens en santé mentale, de manière égale, parce que l’on n’a pas offert de mesures d’adaptation pour leur handicap physique, soit leur mobilité réduite ou leur déficience auditive.

Une de mes clientes a été agressée. Elle est sourde et a un trouble mental. Les policiers ne lui ont pas fourni d’interprète en langage gestuel, et au lieu d’essayer de l’écouter expliquer l’agression qu’elle a subie, ils l’ont emmenée à [un hôpital psychiatrique], où ils ont supposé qu’elle inventait toute l’histoire parce qu’ils ne lui ont pas fourni d’interprète. Ils l’ont donc « formé » [détenue à l’hôpital contre son gré]. – Représentant(e) d’un service juridique communautaire


[57] Les gens aux prises avec un trouble psychique parallèlement à un handicap physique tendent à signaler davantage de stigmatisation et de discrimination perçues de manière générale, ainsi que dans les domaines du manque de logement, de la pauvreté et du quartier de résidence en particulier. Allison Bahm et Cheryl Forchuk, « Interlocking oppressions: The Effect of a Co-morbid Physical Disability on Perceived Stigma and Discrimination among Mental Health Consumers in Canada », Health and Social Care in the Community, vol. 17, no 1, 2008, p. 63.

Code Grounds: 

9.2. Intersections avec l’orientation sexuelle

On nous a expliqué comment il est possible de porter un « double fardeau » quand on se révèle gai, lesbienne ou bisexuel(le) tout en divulguant en même temps un trouble mental. Certaines personnes ont dit que le stress qu’elles éprouvent en raison de la discrimination fondée sur leur orientation sexuelle a contribué à leurs troubles mentaux et à leurs dépendances. Les personnes lesbiennes, gaies et bisexuelles (LGB) courent davantage de risques d’être aux prises avec certains troubles mentaux, notamment la dépression, l’anxiété et la toxicomanie[58]. Ces troubles ont souvent trait à des expériences de discrimination[59]. Les jeunes LGB sont plus enclins à avoir eu des idées suicidaires ou à avoir tenté de se suicider que les jeunes hétérosexuels[60].

Nous avons entendu des préoccupations à propos de stéréotypes selon lesquels les personnes gaies, lesbiennes et bisexuelles sont considérées comme « malades mentales », même si l’homosexualité n’est plus classée comme une maladie mentale dans le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-IV-TR). Certaines personnes nous ont parlé de propos homophobes de fournisseurs de services de santé mentale ou nous ont dit que leurs fournisseurs de services manquaient de compréhension quant à leurs expériences liées à l’orientation sexuelle.

J’ai été référé à un psychiatre à [un hôpital]. Lorsque je lui ai mentionné que je suis gai et que je voulais en parler, il n’était pas prêt à écouter parce qu’il n’était « pas un expert dans ce domaine »! J’ai dû attendre encore cinq mois avant de rencontrer un conseiller ouvert aux personnes gaies à [un organisme communautaire en santé mentale]. – Participant au sondage

On nous a parlé de propos homophobes tenus par d’autres usagers dans un environnement de service, avec lesquels des fournisseurs de services peuvent composer de façon inappropriée. Dans les services de santé mentale, les partenaires du même sexe peuvent ne pas être traités comme des membres légitimes de la famille, ce qui les empêche d’obtenir des informations sur une personne qui reçoit des traitements ou du soutien.


[58] Allen M. Omoto et Howard S. Kurtzman, Sexual Orientation and Mental Health: Examining Identity and Development in Lesbian, Gay and Bisexual people, Washington, DC,  APA Books, 2006; S.D.Cochran, J.G. Sullivan, et V.M. Mays, « Prevalence of Mental Disorders, Psychological Distress, and Mental Health Services Use among Lesbian, Gay, and Bisexual Adults in the United States, », J. of Consulting and Clinical Psychology, vol. 71, 2003, p. 53; I.Meyer, « Prejudice, Social Stress, and Mental Health in Lesbian, Gay, and Bisexual Populations: Conceptual Issues and Research Evidence », Psychological Bulletin, vol. 129, 2003, p. 674; cité dans W.B. Bostwick, Mental Health Issues among Gay, Lesbian Bisexual and Transgender (GLBT) People, National Alliance on Mental Illness, 2007. Accessible en ligne : NAMI www.nami.org/TextTemplate.cfm?Section=Fact_Sheets1&Template=/ContentManagement/ContentDisplay.cfm&ContentID=54036, consulté le 5 août 2009.

[59] Pour un examen de la documentation, voir Dean L et coll. « Lesbian, Gay, Bisexual, and Transgender Health: Findings and Concerns », J. of the Gay and Lesbian Medical Association, vol. 4, no 3, 2000, p. 101.

[60] Elizabeth Saewyc et coll. Not Yet Equal: The Health of Lesbian, Gay, & Bisexual Youth in BC, Vancouver, C.-B., The McCreary Centre Society, 2007, p. 31.

 

Code Grounds: 

9.3. Intersections avec le sexe

Il existe un lien étroit entre les troubles mentaux, les dépendances et la violence fondée sur le sexe. Les femmes qui survivent à la violence, aux traumatismes et aux agressions se retrouvent souvent aux prises avec la toxicomanie et des troubles mentaux[61]. Plusieurs femmes ont fait état de violence fondée sur le sexe en lien avec des antécédents de troubles mentaux. Certaines d’entre elles ont dit qu’elles avaient été harcelées ou agressées sexuellement par des patients ou des employés lors de leur hospitalisation pour un trouble psychique.

À [un hôpital], j’ai subi du harcèlement de la part d’un autre patient. Il apparaissait tous les matins à mon chevet, me réveillait et pointait vers son érection, puis me montrait sa collection de préservatifs colorés. Plus tard, on a appris qu’une autre femme s’était plainte d’une agression. J’étais terrifiée dans mon lit, j’avais peur de prendre des médicaments car je craignais d’être violée alors que je me trouverais sous sédation. L’incident a été signalé, rien n’a été fait, [l’autre patiente] a reçu son congé et il a continué de me harceler. – Mémoire écrit

Les femmes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances peuvent être encore plus vulnérables au harcèlement ou à la violence quand elles sont également pauvres et vieillissantes, et ont d’autres handicaps. À la fin de 2011, le ministère de la Santé et des Soins de longue durée a créé un groupe de travail pour traiter les nombreuses plaintes de mauvais traitements à l’endroit des personnes âgées dans les maisons de soins infirmiers, y compris les agressions sexuelles contre les résidentes atteintes de démence[62].

Certaines femmes ont dit que leurs préoccupations en matière de santé mentale ont été minimisées comparativement aux troubles mentaux des hommes, et que les troubles mentaux et les « affaires féminines » sont considérés comme la même chose. Par le passé, les femmes occidentales pouvaient recevoir un diagnostic « d’hystérie » – un trouble soi-disant nerveux – compte tenu de l’appareil reproducteur féminin. Cela a fourni un prétexte pour leur refuser des droits civils et politiques[63].

Une intervenante décrit les stéréotypes négatifs sur les femmes aux prises avec une dépendance – on suppose qu’elles sont des travailleuses du sexe ou qu’elles se placent dans des situations où elles contractent des maladies. Les femmes ayant un trouble psychique ou une dépendance peuvent faire face à de la discrimination fondée sur les idéaux culturels de la féminité parce qu’elles gagnent ou perdent du poids en raison de leur handicap ou des effets secondaires des médicaments.

L’expérience des femmes avec la discrimination fondée sur la santé mentale et les dépendances doit être comprise dans le contexte d’autres identités rattachées au Code, notamment l’orientation sexuelle, la race, l’ascendance, l’âge, la situation de famille et le fait d’avoir d’autres handicaps. Par exemple, nous avons entendu que les mères peuvent subir des stéréotypes multiples ou devoir surmonter des défis en raison de leur sexe, de leur statut familial ou d’un handicap. On nous a dit que les femmes aux prises avec une dépendance sont réputées être de mauvais parents ou qu’elles peuvent craindre d’utiliser les services de santé mentale ou de lutte contre les dépendances, de peur que les services de protection de l’enfance ne se mêlent de leurs affaires et leur retirent leurs enfants.


[61] Groupe de travail provisoire sur les femmes, la santé mentale, la maladie mentale et les dépendances, Women, Mental Health, Mental Illness and Addictions in Canada: An Overview, 2006. Accessible en ligne : Canadian Women’s Health Network www.cwhn.ca, p. 25.

[62] Moira Welsh et Jesse McLean, « Nursing home residents abused », The Toronto Star, le 17 novembre 2011. Accessible en ligne : The Toronto Star, www.thestar.com; Moira Welsh, « Task force gets cracking on troubled nursing home system », The Toronto Star, le 1er février 2012. Accessible en ligne : The Toronto Star www.thestar.com.

[63] Barbara Ehrenreich et Deirdre English, For Her Own Good: 150 Years of Experts’ Advice to Women, Garden City, NY, Anchor Books, 1978cité par le groupe de travail provisoire sur les femmes, la santé mentale, la maladie mentale et les dépendances, supra note 61, à 1.

 

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9.4. Intersections avec l’identité sexuelle

À mon dernier emploi, j’ai dit à ma patronne que j’étais transsexuée, et elle m’a dit sans détour de n’en parler à personne [ou] je perdrais mon emploi. Je ne gagne pas assez d’argent pour vivre en ce moment, et le stress que cela comporte pèse lourd sur ma santé mentale. Le découragement de chercher un emploi pour lequel on est qualifié, et pour lequel on sait que l’on a les compétences, et de voir sa candidature rejetée à répétition, est vraiment dommageable. 

– Participante au groupe de discussion

Les personnes transgenre nous ont parlé des répercussions importantes qu’ont sur leur santé mentale la discrimination quotidienne, le manque d’acceptation sociale, la pauvreté, les logements inabordables et l’aliénation familiale, tous fondés sur l’identité sexuelle. Un groupe de discussion coanimé par la Rainbow Health Ontario a identifié la pauvreté comme conséquence de la discrimination, mais aussi comme facteur contribuant à une mauvaise santé mentale. Dans une étude menée auprès de 433 Ontariennes et Ontariens transgenre, la moitié a « sérieusement envisagé » le suicide parce qu’ils étaient transgenre. Les jeunes transgenre (de jusqu’à 24 ans) étaient plus de deux fois plus susceptibles d’envisager sérieusement le suicide que les personnes transgenre de plus de 25 ans[64].

Des gens ont exprimé leurs préoccupations au sujet de l’inclusion des « troubles de l’identité sexuelle » dans le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux parce qu’il traite le fait d’être transgenre comme une maladie mentale. On nous a dit que les personnes transgenre sont automatiquement réputées avoir des troubles mentaux. Cependant, il existe des dissensions quant à l’inclusion des « troubles de l’identité sexuelle » dans le DSM-IV-TR. Sans avoir fait l’objet d’un diagnostic de handicap, les personnes transgenre n’ont pas accès au Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées, aux hormones financées ou à la chirurgie de changement de sexe. Certaines personnes ont indiqué que la nécessité de faire la transition doit être considérée comme un problème de santé physique, et non de santé mentale.

Certaines personnes transgenre nous ont parlé de leur difficulté à obtenir du soutien médical pour subir la transition, comme des hormones, en raison de troubles mentaux. Elles nous ont raconté comment leur transition ou les hormones ont été considérées comme la cause des troubles mentaux, alors que le trouble mental peut avoir été relié à de plus vastes expériences de discrimination. Certaines ont indiqué qu’elles n’ont pas été traitées avec dignité lors d’une hospitalisation ou un traitement pour un trouble mental : On ne leur a pas permis d’effectuer une transition, elles ont subi du harcèlement sexuel ou on les a tenues à l’écart des autres patients. Elles ont souligné l’importance de modifier le Code pour y inclure « l’identité sexuelle » comme motif explicite afin d’assurer la reconnaissance des droits des personnes transgenre à un traitement égal et à la pleine participation à la société. En juin 2012, « l’identité sexuelle » et « l’expression de l’identité sexuelle » ont été ajoutées comme motifs de discrimination dans le Code.

 


[64] Kyle Scanlon et coll. « Ontario’s Trans Communities and Suicide: Transphobia is Bad for Our Health », Trans PULSE E-Bulletin, vol. 1, no 2, le 12 novembre 2010. Accessible en ligne : Transpulse project, transpulseproject.ca/documents/E2English.pdf.

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9.5. Intersections avec la race et les motifs connexes

Composer avec le racisme dans mon milieu de travail a considérablement contribué au développement de mes troubles mentaux.

– Participant(e) au sondage

Les médecins tiennent pour acquis que, vu que je suis femme et immigrante, je dois accepter d’être subjuguée ou traitée comme moins qu’une adulte autonome.

– Participante au sondage

Nous avons entendu parler de différents types de discriminations intersectantes exercées sur la base de la race, de la citoyenneté, de l’origine ethnique, du lieu d’origine, de l’ascendance, de la couleur ou de la croyance, en plus de troubles mentaux ou de dépendances. On nous a dit comment les perceptions des handicaps des gens peuvent contribuer à des perceptions négatives fondées sur la race de diverses manières. Par exemple, une personne nous a dit qu’elle avait été étiquetée comme « femme noire en colère » au travail en raison de ses symptômes de dépression.

La Metro Toronto Chinese and Southeast Asian Legal Clinic (MTCSALC) et le New Mennonite Centre ont déclaré que la discrimination et les obstacles à l’intégration peuvent influer sur la santé mentale des immigrants au Canada. Certaines personnes ont dit qu’elles avaient de la difficulté à divulguer leurs troubles mentaux au sein de leur communauté.

Selon la MTCSALC, la stigmatisation sociale dont sont victimes les personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances peut être plus durement ressentie par les immigrants et les personnes issues de communautés racialisées [65]  parce que la stigmatisation s’ajoute aux nombreux défis auxquels ces derniers sont déjà confrontés, et non pas parce que ces problèmes sont plus fréquents dans ces communautés. Dans un groupe de discussion organisé par l’Ethno-Racial Disability Coalition of Ontario (ERDCO), une personne a dit que le fait de demander un logement ou de parler pour affirmer ses droits s’est avéré beaucoup plus difficile lorsqu’il a fallu composer avec des questions de discrimination raciale en raison des déséquilibres de pouvoir.

On nous a dit que des gens issus de communautés racialisées, en particulier les Canadiens d’origine africaine, subissent un traitement plus éprouvant que les personnes non racialisées dans les systèmes de santé mentale et de santé mentale médico-légale (où les gens sont aussi impliqués dans le système judiciaire). Les gens sont préoccupés par la forte représentation de personnes racialisées aux prises avec des troubles mentaux dans le système de justice pénale, et que les Canadiens d’origine africaine ayant des troubles mentaux sont plus susceptibles d’entrer dans le système de justice pénale que dans le système de santé mentale communautaire[66]. L’intervenant d’un organisme desservant les communautés racialisées a dit que des erreurs de diagnostic peuvent être fréquentes à cause des stéréotypes et des obstacles culturels et linguistiques.

Un corpus croissant de recherches internationales soutient bon nombre de ces constatations[67]. Certaines études laissent croire qu’il existe un taux plus élevé de contention et de détention chez les personnes d’ascendance africaine ou antillaise par rapport aux personnes d’autres origines ethniques, bien que les raisons de cette situation puissent être complexes[68].

a) Langue

La langue n’est pas un motif interdit aux termes du Code, mais elle peut être liée à l’origine ethnique ou au lieu d’origine[69]. Le Provincial Human Services and Justice Coordinating Committee (PHSJCC) et beaucoup d’autres intervenants ont dit que le manque de mesures d’adaptation aux besoins linguistiques pour les personnes aux prises avec des troubles mentaux des dépendances est un enjeu majeur.

Nous avons entendu que l’absence d’interprétation et de traduction peut mener à une incapacité d’accéder aux services ou à un traitement différent au sein des services. Des intervenants ont dit qu’il y a un problème systémique de traitement des personnes racialisées comme « non conformes » dans le milieu hospitalier lorsque leurs besoins culturels ou linguistiques ne sont pas satisfaits, et par conséquent les gens n’ont pas été bien traités (par exemple, ils ont été mal évalués ou on leur a retiré des privilèges hospitaliers). Le PHSJCC recommande au gouvernement de l’Ontario d’élaborer des cibles pour améliorer l’accès aux services de santé mentale et de lutte contre les dépendances pour les communautés ethno-raciales, notamment en améliorant l’accès à l’interprétation linguistique.

Le Réseau des services de santé en français de l’Est de l’Ontario (RSSFEO) nous a dit qu’il y a un manque prouvé de services en santé mentale pour les Franco-Ontariens[70]. Il recommande de reconnaître la langue comme élément de discrimination pour toute personne ayant un trouble mental ou une dépendance.

b) Croyance

Nous avons entendu comment les croyances des gens n’ont pas été prises en compte dans différents types de services utilisés par les personnes ayant des troubles mentaux et des dépendances. Certaines femmes ont été empêchées de porter leur hidjab à l’hôpital en raison de « problèmes de santé et de sécurité » ou ont dû retirer leurs vêtements en présence d’hommes. Nous avons également entendu parler de certains services qui ne respectent pas les besoins alimentaires fondés sur les croyances. Certaines personnes n’appartenant à aucune religion ont déclaré que, dans ces services, les points de vue non religieux étaient considérés comme un obstacle à la guérison.

 


 

[65] La race est un construit social. Le Rapport de la Commission sur le racisme systémique dans le système de justice pénale en Ontario a défini la racialisation comme « un processus  par lequel les sociétés assoient la notion que les races sont bien réelles, différentes et inégales, de façons qui importent pour la vie sociale, économique et politique ». Commission ontarienne des droits de la personne, Politique et directives sur le racisme et la discrimination raciale, Toronto, Imprimeur de la Reine pour l’Ontario, 2005, p. 12.

[66] Une étude réalisée à Montréal a également constaté que les Canadiens d’origine africaine sont surreprésentés dans les renvois de la police aux services psychiatriques d’urgence. G. Eric Jarvis et coll. « The Role of Afro-Canadian Status in Police or Ambulance Referral to Emergency Psychiatric Services », Psychiatric Services, vol. 56, no 6, 2005, p. 705.

[67] Des recherches menées aux É.-U., au R.-U., et certaines autres au Canada ont soutenu que les personnes d’ascendance africaine ou antillaise, en particulier les hommes et les personnes immigrantes, sont disproportionnément enclines à être représentées dans le système de santé mentale et de santé mentale médico-légale, et font l’objet d’un diagnostic de psychose ou de schizophrénie, quoiqu’il faille tenir compte de nombreux facteurs. Un rapport indique qu’il y a absence de statistique mais que les unités de psychiatrie médico-légale dans le Sud-ouest ontarien, (y compris le Centre de toxicomanie et de santé mentale), en fonction d’information anecdotique, semblent compter un nombre disproportionnément élevé d’hommes de couleur, notamment de Canadiens d’origine africaine. Pascale C. Annoual, Gilles Bibeau, Clem Marshall et Carlo Sterlin, Enslavement, Colonialism, Racism, Identity and Mental Health: Developing a new service model for Canadians of African DescentPhase I report, Toronto, CAMH, 2007. Accessible en ligne : Centre de toxicomanie et de santé mentale, www.camh.net/publications/resources_for_professionals/EACRIMH/eacrimh_report1107.pdf, p. 13; G. Eric Jarvis et coll. « High rates of psychosis for black inpatients in Padua and Montreal: Different Contexts, Similar Findings », Soc. Psychiatri. Epidemiol., vol. 46, 2011, p. 247; Kwame McKenzie et K. Bhui, « Institutional Racism in Mental Health Care », B.M.J. vol. 334, mars 2007, p. 649.

[68] G. E. Jarvis, Emergency Psychiatric Treatment of Immigrants with Psychosis, Maîtrise ès sciences en psychiatrie, Département de psychiatrie, Université McGill, Faculté de médecine, 2002 [inédit], p. 91; Amos Bennewith et coll. « Ethnicity and Coercion among Involuntarily Detained Psychiatric In-patients » British J. of Psychiatry vol. 196, 2010, p. 75; Rachel Spector, « Is There Racial Bias in Clinicians’ Perceptions of the Dangerousness of Psychiatric Patients? A Review of the Literature », J. of Mental Health, vol. 10, no 1, 2001, p. 5.

[69] Voir Commission ontarienne des droits de la personne, Politique concernant la discrimination et la langue, Toronto, Imprimeur de la Reine pour l’Ontario, 1996. Accessible en ligne : CODP, http://www.ohrc.on.ca/fr/politique-concernant-la-discrimination-et-la-langue.

[70] Soixante-dix-sept pour cent des Francophones en Ontario ont un accès rare ou inexistant à des centres de traitement de l’alcoolisme en français; 66 p. 100 d’entre eux ont un accès rare ou inexistant à des centres de traitement des toxicomanies en français et 53 p. 100 d’entre eux ont un accès rare ou inexistant à des services en santé mentale (à l’exception des hôpitaux psychiatriques) en français. Commissariat aux services en français, Rapport spécial sur la planification des services de santé en français en Ontario, Imprimeur de la Reine pour l’Ontario, 2009, p. 10, tel que cité dans le mémoire du Réseau des services de santé en français de l’Est de l’Ontario.

 

Code Grounds: 

9.6. Autochtones

Je voudrais voir des intervenants en santé des Autochtones accompagner les gens à certains points de la ville parce que nous ne sommes pas toujours bien reçus là où nous devons nous rendre. Je pense que les gens sont cruels envers nous et les jeunes n’ont aucun soutien pour leur permettre de se déplacer et obtenir de l’aide. 

– Participant(e) au sondage

Les gens ne se soucient pas de me comprendre ou de comprendre ma situation en lien avec mon handicap. Les autres éléments de mon identité en tant que double esprit, identifié comme homme et comme Autochtone, influent sur la façon dont les gens me traitent, avant même que je discute des façons dont je compose et vis avec le diagnostic de trouble mental et la maladie. 

– Participant au sondage

De nombreuses personnes et organisations nous ont parlé de la façon dont les Autochtones au Canada ont été affectés par une longue histoire de colonisation, de racisme institutionnalisé et de discrimination, comme le démontrent les politiques des écoles résidentielles. L’Ontario Federation of Indian Friendship Centres (OFIFC) a dit que, pour la population autochtone urbaine, cela a mené à un traumatisme intergénérationnel, à de la violence familiale, à la pauvreté, à l’itinérance, au manque d’éducation et à des incarcérations. Tous ces éléments ont de graves conséquences négatives sur la santé mentale de la population.

Les troubles mentaux comme le suicide, la dépression et la toxicomanie sont plus élevés dans de nombreuses communautés autochtones que dans la population en général. L’OFIFC a indiqué que le taux de suicide chez les Autochtones est de 2,1 fois supérieur au taux canadien, les femmes autochtones sont trois fois plus susceptibles de se suicider que leurs homologues allochtones[71]. Le taux de suicide chez les jeunes Autochtones de 15 à 24 ans est de cinq à six fois plus élevé que celui de la population allochtone[72].

Les stéréotypes sur la consommation de drogues et d’alcool ont été abordés lors de la consultation. Beaucoup de gens ont expliqué comment ils ont fait l’objet d’iniquités dans les services ou ont subi des remarques harcelantes ou du profilage comme risque pour la sécurité en fonction de stéréotypes sur leur identité autochtone et de perceptions erronées à propos de leur consommation d’alcool et de drogues. Selon l’OFIFC, la réforme de la santé mentale adoptée par le gouvernement provincial dans les années 1990 et ayant mené à la fermeture d’hôpitaux, a signifié que beaucoup d’Autochtones aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances ont été désinstitutionnalisés en zone urbaine et non dans leur communauté d’origine.

Beaucoup d’intervenants ont dit que le manque de logements abordables est une préoccupation importante et qu’il est beaucoup plus difficile de trouver un logement en raison de l’intersection des identités de personne aux prises avec un trouble mental ou une dépendance, et simultanément de personne d’ascendance autochtone.


[71] Conseil national du bien-être social, Agissons maintenant pour les enfants et les jeunes métis, inuits et des premières nations, Ottawa, Sa Majesté la Reine en Droit du Canada, 2007, p. 64.

[72] Jeff Latimer et Laura Casey-Foss, Profil instantané d'une journée des jeunes Autochtones sous garde au Canada : Phase II, Ottawa, ministère de la Justice du Canada, recherche sur la justice et les jeunes, février 2004, p. iii.

 

Code Grounds: 

9.7. Intersections avec l’âge

a) Jeunes

La Fédération des enseignantes-enseignants des écoles secondaires de l’Ontario (OSSTF/FEESO) s’inquiète du fait que les services de santé mentale pour les enfants et les jeunes ne sont pas sous mandat en Ontario, ce qui conduit à des approches incohérentes et fragmentées. Les jeunes (de moins de 25 ans) qui ont participé à la consultation ont dit qu’ils ne peuvent pas obtenir de services en santé mentale ou de lutte contre les dépendances parce qu’ils sont trop jeunes pour les services aux adultes et trop vieux pour les services pédiatriques ou qu’ils ne satisfont pas aux critères du programme en raison de handicaps multiples. Un intervenant auprès des jeunes a expliqué comment un programme de traitement des dépendances chez les jeunes refuse d’accepter des personnes qui ont été en contact avec les services de protection de l’enfance.

Le Centre hospitalier pour enfants de l’Est de l’Ontario (CHEO) a affirmé qu’après avoir ratifié la Convention internationale des droits de l’enfant, le Canada est tenu de s’assurer que les enfants peuvent réaliser leur droit à la plus haute norme atteignable en santé. Le CHEO a déclaré que le Canada doit s’efforcer de voir à ce qu’aucun enfant ne soit privé de son accès à ces services de soins de santé (article 24.1). Le CHEO a ajouté que c’est une grave violation des droits des enfants que de ne pas avoir adopté de loi sur les services en santé mentale pour les enfants. Dans sa stratégie sur la santé mentale et les dépendances, le ministère de la Santé et des Soins de longue durée (MSSLD) de l’Ontario a ciblé la prestation des services accrus aux enfants et aux jeunes, en mettant l’accent sur la détection et l’intervention précoces.

b) Adultes âgés

L'Advocacy Centre for the Elderly (ACE) a parlé d’importantes questions de discrimination à l’endroit de personnes âgées aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances. Selon les estimations, une personne de plus de 65 ans sur cinq est atteinte de troubles mentaux[73].

L’ACE est fréquemment contacté par des personnes âgées et des mandataires de personnes âgées parce les personnes âgées recevant des soins de longue durée ont reçu des médicaments, en particulier des antipsychotiques, sans consentement éclairé. L’ACE a exprimé son inquiétude au sujet du taux élevé d’utilisation des antipsychotiques pour les résidents atteints de démence dans les foyers de soins de longue durée par rapport à leur utilisation chez les personnes âgées atteintes de démence vivent dans la collectivité[74]. L’organisme a également déclaré que, contrairement aux personnes visées par la Loi sur la santé mentale, les personnes recevant des soins de longue durée n’ont pas le même accès à un conseiller juridique si elles sont jugées inaptes à consentir au traitement. D’autres questions concernant les soins de longue durée sont soulevées dans la section sur le logement (article 11.1).

D’autres nous ont dit comment la discrimination fondée sur l’âge se combine avec la discrimination fondée sur le handicap, en particulier dans le domaine de l’emploi. Ils ont dit qu’il est beaucoup plus difficile de trouver et conserver un emploi lorsqu’on doit composer avec les symptômes du vieillissement et d’un handicap.

Bien que j’aie plus de 30 ans d’expérience dans les domaines de l’administration, du secrétariat et du travail de bureau, dont près de 25 ans en organisation, planification d’événements, relations publiques, promotions et médias, je ne peux pas trouver de travail approprié en raison du fait que je suis actuellement en mesure de travailler seulement de 25 à 30 heures par semaine et que j’ai passé huit ans hors du marché du travail. Ajoutez à cela le fait qu’il ne me reste que sept ans avant de prendre ma retraite à l’âge normal de 65 ans, et vous comprendrez que beaucoup de gens ne veulent pas m’embaucher.

                  – Participante au sondage

Recommandations :

6. Le gouvernement de l’Ontario et les organisations fournissant des services aux personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances doivent cerner et éliminer la discrimination fondée sur le handicap dans leurs services, de même que la discrimination fondée sur l’âge, le sexe, la race et les motifs connexes, l’identité sexuelle, l’orientation sexuelle et les autres motifs prévus au Code. Cela peut exiger un processus d’examen des politiques, pratiques et processus décisionnels et l’élimination des obstacles qui mènent à la discrimination à l’endroit des groupes protégés aux termes du Code (voir les directives de la CODP concernant l’élaboration de politiques et de procédures en matière de droits de la personne pour plus d’informations).

Engagements de la CODP :

E4. Dans ses travaux sur ses priorités stratégiques (p. ex., la police et l’antiracisme, les droits fondamentaux des Autochtones, la situation de famille, les handicaps et l’éducation), la CODP focalisera sur les droits de la personne, la santé mentale et les dépendances.

E5. La CODP continuera d’examiner la question du niveau de conseils sur les droits fournis aux personnes âgées en soins de longue durée qui sont jugées incapables de prendre des décisions concernant leur traitement. Si cela viole potentiellement le Code, la CODP soulèvera, le cas échéant, ses préoccupations auprès des parties responsables, tiendra des enquêtes d’intérêt public, interviendra dans les affaires judiciaires ou procédera à des demandes à l’initiative de la Commission.


[73] D. Jeste, et coll. « Consensus statement on the upcoming crisis in geriatric mental health: Research agenda for the next two decades », Archives of General Psychiatry, vol. 56, 1999, p. 848, cité dans le mémoire de l’ACE.

[74] L’ACE indique que, selon l’Institut canadien d’information sur la santé, en 2006-2007, 37,7 p. 100 des résidents en maison de soins de longue durée participant aux programmes publics de médicaments ont reçu une ordonnance d’antipsychotique, par rapport à seulement 2,6 p. 100 des adultes âgés vivant dans la collectivité qui pouvaient demander une indemnisation pour des médicaments contre la démence. L’étude indique que « le taux plus élevé d’utilisation d’antipsychotiques chez les personnes âgées vivant dans des centres de soins infirmiers qui prennent des médicaments antidémence peut laisser entendre que des facteurs autres que les différences dans la prévalence de la démence contribuent à la variation des taux d’utilisation d’antipsychotiques ». Institut canadien d’information sur la santé, Utilisation d'antipsychotiques par les personnes âgées : une analyse des demandes de remboursement de médicaments, 2001 à 2007, 2009. Accessible en ligne : Institut canadien d’information sur la santé, https://secure.cihi.ca/estore/productSeries.htm?locale=fr&pc=PCC490, p. 17.

 

Code Grounds: 

10. Obligation d’accommodement

L’accommodement des personnes aux prises avec une maladie mentale en milieu de travail n’est pas uniquement une question de sentiments, de perte de dignité ou d’impression d’injustice. C’est une question de survie. L’accommodement peut faire la différence entre la goutte qui fait déborder le verre et la main tendue qui vous sauve. Parce que je n’avais pas accès à des mesures d’adaptation, je dépensais toute mon énergie à surmonter les obstacles auxquels je me heurtais durant la journée au travail. À la fin de la journée, j’arrivais à peine à prendre le volant pour entrer à la maison tellement j’étais pris de fatigue. – Mémoire écrit

Aux termes du Code, les employeurs et les fournisseurs de logements et de services ont le devoir d’offrir des mesures d’adaptation pour combler les besoins relatifs au Code de leurs locataires, employés et clients. Ils doivent assurer la conception inclusive de leurs organisations et éliminer tout obstacle qui s’y trouve, à moins que cela ne cause de préjudice injustifié. L’obligation d’accommodement pourrait forcer les organisations à apporter des changements à leurs politiques, règlements administratifs, pratiques et processus de prise de décisions pour assurer l’égalité des chances des groupes protégés aux termes du Code. Les personnes demandant des mesures d’adaptation et les organismes offrant de telles mesures ont chacun la responsabilité de participer au processus. Dans bien des cas, les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances n’auront pas besoin de mesures d’adaptation pour obtenir et conserver un logement ou un emploi, ou pour avoir accès à des services. Dans d’autres, ce genre de mesures sera nécessaire. Dans de telles situations, les principes de dignité, d’accommodement individuel, d’intégration et de pleine participation doivent s’appliquer.

Box: À moins que cela ne cause de préjudice injustifié, l’obligation d’accommodement pourrait inclure, par exemple, le fait d’insonoriser le logement locatif d’une personne que le syndrome de stress post-traumatique a rendue sensible au bruit, de permettre à une employée de prendre congé du travail pour consulter un thérapeute ou de prolonger la date limite que doit respecter un candidat qui a dû être hospitalisé. End of box

On nous a dit que l’obligation d’accommodement causait beaucoup de confusion parmi toutes les parties intéressées. Beaucoup de personnes ayant des handicaps psychosociaux ne connaissent pas leurs droits en matière d’accommodement. Certaines personnes peuvent aussi être réticentes à faire part de leur handicap et à demander des mesures d’adaptation, par crainte de subir de la discrimination. Une personne nous a dit avoir si peur d’être stigmatisée qu’elle a laissé son emploi au lieu de demander le congé dont elle avait besoin.

Les organisations doivent s’assurer de lutter explicitement contre les stéréotypes et de faire en sorte que leur culture organisationnelle soit accueillante envers les personnes ayant un handicap psychosocial. Aux termes du Code, les organisations sont ultimement responsables de créer des environnements inclusifs conçus ou adaptés de façon à combler les besoins des personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances et à promouvoir la pleine inclusion ou participation de ces personnes. On nous a souvent dit que les milieux de travail et services, surtout, devaient être « mis au diapason », et être plus inclusifs et accessibles aux personnes ayant des handicaps psychosociaux.

Les organisations nous ont dit qu’elles avaient besoin de conseils clairs et pratiques sur la façon de fournir des services accessibles aux personnes ayant des troubles mentaux et des dépendances. Ces conseils s’avéreraient nécessaires malgré l’établissement de normes d’accessibilité aux termes de la Loi de 2005 sur l’accessibilité pour les personnes handicapées de l’Ontario (LAPHO), qui décrit la façon dont toutes les organisations doivent assurer l’accès complet des personnes handicapées et le respect de leur droit à la non-discrimination.

On nous a dit que l’accommodement des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances est souvent perçu comme une tâche bien plus ardue que celle d’offrir des mesures d’adaptation aux personnes ayant d’autres types de handicaps. Certains des défis de ce type d’accommodement sont dus à la stigmatisation des troubles mentaux et des dépendances, à la nature souvent « cachée » de ces handicaps et aux questions de vie privée qui s’y rattachent. Comme l’indique le bureau de l’ACSM de Sudbury-Manitoulin, cependant, les organisations ne devraient pas présumer que l’accommodement des personnes ayant des handicaps psychosociaux est difficile ou coûteux. Selon lui, « [cela] est exactement le contraire de la réalité, soit que les mesures d’adaptation requises sont habituellement simples et économiques. Le manque de connaissances mène à la peur et, par conséquent, au manque de possibilités ».

Les organisations nous ont dit avoir besoin de plus d’information sur :

  • la façon de respecter leurs obligations en matière d’accommodement lorsque les gens ne sont pas nécessairement capables de cerner leurs besoins à ce chapitre ou de participer au processus d’accommodement en raison de leur handicap
  • la prise en compte du handicap d’une personne comme facteur atténuant dans des situations où cette personne serait normalement pénalisée
  • la façon d’évaluer le préjudice injustifié lorsqu’une situation découle d’un comportement associé à un handicap (par exemple, un cas de santé et de sécurité)
  • la façon de concilier le droit à l’accommodement d’une personne et les besoins et droits des autres.

Les personnes consultées nous ont dit que les fournisseurs de mesures d’adaptation devraient rendre publiques leurs politiques en matière de droits de la personne afin d’accroître la compréhension des droits et responsabilités. Certaines d’entre elles ont fait remarquer que l’exercice des droits de la personne est essentiel pour faire en sorte qu’il n’y ait pas de violation du Code.

Recommandations :

7. La Direction générale de l’accessibilité pour l’Ontario devrait consulter les personnes ayant des handicaps psychosociaux et groupes de personnes handicapées pour évaluer les normes actuelles établies aux termes de la LAPHO et déterminer dans quelle mesure elles tiennent compte des besoins des personnes ayant des handicaps psychosociaux. Ces normes devraient être modifiées à la lumière des commentaires  des personnes consultées afin d’inclure toute exigence additionnelle requise en matière d’accessibilité.

8. La Direction générale de l’accessibilité pour l’Ontario devrait élaborer et promouvoir du matériel d’éducation supplémentaire indiquant comment la LAPHO s’applique spécifiquement aux personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances afin que les organisations puissent comprendre leurs responsabilités à l’égard des personnes ayant des handicaps psychosociaux.

Engagement de la CODP :

E6. La CODP élaborera une politique régissant les droits de la personne, la santé mentale et les dépendances qui s’inspirera de sa Politique et directives concernant le handicap et l’obligation d’accommodement. Le contenu de la politique inclura des conseils et exemples sur la façon dont les organisations peuvent respecter leur obligation d’offrir des mesures d’adaptation aux personnes ayant des handicaps psychosociaux en milieu de travail et en matière de logement et de services. Cette discussion prendra en considération les préoccupations soulevées durant la consultation, les responsabilités des personnes et des organisations au cours du processus d’accommodement, ainsi que les limites de l’accommodement (préjudice injustifié).

10.1. Détermination des besoins en matière de mesures d’adaptation

Il est difficile de savoir si une personne est consciente du fait qu’elle a un handicap, ou si elle préfère tout simplement en taire l’existence par peur d’être stigmatisée. La non-reconnaissance du handicap pourrait avoir un effet préjudiciable sur une cause devant les tribunaux, par exemple si le juge ou la partie adverse reconnait l’existence d’un handicap. De façon semblableles [clients] des services aux tribunaux ne feront pas d’emblée part de leurs handicaps. Devrait-il incomber à la personne de divulguer sa situation, ou le [fournisseur de services] peut-il agir à la lumière de comportements constatés. Et dans ce cas ne fait-il qu’appliquer des stéréotypes?

            – Représentant(e) des services aux tribunaux

De l’accommodement à la condescendance, il n’y a qu’un pas. La clé est de s’assurer que la personne elle-même demande la mesure d’adaptation et soit à l’aise de le faire, et non qu’on lui impose une mesure d’adaptation « pour son propre bien » si elle ne cherchait pas à l’obtenir.

– Représentant(e) de l’OPDI

Le processus d’accommodement débute habituellement lorsqu’une personne détermine qu’elle a un besoin en matière d’accommodement dû à un handicap. Tout au long de la consultation, les organisations ont dit nécessiter des clarifications sur les renseignements qu’elles peuvent ou non demander aux personnes ayant des problèmes de santé mentale à propos de besoins éventuels en matière de mesures d’adaptation, compte tenu du droit à la vie privée de ces personnes. Ce besoin de clarté est particulièrement criant lorsqu’il s’agit d’« entamer une conversation » avec une personne chez qui on croit qu’un problème de santé mentale ou qu’une dépendance nuit au rendement au travail, à la location d’un logement ou à la participation à des services, et devrait faire l’objet de mesures d’adaptation.

À plusieurs reprises, nous avons aussi entendu parler de personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances qui avaient fait part de besoins en matière d’accommodement, et dont les besoins avaient été mis en doute ou tout simplement contestés, même lorsqu’elles avaient présenté de la documentation médicale à l’appui. On présumerait que les personnes mentent à propos de leurs handicaps de façon à esquiver leurs responsabilités, puis refuserait d’offrir des mesures d’adaptation sur cette base. Cette situation préoccupait particulièrement les employés aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances.

On m’a dit que les troubles mentaux ne constituaient pas un handicap, et qu’aucune mesure d’adaptation n’était donc requise. Il revenait à moi de « prendre le travail qu’on me proposait ou de quitter ».

      – Participant(e) au sondage

On nous a dit que les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances éprouvaient de la difficulté à faire reconnaître leurs handicaps au même titre que s’il s’agissait de handicaps physiques, surtout en ce qui a trait aux renseignements requis pour prouver l’existence des handicaps. Comme l’explique le Centre d’assistance juridique en matière de droits de la personne (COAJDP), les personnes aux prises avec ce genre de handicaps doivent souvent effectuer une divulgation plus détaillée en raison de la nature « cachée » de leurs handicaps, qui rend la situation moins apparente.

Au nombre des aspects d’importance capitale figuraient le respect de la vie privée et la confidentialité. Des participants ont soulevé des préoccupations à propos de l’étendue de la documentation médicale pouvant être exigée pour appuyer une demande de mesures d’adaptation. En raison du déséquilibre de pouvoir entre la personne qui demande la mesure d’adaptation et l’entité qui la fournit, et du manque de compréhension par les deux parties de l’information requise pour procéder à l’accommodement, les gens peuvent penser qu’ils doivent soumettre leurs renseignements médicaux personnels, même si cela n’est pas nécessaire pour obtenir la mesure d’adaptation. Des participants se souciaient du fait que cette information puisse ensuite être utilisée de façon non appropriée. Selon la Fédération des enseignantes et des enseignants des écoles secondaires de l’Ontario (OSSTF/FEESO) :

Les pratiques systémiques adoptées par les employeurs revêtent une importance particulière pour les membres de l’OSSTF/FEESO. Bon nombre d’employeurs tentent régulièrement de faire signer aux personnes une lettre de consentement à la divulgation complète de leur dossier médical par le médecin. Les formulaires incluent fréquemment des questions sur les « désordres nerveux » que nos membres affaiblis et mal informés signent parfois. Certains employeurs utilisent ensuite l’information à des fins punitives.

On nous a aussi indiqué que l’information contenue dans les notes des médecins, particulièrement celles des médecins de famille, est parfois vague et dépassée, et ne donne pas toujours à l’organisation les renseignements requis pour procéder à l’accommodement. Selon le bureau des droits de la personne de l’Université de Guelph :

Au moment d’envisager la prestation de soutiens aux étudiants aux prises avec des troubles mentaux, il peut être difficile d’obtenir de la documentation à jour et pertinente, que ce soit pour confirmer le handicap ou pour appuyer la demande de mesures d’adaptation uniques et spécifiques. Cela s’applique surtout aux étudiants en attente de consultation avec un psychiatre.

Les organisations semblent beaucoup se fier sur l’information médicale pour vérifier que les personnes ont bel et bien des troubles mentaux ou des dépendances avant d’envisager de leur procurer des mesures d’adaptation. Certaines personnes ont remis cela en question et noté que les organisations devraient accueillir les demandes d’accommodement de bonne foi, en se fiant à ce que la personne juge être ses besoins en matière de mesures d’adaptation. Certains participants ont donné comme exemple le programme de gestion des handicaps de la CIBC qui, dans la plupart des cas, ne requiert pas de vérification médicale des troubles mentaux pour procurer des mesures d’adaptation en milieu de travail[75].

Engagements de la CODP :

E7. La CODP sensibilisera davantage l’Ontario Medical Association, l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario et d’autres intervenants pertinents au soutien que peut procurer le milieu médical aux personnes qui demandent des mesures d’adaptation lorsque l’accommodement de ces personnes exige la vérification médicale de leurs incapacités et besoins.

E8. La CODP surveillera les enjeux émergents en matière de maladie mentale et de dépendances tout au long des interventions juridiques qu’elle mène à la demande de la collectivité et de ses activités de réseautage avec des organisations communautaires et le COAJDP, dans les médias et au moyen d’autres approches. Elle envisagera d’aborder ces questions dans le contexte de son mandat, le cas échéant, au moyen d’éducation publique, de l’élaboration de politiques, d’enquêtes d’intérêt public, d’interventions juridiques, de requêtes devant le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario, ou d’une combinaison de ces mesures.

10.2. Clarification de l’applicabilité de l’obligation d’accommodement

Certaines personnes et organisations sont également confuses à propos de l’obligation d’accommodement des handicaps aux termes du Code. Est-ce que cela signifie qu’un fournisseur de mesures d’adaptation doit fournir des soins, des traitements ou du counselling aux personnes aux prises avec un handicap psychosocial ou une dépendance, ou veiller au maintien de leur santé mentale? Ce genre de questionnement montre qu’il est nécessaire de clarifier les rôles que confère l’obligation d’accommodement aux fournisseurs de mesures d’adaptation, pour veiller à ce que tout le monde comprenne les différences pouvant exister entre l’accommodement et la prestation de soins.

De nombreuses personnes ont soulevé des préoccupations à l’égard d’organisations qui refusent de fournir des services ou un logement en raison du handicap ou de la complexité des besoins du récipiendaire. Ce refus peut constituer un exemple de traitement inéquitable, ou de manque d’accommodement des besoins d’une personne jusqu’au point de préjudice injustifié. Il peut aussi provenir du fait que le type de service ou de logement demandé ne s’inscrit pas dans le mandat de l’organisation et que les mesures d’adaptation demandées ne sont pas appropriées. La CODP peut aider en fournissant des renseignements supplémentaires sur le moment et la manière d’appliquer le Code.

Engagement de la CODP :

E9. Dans sa politique régissant les droits de la personne, la maladie mentale et les dépendances, la CODP procurera des conseils sur la façon de distinguer l’obligation d’accommodement de la prestation de traitements ou de soins aux personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou de dépendances. La politique abordera aussi la question de l’application du Code dans le cas ou une organisation refuserait d’offrir des services ou un logement à des personnes ayant des handicaps psychosociaux.


[75] Andrea Davis, DM Diagnostic, 1er mars 2006. Accessible en ligne : Benefits Canada, www.benefitscanada.com/news/dm-diagnostic-8220, téléchargé le 3 mai 2012; David Brown, CIBC’s Disability Management Principles [présentation de diapositives non publiée].

Organizational responsibility: 

11. Logement

11.1. Questions systémiques et sociétales

a) Manque de logements abordables

C’est assez simple... problème de santé mentale=aide sociale au revenu=logement social=liste d’attente de huit ans=pour aboutir dans un ensemble de logements sociaux=où je ne me sens pas en sécurité=réapparition de mes symptômes=je représente un danger pour moi-même=un cas de suicide de plus= ça ne préoccupe personne.  – Participant(e) au sondage

La question du manque de logements abordables et convenables à l’échelle de l’Ontario a été soulevée par des personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances, et des organisations. L’Enquête sur la participation et les limitations d’activités (EPLA) de 2006 de Statistique Canada montre qu’en Ontario, les personnes aux prises avec des troubles « émotifs » sont plus susceptibles que les personnes non handicapées ou aux prises avec d’autres types de handicaps d’avoir un besoin impérieux de logement[76]. Les participants se préoccupaient aussi beaucoup de l’itinérance. En Ontario, la fermeture des hôpitaux psychiatriques, jumelée au manque de ressources communautaires pour les anciens résidents de ces établissements, a fait bondir les taux d’itinérance des personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances[77]. Selon l’AIIAO, le gouvernement fédéral n’a pas respecté ses obligations relatives à la lutte contre l’itinérance en mettant en œuvre les recommandations sur la pauvreté, le logement et l’itinérance du rapport Kirby. L’AIIAO nous a dit que la province et les municipalités devaient de toute urgence éliminer les lacunes sur le plan des politiques gouvernementales relatives au logement, au soutien du revenu et à la santé mentale.

Box: Le document de référence Les droits de la personne et le logement locatif en Ontario, le rapport de consultation Le droit au logement et la Politique concernant les droits de la personne et le logement locatif de la CODP abordent en profondeur le droit au logement et l’état du logement abordable en Ontario et au Canada. End of box

Selon L’ACSM – Ontario, les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances peuvent avoir de la difficulté à conserver un logement sûr et abordable lorsqu’elles sont malades, surtout si elles sont incapables de travailler et subissent une perte de revenu. Par conséquent, beaucoup d’entre elles peuvent uniquement se payer un logement inadéquat dans un immeuble surpeuplé et bruyant, situé dans un quartier peu souhaitable. Le Toronto Community Housing Corporation Anti-Ableism Committee a fait part de ses préoccupations par rapport à l’« entreposage » des personnes aux prises avec des maladies mentales ou des dépendances chroniques dans des immeubles à logements sociaux, en partie dû au manque de logements privés abordables.

Pour sa part, le Comité des droits de l’homme des Nations Unies s’inquiète de la détention de personnes ayant des handicaps psychosociaux dans des établissements canadiens en raison d’un manque de logements avec services de soutien dans la collectivité[78]. Ce constat se faisait l’écho du vécu de plusieurs personnes, qui nous ont dit avoir été incapables de quitter un établissement psychiatrique ou avoir été transférées dans une unité moins restreignante pendant des mois, voire des années, parce que l’établissement n’avait pas été en mesure de leur trouver un logement adéquat. D’autres nous ont fait part du fait que des personnes passaient directement de l’établissement à la rue. Faisant référence à une étude de 2006, l’AIIAO a affirmé : «  Il est clairement inacceptable qu’en 2002, à London, en Ontario, au moins 194 personnes aient obtenu leur congé d’un établissement psychiatrique pour passer directement à la rue ou à un refuge[79]. »

Le fait de devoir attendre des années pour obtenir un logement social, coopératif ou avec services de soutien inquiétait aussi beaucoup de personnes. Certains mémoires faisaient état du besoin d’accroître les subventions au logement et les taux d’aide sociale pour favoriser la création de plus de logements sociaux. (TCHC Anti-Ableism Committee). À la suite de notre consultation sur le logement de 2007, nous avons recommandé que les gouvernements fédéral et provincial mettent en place des stratégies sur le logement qui incluent des cibles mesurables et prévoient des fonds suffisants pour accélérer le travail d’élimination de l’itinérance et assurer l’accès de tous les Canadiennes et Canadiens, y compris les personnes à revenu limité, à un logement adéquat sans discrimination. Depuis que nous avons formulé ces recommandations, un projet de loi fédéral d’élaboration d’une stratégie nationale sur le logement a été déposé, mais n’a pas obtenu force de loi. L’investissement fédéral dans le logement abordable est en déclin depuis les années 1990 [80].

L’Ontario a lancé sa stratégie à long terme de logement abordable et a adopté la Loi de 2011 favorisant des collectivités fortes grâce au logement abordable qui, entre autres, vise à regrouper les programmes de logement et de lutte contre l’itinérance. La loi oblige aussi les municipalités à permettre la création de davantage de logements abordables sous forme de deuxièmes unités[81]. Or, selon l’Association du logement sans but lucratif de l’Ontario (ALSBLO), le Réseau ontarien sur le logement et d’autres organismes du genre, la stratégie n’aborde pas la question du besoin d’accroître l’investissement dans des nouveaux ensembles immobiliers ou dans l’entretien continu des ensembles existants [82].

Box: L’article 19 de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées assure aux personnes handicapées le droit de vivre au sein de la société avec la même liberté de choix que les autres personnes. Selon la convention, les États Parties (comme le Canada) devraient prendre des mesures efficaces pour veiller à la pleine intégration et participation des personnes handicapées à la société, notamment en veillant à ce que :

  • les personnes handicapées aient la possibilité de choisir, sur la base de l’égalité avec les autres, leur lieu de résidence et où elles vont vivre
  • les personnes handicapées aient accès à une gamme de services à domicile ou en établissement et autres services sociaux d’accompagnement, y compris l’aide personnelle nécessaire pour leur permettre de vivre dans la société et de s’y insérer. End of box.

Logement inadéquat

Selon l’organisme ARCH, beaucoup de personnes ayant des handicaps psychosociaux vivent dans des logements dans un état de délabrement notoire, mais peuvent hésiter à se plaindre par crainte de perdre leur logement. Beaucoup de propriétaires et de fournisseurs de logements entretiennent convenablement leurs logements. Cependant, dans le cas des logements sociaux, coopératifs ou avec services de soutien, le manque de financement public peut compliquer la tâche de maintien et de réparation des logements des locataires existants[83]. Plusieurs personnes étaient d’avis que les mauvaises conditions de vie dans les logements à loyer modique (logements sociaux et logements locatifs privés) augmentent l’insécurité des gens et leur vulnérabilité aux mauvais traitements et au harcèlement. Cela peut avoir des répercussions négatives sur la santé physique et mentale, et même forcer certains à quitter la collectivité de leur choix pour trouver un logement plus abordable. On nous a fait part d’exemples de mauvaises conditions de vie, comme des logements délabrés, des moisissures, des risques d’incendie, des punaises de lit et un chauffage inadéquat (organisme People Advocating for Change through Empowerment).

Le manque d’options de vie sans services de soutien est un autre thème soulevé durant la consultation. Des personnes nous ont dit qu’elles pourraient être obligées d’opter pour un logement supervisé ou avec services de soutien alors qu’elles n’ont pas besoin de ces soutiens. D’autres personnes peuvent devoir partager un logement en raison de leur revenu faible. Le fait de partager un logement peut être difficile pour des personnes qui risquent de se heurter à des attitudes négatives de la part de colocataires ou qui doivent vivre seules en raison de leur handicap.

Logements sociaux et logements avec services de soutien

Selon l’Association du logement sans but lucratif de l’Ontario, les logements sociaux sont des logements commandités par la collectivité (par exemple des groupes confessionnels locaux, clubs philanthropiques, YMCA, autres organismes communautaires ou municipalités)[84]. Généralement, ces logements sont administrés sans but lucratif et bénéficient d’un financement public pour leurs immobilisations ou leur fonctionnement [85]. Les logements avec services de soutien sont des logements sans but lucratif offerts aux personnes ayant besoin de soutien pour vivre de façon autonome, comme des personnes âgées fragiles ou des personnes aux prises avec des troubles mentaux, des dépendances ou des déficiences développementales. Habituellement offerts en milieu partagé (maisons converties, grappes de logements), les logements avec services de soutien procurent des mesures de soutien au rétablissement aux usagers/survivants afin d’améliorer leurs aptitudes à la vie en société[86]. Le réseau des logements sociaux sans but lucratif est également composé de bon nombre d’organismes de logements coopératifs. Les immeubles de logements sociaux, coopératifs et avec services de soutien desservent parfois une clientèle à revenu mixte, c’est-à-dire qu’ils comptent à la fois des logements subventionnés ou à loyer indexé sur le revenu, et des logements à loyer du marché.

Des participants nous ont donné des exemples de la façon dont les logements sociaux et avec services de soutien pouvaient appuyer le droit des personnes à un logement et améliorer la vie des personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances. Un fournisseur de logements d’Ottawa a recours à un modèle de réduction des méfaits qui permet aux personnes aux prises avec des dépendances de stabiliser leur situation. Les participants étaient d’avis que la méthode d’indexation des logements sociaux au revenu répondait aux besoins individuels. Certains fournisseurs de logements sociaux et logements avec services de soutien ont déclaré avoir collaboré efficacement avec des locataires aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances afin d’instituer les mesures d’adaptation requises.

On nous a dit que le manque d’unités de logement avec services de soutien à l’échelle de l’Ontario contribuait à l’itinérance. Outre les longues listes d’attente, nous avons appris que la province manquait de logements avec services de soutien pour les personnes à besoins multiples ayant des troubles mentaux Certains fournisseurs offrent un type de services seulement (p. ex. dans le domaine de la santé mentale, mais non dans ceux de la santé physique ou des dépendances). Cela peut créer des obstacles additionnels pour les membres de certains groupes protégés aux termes du Code et réduire les options qui s’offrent à eux (p. ex. personnes âgées aux prises avec des problèmes de santé mentale qui sont capables de vivre de façon semi-autonome, femmes autochtones aux prises avec des dépendances qui ont récemment été libérées de prison, personnes aux prises avec des troubles de l’alimentation).

[Environ] la moitié des femmes détenues dans les prisons ont un problème de santé mentale, mais pourraient avoir des dépendances et un double diagnostique. Ces femmes pourraient même se heurter à des obstacles dans certaines maisons de transition, où elles ne seront pas acceptées dans les programmes résidentiels si des accusations demeurent en suspend.

– Participant(e) à la table ronde d’Ottawa

Certaines personnes sont placées dans des logements qui ne répondent pas à leurs besoins, par exemple des jeunes personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou la maladie de Huntington qui se retrouvent dans des établissements de longue durée (ACE).

Certains mémoires soulevaient des inquiétudes par rapport au fait d’axer spécifiquement des logements sur les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale étant donné que cela favorise la ségrégation plutôt que l’intégration. On nous a dit que les personnes ayant des problèmes de santé mentale graves pouvaient avoir des difficultés extrêmes à vivre avec d’autres personnes en milieu communautaire, surtout si elles nécessitent un niveau de soutien différent, et que bon nombre préféraient vivre seules. En raison d’un manque de ressources, les personnes habitant dans des logements supervisés peuvent également avoir peu d’accès à des mesures de soutien et se retrouver dans des immeubles surpeuplés (Services de santé Royal Ottawa).

Foyers de soins de longue durée

Selon l’organisme ACE, le manque de logements abordables a un impact considérable sur les personnes âgées ayant des besoins en matière de santé mentale, particulièrement en raison des besoins complexes en matière de santé physique qu’elles ont parfois. Le milieu bâti n’est pas assez accessible aux personnes âgées à mobilité réduite, qui peuvent aussi faire l’objet de discrimination en matière de logement pour de nombreux motifs interdits par le Code, dont l’âge et l’état mental.

Les établissements psychiatriques refusent parfois d’admettre les personnes qui sont âgées et ont besoin d’un niveau de soins élevé en raison des troubles de comportement qu’entraînent les démences, maladies psychiques ou autres problèmes neurologiques. Certains diront qu’ils n’offrent pas de soins de longue durée. En même temps, ACE a entendu dire que des foyers de longue durée refusent également d’admettre ces personnes en raison de leurs besoins complexes, même si elles sont admissibles à des soins de longue durée. Par conséquent, certaines personnes sont obligées de vivre dans des logements inadéquats ou de rester à l’hôpital.

Selon ACE, les personnes admises dans des foyers de longue durée n’ont également souvent pas accès au niveau de soins requis et la dotation en personnel est souvent inadéquate. Malgré des améliorations générales apportées au savoir et à la formation dans le secteur des soins de longue durée, l’organisme ACE est d’avis que le personnel des foyers de longue durée nécessite davantage de formation pour gérer les comportements et les besoins associés à la maladie mentale.

Recommandations :

9. Le gouvernement de l’Ontario devrait lier l’aide sociale, notamment l’allocation de logement, au coût réel du logement locatif dans les différentes régions de l’Ontario.

10. Le gouvernement devrait proposer de nouvelles options en matière de logement social et de nouveaux types de subventions au logement, comme une allocation de logement transférable, pour accroître les possibilités qui s'offrent aux personnes à faible revenu sur le marché locatif privé et leur donner plus de flexibilité sur le plan du choix du lieu de vie.

11. Étant donné que les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances ont – de façon disproportionnée – tendance à avoir des besoins sur le plan du logement, le gouvernement de l’Ontario et les municipalités devraient envisager d’adopter des mesures inclusives de zonage, c’est-à-dire des lois et règlements municipaux qui obligent les promoteurs et municipalités à réserver un pourcentage des nouvelles unités au logement abordable ou aux personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et de dépendances.

 

La province devrait mettre en œuvre les recommandations formulées par la CODP dans Le droit au logementy compris :

12. Que le gouvernement du Canada adopte une stratégie nationale en matière de logement, en consultation avec les gouvernements provinciaux, territoriaux et municipaux, laquelle comprend des cibles mesurables et la fourniture de fonds suffisants pour accélérer le mouvement visant à éliminer l’itinérance et à assurer l’accès de tous les Canadiennes et Canadiens, y compris ceux dont le revenu est limité, à un logement convenable.

13. Que le gouvernement de l’Ontario améliore sa Stratégie de logement abordable en octroyant des fonds suffisants pour accélérer le mouvement visant à éliminer l’itinérance et à assurer l’accès de tous les Ontariennes et Ontariens, y compris ceux dont le revenu est limité, à un logement convenable, et ce, sans discrimination aucune.

14. Que le gouvernement de l’Ontario révise et améliore les taux de financement, les programmes, les lois et les règlements de l’Ontario pour s’assurer que les locataires à faible revenu sont en mesure de s’offrir un loyer moyen, de se nourrir et de satisfaire leurs autres besoins fondamentaux. Une attention spéciale doit être accordée aux mesures suivantes :

  • veiller à ce que le salaire minimum soit indexé au coût de la vie et permette au travailleur à plein temps de vivre au-dessus du seuil de pauvreté
  • évaluer les incidences liées aux mécanismes de contrôle des loyers et à la suppression des mécanismes de contrôle des vacances
  • aborder les mesures de récupération du revenu prévues dans la Loi de 2011 sur les services de logement et par les programmes d’aide sociale.

b) Obstacles aux logements sociaux et logements avec services de soutien

On nous a fait part du fait que les lois et procédures régissant la prestation de logements sociaux et de logements avec services de soutien pouvaient créer des obstacles pour les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances.

Demandes de logement avec services de soutien

Certaines personnes qui interviennent au nom des personnes aux prises avec des troubles mentaux s’inquiétaient du fait que des fournisseurs de logements avec services de soutien refusent de louer un logement à des personnes ayant de graves problèmes de santé mentale parce qu’ils jugent qu’elles représentent un « trop lourd fardeau », et ce, sans envisager de leur fournir des mesures d’adaptation jusqu’au point de préjudice injustifié. Beaucoup de ces intervenants ont également mentionné que le processus d’obtention d’un logement avec services de soutien peut aussi porter préjudice aux usagers/survivants ou personnes aux prises avec des dépendances. Selon certains, les formulaires de demande de ces logements sont inaccessibles et intrusifs. Parmi les obstacles perçus à l’obtention d’un logement social figuraient les questions sur le casier judiciaire et les antécédents carcéraux. Les questions relatives à des handicaps doivent être liées à des exigences requises en matière de logement ou de services.

Certaines personnes se souciaient aussi du caractère privé des renseignements médicaux, surtout dans le cas où les demandes peuvent être transmises à d’autres fournisseurs de logements. Des personnes craignaient que de tels renseignements détaillés servent d’outil de discrimination à l’endroit de personnes perçues comme « difficiles à loger » en raison des supposés risques pour la santé et la sécurité qu’elles représentent, sans envisager leurs besoins en matière de mesures d’adaptation.

Des gens font une demande de logement mais, en raison de la base de données de logement social consolidée, celle-ci est rejetée. Un premier fournisseur de logements décide que ces personnes constituent un risque pour la sécurité et transmettent cette information aux autres fournisseurs, qui rejettent à leur tour leur demande.

            – Représentant(e) d’une initiative menée par des usagers/survivants

Selon l’ALSBLO et d’autres fournisseurs de logements avec services de soutien, les programmes de logements avec services de soutien ont des mandats spéciaux en matière de handicaps et offrent différents niveaux de services. L’ALSBLO est d’avis que l’information demandée dans ces formulaires est essentielle pour veiller à ce que les auteurs de demande ayant des besoins complexes puissent obtenir les mesures de soutien requises pour assurer le succès de la location et confirmer que la personne est en mesure de vivre de façon autonome, comme l’exige la Loi de 2011 sur les services de logement[87]. D’après l’ALSBLO, cette information est divulguée avec modération et de façon appropriée.

Ce désaccord souligne le besoin de trouver un juste équilibre entre, d’une part, les droits à la vie privée et, de l’autre, l’obtention par les organisations de l’information nécessaire pour donner suite aux besoins des personnes en matière de mesures d’adaptation. L’information demandée ne doit pas créer d’obstacles fondés sur le handicap.

Recommandation :

15. Les fournisseurs de logements avec services de soutien qui travaillent auprès de personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances, ou les deux, devraient examiner leur processus de demande pour veiller à ce que l’information recueillie soit nécessaire et qu’elle ne crée pas, par inadvertance, d’obstacles pour les personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances, ni qu’elle viole les droits à la vie privée des personnes. Avant de rejeter une personne, chaque fournisseur de logements doit considérer ses obligations aux termes du Code pour évaluer les besoins individuels de la personne et lui offrir les mesures d’adaptation nécessaires jusqu’au point de préjudice injustifié.

Location d’un logement social ou logement avec services de soutien

Par ailleurs, on nous a fait part de préoccupations sur la façon dont les logements sociaux ou avec services de soutien sont administrés. Comme nous l’ont expliqué des participants à la consultation, si une personne tarde à déclarer des changements à son revenu, elle peut compromettre sa subvention au logement. On nous a parlé d’une personne menacée d’expulsion parce qu’elle n’avait pas pu cerner à temps une modification à son revenu, même si elle avait été hospitalisée pour un problème de santé mentale. Des fournisseurs de services comme les Municipality of Chatham Kent Health and Family Services ont également fait valoir le caractère souvent subjectif de l’exigence selon laquelle la personne doit pouvoir vivre de façon indépendante, ainsi que du besoin de direction quant à la façon d’interpréter cette section dans le contexte des locataires avec des troubles mentaux et des dépendances. La façon dont les services sont prodigués aux personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances dans les logements avec services de soutien préoccupaient aussi certaines personnes. Quand les services (comme les mesures de soutien à la santé mentale) sont offerts par du personnel et associés au logement, les locataires risquent de perdre leurs services s’ils changent de logement ou sont expulsés.

Pour les personnes consultées, les règles définies par la Loi sur les services de logement rendent le travail à temps partiel inintéressant. Ces règles permettent aux fournisseurs de logements sociaux d’augmenter les loyers pour tenir compte de l’augmentation des revenus hors prestations sociales, tels que ceux tirés d’un emploi, quand ces revenus sont au-delà des montants spécifiés dans la réglementation[88]. Une baisse correspondante des prestations d’aide sociale vient souvent aggraver la situation. Des rapports produits par la Metcalf Foundation décrivent en quoi ces règles ne permettent pas de sortir de la pauvreté, et perpétuent le besoin d’aide sociale[89].

c) Discrimination de type « pas dans ma cour »

Bon nombre de mémoires ont indiqué que l’opposition discriminatoire à la prestation de logements sociaux à des groupes protégés aux termes du Code (syndrome du « pas dans ma cour ») limite le nombre de logements sociaux et logements avec services de soutien offerts aux personnes ayant des handicaps psychosociaux. Dans Le droit au logement, nous avons recommandé que le gouvernement et les organisations surveillent et combattent l’opposition de type « pas dans ma cour ». La CODP a aussi pris ses propres engagements envers la lutte active contre la discrimination de type « pas dans ma cour ». En février 2012, nous avons lancé un guide sur les droits de la personne et le zonage intitulé Dans la zone : Logement, droits de la personne et planification municipale et offert à l’adresse : http://www.ohrc.on.ca/fr.

L’opposition de type « pas dans ma cour » fait référence à l’opposition à l’égard des projets domiciliaires fondée sur des stéréotypes ou des attitudes négatives envers les personnes qui habiteront les logements en question. Les stéréotypes ou attitudes en cause ont souvent directement trait à un ou plusieurs motifs de discrimination interdits par le Code. L’opposition discriminatoire de type « pas dans ma cour » peut prendre la forme d’attitudes ou d’actions, de lois ou de politiques élaborées par une municipalité.

Nous avons appris que la création de logements avec services de soutien destinés aux personnes aux prises avec des troubles psychiques faisait souvent l’objet d’opposition de type « pas dans ma cour » parce que les membres de la collectivité craignent que cela fasse chuter les valeurs des propriétés et hausser la criminalité. Selon le réseau des services de soutien de York et le service régional de police de York, cela est fondé sur des perceptions erronées qui associent la maladie mentale à la criminalité. Le CODDL a soulevé des préoccupations à propos des exigences relatives aux distances de séparation minimales (règles établissant les distances à assurer entre certains types de logements ou de services) étant donné qu’elles auront des répercussions sur le zonage des foyers de groupes, qui accueillent souvent des personnes aux prises avec des troubles psychiques et des dépendances. Selon le CODDL, cela limite les options en matière de logement que peuvent offrir les fournisseurs de foyers de groupes. Beaucoup de formes de discrimination de type « pas dans ma cour » sont décrites dans la Politique concernant les droits de la personne et le logement locatif de la CODP (section 2.7.2.)

On nous a aussi parlé d’opposition de type « pas dans ma cour » aux refuges pour sans-abri et centres de traitement des dépendances, deux types de services utilisés par les personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances. Certaines municipalités ont adopté ou tenté d’adopter des règlements pour éliminer ou limiter les services destinés aux personnes ayant des dépendances. Selon une personne représentant un centre de traitement des dépendances, ces restrictions ne suscitent pas autant d’attention qu’elles ne le devraient de la part du gouvernement et de la CODP étant donné que cette clientèle est perçue de façon plus négative que les autres groupes protégés aux termes du Code.

Beaucoup de participants ont fait part de frustrations à l’égard du fait qu’il revient souvent aux organisations de services ou de logements abordables de lutter contre les réactions de type « pas dans ma cour ». La Federation of Rental Housing Providers of Ontario (FRPO) a souligné le besoin d’obtenir des directives claires du gouvernement provincial pour prévenir la discrimination à l’échelon municipal si on ne veut pas que le processus de planification municipale ne continue de nuire à la création de logements abordables et de logements avec services de soutien. L’ACSM – Ontario a appuyé l’apport de modifications à la Loi sur l’aménagement du territoire de façon à y ajouter un article sur le zonage inclusif qui donnera aux municipalités le droit d’exiger qu’une certaine proportion des nouveaux ensembles domiciliaires soit composée de logements sociaux[90]. L’ALSBLO a également donné son aval aux modifications et a recommandé d’obliger les promoteurs et les municipalités à réserver aux personnes aux prises avec une maladie mentale ou des dépendances une proportion des nouveaux logements créés.

Des participants ont aussi indiqué à la CODP que la Commission des affaires municipales de l’Ontario (CAMO), qui intervient dans des causes liées à l’aménagement du territoire et a l’autorité d’appliquer le Code des droits de la personne, constitue une importante tribune pour assurer le respect des droits de la personne et contester l’opposition de type « pas dans ma cour ».

Recommandations :

16. Comme l’indiquent les commentaires de la CODP au ministère des Affaires municipales et du Logement, le gouvernement de l’Ontario devrait modifier la Déclaration de principes provinciale qui oriente les efforts en matière d’aménagement du territoire, de façon à :  

  • renforcer l’engagement envers les droits de la personne
  • énoncer clairement que les municipalités doivent examiner et éliminer les obstacles à la création de logements abordables susceptibles de causer de la discrimination contre les groupes protégés aux termes du Code des droits de la personne
  • énoncer des mécanismes de responsabilisation en vue d’éliminer les obstacles discriminatoires à l'aménagement de logements abordables
  • encourager clairement les municipalités à augmenter le nombre de logements abordables dans leurs collectivités.

17. Les municipalités de l’ensemble de la province devraient passer en revue leurs règlements de zonage et règlements sur les permis autorisant les logements locatifs pour éliminer les obstacles au logement et aux services qu’utilisent les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances (comme les foyers de groupes ou centres de traitement des dépendances). Les municipalités devraient éliminer toutes les exigences qui ne sont pas légitimes ou de bonne foi et qui s’appliquent aux logements ou services utilisés par les personnes ayant des handicaps psychosociaux, mais non aux autres logements de même envergure ou services similaires.

Engagements de la CODP :

E10. La CODP continuera de promouvoir son guide, Dans la zone : Logement, droits de la personne et planification municipale et de sensibiliser les conseils et planificateurs municipaux, cliniques juridiques, promoteurs, associations de quartier, associations de locataires et autres intervenants avec leurs droits et responsabilités aux termes du Code, de façon à prévenir l’opposition discriminatoire au logement abordable.

E11. Conformément aux engagements qu’elle a pris dans Le droit au logement, la CODP demeurera à la disposition des organisations communautaires, des municipalités/associations municipales et du gouvernement de l’Ontario pour aider à élaborer et à mettre en œuvre une stratégie à l’échelle de la province visant à prévenir et à régler les situations d’opposition discriminatoire de type « pas dans ma cour ».

E12. La CODP continuera de se prévaloir de son mandat pour contester activement les cas d’opposition discriminatoire de type « pas dans ma cour » par l’entremise de collaborations avec les conseils municipaux, d’enquêtes d’intérêt public, de contestations juridiques et d’autres initiatives, selon la situation.

11.2. Types de discrimination contre les personnes

a) Méthodes de sélection des locataires

Au sein du marché privé et du marché du logement locatif, les personnes consultées ont cerné des types de pratiques de sélection qui mènent au rejet des demandes de location des personnes ayant des handicaps psychosociaux ou à l’imposition de conditions de location différentes pour ces personnes. Bon nombre de ces pratiques de sélection constituent des règles fondées sur des critères de location légitimes qui ont néanmoins des effets pervers sur les personnes ayant des handicaps psychosociaux. Dans d’autres cas, il s’agit de décisions des propriétaires ou fournisseurs de logements qui sont basées sur des stéréotypes à propos de handicaps réels ou perçus et constituent une forme de discrimination directe. Pour obtenir d’autres renseignements sur les méthodes de sélection des locataires, consulter la Politique concernant les droits de la personne et le logement locatif de la CODP (section 4.1.2.).

Marché locatif privé : techniques de sélection à effet pervers

Nous avons entendu dire que les personnes qui, en raison d’un handicap, avaient :

  • été admises dans un hôpital, un centre de traitement ou un établissement correctionnel
  • connu des périodes d’emploi instable, peu rémunéré ou intermittent 
  • connu des périodes d’itinérance
  • un revenu faible ou un dossier nul en matière de crédit
  • été expulsées d’un logement en raison de comportements liés à leur handicap,

pouvaient être incapables de satisfaire aux critères de location légitimes, comme un dossier de location ou de crédit positif, ou de fournir le dépôt demandé. Les locataires qui ont besoin d’un animal d’assistance ne peuvent satisfaire à l’exigence « illégale » des locateurs qui refusent les animaux de compagnie. Toutes ces exigences peuvent constituer de la discrimination fondée sur le handicap, et devraient céder devant l’obligation d’accommodement.

La vérification du casier judiciaire semble également de plus en plus courante au sein du marché locatif privé. Selon le bureau de l’ACSM de Sudbury-Manitoulin, les personnes qui ont des problèmes de santé mentale ou des dépendances, et un casier judiciaire, ont beaucoup de difficultés à trouver un fournisseur qui acceptera de leur louer un logement. Au cours de la consultation sur le logement de la CODP, le Centre for Equality Rights in Accommodation (CERA/SRAC) a indiqué que le fait de rejeter des demandeurs de logement sur la base du casier judiciaire pourrait enfreindre les droits fondamentaux des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale s’il existe un lien entre le casier judiciaire et le handicap. Dans de tels cas, les fournisseurs de logements doivent prendre en compte la situation de la personne. Nous avons aussi entendu parler de situations où des locateurs ont appris qu’une personne avait été appréhendée aux termes de la Loi sur la santé mentale au moment de poser des questions sur le casier judiciaire, ce qui a créé un obstacle additionnel à l’obtention d’un logement.

Marché locatif privé : techniques de sélection basée directement sur le handicap

Beaucoup de personnes ont dit s’être fait refuser un logement dans le marché locatif privé après avoir admis qu’elles avaient un problème de santé mentale ou une dépendance, ou après que le locateur a perçu un tel problème. Nous avons appris qu’il existait des obstacles considérables dans ce domaine. De nombreuses personnes ont tenté d’obtenir un logement à maintes reprises, mais n’y sont pas parvenues en raison de la réaction des locateurs. Les recherches confirment le fait que beaucoup de locateurs du marché privé refusent de fournir un logement aux personnes aux prises avec des troubles mentaux[91].

Certaines techniques de sélection des locataires constituent de la discrimination directe à l’endroit des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances. Le recours aux garants est permis dans certaines situations, par exemple quand aucun autre renseignement sur le demandeur n’est disponible ou en présence d’antécédents de loyers impayés. Cependant, un garant ne devrait pas être exigé seulement parce que le locataire potentiel fait partie d’un groupe protégé par le Code. On nous a parlé de locateurs qui demandaient aux personnes qui recevaient de l’aide sociale ou avaient des antécédents de troubles psychiques de se trouver un cosignataire ou un garant. Des personnes ont aussi dit avoir dû fournir un dépôt supérieur à un mois de loyer en raison de leur handicap.

Quand je cherchais un logement au centre-ville, les locateurs ne voulaient pas m’en fournir parce qu’ils disaient que je ne pourrais pas payer le loyer si ma santé périclitait. Le seul locateur qui voulait bien de moi a exigé que je lui donne 100 $ de plus de dépôt, en espèces. J’ai dû accepter car je devais me loger.

            – Participant(e) au sondage

Les locateurs potentiels demandent souvent des questions indiscrètes sur la nature des handicaps, surtout si la personne reçoit des prestations du POSPH. Beaucoup de personnes ne savaient pas qu’elles n’étaient pas tenues de divulguer des renseignements sur leurs handicaps à un locateur éventuel. Les participants nous ont parlé des hypothèses erronées souvent faites à propos des personnes ayant des problèmes de santé mentale ou des dépendances réelles ou perçues, surtout si ces handicaps sont jumelés à un faible revenu, ou à propos des personnes ayant une allure différente en raison de leur handicap. Les locateurs peuvent avoir l’impression que les personnes aux prises avec des dépendances attireront des vendeurs de drogues dans l’immeuble. Nous avons aussi entendu parler de personnes qu’on avait étiquetées à tort de locataires irresponsables ou même dangereux, ou de personnes incapables de prendre soin d’elles-mêmes.

Mon fils… qui a maintenant 30 ans, a vécu ce genre de situations durant les 15 dernières années : refus d’une demande de logement coopératif parce que son trouble psychique était peut-être un soi-disant trouble « sexuel »; [on ne voulait pas] lui louer de logement parce qu’il semblait « étrange » […]

            – Participant(e) au sondage

Je suis un propriétaire et je ne me sens pas du tout à l’aise de partager mon toit avec un locataire ayant des troubles mentaux. Je ne peux pas croire qu’on veule risquer la vie de membres innocents de la population.

            – Participant(e) au sondage

Certaines personnes ont eu de la difficulté à obtenir un logement sans l’aide d’un intermédiaire. En même temps, certains locateurs ne loueront pas de logement à une personne s’ils savent qu’elle a eu des rapports avec un organisme de santé mentale (bureau de l’ACSM de Sudbury-Manitoulin). Des personnes ont expliqué que le travailleur chargé de leur trouver un logement demandait aux locateurs s’ils louaient leurs logements à des personnes handicapées, ou leur faisait part de l’état mental de leur client, ce qui poussait les locateurs à poser des questions indiscrètes sur la nature du handicap du locataire potentiel et réduisait les chances d’obtenir un logement.

Source de revenu

Les personnes qui reçoivent une aide de l’État (p. ex. prestations d’invalidité, prêts étudiants, aide sociale, assurance-emploi ou prestations du Régime de pension du Canada) bénéficient d’une protection contre la discrimination en matière de logement. Malgré cela, de nombreuses personnes ont dit se voir constamment refuser un logement locatif sur le marché privé parce qu’elles recevaient de l’aide sociale, plus particulièrement des prestations du programme Ontario au travail (OT) ou du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées (POSPH). Selon elles, avoir le POSPH comme source de revenu catalogue automatiquement les personnes comme étant handicapées.

Pour obtenir un logement locatif, nous avons appris que certaines personnes étaient obligées de nier le fait qu’elles recevaient de l’aide sociale ou de cacher la nature de leurs antécédents de troubles mentaux ou de dépendances.

J’avais beaucoup de difficultés à trouver un logement avec ma fiancée. On ne nous rappelait pas. Une locatrice m’a demandé depuis combien de temps je recevais des prestations d’invalidité et quel en était le montant, en m’expliquant que le gestionnaire de l’immeuble devait tout savoir à propos de ses locataires […] mais elle ne demandait pas autant de questions à ma fiancée. Ma fiancée a un bon emploi et un bon dossier de crédit; il n’y avait aucune raison de nous refuser les logements pour lesquels nous faisions une demande. Quand j’ai cessé de dire aux locateurs que je recevais des prestations d’invalidité et que je me suis mis à dire que j’était étudiant ou que j’attendais l’approbation de ma demande [d'aide financière aux étudiantes et étudiants de l'Ontario], nous avons obtenu un logement. Je ne peux imaginer les difficultés que j’aurais à chercher un logement par moi-même.

            – Participant au sondage

Certaines personnes ont dit s’être heurtées aux attitudes négatives et aux préjugés de locateurs qui savaient qu’elles recevaient de l’aide sociale. D’après les gens, le comportement de certains locateurs pouvait être fondé sur des perceptions erronées à l’endroit des personnes qui recevaient de l’aide sociale, y compris l’impression qu’elles ne pouvaient pas vivre de façon autonome, qu’elles recevaient de l’aide sociale de façon frauduleuse ou qu’on ne pouvait pas se fier sur ce type de locataires. Certaines personnes font aussi l’objet de discrimination en matière de logement pour plusieurs motifs de discrimination interdits par le Code, ce qui peut être lié au chevauchement de plusieurs stéréotypes. L’une des participantes a déclaré : « je ne disais jamais à un propriétaire potentiel que j’étais une femme célibataire d’âge moyen avec un handicap; ça aurait été fatal ».

Traitement obligatoire :

Après un épisode suicidaire [à l’université], j’ai dû signer un contrat qui indiquait que je poursuivrais ma thérapie pour demeurer dans l’immeuble universitaire. Le contrat stipulait aussi qu’on m’expulserait si mon état s’aggravait […] Par respect pour moi-même, j’ai trouvé un logement hors campus.

– Participant(e) au sondage

La CODP a appris que certains locateurs de logements sociaux, logements avec services de soutien et logements privés exigeaient que des locataires suivent un traitement ou prennent des médicaments pour obtenir ou conserver un logement. D’autres exigeaient de l’information sur la médication des locataires (Empowerment Council et le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques (BIPEP)). L’organisme ARCH a soulevé des préoccupations à propos des locataires qui ont obtenu leur congé d’un hôpital, sont sous la supervision d’équipes de traitement communautaire dynamique (ETCD) et font l’objet d’ordonnances de traitement en milieu communautaire (OTMC). Les OTMC permettent aux personnes qui seraient normalement gardées à l’hôpital contre leur gré de recevoir un traitement dans la collectivité, moyennant certaines conditions.

Selon une personne représentant un organisme de logements avec services de soutien, certains locataires pourraient être tenus d’accepter de prendre des médicaments pour obtenir ou garder un logement offert dans le cadre de programmes de logements avec services de soutien considérables. Selon l’Association du logement sans but lucratif de l’Ontario, des exigences en matière de traitement peuvent aussi être imposées dans le contexte de processus de prévention de l’expulsion de locataires n’ayant pas pu satisfaire à leurs obligations de location en raison de troubles mentaux ou de dépendances, lorsque le traitement ou la prise de médicaments, ou une combinaison des deux, les aide à vivre de façon autonome et à respecter leurs obligations. Les personnes qui sont en mesure de respecter leurs obligations de location sans que de telles mesures leur soient imposées ne devraient pas être expulsées parce qu’elles ne respectent pas ces exigences.

Le fait d’obliger quelqu’un à suivre un traitement pour obtenir ou conserver un logement peut soulever des questions de droits de la personne. Les personnes qui ont besoin de se loger pourraient se sentir obligées d’accepter des conditions proscrites par le Code. Toute personne compétente a le droit de consentir ou non à l’obtention d’un traitement. Dans certaines situations cependant, il peut être justifié de demander à une personne de suivre un traitement comme condition d’obtention ou de maintien d’un logement. Les fournisseurs de logements devraient évaluer attentivement les conditions qui lient le logement à un traitement, et éliminer toutes celles qui n’ont pas de justification légitime (de bonne foi).

La Cour suprême du Canada a établi des critères de détermination du caractère justifié (de bonne foi) d’une exigence ou d’une norme qui mène à de la discrimination[92]. Pour imposer une telle exigence ou norme, l’organisation doit démontrer que celle-ci :

  • a trait à l’objectif ou à la nature de l’activité entreprise (comme un emploi)
  • a été adoptée honnêtement plutôt qu’à des fins de discrimination
  • est essentielle à l’activité (p. ex. remplir son rôle de locataire) et
    • qu’il n’existe pas d’autre solution plus inclusive qui préviendrait ou limiterait les effets négatifs (parmi les groupes protégés aux termes du Code)
    • que les circonstances de la personne sont quand même prises en compte, et qu’elles font l’objet de mesures d’adaptation dans la mesure du possible, à moins que des coûts ou des risques pour la santé et la sécurité ne causent de préjudice injustifié.

Les approches offrant la priorité au logement reconnaissent que le logement est un droit protégé. Cela signifie que les personnes peuvent obtenir un logement social ou logement avec services de soutien sans être obligées de suivre un traitement ou de rester abstinentes[93].

Engagement de la CODP :

E13. La CODP examinera la question de l’imposition d’exigences de traitement obligatoire dans les secteurs du logement social, des logements avec services de soutien et des logements privés dans le cadre de sa politique régissant la maladie mentale et les dépendances, et fournira des conseils supplémentaires aux locateurs et fournisseurs de logements.

b) Durant la location

Traitement inéquitable et harcèlement

Des mémoires faisaient état d’inquiétudes à propos des réactions des locateurs et fournisseurs de logements aux locataires aux prises avec des troubles psychosociaux. Même si beaucoup de locateurs du marché privé respectent les droits de la personne, des gens ont fait part de situations dans lesquelles ils ont été traités de façon inéquitable. Certains participants nous ont dit que leur vie privée n’avait pas été respectée : des locateurs avaient divulgué des renseignements personnels sur le handicap ou posé des questions sur les médicaments pris, ou effectuaient une supervision trop étroite du locataire. Durant notre consultation sur le logement, le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques (BIPEP) a indiqué que certains locateurs pouvaient imposer leurs propres valeurs sur les locataires aux prises avec des troubles mentaux lorsqu’ils exercent leur droit d’entrer dans les logements. Nous avons reçu des comptes rendus écrits similaires durant la présente consultation.

Il semblerait que certains locateurs adoptent des comportements ou émettent des propos qui constituent du harcèlement et empoisonnent l’environnement (bureau de l’ACSM de Sudbury-Manitoulin). Des locataires se font traités de « fou » par exemple. Certaines personnes ont déclaré avoir fait l’objet de harcèlement ou d’intimidation de la part d’autres locataires ou de voisins en raison de perceptions liées à leurs problèmes de santé mentale, et n’avoir pas obtenu de réaction adéquate du locateur.

Des gens ont aussi dit que leur locateur ou fournisseur de logements avait systématiquement fait fi de leurs demandes concernant des réparations à effectuer. Ils attribuaient la situation au fait qu’ils ont un problème de santé mentale ou une dépendance. Or, en raison de ces handicaps, il est selon certains difficile pour ces locataires de continuellement demander qu’on effectue des réparations. Parfois, pour obtenir des résultats, quelqu’un doit intervenir en leur nom.

Expulsion

Plusieurs personnes ont raconté avoir perdu leur logement locatif privé ou logement social en raison d’un trouble mental ou d’une dépendance, ou connaître quelqu’un à qui cela est arrivé. Dans certains cas, la personne se serait retrouvée sans abri. Au sein du marché privé, on nous a dit que des personnes aux prises avec des troubles psychiques et des dépendances pouvaient être expulsées ou menacées d’expulsion par des locateurs qui n’aiment pas leur source de revenu ou apprennent qu’elles ont un handicap.

La locatrice et moi avions une relation merveilleuse avant qu’elle apprenne de sa sœur au POSPH que j’avais des problèmes de santé mentale. Tout d’un coup, elle mettait sa maison à vendre et faisait tout un plat à propos du fait que je détruisais sa propriété, alors que je m’occupais de tout […] J’ai certainement fait l’objet de discrimination en raison de ce qu’elle a appris du POSPH. – Participant(e) au groupe de consultation

Nous avons appris que certaines personnes pouvaient être expulsées ou menacées d’expulsion pour avoir affiché des comportements associés à leur handicap qui entravaient de façon importante « la jouissance raisonnable de l’ensemble d’habitation » par les autres locataires[94]. Certaines personnes ont décrit comment des locateurs expulsaient des personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances sans même essayer de prendre le temps de résoudre les situations qui survenaient, le cas échéant. Or, l’obligation d’accommodement jusqu’au point de préjudice injustifié s’applique à ces situations.

Ma sœur est schizophrène. Quand elle est tombée malade, nous ne savions pas ce qui se passait. Lorsqu’on a demandé si son loyer avait été payé, on nous a dit que nous n’avions pas accès à cette information. À la fin du mois, ma sœur a appelé pour dire qu’on avait mis ses choses à la porte, et qu’elle ne savait pas pourquoi. Nous ne savions pas quoi faire; elle était sans abri. Elle s’est retrouvée à l’hôpital. C’est différent maintenant. [Le fournisseur de logement social] doit téléphoner à la personne-ressource en cas d’urgence avant de l’expulser. – Participant(e) au groupe de consultation

11.3. Logement et obligation d’accommodement

Nous avons reçu beaucoup de mémoires sur le secteur du logement et l’obligation d’accommodement. De l’avis de l’ALSBLO, il est nécessaire de clarifier le lien entre la politique de la CODP régissant l’obligation d’accommodement et les diverses exigences législatives, administratives et financières imposées aux fournisseurs de logements sociaux. Certaines personnes ont expliqué qu’il pouvait être difficile pour les locateurs et les fournisseurs de logements de concilier les droits de la personne aux prises avec un handicap qui a besoin de mesures d’adaptation et les droits des autres locataires qui, parfois, ont eux-mêmes des troubles mentaux ou des dépendances (FRPO, Clinique juridique communautaire de Nipissing).

On nous a fait part de différentes stratégies qui ont permis à des locataires et fournisseurs de logements d’utiliser le processus d’accommodement avec succès. Par exemple, si la personne a des besoins complexes, il pourrait s’agir de communiquer avec des fournisseurs de soutien externes ou d’adopter une approche fondée sur le travail d’équipe avec le consentement de la personne. Certaines personnes consultées ont souligné le fait que les mesures d’adaptation pourraient devoir durer un certain temps. Selon elles, l’accumulation compulsive constituait un type de comportement pouvant être difficile à aborder en raison des risques éventuels pour la santé et la sécurité.

De l’avis du TCHC Anti-Ableism Committee et de la FRPO, les locateurs et fournisseurs de logements sociaux nécessitent des ressources additionnelles pour réussir à aider un locataire et lui fournir les mesures d’adaptation requises. Ils ont demandé au gouvernement de leur offrir de l’assistance à ce chapitre. Dans beaucoup de régions de la province, ajoute l’ALSBO, les services externes dont ont besoin en temps opportun les fournisseurs de logements sociaux pour aider des locataires à conserver leur logement sont tout simplement manquants ou non disponibles.

Bon nombre de gens nous ont demandé de sensibiliser les personnes et organisations à leurs droits et obligations aux termes du Code de façon à assurer progressivement le respect des droits de la personne en matière de logement (CODDL, FRPO, ALSBLO). Selon le CODDL, l’éducation des locataires à propos de leurs droits a la plus grande chance d’assurer la promotion des droits de la personne. La FRPO a recommandé de fournir une éducation pertinente aux propriétaires, gestionnaires et autres parties qui fournissent des logements locatifs. D’autres ont recommandé que le secteur du logement établisse des politiques et protocoles sur l’obligation d’accommodement des personnes ayant des troubles psychiques et des dépendances, et qu’il les communique ensuite aux locataires[95].

Recommandations :

18. Le gouvernement de l’Ontario devrait appuyer les fournisseurs de logements sociaux, coopératifs et privés pour veiller à ce qu’ils respectent leur obligation d’accommodement. Cela pourrait inclure le fait d’assurer qu’assez de tierces parties sont disponibles pour aider à combler les besoins des locataires en matière d’accommodement.

19. Les fournisseurs de logements sociaux, coopératifs et à but lucratif devraient se doter d’une expertise en matière de droits de la personne afin de pouvoir procurer des conseils en matière de droits liés au logement, enquêter sur les plaintes et agir à titre de médiateurs lorsque cela est approprié, et vérifier que leurs politiques et procédures ne créent pas d’obstacles.

Engagement de la CODP :

E14. La CODP continuera de sensibiliser les locataires, locateurs, fournisseurs de logements et autres intervenants aux droits de la personne en matière de logement et plus particulièrement aux droits de la personne, à la maladie mentale et aux dépendances.


 

[76] Un ménage a un besoin impérieux de logement si son logement ne satisfait pas à au moins une de trois normes de qualité convenable (besoin de réparations majeures), de taille convenable (nombre insuffisant de chambres) et d’abordabilité (loyer supérieur à 30 % du revenu avant impôt) du logement, et si son revenu avant impôt est inférieur au seuil de revenu approprié selon la collectivité et le nombre de chambres requis. Statistique Canada, Participation and Activity Limitations Survey, 2006: Selected Variables by Emotional Disability, Other Disabilities and No Disability for Canada and Ontario, 2006. Données fournies par la CODP.

[77] Douglas A. Steinhaus, Debra A. Harley et Jackie Rogers, « Homelessness and People with Affective Disorders and Other Mental Illnesses », J. Applied Rehabilitation Counseling, vol. 35, 2004, p. 36; pour un examen des répercussions sur la santé de la précarité en matière de logement, voir Wellesley Institute, Precarious Housing in Canada, 2010. Accessible en ligne : Wellesley Institute www.wellesleyinstitute.com/wp-content/uploads/2010/08/Precarious_Housing_In_Canada.pdf; Rahel Eynan, et coll. « The Association Between Homelessness and Suicidal Ideation and Behaviours: Results of a Cross-Sectional survey », Suicide and Life-Threatening Behavior, vol. 32, 2002, p. 418.

[78] Observations finales du Comité des droits de l’homme : Canada, UN HRCOR, 2006, document des Nations Unies, CCPR/C/CAN/CO/5, à 17.

[79] Cheryl Forchuk et coll. « From Psychiatric Ward to the Streets and Shelters », J. of Psychiatric & Mental Health Nursing, vol. 13, no 3, p. 301.

[80] Pour plus de renseignements sur ce sujet, voir Commission ontarienne des droits de la personne, Les droits de la personne et le logement locatif en Ontario : Document de référence, Toronto, Imprimeur de la Reine pour l’Ontario, 2007. Accessible en ligne : CODP, http://www.ohrc.on.ca/fr/les-droits-de-la-personne-et-le-logement-locati....

[81] Ministère des Affaires municipales et du Logement, Soutien accordé au logement abordable grâce à une nouvelle loi, communiqué de presse, le 19 avril 2011. Accessible en ligne : Gouvernement de l’Ontario, http://news.ontario.ca/mah/fr/2011/04/soutien-accorde-au-logement-aborda....

[82] Association du logement sans but lucratif de l’Ontario, ONPHA Comments on Housing Strategy: Strategy Recognizes Importance of Community-Based Housing for Ontario’s Future, communiqué de presse, le 29 novembre 2010. Accessible en ligne : ONPHA, www.onpha.on.ca/AM/Template.cfm?Section=Long_Term_Affordable_Housing_Strategy&Template=/CM/ContentDisplay.cfm&ContentID=8897; Housing Network of Ontario, Ontario’s proposed affordable housing plan fails to meet the five basic tests set by the Housing Network of Ontario, 30 novembre 2010. Accessible en ligne : Canadian News Wire, http://cnw.ca/5LX9.

[83] Commission ontarienne des droits de la personne, Le droit au logement : Rapport de consultation sur les droits de la personne en matière de logements locatifs en Ontario, Toronto, Imprimeur de la Reine pour l’Ontario, 2008, à 76.

[84] Association du logement sans but lucratif de l’Ontario, Glossary of Terms and Acronyms. Accessible en ligne : Association du logement sans but lucratif de l’Ontario, http://onpha.on.ca/AM/Template.cfm?Section=Glossary, téléchargé le 14 décembre 2011.

[85] Patrick J. LeSage, Report on the Eviction of Al Gosling and the Eviction Prevention Policy of Toronto Community Housing Corporation, mai 2010, à 5. Accessible en ligne : Toronto Community Housing Corporation, www.torontohousing.ca/webfm_send/6512/1?#.

[86] John Sylvestre et coll. « Strengthening Ontario’s System of Housing for People with Serious Mental Illness », Can. J. of Comm. Mental Health, vol. 26, no 1, 2007, p. 79, à 82.

[87] Loi de 2011 sur les services de logement, L.O. 2011, chap. 6, Annexe 1, Règl. de l’Ont. 367/11, art. 24. La Loi de 2011 sur les services de logement remplace la Loi de 2000 sur la réforme du logement social.

[88] Loi de 2011 sur les services de logement, Ibid. Règl. de l’Ont. 298/01 (anciennement pris en application de la Loi de 2000 sur la réforme du logement social). Les paragraphes 48(5) et 48(6) indiquent que si le revenu mensuel hors prestation dépasse un certain montant par mois (selon la taille du groupe de prestataires), le loyer mensuel peut dépasser le montant stipulé.

[89] John Stapleton, Why is it so Tough to Get Ahead: How Our Tangled Social Programs Pathologize the Transition to Self-Reliance, Metcalf Foundation, 2007, à 29; John Stapleton, Zero Dollar Linda: A Meditation on Malcolm Gladwell’s “Million Dollar Murray,” the Linda Chamberlain Rule, and the Auditor General of Ontario, Metcalf Foundation, novembre 2010. Accessible en ligne : Metcalf Foundation www.metcalffoundation.com/wp-content/uploads/2011/05/zero-dollar-linda.pdf.

[90] Le projet de loi 198, Loi de 2009 modifiant la Loi sur l'aménagement du territoire (inclusion de logements abordables par les municipalités), qui incluait des articles sur le zonage inclusif, a été renvoyé au Comité permanent des affaires gouvernementales le 24 septembre 2009 mais n’a pas franchi l’étape de la troisième lecture.

[91] Dans le cadre d’une étude effectuée par le Centre pour les droits à l’égalité au logement, on a déterminé qu’un locataire éventuel sur trois qui divulgue une maladie mentale fera l’objet de discrimination au sein du marché locatif de Toronto. Centre pour les droits à l’égalité au logement, Sorry It’s Rented: Measuring Discrimination in Toronto’s Rental Housing Market, juillet 2009. Accessible en ligne : CERA, www.equalityrights.org/cera. Des répondants qui prenaient part à la consultation électronique du comité sénatorial permanent, 34 p. 100 ont rapporté connaître des personnes qui avaient été congédiées ou s’étaient fait refuser un emploi en raison d’une maladie mentale et 21 p 100 s’étaient fait refuser un logement par un locateur. Howard Chodos, N. Pogue et T. Riordan, Consultation électronique sur la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie : Première phase, Service d’information et de recherche parlementaire, Bibliothèque du Parlement, 2005, tel que cité dans Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, supra note 14, à 228.

[92] Meiorin, supra note 25.

[93] Sam Tsemberis, Leyla Gulcur et Maria Nakae, « Housing First, Consumer Choice, and Harm Reduction for Homeless Individuals With a Dual Diagnosis », Am. J. Public Health, vol. 94, no 4, 2004, p. 651; Commission de la santé mentale du Canada, Projet Chez soi : Rapport sur les résultats préliminaires – Volume 2, janvier 2012. Accessible en ligne : CSMC, http://www.mentalhealthcommission.ca/SiteCollectionDocuments/AtHome-ChezSoi/At%20Home_EarlyFindingsReportVolume2_FRE.pdf. La stratégie canadienne en matière de santé mentale de la Commission de la santé mentale du Canada recommande l’utilisation de stratégies donnant la priorité au logement pour lutter contre l’itinérance. Commission de la santé mentale du Canada, Changer les orientations, changer des vies : Stratégie en matière de santé mentale pour le Canada, 2012, recommendation 3.5.2, à 61.

[94] Loi de 2006 sur la location à usage d’habitation, L.O. 2006, chap. 17, par. 64(1). Le locateur peut donner un avis de résiliation de la location au locataire si le comportement de celui-ci, d’un autre occupant du logement locatif ou d’une personne à qui le locataire permet l’accès de l’ensemble d’habitation entrave de façon importante la jouissance raisonnable de l’ensemble d’habitation aux fins habituelles par le locateur ou un autre locataire ou entrave de façon importante un autre droit, privilège ou intérêt légitime de l’un ou l’autre.

[95] Par exemple, certains fournisseurs de logements sociaux comme la Toronto Community Housing Corporation et City Housing Hamilton ont établi des « cadres d’action en matière de santé mentale », des politiques sur les droits de la personne et le harcèlement, des procédures de prévention de l’expulsion ou d’autres types de ressources destinées aux locataires vulnérables. Ces outils doivent être appliqués de façon uniforme. Pour assurer leur efficacité, on doit aussi enseigner au personnel à s’en servir. Patrick J. LeSage, Report on the Eviction of Al Gosling and the Eviction Prevention Policy of Toronto Community Housing Corporation, mai 2010. Accessible en ligne : Toronto Community Housing Corporation, www.torontohousing.ca/webfm_send/6512/1?>, à 6, 26 et 27.

 

Social Areas: 

12. Emploi

Les préjugés sur la maladie mentale en milieu de travail abondent encore. Pendant les 40 années de ma carrière, j’ai dépensé plus d’énergie à cacher mes troubles mentaux qu’à promouvoir mon avancement. – Participant(e) au sondage

Rémunéré ou non, l’emploi est un élément central de la dignité humaine, de l’auto-détermination et de la réalisation de son plein potentiel. En Ontario, le Code protège les gens contre la discrimination en emploi fondée sur le handicap. L’emploi inclut tout travail rémunéré ou bénévole, les stages étudiants, les placements en emplois particuliers, ainsi que les emplois temporaires, contractuels, saisonniers ou occasionnels. Bon nombre d’usagers/survivants ou de personnes aux prises avec des dépendances ont formulé le désir de travailler ou de faire du bénévolat, mais n’y parviennent pas sans mesures d’adaptation. Les attitudes négatives et stéréotypes à l’endroit des personnes ayant des troubles psychiques ou des dépendances peuvent venir s’ajouter à d’autres obstacles à l’emploi comme le manque de scolarisation ou de formation préalable à l’emploi.

Box: La Convention relative aux droits des personnes handicapées reconnaît aux personnes handicapées le droit de travailler et la possibilité de gagner leur vie. Cela exige que les milieux de travail soient inclusifs et accessibles aux personnes handicapées. En ratifiant la CRDPH, le Canada a accepté de promouvoir le droit à l’emploi des personnes handicapées, y compris le fait d’interdire la discrimination fondée sur le handicap en ce qui a trait à l’embauche et à l’avancement des travailleurs, à la promotion des possibilités d’emploi dans le marché du travail et à la protection équitable des droits des personnes handicapées. Cette dernière composante comprend le fait d’assurer une rémunération égale pour un travail égal et de promouvoir des conditions de travail sûres et saines[96]End of box

12.1. Questions systémiques et sociétales

a) Chômage et sous-emploi

Vingt ans sans emploi, c’est trop long, surtout quand j’étais capable de travailler tout ce temps-là. – Participant(e) au sondage

On nous a dit que les personnes ayant des handicaps psychosociaux pouvaient avoir de la difficulté à intégrer ou à réintégrer le marché du travail en raison de discrimination, d’antécédents de perte d’emploi, de longues périodes sans emploi, d’une faible scolarisation ou de symptômes liés au handicap. Cela était particulièrement vrai chez les personnes ayant des handicaps graves. Les taux de chômage des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances sont supérieurs à ceux de la population générale et des personnes ayant d’autres types de handicaps. Moins de la moitié des personnes ayant des « handicaps affectifs » font partie de la main-d’œuvre active (occupent ou cherchent un emploi).

En 2006 en Ontario, 74 p. 100 des personnes qui n’ont pas rapporté avoir de handicap faisaient partie de la main-d’œuvre active comparativement à 34 p. 100 des personnes ayant des troubles affectifs et 35 pour 100 des personnes ayant d’autres types de handicaps[97]. Le rapport Kirby cite des enquêtes indiquant qu’entre le tiers et la moitié des personnes ayant une maladie mentale disent s’être fait refuser un emploi pour lequel elles avaient les compétences, ou avoir été congédiées ou forcées de démissionner[98]. De plus, les personnes ayant des handicaps graves ou très graves, en tant que groupe, semblent susceptibles d’être sans emploi ou employées à temps partiel dans des postes peu rémunérés, comparativement aux personnes sans handicap[99].

Selon l’ACSM – Ontario, lorsque les personnes ayant des problèmes de santé mentale parviennent à intégrer le marché du travail, elles sont reléguées à des emplois à bas salaire, ce qui entraîne des allers-retours entre l'aide sociale et des emplois peu stables. Plusieurs personnes ont décrit leurs expériences dans des emplois peu spécialisés et rémunérés, qui offrent peu de stabilité ou de possibilités d’avancement. Comme l’a fait remarquer l’organisme Ontario Shores Centre for Mental Health Sciences (Ontario Shores), il est difficile de décrocher un emploi sans logement stable.

On nous a également dit que le refus d’offrir des mesures d’adaptation en milieu scolaire nuisait aux possibilités d’emploi futures. Les obstacles auxquels les gens se heurtent en milieu scolaire peuvent aussi entraîner un bas niveau de littératie et de scolarisation, ce qui nuira également aux possibilités d’emploi futures et à la capacité de trouver et d’obtenir des services d’acquisition de compétences[100].

Des personnes ont dit qu’elles avaient besoin de soutien à l’éducation en matière d’emploi, de recyclage, de formation et de programmes en milieu de travail, et non seulement de la thérapie et du counselling. Dans un document de discussion sur l’emploi, le Centre de toxicomanie et de santé mentale (CAMH) et l’ACSM – Ontario soulignent la nécessité d’aborder certains facteurs critiques dans ce domaine, y compris :

  • éliminer la discrimination en matière de pratiques d’éducation et d’emploi, dont les politiques et pratiques qui nuisent aux possibilités d’emploi
  • accroître les possibilités en matière d’assistance en emploi
  • réformer les programmes de soutien du revenu offerts aux personnes handicapées et de programmes de soutien fédéraux pour éliminer les mesures non intentionnelles de dissuasion en emploi[101].

b) Aide sociale et emploi 

De nombreuses personnes nous ont parlé des problèmes systémiques engendrés par le système d'aide sociale, qui créent un réel obstacle au passage de l'aide sociale au travail rémunéré. L'une des inquiétudes majeures est que les versements du POSPH sont réduits d'un montant égal à la moitié des revenus nets gagnés en travaillant. Il est donc difficile pour les personnes concernées de tirer profit d'un emploi rémunéré, notamment un emploi à temps partiel ou un emploi de premier échelon. La section 13.4c) décrit d’autres obstacles liés à la conception et à la prestation de l’aide sociale.

c) Vérification du casier judiciaire et secteur des personnes vulnérables

Selon Horizons Renaissance, entre autres, le fait de consigner au casier judiciaire les contacts avec les services de police sans rapport avec un acte criminel, et de les divulguer dans le cadre de vérifications du casier judiciaire, crée des obstacles systémiques à l’emploi. Lorsque les services de police conduisent une personne à l’hôpital conformément à la Loi sur la santé mentale, un casier judiciaire est ouvert et des renseignements sur la santé mentale y sont versés. Cette information peut ensuite être divulguée aux employeurs éventuels, organismes bénévoles ou programmes éducatifs qui œuvrent auprès de clients vulnérables dans le cadre de leur vérification des antécédents du candidat ou de la candidate. Beaucoup de personnes ont déclaré s’être fait refuser un emploi, un travail bénévole ou des possibilités éducatives parce qu’une vérification de leur casier judiciaire avait montré qu’elles avaient un trouble mental. Nous avons aussi appris que des personnes appréhendées aux termes de la Loi sur la santé mentale s’étaient vu refuser un séjour aux États-Unis[102]. Les vérifications de casier judiciaire contribuent aux suppositions négatives à l’endroit des problèmes de santé mentale parce qu’elles alimentent les stéréotypes selon lesquels les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale sont un danger pour la population (ACSM – Ontario).

Mon mari a appelé une ambulance pour me conduire à l’hôpital; il se préoccupait de mon bien-être et ne pouvait pas m’y amener lui-même. J’y suis allée de plein gré. Maintenant, mon casier judiciaire aux fins du recrutement dans le secteur des personnes vulnérables indique « appréhendée aux termes de la Loi sur la santé mentale », sans aucune autre explication. Je n’ai pas d’emploi actuellement. Je travaille dans le secteur sans but lucratif, où la vérification du casier judiciaire aux fins du recrutement dans le secteur des personnes vulnérables est presque toujours une condition d’emploi. Sur le marché compétitif de l’emploi actuel, je crois que cette mention à mon casier me nuit, alors que ma dépression d’il y a cinq ans ne fait en rien de moi un risque pour les clients vulnérables.

      – Participante au sondage

En 2011, l’Association des chefs de police de l’Ontario (OACP) a publié une directive sur la vérification du casier judiciaire qui recommande, entre autres mesures de protection, de retirer des casiers judiciaires les renseignements sur les handicaps[103]. La CODP et d’autres organisations comme le BIPEP appuient la nouvelle directive, qui protège mieux la vie privée et les droits de la personne, tout en continuant de faire la promotion de la sécurité communautaire[104]. La Police provinciale de l’Ontario a commencé à mettre cette directive en œuvre[105].

Recommandations :

20. L’OACP et d’autres organisations devraient promouvoir activement la mise en œuvre de la directive sur la vérification du casier judiciaire de l’OACP dans tous les services de police et organismes du secteur des personnes vulnérables, et parmi les autres employeurs y compris le gouvernement de l’Ontario.

21. La Commission de la santé mentale du Canada et l’Association canadienne des chefs de police devraient promouvoir les principes de la directive de l’OACP sur la vérification du casier judiciaire auprès des services de police et organismes du secteur des personnes vulnérables dans les autres provinces canadiennes.

22. Le Collège de police de l’Ontario et l’OACP devraient organiser de nouvelles formations et améliorer les formations existantes sur la directive relative à la vérification du casier judiciaire. L’OACP devrait superviser l’évaluation de la directive, en collaboration avec des intervenants communautaires et des groupes de personnes handicapées. Une fois que la directive sera évaluée, le gouvernement de l’Ontario devrait déterminer s’il est nécessaire d’apporter des modifications législatives pour en accroître l’efficacité.

Engagement de la CODP :

E15. La CODP soulèvera la question de la divulgation d’information sur la santé mentale empêchant les gens d’entrer aux États-Unis auprès de la Commission canadienne des droits de la personne.

12.2. Intégration du marché du travail

a) Embauche

Durant les processus de recrutement et d’embauche, les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et de dépendances se heurtent à des obstacles considérables qui les empêchent de décrocher un emploi. Les périodes d’inactivité dues à un handicap sont parfois difficiles à expliquer durant le processus d’embauche et peuvent constituer un obstacle à l’emploi. Nous avons appris que le processus de recrutement peut être établi de façon à désavantager les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances, surtout si elles sont pauvres. Par exemple, les personnes qui n’ont pas accès à un ordinateur ne peuvent pas répondre aux offres d’emploi en ligne. De plus, les examens et questionnaires d’embauche peuvent désavantager les personnes aux prises avec des troubles cognitifs si des mesures d’adaptation ne sont pas prévues.

Des gens nous ont dit que durant le processus d’entrevue, certains employeurs pourraient juger à tort la capacité des candidats d’assumer les responsabilités du poste en fonction de leur apparence, que peuvent altérer les effets secondaires des médicaments, les symptômes d’un handicap ou des facteurs liés à la pauvreté. Ce type de jugements peut entraîner le rejet d’une candidature. Les personnes qui ont perdu leur dernier emploi en raison de comportements liés à leur handicap n’ayant pas fait l’objet de mesures d’adaptation peuvent ne pas posséder les références requises pour décrocher un emploi dans l’avenir.

On nous a également parlé de processus d’embauche qui incluaient des questions sur les antécédents médicaux des gens, y compris les traitements psychiatriques suivis, les hospitalisations passées et les médicaments pris, en vue de l’obtention de postes pour lesquels ces informations n’étaient pas requises, comme des postes non critiques sur le plan de la sécurité. Le Syndicat des travailleurs et travailleuses de l’automobile (TCA) est conscient que certains employeurs exigent des tests de dépistage des drogues avant l’embauche, ce qu’il juge problématique. Pour obtenir d’autres renseignements sur les lignes directrices en matière des droits de la personne et de l’emploi, consulter la publication de la CODP intitulée Les droits de la personne au travail, 3e édition (section 6d).

Plusieurs personnes ont déclaré avoir eu à cacher leurs antécédents de travail rémunéré ou bénévole auprès d’initiatives pour usagers/survivants ou d’organismes de santé mentale, leurs activités de soutien à des pairs et même leurs expériences de préparation à l’emploi au sein de programmes visant à aider les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale, parce que cette information pouvait indiquer qu’elles ont un problème de santé mentale. Elles craignaient que cela leur coûte des possibilités d’emploi.

Plusieurs agences de placement et prospecteurs d’emploi qui travaillent auprès de personnes ayant des troubles psychiques nous ont donné leur point de vue. D’après les prospecteurs d’emploi, certains employeurs disent ne pas vouloir travailler avec des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou véhiculent d’autres stéréotypes négatifs à l’endroit de la capacité de travailler des gens.

La fonction publique de l’Ontario – RHOntario (FPO) a recommandé que chaque organisation établisse des politiques et lignes directrices relatives aux droits de la personne qui respectent le Code. Pour promouvoir les pratiques d’embauche non discriminatoires, elle recommande d’afficher des offres d’emploi sans obstacle, de fixer des critères de sélection clairs et objectifs fondés sur les tâches essentielles du poste, d’offrir des mesures d’adaptation aux candidats invités aux entrevues et d’établir des comités de sélection objectifs composés de personnes ayant reçu une formation sur la façon de noter objectivement les réponses des candidats. La FPO a indiqué qu’elle mettait au point des outils et ressources à l’intention des gestionnaires et employés dans le but de réduire les attitudes négatives à l’endroit des personnes ayant une maladie mentale.

b) Divulgation d’un handicap

Des employeurs et des personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances ont demandé des clarifications à propos des renseignements relatifs aux handicaps que les employeurs peuvent obtenir de leurs employés et des candidats à leurs postes. Beaucoup de personnes ne savaient pas qu’elles n’étaient pas tenues de faire part de leur diagnostic à un employeur.

Compte tenu des stéréotypes négatifs associés aux problèmes de santé mentale et aux dépendances, de nombreuses personnes ont dit craindre de divulguer leur handicap en milieu de travail[106]. Même lorsqu’ils ont besoin de mesures d’adaptation en emploi, les gens hésitent à faire part de leur handicap parce qu’ils craignent de subir de la discrimination ou de voir leur rendement évalué en fonction de leur handicap plutôt que de leur travail. Certaines personnes pourraient se préoccuper du fait que la situation nuise à leur capacité d’obtenir une assurance vie ou invalidité. Chez bon nombre de personnes, ces préoccupations sont fondées sur des expériences passées de perte d’emploi et de traitement inéquitable en emploi à la suite de la divulgation d’un handicap.

Des modifications ont récemment été apportées à la Loi sur la santé et la sécurité au travail (LSST). Les dispositions de la LSST relatives à la prévention de la violence et du harcèlement en milieu de travail obligent les employeurs à évaluer les risques en milieu de travail. Les employeurs doivent aussi prévenir les travailleurs des risques de violence associés au milieu de travail, y compris la violence qui pourrait être commise par un collègue ayant des antécédents de violence s’il se pourrait qu’un employé soit blessé. Cependant, les employeurs et les superviseurs ne doivent pas faire part de davantage de renseignements personnels en lien avec la situation qu’il est nécessaire pour réduire le risque de blessures[107].

Des personnes ont expliqué que les règles régissant les évaluations des risques et la divulgation de renseignements personnels sur les employés pouvaient avoir des répercussions négatives sur les personnes ayant des handicaps psychosociaux si elles étaient mal appliquées, surtout si les employés qui ont ou ont eu des problèmes de santé mentale, ou ceux que l’on croit avoir de tels problèmes, sont caractérisés à tort de risques pour la sécurité d’autrui. De plus, la connaissance qu’ont les employés des exigences de la LSST en matière de divulgation pourrait créer par inadvertance un obstacle à la divulgation du handicap à l’employeur, surtout si on pense que les employeurs n’appliquent pas les règles adéquatement. Un suivi additionnel de cette question est requis pour veiller à ce que les exigences de la LSST n’aient pas d’effets négatifs sur les personnes aux prises avec des troubles psychiques ou des dépendances.

Engagement de la CODP :

E16. La CODP et le ministère du Travail discuteront des répercussions des exigences en matière de divulgation prévues dans la LSST sur les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale, et examineront les façons possibles de suivre et d’aborder la question.

c) Traitement inéquitable en milieu de travail

Certaines personnes ont parlé d’expériences de travail positives auprès d’employeurs sensibles et respectueux envers leurs droits fondamentaux en matière de handicap. Par contre, d’autres ont raconté avoir subi un traitement inéquitable en emploi en raison de troubles psychiques ou de dépendances n’ayant pas toujours fait l’objet de mesures d’adaptation. À maintes reprises, des gens nous ont dit que leurs tâches avaient été modifiées ou leur poste restructuré à la suite d’un congé d’invalidité ou après que leur employeur a appris qu’ils avaient un handicap. Certains ont dit avoir fait l’objet de rétrogradations, de réductions de leur horaire de travail, de modifications de leurs tâches et de licenciements. Certains employeurs sembleraient penser que les personnes ayant des handicaps psychosociaux n’ont pas la capacité d’assumer leurs responsabilités, ne sont pas fiables ou ne peuvent pas tolérer le stress associé à leur charge de travail, particulièrement à la suite d’un congé d’invalidité.

Les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale se heurtent aux mêmes attitudes paternalistes que les personnes ayant des handicaps physiques, de la part de personnes bien intentionnées qui veulent simplement les protéger. Or, les gestionnaires devraient lancer comme message « comment puis-je vous aider à bien faire le travail pour lequel vous avez été embauché » plutôt que « comment puis-je vous protéger pour ne pas que vous en faisiez trop ».

– Spécialiste des relations en milieu de travail

Les personnes consultées ont décrit d’autres types de traitements inéquitables auxquels les personnes ayant des handicaps psychosociaux pouvaient se heurter au travail :

  • se retrouver isolées au travail après l’instauration d’une mesure d’adaptation (p. ex. leur poste de travail est déplacé ou leurs collègues et gestionnaires cessent de leur adresser la parole)  
  • n’avoir plus droit aux mêmes possibilités de formation ou de promotion, ou aux mêmes privilèges que leurs collègues 
  • se faire offrir des tâches non stimulantes après le dévoilement du handicap
  • voir leur contribution au travail rabaissée comparativement à celle des autres
  • se voir imposer des normes de travail supérieures aux autres et être pénalisées en cas d’échec.

Une participante à la table ronde de Windsor a décrit son retour au travail après une période de maladie. Au début, son employeur a offert son soutien. Il lui a cependant demandé de signer un contrat indiquant qu’elle serait en mesure d’assurer une présence assidue au travail durant le prochain mois. En raison de l’immense pression que représentait ce contrat, elle a eu un second épisode de maladie et on lui a demandé de démissionner.

L’Association des infirmières et des infirmiers de l’Ontario (AIIO) a fait part de préoccupations spécifiques à propos des obstacles systémiques auxquels se heurte le personnel infirmier aux prises avec des problèmes de santé mentale. Aux termes du Code des professions de la santé, l’Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario peut imposer des conditions et des restrictions au certificat d’une infirmière ou d’un infirmier concernant sa capacité d’exercer la profession si cette personne a un trouble mental. Selon l’AIIO, cette procédure n’est pas adaptée à la situation d’une infirmière ou d’un infirmier spécifique. Elle créerait aussi des obstacles à l’emploi parce qu’il n’est pas certain qu’un employeur éventuel veule embaucher une infirmière ou un infirmier, ou lui procurer des mesures d’adaptation jusqu’au point de préjudice injustifié, une fois qu’il connait les conditions de son certificat[108].

Engagement de la CODP :

E17. La CODP collaborera avec l’Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario et tout autre intervenant pertinent dans le but d’éliminer les obstacles qui empêchent le personnel infirmier aux prises avec des troubles mentaux de bénéficier d’un emploi. Pour y parvenir, la CODP envisagera de se prévaloir de son mandat, lequel peut inclure l’établissement de partenariats, la conduite d’enquêtes d’intérêt public, l’intervention dans le cadre de litiges et l’initiation de contestations juridiques.

d) Harcèlement et milieu empoisonné

Mon employeur a appuyé ma participation à un programme de traitement de la toxicomanie. Je ne bois plus depuis quatre ans. Toutefois, le directeur des ressources humaines continue de me rabaisser en lançant des remarques non professionnelles et des « blagues » sur les personnes alcooliques. C’est tout à fait inacceptable qu’un membre des ressources humaines agisse de cette façon.

      – Participant(e) au sondage

Plusieurs personnes ont parlé du fait d’être soumises à des commentaires ou gestes malvenus de la part de gestionnaires ou de collègues en raison de leur handicap. Parmi ces commentaires et gestes figuraient des blagues non appropriées, des questions sur le handicap, la médication ou les besoins en matière d’accommodement, ou des références à ceux-ci, la divulgation non appropriée du handicap à des collègues qui n’ont pas besoin d’être informés ou des demandes excessives de renseignements médicaux non requis. Beaucoup de personnes ont dit que des collègues avaient passé des remarques malvenues, particulièrement à propos du besoin de restructurer les tâches par suite d’une mesure d’adaptation. Certaines personnes ont indiqué avoir quitté leur emploi en raison de harcèlement verbal.

J’ai enduré beaucoup de commentaires de gestionnaires du genre « les personnes qui ont des problèmes de santé mentale sont détraquées ». On m’a aussi appelé « invalide ». Des gestionnaires m’ont ciblé en raison de ma mesure d’adaptation au travail, dont ils ont ouvertement parlé avec mes pairs. D’ailleurs, ils disent souvent à mes pairs que c’est ma faute s’ils doivent effectuer certaines tâches « moins intéressantes ».

                        – Participant(e) au sondage

J’ai dévoilé mon handicap à un de mes superviseurs là où je faisais du bénévolat et elle s’est mise à m’appeler « la bénévole bipolaire » lorsqu’elle parlait aux autres.

            – Participante au sondage

L’isolement social, c’est-à-dire l’exclusion répétée d’une personne en milieu de travail par ses gestionnaires et collègues, peut également constituer une forme d’empoisonnement du milieu. Ce processus peut avoir des conséquences subtiles mais très néfastes. Le programme La santé mentale au travail, qui offre de la formation sur les questions de santé mentale et d’emploi, applique le concept de « persécution collective en emploi » aux personnes ayant des troubles psychiques. On y explique comment ces personnes peuvent être ouvertement, subtilement ou même non intentionnellement ostracisées et exclues au fil du temps, ce qui mine leur estime de soi[109]. Selon le programme, il s’agit d’un « long et fatal congédiement constructif ».

On nous a aussi dit que les employeurs avaient besoin de davantage d’information sur la façon de protéger la vie privée des employés aux prises avec des handicaps non manifestes tout en composant avec des collègues qui pourraient réagir de façon négative lorsqu’on leur demande de participer aux mesures d’adaptation. Les employeurs ont également besoin d’information sur la façon de réagir aux conflits en milieu de travail causés par des comportements en lien avec un handicap. La fonction publique de l’Ontario a dit avoir besoin du soutien de la CODP pour faire face aux attitudes discriminatoires de collègues que des employés craignent d’aborder avec leurs gestionnaires.

e) Emplois particuliers et programmes spéciaux

Des gens ont parlé des avantages et inconvénients des soutiens à l’emploi spéciaux destinés aux personnes ayant des handicaps psychosociaux du point de vue des droits de la personne. Des programmes de soutiens à l’emploi spéciaux existent dans l’ensemble du secteur de l’emploi pour lutter contre les inégalités systémiques et désavantages historiques auxquels font face les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances qui cherchent de l’emploi. Bon nombre de ces programmes bénéficient de financement du ministère de la Santé et des Soins de longue durée, et ciblent les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances. En général, les types de programmes et de mesures d’emploi suivants pourraient être protégés à titre de « programme spécial » ou d’« emploi particulier » aux termes des lois sur les droits de la personne en vigueur[110] :

  •  Assistance en milieu de travail : Les programmes d’assistance en milieu de travail aident les usagers/survivants ou les personnes aux prises avec des dépendances à décrocher un emploi rémunéré. Les participants reçoivent une assistance et une formation souples et personnalisées en cours d’emploi qui dépendent des besoins[111].
  • Initiatives gérées par des usagers/survivants (IGUS) : Les IGUS incluent les groupes d’entraide, entreprises parallèles et services de soutien gérés par des personnes ayant reçu un diagnostic de maladie mentale à l’intention des personnes ayant un diagnostic de maladie mentale. Il existe en Ontario un grand nombre de groupes d’usagers/survivants financés ou non par les fonds publics, y compris des conseils de patients et des IGUS. Ces groupes procurent une grande variété de soutiens liés ou non à l’emploi, dans des climats non hiérarchiques[112].
  • Programmes d’équité en matière d’emploi : Les employeurs peuvent établir leurs propres programmes d’équité en matière d’emploi pour les aider à accroître la représentation des personnes handicapées (dont les personnes aux prises avec des troubles psychiques et des dépendances) dans leur milieu de travail[113].
  • Emplois particuliers : Ce sont des postes dont une des exigences fondamentales consiste à avoir une expérience personnelle en matière de maladie mentale ou de dépendance (p. ex. conseiller en toxicomanie). Les postes d’entraide offrent un exemple marquant d’emplois particuliers. L’entraide est un type d’assistance qui inclut des face-à-face entre personnes au vécu similaire. Il s’agit d’un système « d’assistance mutuelle basée sur des principes clés de respect, de responsabilité commune et d’entente mutuelle de ce qui s’avère utile »”[114]. Le personnel d’entraide peut être rémunéré ou non, et travaille au sein d’IGUS, d’hôpitaux ou d’organismes de santé mentale traditionnels.

Il peut exister des chevauchements entre ces programmes ou emplois. Par exemple, de nombreux IGUS embauchent du personnel d’entraide rémunéré ou bénévole, ou offrent de l’assistance en milieu de travail. Beaucoup de ces initiatives tirent avantage de l’expertise et des compétences spécifiques que possèdent certaines personnes en raison de leur handicap ou du fait qu’elles ont une expérience pratique au sein de systèmes destinés aux personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances.

[Le personnel d’entraide] est tout aussi important que les autres intervenants en santé mentale et pourtant, on fait rarement appel à cette meilleure pratique. Les postes d’entraide sont une importante façon dont les personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances contribuent à améliorer la perspective qu’ont les systèmes de traitement des troubles mentaux et des dépendances des usagers. C’est aussi une bonne façon d’être entièrement soi-même au sein de ses systèmes, sans avoir besoin de cacher une partie de soi. Au contraire, l’expérience personnelle fait partie intégrante du travail. C’est un fardeau de devoir cacher son vécu, ainsi que son expérience et son expertise particulières.

            -– Participant(e) au sondage

L’Ontario Restaurant Hotel and Motel Association s’est prononcée sur les avantages pour l’employeur de l’assistance en milieu de travail. D’expliquer l’association, l’industrie de l’accueil a eu beaucoup de succès à embaucher des travailleurs handicapés compétents qui ont eu peu de possibilités d’emploi par le passé grâce à un partenariat avec un organisme de prospection de l’emploi, l’Ontario Job Opportunity Information Network.

Même si ces programmes ont pour but de réduire les inconvénients auxquels se heurtent les personnes aux prises avec des troubles psychiques et des dépendances dans le secteur de l’emploi, on nous a dit qu’ils n’éliminaient pas toutes les questions de droits de la personne.

Nous avons appris que les importants rôles que remplit le personnel d’entraide dans les différents milieux de soins de santé mentale étaient beaucoup mieux reconnus aujourd’hui. Beaucoup de nouveaux postes d’entraide sont en cours de création. Certains craignaient cependant que le personnel d’entraide soit soumis à des conditions d’emploi différentes que les autres employés de l’organisation. D’autres se préoccupaient de la nature « symbolique » des responsabilités du personnel d’entraide, qui pourrait hériter de tâches sans importance ne faisant pas appel à leurs compétences ou ne pas obtenir le même respect que les autres employés.

Selon une intervenante du secteur de l’emploi, certains organismes communautaires de santé mentale et hôpitaux offrent des contrats à court terme (six mois) pour des postes d’entraide qui bénéficient d’un financement complet, ce qu’ils ne font pas pour les autres postes. Elle attribuait cela aux perceptions erronées selon lesquelles le personnel d’entraide n’est pas fiable en raison de ses handicaps. De plus, certains employeurs assignent au personnel d’entraide un horaire limité ou les quarts de travail les plus inintéressants, et lui offre peu de formation et de supervision, sinon aucune. Dans certains organismes, le personnel d’entraide n’est pas rémunéré pour sa formation ou reçoit uniquement des honoraires[115].

Certaines personnes se souciaient également du fait qu’en plus d’être à temps partiel, les postes d’entraide, les postes bénéficiant d’une assistance en emploi et les postes au sein d’une IGUS offrent habituellement un bas salaire et de mauvais avantages sociaux comparativement aux postes qui ne visent pas les personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances. Dans un rapport de 2009 sur les IGUS, la Fédération des programmes communautaires de santé mentale et de traitement des toxicomanies de l’Ontario a fait remarquer que certaines IGUS recevaient moins de financement pour leurs postes à temps plein que les autres fournisseurs de services de santé mentale communautaires[116]. Tous ces facteurs pourraient perpétuer les inégalités systémiques auxquelles font face les usagers/survivants et les personnes aux prises avec des dépendances, en les cantonnant dans des emplois mal rémunérés.

Certaines personnes ont rapporté des cas où des personnes aux prises avec des troubles psychiques et des dépendances recevaient un maigre salaire, inférieur au salaire minimum pour des tâches effectuées alors qu’elles étaient à l’hôpital. Ce type d’activités est parfois exempt de la Loi de 2000 sur les normes d’emploi s’il fait partie d’un programme de rétablissement[117]. Des personnes ont soulevé des questions sur le moment auquel le travail rémunéré effectué par des usagers/survivants devient un emploi devant être soumis aux normes d’emploi courantes.

Recommandations :

23. Le gouvernement de l’Ontario, le secteur privé et le secteur sans but lucratif devraient créer de nouvelles possibilités d’emplois particuliers, d’assistance en emploi, d’entreprises parallèles, de pratiques d’équité en matière d’emploi et d’autres programmes spéciaux en matière d’emploi pour les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances.

24.Les organisations qui financent les programmes spéciaux en matière d’emploi et programmes d’assistance en matière d’emploi et les organisations qui offrent des emplois particuliers ou ont recours aux programmes d’assistance en matière d’emploi devraient passer en revue leurs politiques de financement et d’emploi pour éliminer toutes formes d’inégalité qui exposent les personnes ayant des handicaps psychosociaux à des conditions d’emploi différentes de celles dont bénéficient les employés qui font un travail comparable sans participer à de tels programmes.

25. Le gouvernement de l’Ontario, le secteur privé et le secteur sans but lucratif devraient passer en revue leurs politiques d’embauche, d’avancement, de maintien en poste, de discipline, d’accommodement et de congédiement pour y éliminer tout effet discriminatoire sur les personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances, et leur assurer l’égalité des chances à ces personnes.

f) Stress en milieu de travail, santé mentale et discrimination

Le lien entre le stress – dû à l’intimidation en milieu de travail, aux exigences de travail élevées ou au harcèlement et à la discrimination fondés sur des motifs interdits par le Code –, la santé mentale et la discrimination est un thème qui est ressorti tout au long de la consultation. En soi, le stress n’est pas considéré comme un handicap aux termes du Code. Cependant, il est bien connu que le stress peut causer des troubles mentaux ou des dépendances, comme l’état de stress post-traumatique, ou y contribuer[118].

Le Bureau des conseillers des travailleurs soutient qu’il est discriminatoire d’exclure le stress mental chronique des prestations d’invalidité offertes conformément à la Loi de 1997 sur la sécurité professionnelle et l’assurance contre les accidents du travail (LSPAAT). Les travailleurs ont droit à une compensation si des facteurs liés au milieu de travail ont constitué un important facteur déterminant du développement de lésions physiques. Dans le cas de lésions psychologiques, celles-ci doivent également constituer une « réaction vive à un événement traumatisant soudain et imprévu ». Un travailleur n’a pas droit à des prestations pour un stress mental causé par des décisions ou des mesures prises par un employeur à l’égard de l’emploi du travailleur, y compris toute décision visant à modifier les tâches ou les conditions de travail de la personne, à lui imposer des mesures disciplinaires ou à mettre fin à son emploi[119]. Une récente décision du Tribunal d’appel de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (TASPAAT) a étendu la portée des prestations offertes pour stress mental. L’existence d’une menace réelle ou implicite pour le bien-être physique d’une personne et un diagnostic d’état de stress post-traumatique ne sont plus nécessaires pour obtenir des prestations pour stress mental traumatique[120].

Dans Plesner v. British Columbia Hydro and Power Authority, la cour d’appel de la Colombie-Britannique a déterminé que des portions de la Workers Compensation Act de la Colombie-Britannique, jumelées à la politique sur l’admissibilité à une compensation pour stress mental, étaient non constitutionnelles, parce qu’elles imposaient aux travailleurs atteints de préjudices purement mentaux un seuil d’admissibilité à une compensation considérablement plus élevé que celui des travailleurs ayant subi des préjudices de nature purement physique en milieu de travail[121]. À la suite de cette décision, le gouvernement de la Colombie-Britannique a proposé des modifications à la Workers Compensation Act de la province qui, si elles sont adoptées, élargiront la couverture offerte pour des états de stress mental dus aux facteurs de risques considérables et continus en milieu de travail[122].

Recommandation :

26. Le gouvernement de l’Ontario et la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail devraient modifier la LSPAAT et les dispositions stratégiques régissant les prestations d’invalidité de travail pour y tenir compte des récentes décisions juridiques. Ils devraient s’assurer que les personnes ayant subi des préjudices mentaux aient droit aux mêmes prestations que celles qui ont subi des préjudices physiques.

12.3. Emploi et obligation d’accommodement

a) Création d’un environnement inclusif  

La section 2.4 présente l’obligation d’assurer une conception inclusive et d’éliminer les obstacles à la participation des personnes handicapées. Sur le plan de l’emploi, les gens ont décrit comment les milieux de travail ne sont habituellement pas conçus en fonction des besoins des personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances. Par exemple, même si certains milieux de travail ont mis en œuvre des horaires flexibles, nous avons appris que bon nombre d’entre eux ne sont pas conçus en fonction des besoins des personnes qui pourraient devoir s’absenter du travail en raison d’épisodes de maladie. Cela complique le maintien en poste de certaines personnes, même à temps partiel.

On nous a également dit que beaucoup de milieux de travail étaient conçus de façon à permettre aux gens de travailler de longues heures en situation de stress élevé. Cela peut nuire à certaines personnes handicapées, y compris celles qui ont des troubles psychosociaux. Les gens qui ne peuvent pas travailler de longues heures en situation de stress, peuvent perdre toutes possibilités d’avancement ou avoir besoin, comme mesure d’adaptation, qu’on assouplisse les normes de rendement. En même temps, l’employeur a droit de s’entourer d’employés productifs et d’élaborer des normes et des cibles capables d’atteindre les objectifs de l’organisation.

On nous a aussi fait savoir que les personnes aux prises avec des troubles psychiques ou des dépendances peuvent avoir une façon d’exécuter leurs tâches qui ne cadre pas avec les pratiques de travail courantes. Selon un conseiller en santé mentale et emploi, les emplois doivent être conçus en fonction des compétences des gens et de la meilleure manière d’effectuer le travail pour maximiser la contribution des personnes. Pour vraiment assurer le traitement équitable des personnes handicapées, on nous a dit que les possibilités et attentes en matière d’emploi devaient inclure une certaine souplesse sur le plan des modalités et normes d’emploi.

Box: Selon ce qu’a appris la CODP, la culture organisationnelle de nombreux milieux de travail inclut la consommation d’alcool. Ce genre de culture peut créer des obstacles automatiques pour les personnes qui se rétablissent d’une dépendance, surtout si le fait de prendre de l’alcool avec des collègues, des supérieurs ou des clients favorise l’avancement professionnel. End of box

De l’avis des participants, la culture organisationnelle de beaucoup de milieux de travail favorise l’exclusion des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances. En général, les employeurs et les employés nous ont dit que la discussion des problèmes de santé mentale en milieu de travail est source de beaucoup de malaise et de confusion. D’après certains, le manque de dialogue à propos de ces problèmes en milieu de travail crée un environnement peu accueillant où les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale sont perçues de façon négative. À son tour, cela crée des obstacles sur le plan du recrutement et du maintien en poste, et fait en sorte qu’on ne réagit pas adéquatement aux situations de harcèlement et de traitement hostile.

b) Accommodement des besoins individuels en matière d’emploi

Les personnes consultées ont sans cesse soulevé des préoccupations à l’égard de leur propre vécu ou du vécu d’autres personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances qui n’ont pas eu droit à des mesures d’adaptation au travail, ou ont obtenu des mesures d’adaptation non appropriées. Cela se produit même si de plus en plus de milieux de travail adoptent des politiques régissant l’accommodement des handicaps, offrent des prestations d’invalidité, collaborent avec des organismes externes pour favoriser le retour au travail d’employés ayant obtenu un congé d’invalidité et font participer les syndicats au processus d’accommodement. Les employeurs reconnaissaient l’obligation d’accommodement des employés aux prises avec des troubles psychosociaux, mais disaient que la prestation de mesures d’adaptation pouvait présenter des difficultés lorsqu’on tentait de combler les besoins de l’entreprise. Un employeur nous a confié que ses gestionnaires n’appliquaient peut-être pas les politiques de l’organisation auprès des employés aux prises avec des problèmes de santé mentale avec autant d’assiduité qu’ils le faisaient auprès de leurs collègues.

Les types de mesures d’adaptation dont peuvent avoir besoin, selon les circonstances, les personnes ayant des troubles psychosociaux, incluent :

  • un horaire de travail souple
  • des périodes de formation prolongées
  • des mesures d’encadrement en emploi
  • le rajustement de la façon dont l’information leur est transmise
  • des congés à court ou long terme
  • des mesures de partage d’emploi
  • des normes de production modifiées.

Le programme La santé mentale au travail et le Centre pour la santé mentale en milieu de travail de la Great-West fournissent sur leurs sites Web une liste des types de mesures d’adaptation les plus courants[123]. Les employeurs disent avoir trouvé les systèmes de soutien prolongé (comme les programmes d’aide aux employés ou PAE) utiles pour les employés qui avaient besoin d’aide.

Les TCA se préoccupaient du fait que les employeurs se précipitent trop rapidement pour offrir des prestations d’invalidité aux employés, sans déterminer préalablement s’ils pouvaient bénéficier de mesures d’adaptation et s’ils sont en mesure d’exécuter les tâches essentielles de l’emploi. De tels gestes peuvent avoir des effets néfastes sur les travailleurs. Selon le Centre d’assistance juridique en matière de droits de la personne (COAJDP), certains requérants allèguent aussi s’être fait refuser des prestations d’assurance-invalidité de longue durée parce qu’ils étaient capables de travailler s’ils bénéficiaient de mesures d’adaptation, même si leur employeur refusait de leur accorder ces mesures. Dans d’autres situations, les employeurs refusent d’accorder les mesures d’adaptation requises au motif que la demande de prestations d’assurance de l’employé a été refusée.

c) Vie privée, autonomie et obligation d’accommodement 

Beaucoup de personnes consultées se préoccupaient du respect du caractère privé des renseignements médicaux des employés (pour de plus amples renseignements, voir la section 10.1.). Parfois, les demandes de renseignements dépassent les simples questions de vie privée pour toucher des questions de droit à l’auto-détermination et au contrôle de ses propres soins. Les requêtes en droit de la personne sembleraient montrer que les tierces parties responsables de régimes d’assurance-invalidité ont tendance à se croire en droit d’obtenir des renseignements sur tous les aspects du diagnostic, du pronostic et du plan de traitement des employés, ainsi qu’une confirmation constante de la prise des médicaments (COAJDP). Certains employeurs pourraient vouloir que les employés consentent à certaines conditions avant d’obtenir des mesures d’adaptation. Ces conditions peuvent paraître intrusives, comme le fait de rencontrer un psychiatre plutôt qu’un psychologue à des fins d’évaluation ou de traitement (COAJDP), ou de respecter un plan de traitement particulier.

d) Gestion du rendement, mesures disciplinaires et congédiement

Des organisations et des personnes ont décrit comment certains employés aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances qui ont besoin de mesures d’adaptation font plutôt face à des mesures disciplinaires ou un congédiement. On nous a parlé de situations où des employés ayant des problèmes de santé mentale ou des dépendances faisaient l’objet de mesures de gestion du rendement à leur retour d’un congé de maladie.

Dans certains cas, des personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances peuvent afficher des comportements liés à leur handicap qui nuisent à leur rendement au travail, et mènent à des mesures disciplinaires ou à leur congédiement. Les employeurs ont indiqué que ce genre de situation pouvait être difficile à gérer, même quand il existe des procédures d’accommodement en milieu de travail. Selon eux, certains employés peuvent ne pas vouloir divulguer un handicap même si l’employeur est près à offrir des mesures d’adaptation. Les personnes consultées ont souligné le fait que les employeurs ont le devoir de poser des questions et d’offrir des mesures d’adaptation s’ils soupçonnent que des mesures disciplinaires ont trait à un handicap, surtout si les employés eux-mêmes sont incapables de cerner leurs besoins ou s’il se peut qu’ils craignent d’être stigmatisés s’ils dévoilent leur handicap.

Les travailleurs qui ont des dépendances font souvent face à des mesures disciplinaires, dont des suspensions et des congédiements, imposées par des employeurs qui tentent de régler les situations qui surviennent au travail en lien avec leur handicap. L’absentéisme, le manque de productivité, l’indiscipline et l’incapacité d’interagir avec des collègues sont des motifs d’imposition de mesures disciplinaires souvent associés aux travailleurs aux prises avec des dépendances. Tous ces comportements sont perçus comme des fautes professionnelles répréhensibles, mais peu d’attention est accordée aux dépendances sous-jacentes à l’origine de la conduite.

– TCA

Selon les TCA et d’autres personnes consultées, les « ententes de dernière chance », qui stipulent qu’un travailleur ou une travailleuse doit s’abstenir complètement de consommer de l’alcool ou d’autres drogues pendant une période de temps prescrite, posent également problème. Le non-respect d’une de ces ententes mène généralement au licenciement immédiat de l’employé. Ces ententes sont régies par l’obligation d’accommodement[124].

On nous a dit que les employeurs pouvaient hésiter à discuter de questions de rendement ou à régler des conflits auxquels des problèmes de santé mentale pouvaient avoir contribué. Par conséquent, les problèmes peuvent parfois prendre une ampleur démesurée avant qu’on n’aborde les besoins des employés ayant des troubles mentaux.

Recommandations :

27. Tous les employeurs devraient élaborer des politiques et procédures de respect des droits de la personne qui énoncent les obligations de l’organisation aux termes du Code des droits de la personne, y compris l’obligation d’accommodement des personnes ayant des handicaps psychosociaux jusqu’au point de préjudice injustifié. Les employeurs devraient veiller à ce que leurs politiques en matière de droits de la personne indiquent que les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances sont protégées sur la base du handicap et éliminent les obstacles systémiques en milieu de travail (par exemple au sein de leur culture organisationnelle) qui pourraient exclure ou pénaliser ces personnes.

28. Tous les employeurs devraient offrir une formation à leurs employés et gestionnaires sur leurs responsabilités aux termes du Code relativement aux droits fondamentaux des personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances. Cette formation devrait porter sur la prévention de la discrimination et du harcèlement, l’intervention dans ce domaine, les questions systémiques touchant les personnes ayant des handicaps psychosociaux et l’obligation d’accommodement.

Engagement de la CODP :

E18. La CODP continuera de sensibiliser les employeurs, employés et syndicats aux droits de la personne en milieu de travail, notamment en ce qui a trait à la maladie mentale et aux dépendances.


 

 

[96] CRDPHsupra note 9, alinéas 27(1)(a),(b) et (e).

[97] Statistique Canada, Enquête sur la participation et les limitations d’activités, 2006. Données fournies par la CODP.

[98] Statistique Canada, Enquête sur la participation et les limitations d’activités : L’expérience de travail des personnes avec incapacité au Canada, 2010. Accessible en ligne : Statistique Canada, http://www.statcan.gc.ca/pub/89-628-x/89-628-x2008007-fra.htm; Michael Mendelson, Ken Battle, Sherri Torjman et Ernie Lightman, A Basic Income Plan for Canadians with Severe Disabilities, Caledon Institute of Social Policy, 2010, à 3; Association canadienne pour la santé mentale - Ontario et Centre de toxicomanie et de santé mentale, Education and Employment for people with mental illness: Discussion Paper, janvier 2010. Accessible en ligne : Centre de toxicomanie et de santé mentale www.camh.net/Public_policy/Public_policy_papers/employment_discussion_paper_jan10.pdf.

[99]Statistique Canada, Enquête sur la participation et les limitations d’activités: L’expérience de travail des personnes avec incapacité au Canada, 2006. Accessible en ligne : Statistique Canada, http://www.statcan.gc.ca/pub/89-628-x/89-628-x2008007-fra.htm; Michael Mendelson, Ken Battle, Sherri Torjman et Ernie Lightman, A Basic Income Plan for Canadians with Severe Disabilities, The Caledon Institute of Social Policy, 2010, à 3; Association canadienne pour la santé mentale - Ontario et Centre de toxicomanie et de santé mentale, Education and Employment for people with mental illness: Discussion Paper, janvier 2010. Accessible en ligne : Centre de toxicomanie et de santé mentale www.camh.net/Public_policy/Public_policy_papers/employment_discussion_paper_jan10.pdf.

[100] Roeher Insitute, Improving the Odds: Employment, Disability and Public Programs in Canada, 2004, à 49 et 50, tel que cité par la Commission du droit de l’Ontario, Submission of the Law Commission of Ontario to the Commission for the Review of Social Assistance in Ontario, le 29 août 2011. Accessible en ligne : Commission du droit de l’Ontario, www.lco-cdo.org, à 6.

[101] Association canadienne pour la santé mentale - Ontario et Centre de toxicomanie et de santé mentale, supra note 99, à 3.

[102] Par exemple, voir Isabel Teotonio, « Canadian woman denied entry to U.S. because of suicide attempt », Toronto Star, le 29 janvier 2011. Accessible en ligne : Toronto Star, www.thestar.com/news/article/930110--canadian-woman-denied-entry-to-u-s-....

[103] Association des chefs de police de l’Ontario, LEARN Guideline for Police Record Checks, 28 mars 2011. Accessible en ligne : Association des chefs de police de l’Ontario, www.oacp.ca/upload5/news/GUIDELINES_FOR_RECORD_CHECKS___FINAL.pdf.

[104] Des préoccupations demeurent par rapport à la directive (pour de plus amples renseignements, consulter la lettre de la CODP à l’ACPO, à l’adresse www.ohrc.on.ca). De plus, la directive élaborée par l’OACP n’est pas contraignante. Il peut être essentiel d’éduquer et de sensibiliser davantage les services de police de l’ensemble de l’Ontario de façon à assurer la mise en œuvre de pratiques cohérentes.

[105] Commission de la santé mentale du Canada, « L’Association des chefs de police de l’Ontario émet de nouvelles directives relatives à la vérification des casiers judiciaires ». Accessible en ligne : Commission de la santé mentale du Canada, http://www.mentalhealthcommission.ca/Francais/Pages/nouvelles_directives.aspx téléchargé le 9 janvier 2012.

[106] Seulement 36 p. 100 des répondants à une étude menée auprès de plus de 1 000 employés et gestionnaires canadiens ont indiqué qu’ils se sentiraient à l’aise de parler d’un problème de santé mentale à leur gestionnaire. Plus de la moitié des employés (54 p. 100) craignaient que cela nuise à leurs chances d’avancement et 38 p. 100 étaient d’avis que cela nuirait à leur réussite. Karla Thorpe, « Building Mentally Healthy Workplaces: Perspectives of Canadian Workers and Front-Line Managers » (présentation effectuée au symposium sur le stress, la santé mentale et le milieu de travail de l’Université  Ryerson, le 30 septembre 2011), 2011. Conference Board du Canada.

[107] Loi sur la santé et la sécurité au travail, L.R.O. 1990, chap. O.1, par. 32.0.5(3) et (4).

[108] Une question semblable a été soulevée dans le cadre d’une affaire de droits de la personne portée  devant le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario. Mme Trozzi soutenait que les conditions rattachées au permis d’exercice de la profession infirmière que lui avait décerné l’Ordre des infirmières et infirmiers en raison de son handicap, qui incluait la dépression, étaient discriminatoires. Or, la Cour divisionnaire a déterminé que le Tribunal ne pouvait pas entendre sa cause étant donné que les préoccupations de Mme Trozzi à l’égard des conditions rattachées à son permis avaient déjà été « examinées de façon appropriée » dans le cadre de son appel interjeté auprès de la Commission d’appel et de révision des professions de la santé; College of Nurses v. Trozzi, 2011 ONSC 4614 (CanLII).

[109]La santé mentale au travail, « Cubicle bullies: ’Mobbing’ at work ». Accessible en ligne : La santé mentale au travail, www.mentalhealthworks.ca/media/mobbing-at-work, téléchargé le 11 janvier 2012. « La persécution collective peut viser tous les employés, sans égard au handicap. Le terme fait référence aux communications hostiles et contraires à l’éthique dirigées de façon systémique vers une personne en général, par une personne ou un groupe de personnes [...] Ces communications ont lieu souvent (presque tous les jours) sur une longue période de temps (au moins six mois) et, en raison de leur durée et fréquence, entraînent une détresse psychique, psychosomatique et sociale considérable. Heinz Leyman, « Mobbing and psychological terror at workplaces », Violence and Victims, vol. 5, no 2, 1990, p. 119.

[110] Articles 14 et 24 du Code, respectivement.

[111] Ministère de la Santé et des Soins de longue durée, La clé du succès : Cadre stratégique – Mécanismes de soutien à l’emploi à l’intention des personnes atteintes d’une maladie mentale grave. Accessible en ligne : Ministère de la Santé et des Soins de longue durée, http://www.health.gov.on.ca/fr/public/publications/mental/docs/pfesf.pdf. Téléchargé le 12 janvier 2012.

[112] Mary O’Hagan, Heather McKee et Robyn Priest, Consumer Survivor Initiatives in Ontario: Building for an Equitable Future, Fédération des programmes communautaires de santé mentale et de traitement des toxicomanies de l’Ontario, 2009, à 14.

[113] Conformément à la Loi sur l’équité en matière d’emploi, L.C. 1995, chap. 44, les employeurs assujettis à la réglementation fédérale (aux termes du Programme d’équité en matière d’emploi) et à une réglementation provinciale (aux termes du Programme de contrats fédéraux) doivent prendre des mesures pour éliminer les obstacles auxquels se heurtent les membres des groupes désignés : femmes, peuples autochtones, personnes handicapées et membres de « minorités visibles ».

Accessible en ligne : Ressources humaines et Développement des compétences Canada, http://www.rhdcc.gc.ca/fra/travail/egalite/equite_emploi/loi_mandats/index.shtm

[114] Sherry Mead, D. Hilton et L. Curtis, Peer support: A theoretical perspective (sans date), tel que cité dans Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, supra note 6, à 234-235. D’autres types de soutiens à l’emploi incluent des programmes d’évaluation professionnelle, de planification de la carrière et de placement en emploi, et des entreprises parrainées. Ministère de la Santé et des Soins de longue durée, La clé du succès : Cadre stratégique – Mécanismes de soutien à l’emploi à l’intention des personnes atteintes d’une maladie mentale grave. Accessible en ligne : Ministère de la Santé et des Soins de longue durée, http://www.health.gov.on.ca/fr/public/publications/mental/docs/pfesf.pdf. Téléchargé le 12 janvier 2012.

[115] Lettre du conseiller Gord Perks, président du Toronto Drug Strategy Implementation Panel, à Mme Jann Houston, directrice du programme Healthy Living/Healthy Communities du bureau de santé publique de Toronto, le 12 otobre 2011.

[116] Mary O’Hagan, Heather McKee et Robyn Priest, supra note 112, à 33.

[117] Selon l’alinéa 3(5)6) de la Loi de 2000 sur les normes d’emploi, 2000, L.O. 2000, chap. 41, la loi ne s’applique pas à un « particulier qui exécute un travail dans un emploi ou un milieu de travail simulé si le but principal visé en l’y plaçant est de le réadapter ».

[118] Carolyn S. Dewa, Chronic Work Stress, Mental Disorder and Work Disability (présentation effectuée au symposium sur le stress, la santé mentale et le milieu de travail de l’Université Ryerson, le 30 septembre 2011).

[119] Paragraphes 13(4) et (5) de la Loi de 1997 sur la sécurité professionnelle et l’assurance contre les accidents du travail, 1997, L.O. 1997, chap. 16.

[120] Par le passé, des prestations étaient uniquement accordées après qu’un demandeur a été victime d’un événement traumatisant qui représentait une menace réelle ou implicite pour le bien-être physique de la personne. En raison d’une accusation non fondée d’agression d’un élève portée contre elle, une aide-enseignante a développé un traumatisme psychologique débilitant diagnostiqué comme une dépression majeure. Cependant, sa réclamation a été rejetée parce que la situation ne satisfaisait pas aux critères stratégiques de la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail, qui semblaient limiter l’admissibilité aux prestations aux personnes victimes d’événements inattendus et soudains qui surviennent en milieu de travail et menacent le bien-être physique. Lors de l’appel, la CSPAAT a fait remarquer que la loi ne semblait pas limiter les prestations aux événements menaçant le bien-être physique d’une personne. L’audience a été ajournée afin d’obtenir les observations écrites de la Commission à propos des incohérences apparentes entre sa politique et la loi, et des incohérences au sein de la politique elle-même. En réponse à la demande du Tribunal, la Commission a indiqué que la présence d’une menace réelle ou implicite au bien-être physique n’était pas nécessaire pour avoir droit à des prestations pour stress mental traumatique. La Commission a aussi clarifié le fait que l’état de stress post-traumatique n’était pas le seul diagnostic du  DSM-IV pouvant former la base d’une demande de prestations; tout diagnostic de troubles de l’Axe 1 peut convenir. Après avoir obtenu la réponse de la Commission, le Tribunal a accordé des prestations à l’aide-enseignante pour stress mental traumatique. Il s’agit d’une décision importante qui accroît les types de cas de stress mental traumatique pouvant mener à des prestations d’assurances contre les accidents du travail. Decision No. 483/11I, 2011 ONWSIAT 1231 (CanLII). Voir également les commentaires décrivant l’issu et les conséquences de la décision; p. ex. Heenan Blaikie, WSIAT Expands the Scope of Entitlement for Traumatic Mental Stress, le 10 janvier 2012, www.mondaq.com/canada/x/160258/Employee+Rights/WSIAT+Expands+The+Scope+Of+Entitlement+For+Traumatic+Mental+Stress, téléchargé le 18 avril 2012.

[121] Plesner v. British Columbia Hydro and Power Authority, 2009 BCCA 188 (CanLII).

[122] Le projet de loi 14, Workers Compensation Amendment Act, 2011 a été déposé en novembre 2011 et a été reçu en première lecture à l’assemblée législative de la Colombie-Britannique. Nous ne pouvons dire à ce moment si ces modifications seront adoptées et obtiendront force de loi.

[123] La santé mentale au travail, « What kinds of accommodations can I ask for? » Accessible en ligne : La santé mentale au travail, www.mentalhealthworks.ca/employees/faqs/accommodations/types, téléchargé le 16 janvier 2012. Centre pour la santé mentale en milieu de travail de la Great-West, Mesures d’adaptation qui fonctionnent. Accessible en ligne : Centre pour la santé mentale en milieu de travail de la Great-West http://www.gwcentrepourlasantementale.com/display.asp?lc=1&l1=175&l2=6&d=6, téléchargé le 16 janvier 2012.

[124] Pour une discussion sur les questions de droits de la personne en lien avec les ententes de dernière chance, voir le document de 2008, Les droits de la personne au travail, de la Commission ontarienne des droits de la personne, à l’adresse www.ohrc.on.ca.

 

 

Social Areas: 
Discrimination Type: 
Organizational responsibility: 

13. Services

Aux termes du Code, les fournisseurs de services ont l’obligation de fournir des services libres de discrimination et de harcèlement. La catégorie des « services » est très vaste et comprend les services grand public (boutiques, restaurants, éducation) et les services qui s’appliquent tout spécifiquement aux personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances (système de santé mentale ou centres de traitement des dépendances). Certains services touchent un nombre restreint de personnes. D’autres, cependant, contribuent considérablement à la capacité des gens de faire valoir leurs droits, de gagner leur vie, de maintenir la santé, d’obtenir justice ou de prendre part à la vie communautaire ou politique. Les types de services qui posaient le plus de problèmes selon les personnes consultées avaient trait à l’éducation et au système de justice pénale (y compris les services de la police, des tribunaux et du système correctionnel), aux programmes d’aide sociale, aux soins de santé physique et mentale, au bien-être de l’enfance, aux règles du gouvernement concernant les permis de conduire, au système d’assurance et aux tribunaux administratifs.

13.1. Disponibilité des services de santé mentale et de soutien

Un grand nombre de participants à la consultation nous ont parlé du besoin pressant de services de santé mentale et autres services de soutien adéquats pour les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances. On nous a fait part des profondes répercussions qu’a le manque de services de santé mentale appropriés sur la vie des gens, y compris l’accroissement de la criminalité, de l’itinérance et de l’isolement social, la perpétuation de la pauvreté, la détérioration de la santé physique et mentale, et les décès prématurés. Nous avons également appris que le manque de services offerts au sein de la collectivité avait un impact sur la capacité des gens de faire valoir leurs droits fondamentaux dans d’autres sphères de la vie. Par exemple, les longs temps d’attente d’évaluations psychologiques afin de déterminer les besoins d’une personne peuvent retarder la mise en œuvre de mesures d’adaptation en matière d’emploi, d’éducation ou de justice pénale, ce qui peut brimer le droit à l’égalité d’accès ou des chances dans ces sphères de la vie.

Les thèmes soulevés durant la consultation reflètent, en partie, les propos des participants aux consultations provinciale et fédérale sur la réforme du système de santé mentale[125]. Par exemple, on nous a fait part du besoin d’accroître les traitements de la maladie mentale et des dépendances, et les services de counselling et de soutien (comme les soutiens au logement et à l’emploi). Les gens ont décrit le fait que de tels services n’étaient souvent pas offerts aux personnes qui sortaient d’établissements psychiatriques ou correctionnels, ou aux détenus des établissements correctionnels. Nous avons appris que certaines clientèles bénéficiant de protections particulières aux termes du Code avaient beaucoup de difficultés à obtenir des services. C’est le cas des jeunes, des Autochtones, des réfugiés et des immigrants, des personnes ayant des troubles de l’apprentissage ou du développement, des troubles auditifs, des troubles de la personnalité limite ou des troubles causés par l’alcoolisation fœtale, des femmes victimes de violence et des membres de la communauté francophone. Nous avons également appris que les personnes provenant de plus d’une de ces clientèles avaient encore davantage de difficultés à trouver des services, ou à y accéder.

Des personnes s’inquiétaient aussi des différences de financement des services dans les collectivités rurales par opposition aux centres urbains de l’Ontario, des très longues listes d’attente pour rencontrer une professionnelle ou un professionnel de la santé mentale, ainsi que de la couverture insuffisante de l’Assurance-santé de l’Ontario en ce qui a trait aux médicaments et aux consultations avec des psychologues, thérapeutes et autres intervenants en santé mentale. Les gens nous ont dit que l’hospitalisation à des fins de traitement posait un problème en ce sens qu’il fallait être sur le bord de la crise ou qualifié de risque pour soi-même ou autrui, aux termes de la Loi sur la santé mentale, pour y être admissible.

De l’avis des personnes consultées, le manque de coordination de la prestation des services et le mandat étroit des services de santé mentale, autres services et ministères gouvernementaux chargés de les financer entraînaient la création d’un amalgame problématique de services auxquels les gens sont inadmissibles. Par exemple, une personne d’Ottawa a expliqué que la définition de « diagnostic double » varie selon que les services sont financés par le ministère de la Santé et des Soins de longue durée ou le ministère des Services sociaux et communautaires[126]. L’Association ontarienne des troubles de l’apprentissage nous a dit que le manque de coordination des services à l’échelle du gouvernement et au sein des ministères constitue un grand problème pour les personnes aux prises avec à la fois des troubles de l’apprentissage et des troubles mentaux.

Je trouve parfois que les services de santé mentale sont très spécifiques. Si vous ne cadrez pas exactement dans la catégorie des services offerts, vous passez par les mailles du filet et n’obtenez pas les services dont vous avez besoin.

            – Participant(e) à la table ronde de North Bay

Des gens se préoccupaient du fait que le système de santé mentale est financé de façon inéquitable comparativement aux soins de santé généraux. Par le passé, d’autres rapports ont documenté les divergences entre le financement du système de santé mentale et du secteur plus vaste des soins de santé[127]. Selon le rapport Romanow de 2002 sur l’état du système canadien de soins de santé, le système de santé mentale a traditionnellement été perçu comme l’« orphelin » des soins de santé étant donné que les programmes relatifs à la santé mentale et aux dépendances ont été gérés séparément des autres programmes de soins de santé[128]. Le Canada accorde moins de financement aux soins de santé mentale que la plupart des pays développés[129]. Pour corriger les déséquilibres sur le plan du financement des soins généraux et soins de santé mentale, la stratégie nationale de la santé mentale de la Commission de la santé mentale du Canada recommande d’accroître les investissements dans la santé mentale et les autres sphères sociales (comme le logement, l’éducation et le système de justice pénale)[130]. D’autres ont suggéré de fusionner les systèmes de santé générale et de santé mentale de façon à traiter la personne dans son entier.

La Cour suprême du Canada a donné aux gouvernements la latitude de répartir les ressources et de choisir les services qu’ils financeront. Les fonds ne doivent pas, cependant, être répartis de façon discriminatoire[131]. Si sa répartition des ressources en soins de santé a un effet néfaste sur l’un quelconque des groupes protégés aux termes du Code, le gouvernement peut être obligé de démontrer que sa décision est raisonnable et légitime (de bonne foi) compte tenu des circonstances. Cela inclut le fait d’examiner l’objectivité du processus utilisé pour prendre la décision et la possibilité que la décision relative à la couverture de soins de santé ait été basée sur des points de vue discriminatoires à l’endroit du groupe en question[132].

Le manque d’accès des personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances à des soins de santé appropriés peut aussi entrer en conflit avec les droits de ces personnes aux termes de la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CRDPH). Selon la CRDPH, les États Parties (y compris le Canada) fourniront aux personnes handicapées les services dont elles ont besoin spécifiquement en raison de leur handicap, y compris des services de dépistage et d’intervention précoce, au besoin (par. 25(b)) et les États Parties organiseront, renforceront et développeront des services et programmes diversifiés d’adaptation et de réadaptation, en particulier dans les domaines de la santé, de l’emploi, de l’éducation et des services sociaux (par. 26(1)).

La plupart des gens ont fait état du besoin de mettre sur pied davantage de services de santé mentale et d’autres services de soutien qui répondent aux besoins diversifiés des personnes au moyen d’une variété d’approches. La CODP n’a pas pour rôle d’émettre des recommandations sur la façon d’octroyer des fonds aux divers services de santé mentale, de traitement des dépendances ou autres, ni l’expertise nécessaire pour se prononcer à ce chapitre. Cependant, toute inégalité sur le plan de la disponibilité de ces services ne devrait pas contribuer aux obstacles auxquels se heurtent les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances lorsqu’il s’agit d’obtenir des soins de santé et autres soutiens appropriés comparativement aux personnes non handicapées ou aux prises avec d’autres types de handicap.

Recommandation :

29. Le gouvernement de l’Ontario devrait cerner et éliminer les inégalités en matière de soins de santé, services de réadaptation et autres services de soutien auxquelles se heurtent les personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances, comparativement à la population générale.

13.2. Obligation d’accommodement en matière de services

La section 2.4 présente les grandes lignes de l’obligation d’accommodement. On nous a aussi fait part de ce qui suit :

a) 13.2.1. Services inclusifs et accessibles

Beaucoup de personnes consultées ont décrit comment différents types de services, y compris les services de soutien au revenu, services policiers et services de soutien à la santé mentale, ne sont habituellement pas conçus de façon à répondre aux besoins des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances. Des obstacles liés aux attitudes peuvent exister et nuire à ces personnes. Selon l’Association des travailleuses et travailleurs sociaux de l’Ontario (ATTSO), la conception même des services peut inclure de la discrimination en situation de : ressources limitées; mécanismes de reddition de comptes déficients; manque de mandats spécifiques, de formation et de capacité nécessaire pour travailler auprès de clients perçus comme étant difficiles à aider et de cas plus complexes.

Les participants à la consultation étaient aussi d’avis que les services ne sont souvent pas conçus de façon à répondre aux besoins des personnes aux prises avec des handicaps épisodiques. Quand le service est prêt à intervenir, la personne peut ne pas être prête pour l’intervention, et vice versa. Compte tenu de restrictions sur le plan du financement, certaines organisations peuvent uniquement avoir pour mandat d’aider les personnes ayant des handicaps graves. Des gens peuvent être poussés à démontrer non pas qu’ils ont un handicap les affectant considérablement, mais qu’ils répondent aux critères de handicaps permanents (bureau des droits de la personne de l’Université de Guelph). Enfin, des personnes ont raconté s’être fait refuser des prestations ou des services parce qu’au moment de l’évaluation, certains de leurs problèmes n’étaient pas débilitants.

Tout au long de la consultation, on nous a dit que les services reposaient sur la notion de handicap unique. Les personnes qui ont des handicaps multiples ont de la difficulté à se prévaloir de certains services ne bénéficiant pas d’une conception inclusive. Beaucoup de gens ont indiqué que la présence d’une déficience intellectuelle, d’une dépendance ou d’un trouble de l’apprentissage concomitant pouvait créer un obstacle à l’obtention d’un traitement de la maladie mentale ou de services de soutien. Certains services peuvent être conçus de façon à accueillir uniquement les personnes aux prises avec des handicaps physiques ou autres, tout en excluant les personnes ayant des handicaps psychosociaux qui pourraient également bénéficier de leur assistance.

La conception, la structure, les politiques et les processus de prise de décisions des services peuvent également, par inadvertance, créer des obstacles pour les personnes qui ont des troubles psychiques ou des dépendances. D’après l’ATTSO, entre autres, beaucoup de systèmes de santé mentale et de soutien comptent des processus d’aiguillage qui sont peu efficaces en présence de symptômes de maladie mentale. Certains usagers/survivants ou personnes aux prises avec des dépendances peuvent avoir de la difficulté à organiser leurs pensées, ce qui peut s’avérer problématique lorsqu’il est nécessaire de garder un œil constant sur des listes d’attente.

Les formulaires de demande de certains services (p. ex. des tribunaux administratifs ou du POSPH) ont été qualifiés de complexes, difficiles à remplir et rédigés en langage qui n’est pas simple. Certains processus de demande exigeraient aussi la transmission d’une documentation substantielle pouvant entraîner des frais que les demandeurs n’ont pas les moyens de débourser. Les centres d’appels qui effectuent l’évaluation initiale, pour les programmes d’aide sociale ou Aide juridique Ontario par exemple, ont été caractérisés de difficiles à accéder. Les processus de demande peuvent poser des difficultés extrêmes aux personnes qui n’ont pas accès à un téléphone ou ont des troubles cognitifs ou de la mémoire, ou un niveau d’alphabétisation peu élevé. Consulter la section 2.5.1.2.1. pour connaître les inquiétudes des participants par rapport au processus de demande d’un logement avec services de soutien.

Certaines méthodes de paiement ou d’évaluation pourraient sans le vouloir encourager les fournisseurs de services à refuser les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances. Le fait de rémunérer les fournisseurs de services selon le nombre de clients et d’évaluer leur rendement en fonction de cibles axées sur la prestation de services à un nombre élevé de clients (p. ex. cabinets de médecins) peut avoir un effet néfaste sur les personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances, ou d’autres types de handicap qui requièrent plus de temps (ACSM – Ontario; ARCH). Nous avons aussi appris que les personnes ayant des handicaps psychosociaux pouvaient être perçues comme étant plus « difficiles » si elles requièrent plus de temps de la part des fournisseurs de services. Le fait d’accorder plus de temps à des clients en raison de besoins liés à un handicap s’inscrit dans l’obligation d’accommodement. Des fournisseurs de services ont déclaré qu’on ne peut pas accorder plus de temps à des clients qui en aurait besoin sans prendre en compte les besoins des autres clients qui ont aussi besoin du service.

Box: L’organisme ARCH a expliqué que certains avocats qui acceptaient des certificats d’aide juridique pouvaient hésiter à représenter des clients qui n’ont peut-être par la capacité juridique, mais ne sont pas accompagnés d’un décideur substitut. Le fait d’évaluer la capacité d’une personne à chaque rendez-vous prend du temps, pour lequel l’avocat n’est pas nécessairement rémunéré. End of box

Comme dans le secteur du logement social, les personnes ayant des handicaps psychosociaux peuvent être rejetées ou se faire refuser des services en raison de facteurs en lien avec leur handicap. En particulier, certains usagers de services ayant des troubles psychiques peuvent se voir refuser des services parce qu’ils sont jugés à « risque élevé » en raison de comportements en lien avec leur handicap, affichés par le passé auprès du même fournisseur ou d’un fournisseur différent. Le fait que de nombreux fournisseurs ne tiennent pas compte de leur obligation d’accommodement et refusent tout simplement les personnes ayant un casier judiciaire, même si ce casier a trait à un problème de santé mentale ou une dépendance, était aussi une source de préoccupations.

De plus, selon certaines personnes, il peut arriver que des fournisseurs de services refusent de fournir des services à des personnes qui ne respectent pas les modalités du traitement recommandé, ne se comportent pas de la façon à laquelle le fournisseur s’attend ou n’acceptent pas un certain type de traitement de la maladie mentale alors qu’il ne s’agit pas d’une condition légitime (de bonne foi) de participation au service. Par exemple, un étudiant universitaire a raconté qu’on lui avait refusé les mesures d’adaptation des examens requises par son handicap parce qu’il ne voyait pas son conseiller à intervalles réguliers.

Box: Des personnes ont rapporté à la CODP que si elles ne prenaient pas les médicaments prescrits par leur psychiatre ou médecin, ce dernier les informait qu’il cessait de les aider. End of box

Pour évaluer correctement les besoins des personnes ayant des handicaps psychosociaux, on nous a dit que les services devraient être conçus de façon à accorder à chaque personne le temps et la flexibilité nécessaires, en fonction de ses besoins individuels, sans qu’il soit essentiel de s’informer de la présence d’un handicap ou de supposer qu’il y en existe un. Selon les personnes consultées, les règles, politiques et procédures des organisations doivent être modifiées et assouplies afin de répondre aux besoins individuels des clients. À propos de la restructuration des services ou des systèmes, les participants de la table ronde d’Ottawa ont exprimé particulièrement clairement le besoin d’inclure les usagers/survivants au processus afin qu’ils orientent les travaux, en ajoutant qu’on « ne devait rien planifier pour eux, sans eux ».

Parmi les types de mesures d’adaptation en matière de services dont pourrait avoir besoin une personne aux prises avec des troubles psychosociaux figurent :

  • des délais flexibles ou plus de temps
  • un environnement de services tranquille
  • un soutien additionnel de la part de personnes (soutien humain)
  • des modes de communication multiples avec l’organisation (p. ex. téléphone, courriel, en personne, poste)
  • de l’aide ou du soutien à la prise de décisions
  • des formulaires d’admission et d’autres formes de communication écrite accessibles et rédigées en langage simple
  • de la flexibilité sur le plan de l’établissement des rendez-vous
  • la prise en compte du handicap comme facteur atténuant avant d’imposer des mesures punitives.

Recommandation :

30. Aux termes de la LAPHO et du Code, les organismes de services devraient passer en revue leurs politiques, pratiques, formulaires de demande et procédures de prise de décisions en collaboration avec des groupes d’usagers/de survivants et des experts en matière d’accessibilité de façon à cerner et à éliminer les obstacles pouvant mener au traitement inéquitable des personnes ayant des handicaps psychosociaux ou des dépendances.

13.3. Traitement inéquitable et harcèlement en matière de services

De nombreux fournisseurs de services sont conscients de leur obligation individuelle d’assurer le traitement équitable des personnes aux termes du Code. D’ailleurs, certaines personnes consultées ont décrit de très bonnes interactions avec des fournisseurs de services, durant lesquelles elles se sont senties respectées, estimées et incluses. Des centaines d’organisations et de fournisseurs de services individuels ont pris le temps de faire part de leurs préoccupations relativement à la violation des droits fondamentaux des personnes ayant des problèmes de santé mentale et des dépendances. Comme l’a expliqué un fournisseur de services, directeur régional d’un centre de soins de santé, « […] nous nous impliquons toujours à fond dans ces questions parce que nous croyons que les clients font l’objet de discrimination ».

D’un autre côté, beaucoup de participants ont noté que, comparativement à la population générale, les personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances peuvent se heurter à des comportements non professionnels ou à des traitements inéquitables de la part de fournisseurs de services, y compris des commentaires ou comportements en lien avec le handicap qui peuvent équivaloir à du harcèlement ou empoisonner l’environnement de services. Ils relatent aussi des jugements de la part de fournisseurs de services selon lesquels les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances tentent de « tirer avantage » des systèmes.

Ces commentaires et comportements peuvent résulter d’attitudes négatives ou discriminatoires à l’égard des personnes ayant des handicaps psychosociaux. Selon l’Association des travailleuses et travailleurs sociaux de l’Ontario, les fournisseurs de services peuvent parfois utiliser un « langage commun qui est discriminatoire, désobligeant et plein de jugements, qui peut rendre des usagers éventuels peut enclins à recourir à leurs services. Les fournisseurs de services peuvent parfois s’attarder uniquement à l’étiquette collée à l’usager/au survivant, réduisant ainsi l’identité de la personne à sa maladie. »

Après ma chirurgie, le chirurgien m’a dit : « Si j’avais su que tu étais fou, je ne t’aurais pas opéré ».

– Participant(e) au groupe de consultation

Des personnes se préoccupaient tout particulièrement du fait que certains professionnels de la santé mentale et des soins primaires créaient un environnement de services peu accueillant et empoisonné, où les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances pouvaient faire l’objet de harcèlement.

J’ai travaillé au sein [du personnel ambulancier paramédical] de services d’urgence et ces gens-là dénigrent beaucoup les personnes qui ont des troubles mentaux. À l’heure du lunch, ils parlaient d’aller chercher une autre « folle » ou un autre « dopé ». Et ce sont des intervenants de première ligne.

– Participant(e) à la table ronde de North Bay (qui se qualifiait également d’usager(e)/de survivant(e))

La Commission de la santé mentale du Canada a dirigé la première phase de sa campagne pancanadienne de lutte contre la stigmatisation sur les professionnels de la santé, en partie parce que le rapport Kirby faisait état des mêmes préoccupations[133].

Deux personnes nous ont donné un exemple de l’effet de l’étiquetage en nous racontant qu’elles avaient dû porter un brassard mauve à l’hôpital pour indiquer qu’elles représentaient un danger pour elles-mêmes ou autrui (elles étaient toutes les deux suicidaires). Elles ont déclaré s’être senties très stigmatisées. L’une d’entre elles a aussi affirmé avoir été plus mal traitée par le personnel de l’hôpital lorsqu’elle portait le brassard que lors d’un autre séjour, lorsqu’elle n’avait pas eu à le porter.

Box: Les participants à la consultation ont soulevé des préoccupations en matière de vie privée. Beaucoup de personnes ont dit que les renseignements sur les antécédents de maladie mentale ou de dépendances d’une personne peuvent être transmis d’un fournisseur de services à un autre, souvent après que la personne concernée a signé un formulaire de consentement « général » des années plus tôt. Les formulaires de consentement ne sont pas toujours renouvelés sur une base annuelle, ce qui peut donner aux fournisseurs de services accès à des renseignements médicaux privés dont ils n’ont pas besoin pour fournir le service, et violer la vie privée de l’usager du service. End of box

13.4. Types de services soulevant des préoccupations

a) Éducation

Box: L’article 24 de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées garantit le droit à l’éducation. En ratifiant la CRDPH, le Canada s’est engagé à prendre des mesures graduelles pour s’assurer que les élèves handicapés ne sont pas exclus du système éducatif en raison de leur handicap, et qu’ils ont accès à des mesures d’adaptation et à des mesures de soutien individualisé afin de maximiser leur développement scolaire et social en conformité avec l’objectif d’inclusion[134].  End of box

Les problèmes de santé mentale font souvent éruption quand la personne est en âge d’aller à l’école et qu’elle fréquente un établissement primaire, secondaire ou postsecondaire. Selon les personnes consultées, l’évaluation initiale des élèves touchés et la détermination de leurs besoins revêtent une importance critique. À Windsor, des participants se préoccupaient du fait que des élèves puissent être qualifiés de « paresseux » ou de « fauteurs de troubles » lorsqu’ils ont des troubles mentaux naissants qui ne sont pas reconnus ou pris en compte. Ces élèves peuvent avoir besoin de mesures d’adaptation à tous les niveaux scolaires pour assurer leur accès équitable à l’éducation. Les mesures d’adaptation que requièrent habituellement les élèves ayant des problèmes de santé mentale incluent l’adaptation des examens, l’offre de soutien humain, l’extension des délais de production des travaux, ainsi que la prise en compte des absences liées au handicap et, dans le cas des suspensions scolaires, des facteurs atténuants liés au handicap.

École primaire et secondaire

Selon l’organisme ARCH, les obstacles liés aux attitudes sont courants au sein du système d’éducation publique de l’Ontario. Les stéréotypes, suppositions et attitudes discriminatoires constituent d’importants obstacles et pourraient empêcher certains élèves aux prises avec des troubles mentaux d’obtenir des mesures d’adaptation appropriées. Nous avons entendu que les élèves ayant des problèmes de santé mentale peuvent être considérés comme n’ayant pas les capacités requises pour réussir. Ces suppositions sont peut-être plus courantes si la personne handicapée se heurte aussi à de la discrimination raciale ou à de la discrimination fondée sur d’autres motifs visés par le Code. D’après les participants au groupe de consultation de l’Ethno-Racial Disability Coalition of Ontario, les élèves racialisés dont les parents ont une maladie mentale ou une dépendance peuvent être ciblés à l’école et orientés vers des programmes qui ne leur permettent pas d’atteindre leur plein potentiel.

Certains participants à la consultation ont décrit avoir été mal traités, intimidés ou exclus par d’autres élèves en raison d’un trouble psychosocial, ou s’être sentis exclus après avoir été qualifiés de « différents ».

Il est encore courant d’être ostracisé à l’école parce qu’on agit étrangement ou différemment. Et si on choisit d’expliquer ce qui se passe, les gens n’en savent pas assez sur la maladie mentale pour ne pas hausser les épaules ou en rire. Il faut sensibiliser davantage les élèves de tous les niveaux scolaires, pas seulement à propos des handicaps physiques mais aussi des handicaps mentaux.

      – Participant(e) au sondage

Beaucoup d’élèves mettent fin à leurs études en raison du manque de services appropriés de traitement ou d’évaluation. Nous avons appris que des élèves pouvaient attendre jusqu’à deux ans pour obtenir une évaluation psychologique dans le but de cerner leurs besoins. Selon l’OSSTF/FEESO, le système éducatif doit parfois bloquer l’accès aux études aux élèves qui constituent un danger pour eux-mêmes ou autrui en raison du manque de ressources adéquates pour évaluer et traiter ces élèves. Malgré les situations où un élève peut représenter un risque pour sa santé ou sécurité, ou celle d’autrui, la Directive concernant l’éducation accessible de la CODP indique que le processus d’accommodement doit être exploré pleinement jusqu’au point de préjudice injustifié.

Plusieurs personnes consultées, dont l’organisme ARCH, craignaient que les élèves aux prises avec des handicaps multiples, y compris des troubles du comportement et des déficiences intellectuelles et développementales comme l’autisme ou le DCA/THADA, soient suspendus ou renvoyés de l’école en raison de comportements liés à leur handicap, sans exploration convenable des mesures d’adaptation possibles. Nous reconnaissons cette possibilité depuis des années, et l’avons abordée dans le cadre de notre consultation sur l’éducation accessible, présentée dans Une chance de réussir. Selon ARCH, les suspensions fréquentes et mauvais résultats scolaires dus au manque de mesures d’adaptation convenables aux handicaps ont des effets très négatifs sur la santé mentale des élèves. Des parents et élèves ont rapporté à l’organisme que les suspensions multiples et le manque d’accès à des mesures d’adaptation à l’école entraînent des troubles anxieux, la dépression ou une mauvaise estime de soi. Comme le faisait remarquer l’OSSTF/FEESO, les élèves qui ont des phobies scolaires non traitées, une dépression ou une psychose non diagnostiquée peuvent ne pas vouloir ou pouvoir fréquenter l’école de façon régulière. Le comité consultatif de l’éducation spéciale du conseil scolaire de district Lakehead a recommandé de fournir des ressources aux conseils scolaires pour faire en sorte d’offrir au personnel et aux élèves la formation appropriée pour régler toute question d’accommodement pouvant survenir.

Le conseil scolaire a dit que la santé mentale ne le concernait pas, immédiatement après qu’un autre garçon ayant des besoins particuliers se soit suicidé l’année dernière. Je devais recevoir des services d’ergothérapie l’an dernier, mais l’école n’a pas pris la peine de traiter ma demande pour que je puisse obtenir de l’assistance. Aucun membre du personnel n’a même lu mon dossier pour que je reçoive l’aide appropriée pour mon apprentissage. On m’a donné la note de passage sans même que j’effectue les travaux ou examens. C’est plus facile de suspendre les élèves que de les aider. Si on pose un geste légèrement inapproprié, ils appellent la police sans avertir nos parents pour qu’ils puissent venir nous défendre. Ma mère dit que c’est une façon de nous faire peur.

      – Participant(e) au sondage

Des personnes se préoccupaient du fait que les élèves aux prises avec des handicaps, y compris des problèmes de santé mentale, sont parfois placés dans des classes pour l’enfance en difficulté sans le consentement des parents et sans grande possibilité d’inclusion dans des classes ordinaires. Cela ne respecte pas le principe d’inclusion inhérent aux droits de la personne, les Directive concernant l’éducation accessible de la CODP, la position stratégique du ministère de l’Éducation et l’orientation du Règlement 181/98 pris en application de la Loi sur l’éducation, qui régit le placement des élèves en difficulté en salles de classe[135].

Les personnes consultées ont déclaré que la stratégie sur l’éducation inclusive du ministère de l’Éducation offrait une fondation positive pour le respect des droits fondamentaux des élèves handicapés. La stratégie et la Note Politique/Porgrammes no119 reconnaissent que les obstacles discriminatoires en matière d’apprentissage peuvent nuire aux élèves qui ont des troubles mentaux ou d’autres motifs de discrimination interdits aux termes du Code. La Note no 119 énonce les exigences auxquelles tous les conseils scolaires financés par les fonds publics doivent satisfaire en matière d’élaboration, de mise en œuvre et de suivi de l’exécution d’une politique en matière d’éducation équitable et inclusive, conçue pour favoriser un climat scolaire sain qui est libre de discrimination et de harcèlement[136].

De plus, les trois premières années de la stratégie sur la santé mentale du ministère de la Santé et des Soins de longue durée (MSSLD), d’une durée de 10 ans, portent tout particulièrement sur les enfants et les jeunes. Le MSSLD a déclaré qu’il investirait dans l’accroissement des ressources en santé mentale (dont des intervenants) dans les écoles en plus de faire la promotion des connaissances sur la santé mentale en milieu scolaire et des pratiques libres de stigmatisation visant, entre autre, les enfants, les jeunes et les éducateurs[137].

Établissements postsecondaires

Les mémoires axés sur l’éducation postsecondaire portaient principalement sur l’obligation des établissements d’offrir des mesures d’adaptation aux étudiants ayant des troubles psychiques jusqu’au point de préjudice injustifié, au moment de la demande d’admission et durant les études. Plusieurs étudiants ont dit avoir eu facilement accès à des mesures d’adaptation étant donné que les établissements postsecondaires abritent des bureaux d’aide aux personnes handicapées qui procurent de l’assistance à ce chapitre. D’autres personnes ont cependant affirmé qu’il y avait quand même des lacunes sur le plan des pratiques d’accommodement qui faisaient en sorte que les étudiants aux prises avec des troubles psychiques étaient plus susceptibles d’abandonner leurs études.

Malgré le fait que je participe au programme pour personnes handicapées de l’école, qui me donne accès à certaines mesures d’adaptation, il m’arrive de frapper des professeurs qui ne sont pas prêts à respecter ces mesures. Je crois que les gens pensent que je fais semblant parce que mon handicap n’est pas visible. Ça me coûte tellement de devoir me battre pour obtenir ces mesures que je finis habituellement par abandonner le cours, et je me retrouve avec encore plus de retard à l’école.

            – Participant(e) au sondage

D’après ce qu’on nous a dit, les étudiants aux prises avec des troubles psychosociaux sont parfois tenus d’expliquer des périodes d’interruption de l’emploi ou des études, ce qui réduit leurs chances d’être acceptés dans un programme d’études postsecondaires. Or, ces périodes d’interruption peuvent avoir servi à se rétablir d’un problème de santé mentale ou d’une dépendance (ARCH). On nous a également fait part de cas où des professeurs ou d’autres personnes avaient contesté la prestation de mesures d’adaptation, ou l’établissement avait exigé des renseignements détaillés sur un handicap ou un diagnostic avant d’accorder de telles mesures, ce qui était perçu comme une atteinte à la vie privée des étudiants.

Comme c’est le cas dans les écoles primaires et secondaires, des personnes ont indiqué que les retards sur le plan de la prestation des services de santé mentale (p. ex. obtention d’un rendez-vous avec un psychiatre) réduisent l’accès à l’éducation des étudiants aux prises avec des troubles psychiques et des dépendances parce que les établissements postsecondaires dépendent des évaluations de ces intervenants pour donner suite aux demandes d’accommodement. Selon le bureau des droits de la personne de l’Université de Guelph, les éducateurs doivent tenir compte de la nature variable des problèmes de santé mentale des étudiants au moment de planifier les mesures d’adaptation. D’ajouter le bureau, les demandes de mesures d’adaptation doivent être examinées au cas par cas en fonction des besoins des étudiants, sans perdre de vue l’importance pour l’établissement de maintenir l’intégrité de ses programmes d’études.

La CODP a appris que certains professeurs tentent de dissuader des étudiants aux prises avec des antécédents de troubles mentaux d’effectuer des stages coopératifs ou d’apprentissage dans le secteur de la santé mentale ou dans un environnement où ils devraient travailler auprès de gens. Cela a des répercussions sur leur carrière future. De plus, l’obligation de se soumettre à une vérification du casier judiciaire (voir la section 7 pour obtenir de plus amples renseignements) a eu un effet sur la capacité des gens de décrocher des stages coopératifs ou d’apprentissage dans des secteurs vulnérables.

Je n’ai pas pu participer à un programme de sciences de laboratoire médical. L’admission au programme exigeait une vérification du casier judiciaire parce que j’aurais effectué des prises de sang auprès de patients. On a refusé de m’accepter dans le programme en raison de deux épisodes suicidaires où la police m’a conduit à l’hôpital.

      – Participant(e) au sondage

b) Présomption de risque : permis de conduire, protection de l’enfance et assurance

Une intervenante de la société d’aide à l’enfance m’a déjà dit : « Mais vous avez un trouble bipolaire. Comment pouvez-vous élever des enfants? » Cette même intervenante a admis qu’elle ne croyait pas que les personnes ayant une maladie mentale pouvaient être parents.

– Participant(e) au sondage

D’après beaucoup de gens, les services de protection de l’enfance, les assurances vie et invalidité et les règles régissant la suspension du permis de conduire peuvent aussi poser des problèmes du point de vue des droits de la personne. En particulier, les gens craignaient de ne pas faire l’objet d’un traitement équitable relativement à ces services parce qu’on présumait qu’ils posaient un risque en raison de leur handicap.

Le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques et d’autres personnes consultées s’inquiétaient du fait que la suspension du permis de conduire en raison d’un trouble mental ou d’une dépendance à l’alcool ou à une autre drogue aux termes du Code de la route est effectuée sans évaluation individualisée préalable de la situation médicale de la personne par des médecins ou par le ministère des Transports. Le processus d’appel en vue de récupérer son permis de conduire aurait également des répercussions disproportionnées sur les personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances étant donné son coût et sa complexité.

On nous a également parlé du système de bien-être de l’enfance. D’après les participants, les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances sont parfois considérées comme un danger pour leurs enfants en raison de stéréotypes liés au handicap. On nous a dit que des parents avaient été signalés à la société d’aide à l’enfance après avoir dévoilé un problème de santé mentale à la direction de l’école de leur enfant, et que les tests de dépistage des drogues peuvent ne pas adéquatement évaluer le danger que représente une personne pour ses enfants.

Beaucoup de personnes ont raconté avoir de la difficulté à souscrire une assurance vie ou invalidité, y compris de l’assurance individuelle et collective, en raison de troubles psychosociaux ou de dépendances, et des risques connexes de suicide ou d’invalidité. Elles nous ont également dit qu’elles n’étaient pas admissibles à une couverture d’assurance en raison d’un « état de santé antérieur », même si elles sont actuellement en bonne santé.

Selon le Centre d’assistance juridique en matière de droits de la personne, l’absence de symptômes liés au handicap et de traitement dans les 12 derniers mois pourrait constituer une condition d’admissibilité à une protection d’assurance. Cependant, cette condition pourrait nuire aux personnes aux prises avec des troubles mentaux en pénalisant les personnes qui suivent un traitement les tenant en santé. D’expliquer l’Association canadienne des compagnies d’assurances de personnes, les assureurs évaluent le risque d’une personne en fonction des facteurs comme la gravité de l’état de santé, son caractère chronique ou récurrent, le dossier de soins du médecin traitant et le temps écoulé depuis le plus récent incident ou épisode symptomatique.

Quand des distinctions sont établies dans ces secteurs relativement à un handicap, et qu’elles créent un préjudice, il peut s’agir de discrimination. Le Code pourrait prévoir des défenses et des exceptions dans ces cas, qu’il faudrait envisager. Les organisations doivent s’assurer que les risques sont évalués au cas par cas, sur la base de critères objectifs.

Engagement de la CODP :

E19. La CODP examinera davantage les politiques et processus relatifs à la suspension des permis de conduire, à la protection de l’enfance ou aux assurances, et consultera les intervenants et ministères gouvernementaux appropriés pour déterminer s’ils contreviennent au Code. Dans le cas de possibles violations du Code, la CODP utilisera les moyens prévus par son mandat pour régler les sources de préoccupations.

c) Aide sociale

Le système d’aide sociale est un système cruel qui laisse les clients croire qu’une fois qu’ils bénéficient d’un revenu « pour handicapé », leur vie se résumera à cela, à une vie de pauvreté et d’inutilité perpétuelles. En quoi est-ce une méthode saine économiquement parlant? En quoi le fait de sous-utiliser les ressources humaines est-il intelligent ou vaguement bon pour la prospérité globale de notre province ou de notre pays?

            – Mémoire écrit

Une grande partie de la consultation a porté sur l’expérience des bénéficiaires de l’aide sociale. On nous a fait part d’obstacles relatifs à la conception et à la prestation des programmes d’aide sociale qui portaient préjudice aux personnes ayant des handicaps psychosociaux. Comme l’indique la section sur le statut socioéconomique, le gouvernement de l’Ontario revoit actuellement ses programmes OT et POSPH dans le but d’y éliminer les obstacles et d’accroître les possibilités d’emploi des bénéficiaires.

Le processus de demande d’aide sociale (OT et POSPH) était une source de préoccupations pour les personnes consultées. En plus de la nature complexe des formulaires, de nombreuses personnes ont indiqué qu’il pouvait être très difficile de rassembler toute l’information requise dans les délais prévus, surtout lorsqu’on a des symptômes de handicap. Pour certaines personnes, cela peut entraîner la perte des prestations ou l’inadmissibilité au programme.

Nous avons appris que l’« énergie émotionnelle » requise pour évoluer au sein du système d’aide sociale, jumelée aux symptômes de santé mentale, était souvent trop considérable, et poussait certaines personnes à « abandonner » tout simplement. Ces personnes étaient ensuite incapables de se procurer des articles de première nécessité comme de la nourriture et de payer leur loyer ou leurs factures de services publics. D’autres personnes ont décrit comment le stress causé par le système avait eu des effets néfastes sur leur santé mentale. Un représentant du programme d’aide sociale a rapporté à la CODP que des efforts avaient été déployés pour accroître l’accessibilité du service en améliorant les lettres et brochures, et en accroissant la disponibilité des chargés de cas.

Il semble impossible de s’y retrouver au sein du système. [Après mon congé de l’hôpital] Je n’avais pas les pensées claires. Nous sommes laissés à nous-mêmes. Il y a un système, mais il est presque impossible d’y accéder.

      – Participant(e) à la table ronde de Toronto

On nous a aussi fait part de préoccupations quant aux types de prestations dont les gens ont besoin en raison de leur handicap, mais qui ne sont pas offerts par les programmes d’aide sociale. Des personnes ont indiqué que le POSPH ne couvrait pas certains frais médicaux additionnels liés au handicap, comme les coûts des régimes alimentaires spéciaux requis en raison d’un problème de santé mentale ou d’une dépendance. La CODP intervient dans une affaire en cours devant le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario pour contester certains aspects du programme de régime alimentaire spécial offert dans le cadre du POSPH (et d’OT). L’affaire pourrait entraîner l’élimination des prestations pour régime alimentaire spécial offertes aux personnes schizophrènes qui prennent certains types de médicaments.

Beaucoup de personnes ont rapporté que les fournisseurs de services ne tenaient pas compte de leurs besoins individuels en lien avec leur handicap. Par exemple, certains fournisseurs pouvaient fixer des rendez-vous à des heures ou une personne ne pouvait se présenter en raison de symptômes de son handicap. Selon des participants, les problèmes de mémoire et de concentration, et les difficultés à s’exprimer en raison d’un handicap, peuvent faire en sorte qu’il soit difficile de « défendre ses besoins » devant un chargé ou une chargée de cas, ce qui peut retarder la prestation des services. D’autres ont déclaré que les attitudes négatives à l’endroit des usagers de services étaient courantes et qu’elles avaient l’impression qu’on les traitait comme si elles « profitaient » du système.

Des conditions strictes ou des procédures complexes de réadmission aux programmes d’aide sociale peuvent créer des obstacles pour les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou d’autres handicaps épisodiques en compliquant l’accès à répétition au système. Dans le cas du RAFEO, le bureau des droits de la personne de l’Université de Guelph a fait remarquer que des étudiants doivent parfois abandonner leur session complète en raison d’un handicap, ce qui peut entraîner une restriction sur le plan du RAFEO. Les étudiants peuvent en appeler d’une telle restriction seulement une fois, ce qui ne convient pas dans le cas de problèmes de santé mentale ou  dépendances à nature imprévisible.

Des préoccupations ont également été soulevées par rapport à l’accès des personnes aux prises avec des dépendances au programme OT et au POSPH. Après la décision dans l’affaire Tranchemontagne, le gouvernement de l’Ontario a commencé à permettre aux personnes dont le seul handicap était une dépendance de participer au POSPH. Par contre, même lorsque le médecin détermine que la dépendance d’une personne constitue un handicap, l’organisme ARCH affirme que l’admissibilité au POSPH peut être difficile à obtenir et nécessiter l’appel d’un refus initial. D’autres participants se sont dits préoccupés du fait que les personnes ayant des dépendances font l’objet d’un suivi plus étroit que les autres bénéficiaires du programme OT et qu’elles risquent de perdre leurs prestations si une rechute les empêche de participer à leur programme de toxicomanie obligatoire[138].

Recommandation :

31. La Commission d’examen du système d’aide sociale de l’Ontario devrait se pencher sur l’inaccessibilité des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances au système d’aide sociale et veiller à ce que les politiques et pratiques en matière d’aide sociale n’aient pas d’effet néfaste sur les personnes protégées aux termes du Code, dont les personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances.

d) Soins de santé

Box: Selon l’article 25 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, les personnes handicapées ont le droit de jouir du meilleur état de santé possible sans discrimination fondée sur le handicap. Cela signifie, entre autres :

  • de fournir aux personnes handicapées des services de santé couvrant la même gamme et de la même qualité que ceux offerts aux autres personnes
  • de fournir aux personnes handicapées les services de santé dont celles-ci ont besoin en raison spécifiquement de leur handicap
  • d’exiger des professionnels de la santé qu’ils dispensent aux personnes handicapées des soins de la même qualité que ceux dispensés aux autres, notamment qu’ils obtiennent le consentement libre et éclairé des personnes handicapées concernées; à cette fin, les États Parties mènent des activités de formation et promulguent des règles déontologiques pour les secteurs public et privé de la santé de façon, entre autres, à sensibiliser les personnels aux droits de l’homme, à la dignité, à l’autonomie et aux besoins des personnes handicapées
  • d’empêcher tout refus discriminatoire de fournir des soins en raison d’un handicap[139]End of box

Soins de santé primaires

Les personnes handicapées ont le droit à des soins de santé aux termes des lois internationales sur les droits de la personne. Elles ont aussi le droit, aux termes du Code et de la CRDPH, de ne pas subir de discrimination en matière de soins de santé. Un grand nombre de personnes ont rédigé des mémoires sur leur vécu au sein du système de santé, y compris dans les salles des urgences ou auprès de médecins de famille et de professionnels des soins de santé, ou sur celui de connaissances ayant des troubles mentaux ou des dépendances.

Selon CAMH et l’ACSM – Ontario, les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances sont en général moins susceptibles de recevoir des soins de santé primaires ou d’avoir le même accès à l’hospitalisation que la population générale, ce qui constitue en soi un obstacle systémique[140]. Les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ont aussi rapporté devoir attendre longtemps avant d’obtenir de l’aide dans les salles des urgences parce qu’on ne juge pas leur situation « urgente » comparativement à celle des personnes ayant d’autres types de maux[141].

Le fait que les fournisseurs de services ne prennent pas au sérieux les symptômes physiques des gens s’ils savent que ceux-ci ont un problème de santé mentale ou une dépendance inquiète aussi considérablement. Cela peut mener à des erreurs de diagnostic, à des délais sur le plan du traitement, au traitement non approprié des symptômes physiques et à la non-évaluation du patient. Par conséquent, des participants ont rapporté avoir caché leurs troubles mentaux, médicaments ou dépendances à leur médecin par crainte qu’on ne prenne pas leurs symptômes sérieusement, ou qu’on leur refuse des services.

On nous a aussi dit qu’on soupçonnait souvent les gens d’être « en quête de drogues » lorsqu’ils cherchent à obtenir des soins médicaux pour des symptômes physiques graves (BIPEP)[142]. Une personne a raconté s’être rendue à l’hôpital en raison d’une douleur abdominale grave. Lorsque les médecins ont appris qu’elle suivait un traitement de substitution à la méthadone, ils l’ont laissée seule à attendre pendant 10 heures, même après qu’elle a perdu connaissance à cause de la douleur. Plus tard, les médecins ont déterminé qu’elle avait besoin d’une chirurgie intestinale. D’après le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques (BIPEP), la province a besoin de politiques et de procédures claires si elle ne veut pas que les préjugés associés aux troubles psychiques, y compris l’importance disproportionnée accordée à la sécurité individuelle et publique, prennent le dessus sur les problèmes non psychiques et créent des obstacles à l’obtention de soins primaires.

Un thème important de la consultation gravitait autour du fait que de nombreux médecins, y compris des généralistes, refusent de traiter des personnes ayant des handicaps psychosociaux, souvent parce qu’ils jugent que leur besoins sont « trop complexes ».

J’avais désespérément besoin d’un médecin, mais quand j’ai rempli le formulaire, elle m’a dit qu’elle n’acceptait pas de patients qui avaient une maladie mentale. J’ai dû la prier de m’accepter et promettre de venir uniquement une fois par année, pour subir un examen général et renouveler mon ordonnance de pilule contraceptive. Je vais la voir seulement une fois par année. Le reste du temps, je fréquente les cliniques sans rendez-vous et services d’urgence, et j’utilise télésanté.

– Participante au sondage

On nous a dit que certains médecins hésitaient à travailler auprès de personnes aux prises avec certains troubles mentaux ou des dépendances, et que les personnes qui avaient des troubles de l’alimentation, des troubles bipolaires ou un trouble de la personnalité limite étaient rejetées par des médecins généralistes et des professionnels de la santé mentale, y compris des psychiatres, en raison de leur handicap. Il semblerait également que certains médecins ne veulent pas accepter des patients avec des antécédents de dépendance en raison des stéréotypes négatifs associés aux personnes qui ont des dépendances. Les médecins peuvent aussi ne pas avoir la formation requise pour répondre à leurs besoins.

Le rapport Kirby et la consultation sur la santé mentale menée à l’échelle de la province par le ministère de la Santé et des Soins de longue durée soulèvent tous les deux des préoccupations relatives au refus de fournir des services. Les modèles de financement qui encouragent les médecins à voir rapidement des patients, surtout des patients en santé, peuvent contribuer à ce problème. À la suite de sa propre consultation sur la santé mentale, le Comité spécial de la santé mentale et des dépendances, formé de membres de tous les partis, a recommandé au MSSLD « d’envisager d’apporter d’autres changements au modèle de rémunération des médecins de famille pour mettre l’accent sur l’amélioration de l’accès aux soins primaires et sur l’amélioration des soins pour les personnes atteintes de problèmes de santé mentale et de dépendance »[143].

Dans sa politique sur l’admission de nouveaux patients, élaborée en consultation avec la CODP, l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario (OMCO) a indiqué qu’on devrait accepter les patients selon la méthode du « premier arrivé, premier servi ». La compétence clinique et l’étendue des problèmes sont des motifs de refus de patients. Ces motifs ne peuvent cependant pas servir à exclure de façon injuste les patients perçus comme ayant des besoins complexes en matière de santé ou comme étant « difficiles »[144].

Recommandations :

32. L’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario (OMCO) et le ministère de la Santé et des Soins de longue durée devraient consulter la CODP et des groupes de personnes handicapées pour accroître la conformité à la politique de l’OMCO régissant l’admission de nouveaux patients.

33. L’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario devrait revoir ses politiques et procédures régissant les plaintes et éliminer les obstacles qui peuvent rendre le dépôt de plaintes relatives aux pratiques professionnelles plus difficiles pour les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances.

34. L’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario, l’Ontario Medical Association, l’Association des hôpitaux de l’Ontario et le ministère de la Santé et des Soins de longue durée devraient sensibiliser les médecins et étudiants en médecine à leurs obligations aux termes du Code de ne pas refuser des patients sur la base d’un motif interdit par le Code.

Engagements de la CODP :

E20. La CODP sera à la disposition de l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario et du ministère de la Santé et des Soins de longue durée pour discuter du respect accru de la politique de l’OMCO relative à l’acceptation de nouveaux patients.

E21. Le cas échéant, la CODP mènera des enquêtes d’intérêt public, cherchera à intervenir dans le cadre d’affaires ou déposera des requêtes pour contester des cas de refus par des médecins de fournir des services à des personnes en raison de troubles mentaux ou de dépendances, ou prendra une combinaison de ces mesures, en conformité avec son mandat.

Soins de santé mentale

Certains participants à la consultation ont fait part d’expériences positives au sein du système de santé mentale, caractérisant celui-ci de « bouée de sauvetage » et les médecins et membres du personnel traitants d’accueillants, de respectueux et d’autonomisants. Cependant, beaucoup d’autres personnes ont relaté des expériences négatives, surtout au sein du système hospitalier, et fait part d’inquiétudes à propos de l’étiquetage des patients, de la surmédication, d’entraves à la liberté et de l’utilisation non appropriée de mesures de contention. Certains représentants d’établissements psychiatriques ont répliqué que l’examen des préoccupations soulevées à propos du système psychiatrique durant la consultation doit tenir compte des dispositions de la Loi sur la santé mentale et d’autres lois, qui permettent qu’on restreigne les droits de la personne dans certaines circonstances. En Ontario, les personnes ayant des troubles mentaux peuvent être hospitalisées contre leur gré si elles présentent un risque pour elles-mêmes ou autrui, si elles risquent de se blesser par inadvertance ou si leur état se détériore et qu’elles doivent être hospitalisées[145]. Certains fournisseurs de services ont qualifié de défi le fait de concilier, d’une part, les droits de la personne et, de l’autre, les risques éventuels pour la santé et la sécurité de la personne et de la collectivité.

Certaines personnes consultées se souciaient du fait qu’on avait refusé d’hospitaliser contre leur gré des membres de leur famille parce qu’ils ne satisfaisaient pas aux critères de la Loi sur la santé mentale. D’autres ont indiqué qu’on refusait de leur fournir des renseignements médicaux sur des membres de leur famille sans le consentement de la personne. Le ministère de la Santé et des Soins de longue durée a accepté de former un groupe de travail pour déterminer s’il y a lieu de modifier les lois actuelles en matière de santé mentale et de vie privée pour tenir compte de ces préoccupations.

  • Préoccupations internationales à l’endroit des établissements de santé mentale

En Ontario, les lois et politiques régissant les établissements incluent plusieurs mesures de protection contre le mauvais traitement des personnes aux prises avec des troubles psychiques et des dépendances. Ces mesures comprennent des processus d’appel de l’hospitalisation forcée et d’autres situations ayant trait au consentement et à la capacité, la prestation de conseils en matière de droits et la défense des droits fondamentaux, des mécanismes de dépôt de plaintes et l’élaboration d’une charte des droits des patients.

Selon ce qu’on nous a dit, toutefois, des atteintes aux droits de la personne ont encore lieu. Que ces préoccupations représentent ou non un traitement inéquitable des personnes en raison d’un handicap ou d’un autre motif de discrimination interdit aux termes du Code, elles pourraient constituer une atteinte aux droits plus généraux des personnes à l’autonomie, à la liberté et à l’intégrité physique ou mentale, conformément à la Charte et au droit international.

La vulnérabilité des patients handicapés des établissements de santé mentale et autres, et le potentiel de violation de leurs droits fondamentaux sont reconnus sur la scène internationale[146]. En 2008, le rapport intérimaire du Rapporteur spécial du Conseil des droits de l’homme sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, M. Manfred Nowak, faisait état d’outrages dont sont victimes des personnes handicapées partout dans le monde, dans des milieux ségrégés comme des prisons, des centres de soins sociaux, des orphelinats et des établissements de santé mentale[147].

Le Rapporteur spécial a émis des craintes par rapport à l’utilisation prolongée de mesures de contention et d’isolement des personnes handicapées partout dans le monde, ce qui peut constituer de la torture ou des mauvais traitements[148]. Il a aussi affirmé que les types invasifs d’interventions médicales, comme les électrochocs, doivent être uniquement administrés avec le consentement libre et éclairé, et que l’administration de force de médicaments psychiatriques, en particulier de neuroleptiques (souvent utilisés pour le traitement de la psychose), doit être surveillée de près. Sans consentement libre et éclairé, les souffrances infligées par ce type d’interventions et leurs effets sur la santé de la personne peuvent constituer une forme de torture ou de mauvais traitement, selon les circonstances du cas[149]. De poursuivre le Rapporteur spécial, les traitements et l’isolement forcés sont contraires aux dispositions de la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CRDPH), qui vient s’ajouter à d’autres conventions interdisant la torture.

  • Droit à la liberté et à la sécurité de la personne et critères d’admission forcée

La CRDPH énonce les droits et obligations en lien avec les questions abordées durant la consultation de la CODP. La CRDPH peut offrir des conseils sur la façon d’élaborer les mesures législatives, politiques et programmes du secteur de la santé mentale en vue d’assurer le traitement équitable des personnes handicapées. L’article 14 (Liberté et sécurité de la personne) garantit le droit des personnes de ne pas être privées de leur liberté de façon illégale ou arbitraire. Il veille en outre à ce que toute privation de liberté soit conforme à la loi et, à ce qu’en aucun cas, l’existence d’un handicap ne justifie une privation de liberté[150]. Le rapport annuel de 2009 du Haut-commissaire des droits de l’homme des Nations Unies donne cette interprétation de l’article 14 :  

Les mesures législatives autorisant l’internement des personnes handicapées en raison de leur handicap sans obtenir leur consentement libre et éclairé doivent être abolies. Cela doit inclure l’annulation des dispositions autorisant l’internement sans consentement libre et éclairé des personnes handicapées à des fins de soins et de traitement, ainsi que des dispositions autorisant la détention préventive de ces personnes au cas où elles poseraient un risque pour elles-mêmes ou autrui, ou pour tout autre motif du genre, dans tous les cas ou les motifs en lien avec les soins, le traitement ou la sécurité publique sont associés aux termes de la loi à une maladie mentale manifeste ou diagnostiquée.

Cela ne doit pas être interprété de manière à ce que les personnes handicapées ne puissent, aux termes de la loi, faire l’objet d’une détention préventive ou d’une détention à des fins de soins ou de traitement, mais plutôt de manière à ce que les motifs à l’origine de l’atteinte à la liberté soient dissociés du handicap et définis de façon neutre, afin de s’appliquer équitablement à toutes et tous[151].

Compte tenu des commentaires que nous avons reçus, des dispositions de l’article 14 et d’autres articles de la CRDPH, la province doit examiner de plus près ses mesures législatives régissant la santé mentale. Des organisations comme la Commission du droit de l’Ontario et la Commission de la santé mentale du Canada élaborent actuellement des outils pour évaluer les mesures législatives, les politiques et les normes de la province dans le but de les aligner plus étroitement sur les obligations du Canada aux termes des lois sur les droits de la personne du pays et de la CRDPH[152].

  • Droits en matière de capacité juridique et modèles de prise de décisions assistée

Les droits garantis aux termes de l’article 12 de la CRDPH doivent également être examinés attentivement étant donné leur lien avec les questions de prise de décisions assistée des personnes ayant des handicaps psychosociaux et de détermination de la capacité de prendre certaines décisions. L’article 12 reconnaît que « les personnes handicapées jouissent de la capacité juridique dans tous les domaines sur la base de l’égalité avec les autres ». Selon le Haut-commissaire des droits de l’homme des Nations Unies, cette disposition n’inclut aucune exception[153]. Aux termes de l’article 12, les États Parties doivent prendre des mesures appropriées pour donner aux personnes handicapées accès à l’accompagnement dont elles peuvent avoir besoin pour exercer leur capacité juridique. Le Haut-commissaire des droits de l’homme des Nations Unies soutient que la restriction de l’exercice de la capacité juridique au motif d’une maladie mentale ou d’un trouble psychosocial manifeste ou réel peut constituer une violation des obligations énoncées à l’article 12[154].

Le Canada a émis une déclaration et des réserves relativement à l’article 12, indiquant qu’il se réservait le droit de continuer d’utiliser des mesures de représentation relatives à l’exercice de la capacité juridique, sous réserve de garanties appropriées et effectives[155]. Généralement, les systèmes de tutelle du Canada et de l’Ontario prévoient la désignation d’un mandataire spécial pour décider au nom d’une personne jugée incapable de prendre des décisions dans une sphère particulière, comme ses finances ou ses soins personnels[156].

Néanmoins, l’article 12 exige que l’on prenne des mesures appropriées pour donner aux personnes handicapées accès à l’accompagnement dont elles peuvent avoir besoin pour exercer leur capacité juridique. Par exemple, cela signifie qu’une personne doit avoir accès à un réseau de personnes pouvant l’aider. Un rapport de la Commission de la santé mentale du Canada recommande de modifier les lois de façon à limiter le recours aux mandataires spéciaux en établissant que ces mandataires doivent uniquement servir de dernier recours[157]. Pour assurer une équité substantive réelle, certains penseurs et groupes de personnes handicapées soutiennent qu’on doit inclure à l’obligation légale d’accommodement le fait de fournir les soutiens requis, dans la mesure du possible, pour permettre aux personne de prendre leurs propres décisions[158].

Recommandation :

35. Compte tenu des mesures de soutien requises aux termes de la Convention relative aux droits des personnes handicapées et du libellé des articles 12 et 14, le gouvernement de l’Ontario devrait examiner et évaluer toutes les lois, politiques et normes relatives à la santé mentale en consultation avec des groupes de personnes handicapées et autres intervenants, de façon à assurer le traitement équitable des personnes ayant des troubles psychiques ou des dépendances. Cet examen devrait s’étendre au système de tutelle de l’Ontario et à ses critères d’admission forcée.

  • Questions de dignité et d’autonomie

Les questions de libre-choix et de respect de la dignité occupaient une place importante dans l’expérience des gens au sein du système de santé mentale et des milieux psychiatriques médicolégaux. Certaines personnes consultées ont rapporté se sentir déshumanisées et « mises à l’écart », et ne pas avoir l’impression que leurs préoccupations ont été abordées durant leur séjour à l’hôpital. Nous avons appris que la relation entre le personnel des milieux hospitaliers et les patients est souvent conflictuelle. Certaines personnes ont déclaré avoir fait l’objet de fouilles à nu devant des membres du personnel masculins et féminins. Dans des cas extrêmes, des personnes ont rapporté avoir fait l’objet de harcèlement ou de mauvais traitements physiques ou sexuels de la part de membres de personnel.

Les médecins cherchent uniquement à savoir ce qui « ne va pas » […] À cause de leur formation, ils s’intéressent uniquement aux états pathologiques et considèrent la plupart des problèmes comme des pathologies nécessitant l’administration de médicaments. Le patient doit ensuite suivre à la lettre le traitement médicamenteux inadéquat prescrit. Je pense qu’il est discriminatoire de ne s’intéresser qu’aux pathologies, puisque cela part du principe que toutes les personnes qui voient un psychiatre ont besoin de médicaments et de supervision, et qu’elles sont « moins capables » que les autres. Dès le départ, le modèle de traitement repose sur une analyse erronée.

            – Participant(e) au sondage

Les gens décrivent avoir été traités comme s’ils étaient moins intelligents et moins capables de prendre des décisions que les autres. Ils racontent avoir été abordés de façon condescendante et avoir été écartés des décisions concernant leurs soins médicaux, même lorsqu’ils étaient capables de participer à la décision. On nous a aussi fait part des préoccupations des gens à propos des choix de traitements thérapeutiques offerts au sein du système de santé mentale. Même si certaines personnes ont indiqué avoir ressenti des effets positifs en prenant des médicaments, d’autres se sont dites préoccupées par certaines méthodes de traitement, dont l’administration de médicaments antipsychotiques et d’électrochocs, particulièrement quand ces méthodes ont des effets négatifs néfastes. Les gens ont aussi déclaré avoir eu l’impression de ne pas avoir la possibilité de suivre un traitement de médecine douce, non axé sur la prise de médicaments.

Le système de « privilèges » constitue un autre thème de la consultation. Au sein des établissements, des libertés et responsabilités accrues sont données à certaines personnes à des fins de renforcement de comportements souhaités. Bien qu’il s’agisse d’une pratique courante au sein d’établissements de santé mentale et d’établissements psychiatriques médicolégaux, des personnes et des organisations se souciaient du fait que les privilèges puissent être arbitraires, appliqués de façon non uniforme selon le membre du personnel et utilisés de façon à punir certains patients pour ne pas avoir suivi les règles ou le traitement prévu. Elles se préoccupaient aussi du fait que le système de privilèges puisse faire entrave aux droits des gens de faire leur propre choix, ce qui mine leur dignité.

Les personnes qui interviennent au nom des personnes aux prises avec des troubles psychiques ou des dépendances craignaient que des personnes soient punies pour des infractions mineures et qu’on utilise la sécurité comme justification même quand cela n’est pas légitime. On nous a dit que dans certains milieux, le fait d’aller à l’extérieur prendre l’air, de porter ses propres vêtements ou d’utiliser le téléphone cellulaire pour parler à autrui sont des privilèges devant être acquis et pouvant être perdus. L’accès des patients à ces privilèges ou à d’autres peut dépendre du nombre d’employés présents.

Le système de santé mentale semble accorder une valeur considérable à l’« obéissance » des patients. En raison du déséquilibre de pouvoir entre le personnel et les patients, ces derniers peuvent ne pas être enclins à poser des questions à propos de leurs soins, à protester contre des traitements inadéquats ou à chercher à obtenir des conseils, le cas échéant. Les déséquilibres de pouvoir dissuadent aussi les gens de déposer des plaintes relatives à des motifs de discrimination interdits par le Code, ou à faire valoir leurs droits d’autres façons. La culture d’une organisation peut être empreinte de telles attentes en matière d’obéissance. Dans le rapport Kirby, le Comité sénatorial a affirmé qu’en général :

les étiquettes péjoratives de type « non obéissant », « manipulatrice », « difficile à diriger », « difficile à aider », « recherche l’attention » ou « intrusif » (pour un membre de la famille) ont discrédité les comportements d’affirmation de soi et réduit davantage les gens au silence[159].

Les résidents des établissements de santé mentale ont constaté qu’ils hésitent à se plaindre de mauvais traitements de peur de perdre leurs privilèges ou de ne pas être pris au sérieux. Par exemple, une participante a dit que d’autres femmes et elle ont été victimes de harcèlement sexuel durant des séjours en établissement, mais que leurs plaintes avaient été perçues comme « le fruit de leur maladie » et écartées.

Les organisations où ce genre de climat s’est installé peuvent devoir apporter des modifications pour assurer en tout temps le traitement respectueux des gens. Les propos des participants illustrent l’importance de doter les hôpitaux de personnes qui ont de l’expertise en droits de la personne et peuvent faire en sorte que les patients obtiennent le soutien approprié, des conseils sur leurs droits aux termes de la loi et l’encadrement requis pour déposer des plaintes relatives aux droits de la personne.

  • Traitement et consentement éclairé

Dans Fleming v. Reid, la Cour d’appel de l’Ontario a affirmé le droit d’une personne compétente de déterminer ce qui doit être fait à son propre corps et de vivre à l’abri des traitements médicaux non consensuels. De plus, selon la cour, si une personne perd la capacité de prendre ses propres décisions, les désirs en matière de traitement qu’elle a exprimés lorsqu’elle était compétente doivent être respectés. La cour a comparé les patients des établissements psychiatriques aux patients ayant des maladies physiques, et indiqué qu’ils avaient tous les mêmes droits de refuser de suivre les conseils ou médicaments offerts par leur médecin. L’hospitalisation forcée ne rend pas automatiquement la personne incompétente, ou incapable de prendre des décisions médicales. De déterminer la cour, « les personnes ayant une maladie mentale ne doivent pas être stigmatisées en raison de la nature de leur maladie ou handicap. Elles ne devraient pas non plus être traitées comme des personnes de moindre statut ou dignité. Leur droit à l’autonomie et à l’autodétermination n’est pas moins significatif; il commande la même protection que celui des personnes compétentes souffrant de maladies physiques[160]. »

Bon nombre de personnes consultées et d’intervenants au nom des personnes ayant des troubles mentaux et des dépendances ont dit avoir subi des traitements contre leur gré durant des séjours en milieu hospitalier pour traiter des troubles psychiques, ou connaître des personnes ayant subi de tels traitements. Tout le monde a le droit de refuser de consentir à un traitement, à moins d’avoir été jugé inapte sur le plan mental à prendre des décisions en matière de traitement[161]. L’Empowerment Council a fait remarquer que de nombreuses personnes en milieu hospitalier ne connaissent pas leurs droits en matière de consentement au traitement, malgré le fait qu’ils sont énoncés dans Loi sur le consentement aux soins de santé.

Certaines personnes ont rapporté ne pas comprendre les effets secondaires de la médication qu’elles prenaient, ou n’avoir pas été mises au courant de ces effets. D’autres ont dit n’avoir pas été avisées officiellement de leur diagnostic par un professionnel médical ou informées du fait qu’elles étaient visées par une Formule 1 (détention forcée à l’hôpital pendant une période maximale de 72 heures à des fins d’évaluation psychiatrique). Le cas de personnes qui sont admises de leur gré à l’hôpital mais placées dans des unités fermées causerait également des préoccupations. De plus, des gens nous ont dit avoir été contraints de prendre des médicaments, sous peine de ne pas obtenir leur congé s’ils refusaient. Le traitement inéquitable des personnes handicapées en matière de services et l’établissement d’un lien entre le consentement au traitement et l’obtention de services soulèvent à la fois des questions sur la capacité des personnes de refuser des traitements et des préoccupations relatives au respect du Code.

Selon l’organisation ACE, les résidents âgés des foyers de soins de longue durée ou leur mandataire spécial (si la personne âgée est jugée inapte) sont souvent maintenus dans l’ignorance relativement à leurs droits de refuser de consentir à un traitement. ACE dit recevoir régulièrement des plaintes de mandataires qui se soucient du fait qu’on administre à un résident âgé inapte d’un foyer de soins de longue durée des médicaments sans leur consentement. Pour sensibiliser la population aux options s’offrant aux gens après une déclaration d’inaptitude de manière à assurer la sécurité des personnes, ACE recommande de renforcer la Loi sur le consentement aux soins de santé en inscrivant dans la réglementation le devoir des intervenants en santé de fournir des conseils spécifiques en matière de droits, dont l’obligation d’aviser la personne d’une déclaration d’inaptitude et de fournir de l’information et de l’assistance relatives à l’interjection d’appels devant la Commission du consentement et de la capacité.

  • Ordonnances de traitement en milieu communautaire (OTMC) et Équipes de traitement communautaire dynamiques (ETCD) :

Les OTMC et les plans des ETCD ont également soulevé des préoccupations. Les ETCD supervisent le traitement des personnes au sein de la collectivité, tandis que les plans des ETCD pourraient servir à orienter les personnes vers des services autres que ceux du système de justice pénale. On nous a indiqué que ces mesures pouvaient réserver un traitement restrictif aux personnes aux prises avec des troubles psychiques sur la base de leur handicap, sans veiller à ce que les restrictions imposées aient un lien légitime avec l’objectif du programme ou les circonstances individuelles des gens. Les OTMC peuvent imposer une variété de conditions, comme des couvre-feux, l’interdiction de communiquer avec des personnes d’un certain âge, des restrictions relatives à l’utilisation des transports collectifs ou à la location immobilière. Comme l’a indiqué le BIPEP, les restrictions associées aux plans des ETCD peuvent n’avoir rien à voir avec l’infraction commise initialement. Elles peuvent avoir été imposées pour respecter des conditions d’assurance, plutôt que par suite de l’évaluation d’un risque réel.

Pour certaines personnes, les OTMC représentaient généralement des mécanismes coercitifs visant à pousser les gens à entreprendre ou à observer un traitement. Un examen de l’efficacité des OTMC mené en 2005 a donné des résultats mitigés. Certaines personnes ont décrit les effets positifs du fait d’avoir une OTMC, y compris la stabilité requise pour éviter l’admission en milieu hospitalier et la capacité de réintégrer la collectivité. D’autres, par contre, étaient d’avis que les inconvénients associés aux OTMC, dont la perte d’autonomie et de contrôle personnel, étaient supérieurs aux avantages de telles mesures[162].

  •  Contention

Une femme a décrit son séjour à l’hôpital à la suite d’une surdose intentionnelle de la façon suivante :

[…] Après l’évaluation [psychiatrique], je me suis mise à pleurer en silence et la psychiatre a demandé 4 mg d’Ativan [médicament contre l’anxiété]. Je n’aime pas prendre des médicaments à moins de connaître exactement ce qu’ils contiennent, mais la psychiatre ne voulait pas me décrire les effets secondaires de ce médicament ou me dire comment il me ferait sentir. Elle m’a dit que je devais le prendre parce que j’étais trop surstimulée et qu’elle devait assurer la sécurité des autres patients. Ça n’avait pas de sens parce que j’étais couchée en silence (mis à part quelques reniflements occasionnels) dans le lit et n’avais démontré aucune violence (verbale ou physique) depuis mon arrivée […] J’ai dit à l’infirmière que je ne voulais pas prendre les 4 mg d’Ativan. Elle m’a répondu que l’alternative était de m’attacher au lit à l’aide de dispositifs de contention en cuir. Je n’ai pas besoin de vous dire que j’ai choisi la contention chimique.

      – Participante au sondage

Selon l’Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario, la contention, qu’elle soit appliquée par des moyens physiques, environnementaux ou chimiques, est un moyen servant à maîtriser les mouvements ou le comportement d’une personne ou à immobiliser une partie de son corps. Les instruments de contention physique restreignent les mouvements d’un client. La contention environnementale vise à limiter la mobilité du client (comme une unité fermée, l’isolement ou une aire d’isolation). Par contention chimique s’entend tous les médicaments psychotropes visant, non pas à traiter une maladie, mais à inhiber intentionnellement un comportement ou un mouvement précis[163].

On nous a fait savoir que les établissements de la province n’appliquent pas de politiques et de pratiques uniformes en matière de contention des personnes aux prises avec des troubles psychiques[164]. Selon les personnes qui interviennent au nom des patients et les représentants du secteur hospitalier, la province supervise peu le recours à la contention en Ontario. Des fournisseurs de services comme Ontario Shores ont laissé entendre que la promotion de directives cohérentes et appropriées concernant l’isolement et la contention devrait constituer un objectif dans ce secteur.

À l’heure actuelle, l’utilisation de dispositifs de contention est permis dans certaines circonstances, comme lorsqu’il est nécessaire d’éviter qu’une personne n’inflige des blessures graves à elle-même ou autrui. Bon nombre de participants à la consultation ont exprimé de sérieuses préoccupations à propos de leurs expériences passées de contention dans un milieu de soins de santé en raison d’un problème de santé mentale, ou de l’expérience d’autres personnes, et étaient d’avis que des dispositifs de contention avaient été utilisés de façon inappropriée. D’autres nous ont fait part de cas de personnes immobilisées à l’aide de dispositifs de contention pendant des heures ou des jours, dans certains cas sans même que des membres du personnel viennent s’assurer que tout allait. Dans un cas, une personne a décrit comment son fils n’avait pas pu aller à la salle de bains après avoir été immobilisé par contention pendant huit heures.

Des participants nous ont également dit que la contention ou l’isolement sont parfois utilisés pour composer avec des patients perçus comme peu disposés à suivre les consignes ou traitements du personnel. D’autres ont indiqué que la contention était utilisée comme solution de rechange au manque de personnel (p. ex. auprès des patients âgés atteints d’Alzheimer dans des foyers de soins de longue durée)[165]. On nous a dit que l’usage de contention physique avait des effets préjudiciables particuliers sur les personnes malentendantes, qui ne peuvent plus communiquer à l’aide du langage des signes une fois immobilisées.

Des rapports et des enquêtes menées précédemment ont aussi soulevé des préoccupations à propos de l’usage de contention. L’Institut canadien d’information sur la santé a publié un rapport sur l’usage de contention auprès de personnes admises dans une unité psychiatrique entre 2006 et 2007, et 2009 et 2010. Le rapport révèle que près d’une personne sur quatre avait fait l’objet d’une forme de contention quelconque[166]. En 2005, Jeffrey James est décédé à l’hôpital après avoir fait l’objet de contention physique et chimique, et isolé pendant plusieurs jours. À la suite de l’enquête sur les circonstances de sa mort, le coroner de l’Ontario a recommandé que tous les hôpitaux psychiatriques de la province aspirent à fournir des soins libres de contention et prévoient la participation de davantage de patients et d’intervenants au nom des patients à la gestion des facteurs de risque avant le recours à la contention.

Également par suite de l’enquête, l’Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario a élaboré des meilleures pratiques cliniques en matière de contention[167]. Selon l’OIIO, « il existe trop peu d’éléments de preuve à l’appui de l’usage de contention, y compris l’isolement, à des fins de gestion à court terme des comportements perturbés ou agressifs en milieu psychiatrique pour adultes ». Le guide appuie le recours à la contention uniquement après que toutes les méthodes de désamorçage de la situation ont été essayées, en vain[168].

Les pratiques et politiques de contention peuvent contrevenir au Code lorsqu’elles ne sont pas fondées sur des risques réels en matière de santé et de sécurité, mais sur des stéréotypes liés à un motif de discrimination interdit par le Code, ou lorsqu’elles visent de façon disproportionnée les membres des groupes protégés aux termes du Code et ne sont pas légitimes. Par exemple, si un homme d’origine afro-canadienne qui a un trouble psychique est retenu par contention sur la base d’une perception stéréotypée de sa race et de son handicap, au lieu de risques imminents pour la santé et la sécurité, l’usage de contention pourrait représenter une atteinte à ses droits aux termes du Code. L’usage de contention comme moyen de dernier recours après avoir tenté d’autres mesures de désamorçage de la situation, l’application des mesures appropriées d’évaluation du risque et la mise en place de moyens de protection et de surveillance pourraient éviter la violation des droits de la personne.

Recommandations :

36. Le gouvernement de l’Ontario devrait mettre en œuvre des règles provinciales et des mécanismes de surveillance pour assurer le recours uniforme à la contention auprès des personnes aux prises avec des troubles mentaux ou dépendances, avec pour objectif d’utiliser la contention en dernier recours seulement.

37. Le Bureau du coroner en chef de l’Ontario devrait mener une enquête dès qu’un patient meurt dans un hôpital ou établissement psychiatrique pendant qu’il faisait l’objet d’une contention chimique ou environnementale (isolement).

  • Protection des droits de la personne au sein du système psychiatrique

Des représentants d’hôpitaux et d’établissements de santé mentale, y compris l’OHA, ont indiqué que les attitudes à l’égard des personnes aux prises avec des troubles mentaux avaient connu un « virage fondamental » au sein du système psychiatrique. Par exemple, des organisations ont dit qu’elles tiennent maintenant compte de la philosophie du rétablissement, participent à l’élaboration de chartes des droits des patients, et financent des conseils composés de patients et de familles et capables d’intervenir au nom de personnes dont les droits ont été violés. Des fournisseurs de services ont évoqué certaines lois comme la Loi de 2010 sur l’excellence des soins pour tous, qui fait la promotion de soins « axés sur le client » et exige que l’on obtienne les commentaires des récipiendaires de services sous forme de sondages sur la satisfaction des clients, de façon à évaluer et à améliorer les soins. Certains hôpitaux ont rapporté avoir élaboré une série de politiques et de séances de formation qui favorisent le respect des droits (Ontario Shores). Enfin, l’OMCO a élaboré plusieurs politiques et procédures, y compris une procédure de traitement des plaintes, qui prennent en compte les responsabilités professionnelles et obligations en matière de droits des patients.

Malgré ces développements positifs, on nous a dit qu’il était extrêmement difficile de faire clairement valoir ou de connaître ses droits au sein du système psychiatrique. Pour que des changements systémiques soient apportés au sein du système, les personnes consultées étaient d’avis qu’il fallait contester les attitudes négatives, particulièrement dans les facultés médicales, en faisant davantage de sensibilisation. Parmi les suggestions sur la façon d’accroître le respect des politiques et procédures figuraient :

  • surveiller la satisfaction des clients et évaluer les inégalités dont pourraient faire l’objet les membres de groupes protégés aux termes du Code
  • faire le suivi des efforts déployés par les hôpitaux pour mettre en œuvre les chartes des droits des patients
  • appuyer la participation de défenseurs des droits des clients
  • appuyer davantage l’entraide au sein du système de santé mentale
  • veiller à ce que les usagers des services soient représentés dans tous les aspects de la prise de décisions, du conseil d’administration de l’hôpital aux services de première ligne
  • faire du respect des politiques et pratiques de droits de la personne une exigence de l’agrément des hôpitaux et des évaluations du personnel.

Selon l’Empowerment Council, le respect des droits des personnes aux prises avec des troubles psychiques et des dépendances devrait être mesuré au moyen d’un mécanisme intégré d’évaluation et de déclaration. Dans l’ensemble, les représentants des hôpitaux et du secteur médical appuyaient la collecte de données additionnelles relatives aux motifs de discrimination interdits par le Code à des fins d’évaluation des inégalités sur le plan des traitements.

Recommandations :

38. Tous les hôpitaux devraient passer en revue et surveiller le système de privilèges en collaboration avec des groupes de personnes handicapées et le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques, afin de veiller à ce que les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale soient traitées équitablement et avec dignité en ce qui a trait aux motifs prévus dans le Code, et qu’aucune autre violation des droits de la personne ne survienne.

39. Les hôpitaux abritant des unités psychiatriques devraient déterminer comment recueillir des données relatives aux motifs prévus dans le Code si des membres des groupes protégés aux termes du Code sont traités différemment que les autres patients en matière d’isolement et de contention, à la suite de leur décès ou en ce qui a trait à d’autres questions de santé pertinentes touchant les personnes ayant des problèmes de santé mentale, de concert avec la CODP, le ministère de la Santé et des Soins de longue durée, le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques, des groupes d’usagers/de survivants et d’autres intervenants appropriés. Le guide de la CODP, Comptez-moi! Collecte de données relatives aux droits de la personne, peut être utile à ce chapitre. Les mesures de collecte de données doivent respecter la dignité des gens et protéger le caractère privé de leurs renseignements.

40. Comme l’exige la LAPHO, tous les hôpitaux devraient élaborer des politiques en matière de droits de la personne et d’accommodement, et des procédures de dépôt de plaintes régissant l’offre de services aux personnes ayant des handicaps psychosociaux et autres membres de groupes protégés aux termes du Code, et l’embauche de ces personnes.

41. Les hôpitaux devraient régulièrement promouvoir les politiques sur les droits de la personne et offrir au personnel et aux patients une formation sur ces politiques de façon à ce que tout le monde comprenne ses droits et responsabilités.

42. Les hôpitaux devraient collaborer avec les patients, les groupes de patients et le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques afin de cerner et d’éliminer les obstacles au dépôt de plaintes internes en milieu hospitalier.

43. Le gouvernement de l’Ontario et tous les hôpitaux abritant des unités de santé mentale devraient créer un système de protection du citoyen indépendant qui peut recevoir les plaintes relatives à de la discrimination ou autres questions plus générales de droits fondamentaux des personnes évoluant au sein du système psychiatrique, faire enquête sur ces plaintes et émettre des conclusions.

44. Les hôpitaux devraient faire en sorte qu’aucune personne compétente ne soit forcée de suivre un traitement psychiatrique, conformément à la Loi sur le consentement aux soins de santé et à la CRDPH.

Engagements de la CODP :

E22. La CODP invitera un établissement psychiatrique provincial et d’autres partenaires possédant de l’expertise en matière de droits de la personne en lien avec la santé mentale, y compris des organisations d’usagers/survivants à entreprendre un processus de changement organisationnel d’envergure visant à aborder les questions de droits de la personne soulevées durant la prestation de services aux personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances et membres d’autres groupes protégés aux termes du Code. Entre autres, un tel processus pourrait inclure un examen des politiques et pratiques internes de façon à cerner et à éliminer tout obstacle discriminatoire.

E23. La CODP collaborera avec les hôpitaux, le MSSLD, des groupes d’usagers/de survivants et d’autres intervenants appropriés pour déterminer comment recueillir des données en lien avec les droits de la personne de façon à mesurer les disparités entre les groupes protégés aux termes du Code en ce qui a trait à l’isolement, à l’usage de contention et à d’autres questions de santé pertinentes. Les mesures de collecte de données adoptées doivent respecter la dignité des gens et protéger le caractère privé de leurs renseignements.

e) Système de justice pénale

Services policiers

De nombreuses personnes et organisations ont commenté le rôle des services de police lorsqu’il s’agit d’intervenir auprès des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances. D’après le Comité provincial de coordination des services à la personne et des services juridiques (CSPSJ), plus de ressources communautaires doivent être mises en place dans les régions urbaines et rurales pour veiller à ce que les services de police ne soient pas, par défaut, les services chargés d’intervenir auprès des personnes ayant des troubles mentaux qui sont en situation de crise. En 2011, l’Association des chefs de police de l’Ontario a adopté une résolution appuyant la réduction de l’importance accordée au rôle des services de police dans les cas de santé mentale et de dépendances parce que les professionnels de la santé locaux sont les plus aptes à aider les personnes touchées[169]. Selon un représentant des services de police, le fait que des agents de police interviennent auprès des personnes ayant des troubles mentaux renforce le stéréotype selon lequel ces personnes représentent un danger pour autrui.

D’autres participants à la consultation ont déclaré que les agents de police avec lesquels ils avaient eu des rapports leur avaient fourni des services inadéquats ou avaient agi envers eux de façon inappropriée, en raison de leur handicap. Par exemple, de nombreux usagers/survivants ont fait remarquer que les policiers ont tendance à faire fi d’allégations ou à ne pas prendre de mesures appropriées s’ils savent que l’auteur de ces allégations a un problème de santé mentale.

S’ils savent que vous avez une maladie mentale, les [services de police] font fi de ce que vous dites. Je ne les appelle plus pour obtenir de l’assistance (j’habite dans un très mauvais quartier). Je garde des bâtons de baseball à la porte pour nous protéger, mon fils et moi.

            – Participant(e) au sondage

De plus, on nous a dit que les services de police n’étaient pas adéquatement formés pour désamorcer des situations de crise en lien avec la santé mentale. Comme l’a indiqué la Metro Toronto Chinese and Southeast Asian Legal Clinic (MTCSALC), depuis qu’Edmond Yu, une personne aux prises avec un problème de santé mentale, a été abattu par balle en 1997, « les pratiques policières à cet égard ont peu changé. Les rapports de harcèlement policier, l’usage de force excessive et l’interpellation démesurée des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale restent inchangés. » L’ACSM – Ontario a dit que les personnes aux prises avec une maladie mentale sont plus susceptibles que les autres d’être interpellées ou arrêtées pour des infractions mineures comme l’« accès non autorisé » ou l’« inconduite », en ajoutant que « le nombre de personnes atteintes de troubles mentaux qui ont des démêlés avec le système judiciaire augmente de 10 p. 100 par année, malgré que le nombre d’interaction jugées violentes soit en déclin[170]. »

De nombreuses personnes ont soulevé des inquiétudes à propos de l’intervention policière, particulièrement de l’usage de force, auprès de personnes en situation de crise qui doivent être transportées à l’hôpital aux termes de la Loi sur la santé mentale [171]. En mai 2012, après que plusieurs personnes aux prises avec des troubles mentaux ont été tuées par balles par des agents de police, le ministère de la Sécurité communautaire et des Services correctionnels a annoncé la tenue d’une enquête gouvernementale interne sur la façon dont les services de police réagissaient aux situations de crise des personnes aux prises avec des troubles mentaux[172].

Quand j’étais malade et que j’avais besoin d’être hospitalisé, la police qui a répondu à l’appel au 911 m’a traité d’une façon que je qualifierais de brutale. J’étais malade et pas en train de commettre un acte criminel. En tant que personne malade, j’aurais dû être transportée en ambulance, par du personnel médical, et non menottée et conduite en autopatrouille.

      – Participant(e) au sondage

J’ai appelé les services de police pour qu’ils viennent chercher mon fils et l’amener à l’hôpital (j’avais une ordonnance de la cour) […] Ils sont arrivés avec des pistolets Taser et m’ont dit qu’ils les utiliseraient au besoin […] Que pensez-vous qu’il se passe quand quatre ou cinq agents de police se présentent avec un pistolet Taser à la main pour venir chercher une personne ayant une maladie mentale (qui a très peur)?

      – Participant(e) au sondage

L’ACSM – Ontario se préoccupait de la tendance qu’ont les services de police d’utiliser des pistolets Taser (armes à impulsion) sur des personnes vivant un épisode de trouble mental ou en situation de détresse émotive. En plus de faire appel à des équipes d’intervention d’urgence pour aborder la situation de façon appropriée, elle recommande de faire en sorte que les services de police de l’Ontario limitent leur usage des pistolets Taser aux situations où la seule autre option constitue l’utilisation de force létale, et qu’ils surveillent et rendent publics les cas d’utilisation de ces pistolets et les résultats obtenus. De plus, l’ACSM – Ontario demande la conduite de recherches indépendantes sur la sécurité associée à l’utilisation des pistolets Taser, y compris les effets de ces armes sur les personnes vivant un épisode de trouble mental[173].

De nombreuses personnes consultées ont apporté leur appui à la formation d’équipes d’intervention d’urgence. Plusieurs services de police partout en Ontario collaborent avec des organismes communautaires pour mettre ces équipes sur pied, dont les membres interviennent avec les agents de police dans des cas d’urgences d’ordre psychiatrique afin de désamorcer la situation. Le York Support Services Network et le service régional de police de York nous ont dit que leur équipe d’intervention d’urgence avait un effet considérable sur les attitudes des agents de police à l’égard des personnes aux prises avec des troubles mentaux, ainsi que sur celles de la collectivité locale à l’égard des services policiers. En général, les policiers peuvent jouer un rôle important lorsqu’il s’agit de tenir compte des besoins des personnes handicapées en évitant que les personnes ayant des handicaps psychosociaux ne soient happées par le système de justice pénale lorsqu’elles commettent des infractions mineures manifestement liées à un trouble psychique.

D’autres personnes consultées ont fait état d’inconvénients associés à ces équipes. On nous a dit que la tension pouvait monter entre une personne en situation de crise et des policiers en uniforme si ces policiers interviennent en premier, avant l’arrivée du membre de l’équipe d’intervention d’urgence. De plus, des équipes d’intervention d’urgence ne sont pas de service dans toutes les régions à toutes les heures de la journée. On nous a également dit que le type de formation offerte à ces équipes devrait être fourni à tous les agents de police étant donné qu’un volet fondamental de leur emploi consiste à intervenir auprès de personnes en détresse psychique et que le fait de former des agents spécialisés renforce l’idée que les usagers/survivants sont distincts du reste de la population.

On nous a dit que les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances peuvent être prises à partie par les services de police, harcelées et traitées de façon agressive pour avoir afficher des comportements liés à leur handicap ou parce qu’il est connu qu’elles ont un problème de santé mentale. Une personne a raconté avoir été accusée « de façon agressive » d’avoir pris de la cocaïne parce qu’elle reniflait, alors qu’il s’agissait d’un tic associé au syndrome de Tourette. Elle a ajouté :

J’ai tout de suite compris que cet agent se fiait à sa première impression sans se poser trop de questions. Pour moi, c’est comme être en présence d’une personne diabétique. Son insuline peut chuter et elle peut se mettre à se comporter comme si elle avait bu. Les policiers doivent mieux connaître les symptômes.

– Participant(e) au groupe de consultation

Certains corps policiers, comme les services de police de Toronto, ont mis sur pied des groupes consultatifs sur la santé mentale pour donner à la collectivité voix au chapitre relativement aux questions de maintien de l’ordre associées aux personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale. S’ils héritent d’un mandat approprié, ces comités peuvent jouer un rôle puissant en examinant les thèmes et les tendances, en émettant leur point de vue relativement aux questions complexes et en aidant à assurer la prestation de services qui respectent les droits de la personne.

Recommandations :

45. Le Collège de police de l’Ontario et les services de police devraient offrir aux nouvelles recrues et agents chevronnés une formation sur les droits de la personne et l’obligation d’accommodement des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances. Tous les agents de police, y compris les nouvelles recrues et agents chevronnés, devraient aussi suivre une formation sur les techniques de désamorçage des situations de crise utilisées par les équipes d’intervention d’urgence.

46. Les services de police devraient mettre sur pied des comités communautaires, dont des usagers/survivants et des personnes aux prises avec des dépendances, pour leur fournir des conseils sur des questions en lien avec la santé mentale et la prestation de services policiers.

47. Les services de police devraient élaborer des politiques et protocoles de maintien de l’ordre qui abordent les questions liées aux droits fondamentaux des personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances.

48. Les services de police devraient recueillir des données de façon à cerner tout cas de traitement inéquitable des personnes ayant des troubles mentaux ou des dépendances déclarés ou perçus, comparativement aux autres personnes.

Engagement de la CODP :

E24. Dans son travail auprès des services de police de l’Ontario, la CODP soulèvera des questions de discrimination à l’endroit des personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances en matière de prestation de services, et collaborera avec les services de police pour créer la capacité requise pour régler ces questions.

Tribunaux et représentation par un avocat

Oui, les gens vous préviennent : « N’allez pas devant les tribunaux, le stress est trop grand ». Et les gens vous exploitent parce qu’ils savent que vous n’êtes pas à votre meilleur.

– Participant(e) au sondage

Le fait qu’il est difficile pour certaines personnes ayant des handicaps psychosociaux d’obtenir un soutien juridique, parce qu’elles ne peuvent pas se payer d’avocat ou n’arrivent pas à mener à terme le processus de dépôt d’une demande d’aide juridique fait partie des préoccupations soulevées à propos de l’accès à la justice au moyen des tribunaux. Sans représentation juridique, les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale peuvent faire face à un double préjudice si elles se présentent devant les tribunaux alors qu’elles ont des symptômes psychiques. Cette question préoccupait également les personnes impliquées dans des procédures judiciaires.

Le juge a demandé : « Comprenez-vous ce que nous vous demandons? » J’avais un problème [de santé] mental et je faisais face à des accusations criminelles. Il posait des questions qui duraient 20 minutes. Je ne comprenais pas ce qu’il disait.

– Participant(e) à la table ronde de Toronto

D’autres questions ont été soulevées à propos du traitement équitable au sein du système juridique. Certaines personnes se préoccupaient du fait que l’avocat de la partie adverse puisse exploiter le problème de santé mentale d’un témoin, ce qui accroît le sentiment de victimisation du témoin et le risque que la personne perdre sa cause. On nous a fait remarquer que le manque d’éducation et de sensibilisation des décideurs et membres du personnel des tribunaux à l’égard des problèmes de santé mentale et des dépendances posait aussi problème.

La plupart de mes clients ont des démêlés avec le système judiciaire. Ça fait peur de se retrouver devant un juge et de devoir lui expliquer les problèmes de santé mentale de votre client lorsqu’il ne connaît même pas les différents types de troubles mentaux existants, comme le CCA [trouble déficitaire de l’attention], le TOC [trouble obsessivo-compulsif] ou le TOP [trouble oppositionnel avec provocation].

            – Participant(e) au sondage

Selon un représentant du système judiciaire de l’Ontario, des efforts ont été entrepris pour rendre les tribunaux plus accessibles. Par exemple, des coordonnateurs de l’accès aux tribunaux peuvent accepter des demandes d’accommodement. Les documents clés fournis aux membres du public sont de plus en plus rédigés en langage simple et des aires plus tranquilles ont été prévues à proximité des comptoirs de services bruyants pour favoriser la discussion. Moyennant une approbation judiciaire, des audiences peuvent être reportées au besoin pour tenir compte des symptômes des gens. Parmi les autres types de mesures d’adaptation pouvant être requis en cour ou dans le cadre d’un processus de décision figurent la tenue d’audiences privées ou de conférences préparatoires, l’ajournement d’audiences, et l’offre de soutien humain en vue de l’obtention de services juridiques[174].

  • Programmes de déjudiciarisation

Malgré que les programmes varient d’une région à l’autre, des programmes de déjudiciarisation de la santé mentale et des tribunaux de traitement de la toxicomanie ont été mis sur pied pour fournir des services de santé mentale et soutiens connexes aux personnes ayant des besoins en matière de santé mentale et de dépendances qui ont des démêlés avec le système judiciaire. Une personne peut être admissible aux services de déjudiciarisation si les infractions qu’elle est accusée d’avoir commises sont jugées à faible risque et si ses besoins en matière de santé peuvent être comblés par des services communautaires. Les services de déjudiciarisation sont conçus pour « déjudiciariser » le processus et éviter que les personnes aux prises avec des troubles mentaux intègrent le système correctionnel, qui n’est pas en mesure de combler adéquatement leurs besoins en matière de santé mentale.

Les clients peuvent participer au programme de façon volontaire. Selon un penseur du domaine juridique, cependant, les tribunaux de santé mentale ont été créés parce que les soutiens offerts au sein de la collectivité étaient inadéquats et sont le fruit d’un système de justice pénale dont le climat est discriminatoire. Selon l’Empowerment Council, on doit encore démontrer de façon empirique la capacité des services de déjudiciarisation de respecter les droits de la personne.

De nombreuses personnes nous ont dit que les services de déjudiciarisation avaient eu un effet positif en réorientant avec succès les gens du système de justice pénale vers le système de santé mentale. Cependant, selon la MTCSALC, certaines personnes qui pourraient bénéficier des services de déjudiciarisation n’y ont pas accès, parce qu’elles ne sont pas repérées par les agents de police ou les avocats de la Couronne. D’expliquer la MTCSALC, « les personnes dont les problèmes de santé mentale n’ont pas été diagnostiqués aboutiront devant une cour criminelle ordinaire et feront face à des peines pouvant être plus sévères ».

Le Comité provincial de coordination des services à la personne et des services juridiques nous a confié que les programmes de soutien aux tribunaux n’ont pas la capacité de traiter les cas plus complexes comme les personnes ayant des toxicomanies concomitantes ou un diagnostic double co-occurrent (déficience intellectuelle). Il laisse entendre que 80 p. 100 des personnes aiguillées par le système judiciaire vers des services de santé mentale on une dépendance ou un trouble concomitant.

La nature « distincte » du système de services de déjudiciarisation inquiétait aussi certaines personnes, qui étaient d’avis que la résolution des questions de mesures d’adaptation requises dans le cadre d’un procès ordinaire constituerait une approche davantage intégrée et équitable. On nous a également fait part de préoccupations à propos de l’étendue des évaluations individuelles des gens menées par les tribunaux et de la mesure dans laquelle ces derniers établissent des plans de traitement appropriés. D’après une personne représentant une initiative d’usagers/de survivants, les gens ne participent pas aux décisions relatives à leurs besoins, et les plans de traitement peuvent limiter le type de services auxquels la personne peut avoir recours.

Recommandations :

49. Le Conseil canadien de la magistrature et l’Institut national de la magistrature devraient offrir une formation à tous les juges en matière de droits de la personne et d’accommodement des personnes ayant des handicaps psychosociaux durant le processus d’audience.

50. Le ministère du Procureur général, le Barreau du Haut-Canada et l’Association du Barreau de l’Ontario devraient planifier des formations pour les juristes et le personnel des tribunaux en matière de droits de la personne et d’accommodement des personnes ayant des handicaps psychosociaux durant le processus d’audience.

51. Le ministère du Procureur général et Aide juridique Ontario devraient examiner leurs politiques, processus et pratiques, y retirer les obstacles à l’accès et y améliorer les mesures d’adaptation offertes aux usagers aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances.

Système correctionnel

Les prisons sont les pires endroits où avoir des troubles mentaux. Elles ne sont pas équipées pour composer avec la situation. Une personne pourrait avoir une crise maniaque, se mettre à hurler ou autre. La seule chose que le gardien peut faire, c’est de lui dire de la fermer et de la mettre en isolement cellulaire, ce qui ne fait qu’empirer les choses. Durant une de mes crises en prison, ils ne s’avaient plus quoi faire avec moi. J’étais en isolement et ma situation s’est aggravée. En bout de ligne, ils m’ont envoyé dans un centre où ils offrent des soins de santé aux détenus. Cet endroit a sauvé ma vie.

            – Participant(e) au groupe de consultation

Dans son rapport annuel de 2008-2009, le Bureau de l’enquêteur correctionnel du gouvernement fédéral, qui agit à titre de protecteur du citoyen pour les contrevenants des établissements correctionnels fédéraux, a rappelé les propos du ministre fédéral de la Sécurité publique, qui a indiqué qu’au cours des 30 dernière années, le Canada s’était graduellement orienté vers un système communautaire et ambulatoire de « désinstitutionalisation » des résidents des établissements provinciaux aux prises avec des troubles mentaux, pour découvrir qu’il ne fait que les « ré-institutionnaliser » dans le système carcéral, ce qui laisse entendre que le Canada « criminalise la maladie mentale »[175]. Le rapport poursuit en affirmant que 39 p. 100 des détenus des établissements de l’Ontario ont un diagnostic de maladie mentale, ont une ordonnance de médication en vigueur ou font l’objet d’une évaluation psychiatrique ou d’un traitement psychologique continu. Dans le système judiciaire fédéral, 50 p. 100 des contrevenants canadiens ont rapporté des problèmes de surconsommation d’alcool à l’origine de leur infraction[176].

Les personnes consultées se souciaient du fait que beaucoup de personnes ayant des handicaps psychosociaux soient en prison pour des infractions relativement mineures. Le fait que certaines populations protégées aux termes du Code, comme les hommes afro-canadiens et racialisés, les Autochtones et les personnes atteintes de troubles d’apprentissage et de troubles causés par l’alcoolisation fœtale, soient hautement représentées au sein du système correctionnel alarmait beaucoup de personnes, compte tenu que cela peut être le reflet de discrimination systémique à l’endroit de ces personnes[177].

Le manque de disponibilité de services de santé mentale adéquats pour les détenus du système correctionnel (OHA) et l’accès limité de ces personnes à des médecins et des traitements est un problème important. On nous a aussi fait part de préoccupations par rapport au fait que les personnes ayant certains problèmes psychiques pouvaient ne pas obtenir des mesures d’adaptation appropriées au sein du système carcéral sous forme d’interruptions non justifiées de leurs traitements, comme la non-administration des médicaments dont ils on besoin. Les personnes consultées craignaient que ces types de pratiques soient dangereux pour la situation des gens. La CODP est consciente des inquiétudes par rapport au fait que les détenus des établissements correctionnels pourraient avoir un accès limité aux médicaments couramment prescrits et voir leur traitement existant modifié sans évaluation en face à face par un médecin.

Selon le Comité provincial de coordination des services à la personne et des services juridiques, l’Ontario compte plus de clients en détention provisoire que de personnes reconnues coupables d’actes criminels, et bon nombre de ces détenus provisoires ont des problèmes de santé mentale ou des dépendances, ou les deux. Cependant, ces personnes ne reçoivent pas d’évaluations psychiatriques prescrites par la cour, ou des services de santé mentale ou de toxicomanie adéquats pendant qu’elles attendent leur procès, et ce, surtout en milieu rural.

En juin 2012, le Comité contre la torture des Nations Unies a soulevé des préoccupations par rapport à l’état des détenus canadiens aux prises avec une maladie mentale. Pour se conformer aux normes des Nations Unies, il somme le Canada de prendre, entre autres, les mesures suivantes : renforcer la capacité des centres de traitement pour les prisonniers atteints de problèmes de santé mentale intermédiaires et graves, et ne plus recourir à l’isolement cellulaire pour les personnes atteintes de graves maladies mentales[178].

Engagement de la CODP :

E25. Dans le cadre de son travail en matière de droits de la personne auprès du ministère de la Sécurité communautaire et des Services correctionnels (MSCSC), la CODP inclura au nombre des questions prioritaires le manque de mesures d’adaptation offertes aux personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances, surtout en cas d’intersection avec d’autres motifs de discrimination interdits par le Code, dont la race et les motifs connexes, d’autres formes de handicap et le sexe.

Casier judiciaire

Les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances peuvent obtenir un casier judiciaire à la suite de démêlés avec les tribunaux en lien avec leur handicap, comme une accusation d’inconduite ou une infraction plus grave. Beaucoup de préoccupations ont été soulevées à propos des profondes répercussions du fait d’avoir un casier judiciaire sur la capacité d’obtenir un logement, un emploi, un travail bénévole, comme une éducation postsecondaire ou d’autres services, ou un médecin, un psychiatre ou un programme communautaire de santé mentale (OHA, Provincial Health and Services Justice Coordinating Committee). Le Code interdit la discrimination en emploi contre les personnes qui ont un casier judiciaire mais ont obtenu un pardon. Ce type de protection a une portée restreinte et ne s’étend à aucun autre aspect social couvert par le Code.

Selon la Metro Toronto Chinese and Southeast Asian Legal Clinic, les répercussions du casier judiciaire sont encore plus grandes chez les personnes racialisées. Les résidents permanents peuvent se faire déporter même si le casier judiciaire est le résultat de comportements en lien avec un handicap. Les personnes à faible revenu peuvent avoir de la difficulté à obtenir un pardon, ce qui peut aussi avoir des effets néfastes sur les personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances.


 

[125] Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, supra note 6; Gouvernement de l’Ontario, supra note 6.

[126] Pour plus de renseignements sur ce sujet, voir Yona Lunsky et Jennifer Puddicombe, Dual Diagnosis in Ontario’s Specialty (Psychiatric) Hospitals: Qualitative Findings and Recommendations. Phase II Summary Report, décembre 2005. Accessible en ligne : Centre de toxicomanie et de santé mentale www.camh.net/Care_Treatment/Program_Descriptions/Mental_Health_Programs/....

[127] Par exemple, en 2008, le vérificateur général de l’Ontario a déterminé que le financement accordé aux services de traitement de la toxicomanie et services de santé mentale communautaires était inférieur aux cibles établies et aux niveaux requis pour satisfaire la demande de ces services. Bureau du vérificateur général de l’Ontario, Rapport annuel 2008 du Bureau du vérificateur général de l’Ontario, Toronto, Imprimeur de la Reine pour l’Ontario, 2008. Accessible en ligne : Bureau du vérificateur général de l’Ontario, http://www.auditor.on.ca/fr/rapports_fr/fr08/ar_fr08.pdf, à 199.

[128] Commission sur l’avenir des soins de santé au Canada, Guidés par nos valeurs : L’avenir des soins de santé au Canadarapport final, novembre 2002, à 194 (commissaire : Roy J. Romanow). Ministère de la Santé et des Soins de longue durée, Chaque porte est la bonne porte. Vers une stratégie décennale de santé mentale et de lutte contre les dépendances. Document de travail, Toronto, Imprimeur de la Reine pour l’Ontario, 2009.  

[129] Les dépenses publiques dans le secteur de la santé mentale représentaient 6,1 p. 100 des dépenses publiques en santé, lesquelles s’élevaient à 91,4 milliards de dollars. Ce niveau de financement est supérieur au seuil de 5 p. 100 fixé par le Réseau européen de l’économie de la santé mentale, mais inférieur à celui de la plupart des pays développés. Une proportion de moins de 5 p. 100 peut représenter un financement inéquitable de la santé mentale (Santé mentale Europe, 2004). P. Jacobs et coll. « Expenditures on mental health and addictions for Canadian provinces from 2003 and 2004 », Can.J.of Psychiatry, vol. 53, no 5, 2008, p. 33, tel que cité dans Institute of Health Economics, How Much Should we Spend on Mental Health? septembre 2008, à la p. 25.

[130] Commission de la santé mentale du Canada, supra note 93, à la p. 13.

[131] Auton (Tutrice à l’instance de) c. Colombie-Britannique (Procureur général), [2004] 3 R.C.S. 657, 2004 CSC 78, à 41.

[132] Hogan v. Ontario (Ministry of Health & Long-Term Care), 2006, HRTO 32 (CanLII); L’allocation de ressources aux services de santé mentale dépend de beaucoup de facteurs. Les recherches effectuées laissent entendre que la perception de responsabilité personnelle est le plus important corrélat des valeurs à l’origine des décisions en matière d’allocation de ressources. Les perceptions à propos de la responsabilité des gens à l’égard de leurs propres problèmes de santé mentale peuvent avoir une influence sur le financement des services de santé mentale, et pourraient expliquer pourquoi ces programmes ont un niveau de financement moindre que les autres services. Pour une analyse documentaire, voir Patrick W. Corrigan et Amy C. Watson, « Factors that Explain how Policy Makers Distribute Resources to Mental Health Services », Psychiatric Services, vol. 54, no 4, 2003, p. 501.   

[133] Pour de plus amples renseignements sur les initiatives de lutte contre la stigmatisation à l’échelle du Canada, voir Commission de la santé mentale du Canada, Changer les mentalités. Accessible en ligne : Commission de la santé mentale du Canada, http://www.mentalhealthcommission.ca/Francais/Pages/Campagneanti_stigmate.aspx.

[134] CRDPHsupra note 9, par. 24(2).

[135] Loi sur l’éducation, L.R.O. 1990, C. E.2, Règl. de l’Ont. 181/98 (Identification et placement des élèves en difficulté), par.17(1); Commission ontarienne des droits de la personne, Directives concernant l’éducation accessible, Toronto, Imprimeur de la Reine pour l’Ontario, 2004. Accessible en ligne : CODP, http://www.ohrc.on.ca/fr/directives-concernant-l%C3%A9ducation-accessible.

[136] Ministère de l’Éducation, Note Politique/Programmes no 119. Accessible en ligne : Ministère de l’Éducation http://www.edu.gov.on.ca/extra/fre/ppm/119f.html.

[137] Ontario, ministères des Services à l’enfance et à la jeunesse, de la Santé et des Soins de longue durée et de l’Éducation, Amélioration des soutiens en matière de santé mentale destinés aux enfants et aux familles, communiqué de presse, le 22 juin 2011; Gouvernement de l’Ontario, supra note 6, à 12 et 14.

[138] Ontario au travail reconnaît que les risques de rechute peuvent nuire à l’atteinte des objectifs en matière de traitement et met de l’avant des mesures progressives visant à promouvoir le respect du traitement. En bout de ligne, cependant, les absences répétées à un programme de traitement peuvent mener à la décision de cesser ou de réduire le soutien en raison de l’inobservation du traitement. Ministère des Services sociaux et communautaires, Directives du programme Ontario au travai 8.4. Initiative de traitement de la toxicomanie, février 2009. Accessible en ligne : MCSS, http://www.mcss.gov.on.ca/documents/fr/mcss/social/directives/ow/0804Fr1.pdf, à 5 et 6.

[139] CRDPHsupra note 9, paragraphes 25(a), (b),(d) et (f).  

[140] Selon le CAMH, « les patients atteints de maladie mentale grave qui ont un infarctus sont considérablement moins susceptibles que la population générale de recevoir un traitement médicamenteux éprouvé. Ils ont moins tendance à subir un cathétérisme cardiaque, une angioplastie d’urgence ou un pontage aortocoronarien. » J. Newcomer et C. Hennekens, « Severe Mental Illness and Risk of Cardiac Disease », J.A.M.A., vol. 298, no 15, 2007, p. 1794. Le CAMH a aussi cité une étude qui estimait à 35 p. 100 le nombre de personnes ayant des troubles mentaux graves qui ont au moins un trouble médical non diagnostiqué. Bazelon Centre for Mental Health Law, Get it Together: How to Integrate Physical and Mental Health Care for People with Serious Mental Disorders, 2004. Le CAMH a aussi fait remarquer que le taux de mortalité des suites du cancer est de 65 p. 100 supérieur chez les personnes ayant des troubles mentaux.. André Picard, « Cancer death rate 65% higher among the mentally ill », The Globe & Mail, le 9 avril 2009. Accessible en ligne : The Globe & Mail, www.theglobeandmail.com/life/article965397.ece.

[141] En 2008, plusieurs organismes du secteur de la santé mentale et des dépendances ont indiqué au ministère de la Santé et des Soins de longue durée que l’Échelle canadienne de triage et de gravité incluait les « problèmes psychiatriques » (à l’exception des idées suicidaires/tentatives de suicide) au « niveau V » de triage, le niveau le moins urgent. Ces organismes recommandaient d’examiner les effets de ce niveau sur les temps d’attente et la qualité des soins, et d’apporter les remèdes nécessaires. Addictions Ontario et coll. Addressing Emergency Department Wait Times and Enhancing Access to Community Mental Health & Addictions Services and Supports, mémoire au ministre de la Santé et des Soins de longue durée, mai 2008, à 5; Les critères de l’Échelle canadienne de triage et de gravité touchant les problèmes de santé mentale ont été revisés; Voir Michael J. Bullard et coll. « Révision des lignes directrices de l’Échelle canadienne de triage et de gravité (ÉTG) pour les adultes », C.J.E.M., vol. 10, no 2, 2008, p. 143. Accessible en ligne : CJEM, http://www.cjem-online.ca/sites/default/files/pg143(1)(1).pdf.

[142] Le BIPEP nous a dit que cette question avait été soulevée durant l’enquête sur le décès de Ryan Coulter qui, selon le BIPEP, pourrait ne pas avoir reçu de soins médicaux durant son séjour à l’hôpital psychiatrique parce qu’on aurait attribué ses symptômes physiques à son état psychique et ses dépendances multiples.

[143] Comité spécial de la santé mentale et de la lutte contre les dépendances, Sur le chemin du mieux-être : Le plan d’action compréhensif sur la santé mentale et les dépendances à l’intention des Ontariens et Ontariennes, Rapport final, 2e session, 39e Parlement, Elizabeth II, Toronto, Imprimeur de la Reine pour l’Ontario, 2010, p. 59. Accessible en ligne : Assemblée législative de l’Ontario, http://www.ontla.on.ca/committee-proceedings/committee-reports/files_pdf/Select%20Report%20FR.pdf, recommandation 12, à 12.

[144] Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario, Accepting New Patients, politique no 1-09, avril 2009. Accessible en ligne : CPSO, www.cpso.on.ca/policies/policies/default.aspx?ID=2506 , à 2.

[145] Loi sur la santé mentale, L.R.O. 1990, chap. M.7., art. 15.

[146] Avant l’entrée en vigueur de la CRDPH, l’Assemblée générale avait adopté (Résolution 46/119 du 17 décembre 1991) des normes et directives relatives aux soins et traitements prodigués aux personnes hospitalisées dans un établissement de santé mentale (appelées Principes des Nations Unies pour la protection des personnes atteintes de maladie mentale et pour l’amélioration des soins de santé mentale). La CRDPH a préséance sur ces principes.

[147] « Les personnes handicapées sont souvent isolées de la société : elles sont placées dans des institutions, y compris des prisons, des centres de soins sociaux, des orphelinats et des établissements de santé mentale. Elles sont privées de leur liberté pendant de longues périodes, parfois même pendant toute leur vie, soit contre leur volonté soit sans leur consentement libre et éclairé. Dans ces institutions, elles sont souvent victimes d’indicibles humiliations, de négligences, de formes extrêmes de contention et d’isolement, ainsi que de violences physiques, mentales et sexuelles. » Rapport d’activité du Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, UN GAOR 63e session, Document des Nations Unies A/63/175, 2008, p. 9, par. 38.

[148] « Le Rapporteur spécial constate qu’il ne saurait y avoir de justification thérapeutique de l’utilisation prolongée des moyens de contention qui peut constituer un acte de torture ou un mauvais traitement [...] Dans les établissements, les personnes handicapées sont souvent mises à l’isolement ou au secret, deux méthodes employées comme moyens de contrôle ou comme traitement médical, bien qu’injustifiables pour des motifs thérapeutiques, ou encore comme forme de châtiment. » Note du Secrétaire général, ibid., par. 55-56.

[149]Note du Secrétaire général, ibid., page 16, par. 63.  

[150] CRDPHsupra note 9, alinéa 14(1)b).

[151] Haut-Commissariat aux droits de l’homme des Nations unies et rapports du Haut-Commissariat et du Secrétaire général, Thematic Study by the Office of the United Nations High Commissioner for Human Rights on enhancing awareness and understanding of the Convention on the Rights of Persons with Disabilities, Conseil des droits de l’homme, 10e session, UN GAOR, doc. no A/HRC/10/48, 2009, à 49.

[152] Commission du droit de l’Ontario, Promouvoir l’égalité des personnes handicapées par l’entremise des lois, des politiques et des pratiques : Cadre provisoire, mars 2012.

[153] Étude thématique sur la participation des personnes handicapées à la vie politique et à la vie publique, établie par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, UN GAOR, Conseil des droits de l’homme, 19e session, document des Nations Unies A/HRC/19/36, 2011, à 30.

[154] Ibid., à 68.

[155] Le Canada se réserve aussi le droit de ne pas soumettre toutes ces mesures à un contrôle périodique effectué par un organe indépendant, étant donné qu’il dispose de son propre mécanisme d’appel. CRDPHsupra note 9, Déclaration et réserves du Canada. Accessible en ligne : Collection des traités des Nations unies http://treaties.un.org/pages/ViewDetails.aspx?src=TREATY&mtdsg_no=IV-15&....

[156] Loi de 1992 sur la prise de décisions au nom d’autrui, L.O. 1992, chap. 30; Loi sur le consentement aux soins de santé, L.O. 1996, c. 2, Annexe A.

[157] Nicole Chammartin, Christine Ogaranko, Beverly Froese, supra note 152, à 68.

[158] Michael Bach et Lana Kerzner, Un nouveau paradigme pour protéger l’autonomie et le droit à la capacité juridique, octobre 2010. Accessible en ligne : CDO, www.lco-cdo.org; Le World Network of Users and Survivors of Psychiatry soutient que les organismes comme les banques, les juges et le personnel médical qui traitent souvent de questions nécessitant l’exercice de la capacité juridique doivent fournir des mesures de soutien à titre de mesures d’adaptation. World Network of Users and Survivors of Psychiatry, supra note 23, à 17; Le commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe recommande de « créer une obligation juridique contraignant les autorités gouvernementales et locales, l'appareil judiciaire, les services de santé, les services financiers, les assurances et les autres prestataires de services à mettre en place des aménagements raisonnables en faveur des personnes handicapées désireuses de recourir à ces services. La notion d’aménagement raisonnable implique de fournir des informations dans un langage clair et d'accepter qu'un auxiliaire communique la volonté de la personne concernée. » Commissaire aux droits de l’homme, Conseil de l’Europe, À qui appartient-il de décider? Le droit à la capacité juridique des personnes ayant des déficiences intellectuelles et psychosociales, Strasbourg, 2012, CommDH/IssuePaper(2012)2. Accessible en ligne : Conseil de l’Europe, https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?id=1908565, recommendation 9.

[159] Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, supra note 6, à 230.

[160] Fleming v. Reid, [1991] O.J. No. 1083, 1991 CanLII 2728 (ON CA), par. 33 et 34.

[161] Toute personne est capable à l’égard d’un traitement, de son admission à un établissement de soins ou d’un service d’aide personnelle si elle est apte à comprendre les renseignements pertinents à l’égard de la prise d’une décision concernant le traitement, l’admission ou le service d’aide personnelle, selon le cas, et apte à évaluer les conséquences raisonnablement prévisibles d’une décision ou de l’absence de décision. Loi sur le consentement aux soins de santé, L.O. 1996, chap. 2, Annexe A, par. 4(1).

[162] Dreezer and Dreezer Inc. Rapport sur le processus d’examen des ordonnances de traitement en milieu communautaire en vertu de l’article 33.9 de la Loi sur la santé mentale, préparé pour le ministère de la Santé et des Soins de longue durée en décembre 2005, à 7.

[163] Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario, Norme d’exercice : La contention, Toronto, Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario, 2009. Accessible en ligne : OIIO, http://www.cno.org/Global/docs/prac/51043_restraints.pdf, à 4.

[164] La Loi de 2001 sur la réduction au minimum de l’utilisation de la contention sur les malades, L.O. 2001, chap. 16, fait la promotion des principes de réduction au minimum de l’utilisation de la contention et oblige les hôpitaux et autres établissements à élaborer des politiques en matière de contention. Cependant, la loi ne s’applique pas dans les circonstances où la Loi sur la santé mentale régit l’utilisation de moyens de contention sur les malades ou autres personnes qui se trouvent dans des établissements psychiatriques (voir le par. 2(2)).

[165] Les maisons de soins infirmiers qui ont une plus grande proportion d’infirmières autorisées à temps plein ont recours à la contention moins fréquemment que les maisons qui ont une plus grande proportion d’infirmières autorisées contractuelles et à temps partiel. Robert Weech-Maldonado, Louise Meret-Hanke, Maria C. Neff et Vince Mor, « Nurse Staffing Patterns and Quality of Care in Nursing Homes », Health Care Man Rev., vol. 29, no 2, 2004. P. 107.

[166] Les mesures de contention utilisées incluent : contrôle médicamenteux en phase aiguë, contention physique, contention mécanique et isolement. Institut canadien d’information sur la santé, Mesures de contention et autres interventions de contrôle pour les patients hospitalisés en santé mentale en Ontarioaoût 2011. Accessible en ligne : Institut canadien d’information sur la santé, www.cihi.ca, à 1.

[167] Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario, supra note 163.

[168] Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario, supra note 163, à 39.

[169] Association des chefs de police de l’Ontario, Resolution 2011-01: Mental Health and Addictions, 29 juin 2011. Accessible en ligne : Association des chefs de police de l’Ontario, www.oacp.ca/content/resolutions/view_resolution.html?id=132.

[170] Association canadienne pour la santé mentale – Ontario, Justice and Mental Health, Accessible en ligne : Association canadienne pour la santé mentale – Ontario, www.ontario.cmha.ca/justice.asp, téléchargé le 31 janvier 2012.

[171] L’article 17 de la Loi sur la santé mentale de l’Ontario donne à un agent de police l’autorité requise pour amener quelqu’un dans un centre médical à des fins d’évaluation si l’agent de police a « des motifs raisonnables et probables » de croire qu’une personne a agi « de façon désordonnée » et qu’il a des motifs valables de croire que cette personne souffre d’un trouble mental tel qu’elle s’infligera probablement des lésions corporelles graves, qu’elle en infligera probablement à une autre personne ou qu’elle subira un affaiblissement physique grave, ou qu’elle a menacé ou tenté de s’infliger des lésions corporelles ou menace ou tente de le faire, qu’elle s’est comportée ou se comporte avec violence envers une autre personne ou de manière à lui faire craindre qu’elle lui causera des lésions corporelles, ou qu’elle a fait ou fait preuve de son incapacité de prendre soin d’elle-même.

[172] Carys Mills, « Ontario to review how police respond to the mentally ill », The Globe and Mail, le 2 mai 2012. Accessible en ligne : The Globe and Mail www.theglobeandmail.com/news/national/toronto/ontario-to-review-how-police-respond-to-the-mentally-ill/article2420940/.

[173] « Le taux d’utilisation de l’AI [par la GRC] de 49,6 % dans les cas liés à la santé mentale est beaucoup plus élevé que pour les autres types de cas liés à la santé (39,2 %). […] de tous les types d’incidents, c’est dans des cas liés à la santé mentale que l’AI a été déployée le plus souvent […] il n’y a aucune donnée probante selon laquelle les cas liés à la santé mentale présentent un risque plus élevé que les autres types d’incidents. » Commission des plaintes du public contre la GRC, Utilisation de l'arme à impulsions (AI) à la GRC du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2009, le 24 juin 2010. Accessible en ligne : Commission des plaintes du public contre la GRC, http://www.cpc-cpp.gc.ca/prr/rep/sir/cew-ai-10-fra.pdf, p. 52-53.

[174]Anita Barnes, Accommodating people with mental health issues and addictions in the tribunal system, (présentation faite à la Society of Ontario Adjudicators and Regulators, le 1er juin 2011). Accessible en ligne : Society of Ontario Adjudicators and Regulators, www.soar.on.ca/docs/Accommodating%20people%20at%20tribunals.pdf.

[175] Howard Sapers, Rapport annuel du Bureau de l’enquêteur correctionnel 2008-2009, le 29 juin 2009. Accessible en ligne : Bureau de l’enquêteur correctionnel, http://www.oci-bec.gc.ca/rpt/pdf/annrpt/annrpt20082009-fra.pdf.

[176] Comité spécial de la santé mentale et de la lutte contre les dépendances, supra note 143, à 13.

[177] Des statistiques colligées par l’Enquêteur correctionnel Canada montrent que le taux d’incarcération des Canadiennes et des Canadiens d’origine africaine au sein du système fédéral augmente, et qu’il est passé de 6,27 p. 100 du nombre total de détenus en 2000-2001 à 8,4 p. 100 de leur nombre total en 2010-2011. Données fournies à la CODP par le Bureau de l’enquêteur correctionnel du Canada.

[178] Observations finales du Comité contre la torture : Canada, Nations unies, Comité contre la torture, version avancée et non éditée, 48e session, documents des Nations Unies, CAT/C/SR.1087 et 1088, 2012, à 19.

 

Discrimination Type: 
Organizational responsibility: 

14. Connaissance et application des droits

14.1. Mécanismes de plainte

De nombreuses personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances nous ont fait savoir qu’elles étaient généralement peu conscientes de leur droit de ne subir aucune discrimination fondée sur un trouble psychique ou une dépendance en matière de logement et d’emploi, de même que lorsqu’elles reçoivent des services. Parallèlement, il semble que les organisations ont elles aussi une méconnaissance de leurs responsabilités découlant du Code. Même lorsque les gens connaissaient leurs droits, beaucoup d’entre eux ont indiqué qu’ils ont une grande difficulté à les faire appliquer, que ce soit en portant plainte contre l’organisation faisant l’objet de leurs récriminations, le système des droits de la personne ou d’autres organismes décisionnels, tels que les tribunaux administratifs ou les tribunaux[179]. Nous avons entendu que les façons de faire respecter les droits étaient essentielles aux mesures correctives et à la prévention des violations des droits humains que les gens subissent. Cependant, beaucoup de gens ne savent pas qu’il existe un système des droits de la personne auquel ils peuvent avoir recours pour lutter contre la discrimination.

On nous a dit que les gens sont souvent empêchés d’accéder aux systèmes de plaintes en raison des symptômes liés à leur handicap, et se sentent dépassés par la gestion de leurs activités quotidiennes, en particulier en raison de facteurs liés à la pauvreté. Selon l’Association des travailleuses et travailleurs sociaux de l’Ontario (ATTSO), « les personnes atteintes de maladie mentale qui ont un mode de vie essentiellement itinérant sont probablement plus enclines à faire l’expérience de la discrimination et peuvent avoir une capacité réduite de demander réparation par la voie des systèmes formels parce qu’elles n’ont pas d’adresse ni de numéro de téléphone pour les suivis et en raison des circonstances perpétuellement changeantes de leur vie. »

Nous avons également entendu que les exigences relatives au dépôt d’une plainte (remplir un formulaire de demande) sont souvent complexes ou intimidantes et conçues sans tenir compte des besoins des personnes ayant des handicaps psychosociaux. Par exemple, on nous a fait remarquer que les preuves considérables exigées pour se préparer à une audience devant un tribunal administratif peuvent constituer un obstacle pour les personnes ayant des pertes de mémoire attribuables à un état de stress post-traumatique.

Connaître vos droits fondamentaux ne signifie pas que vous allez les faire respecter. Il n’est pas question de sensibilité. L’expression de préoccupations et de questions touchant les droits de la personne n’est pas accessible. La question en est une d’accessibilité et de rayonnement hors du système des droits de la personne vers les personnes qui subissent la discrimination. – Participant(e) au groupe de consultation

ARCH a indiqué que les tribunaux administratifs doivent appliquer des processus appropriés et équitables pour les personnes qui ont été jugées inaptes à prendre des décisions particulières. L’organisme a déclaré que quand les tribunaux croient qu’une personne est inapte, ils peuvent rechercher une « solution rapide » : un mandataire ou quelqu’un qui prendra des décisions au nom de la personne qui a déposé la plainte. Cette approche peut être envahissante. Elle peut s’étendre au-delà du processus du tribunal, et elle peut ne pas être compatible avec les capacités décisionnelles de la personne. ARCH conseille aux tribunaux d’envisager plutôt d’utiliser un continuum d’approches souples qui aident en s’adaptant d’abord aux capacités décisionnelles de la personne. Pour les requérants non représentés, par exemple, l’organisation suggère la désignation d’un ami de la cour, un amicus curiæ, pour maximiser le respect des choix de la personne et fournir au tribunal les informations dont il a besoin pour évaluer sa demande[180].

En raison de ces préoccupations, un grand nombre de personnes consultées a demandé à la CODP de dispenser une formation aux droits de la personne aux personnes ayant des handicaps psychosociaux, aux fournisseurs de logements, aux employeurs, aux fournisseurs de services, au grand public et aux décideurs tels que les membres des tribunaux administratifs. L’ATTSO a recommandé un accès accru aux services de l’ombudsman afin d’améliorer la capacité des individus, en particulier des personnes itinérantes, à se plaindre de services.

Box: Plusieurs tribunaux administratifs en Ontario ont donné de la formation sur les façons de répondre aux besoins des personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances dans le processus du tribunal. Cette formation a également été donnée par la CODP. Pour plus d’informations, consultez le site Web de la Society of Ontario Adjudicators and Regulators (SOAR) au www.soar.on.ca/events/index.phpEnd of box.

Recommandations :

52. La Society of Ontario Adjudicators and Regulators (SOAR) et le SOAR Administrative and Management Network (SAMN) doivent continuer de s’assurer que les nouveaux arbitres, arbitres existants et membres du personnel reçoivent une formation sur le Code, notamment sur les mesures d’adaptation à offrir aux personnes ayant des problèmes de santé mentale ou des dépendances durant le processus du tribunal.

53. Les tribunaux administratifs et autres organismes de traitement des plaintes et instances décisionnelles doivent examiner leurs politiques et procédures afin de repérer et d’éliminer les obstacles qui empêchent les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances d’accéder à ces services. Dans le cadre de ce processus, les décideurs doivent utiliser des approches qui maximisent la participation et s’adaptent aux besoins des personnes pouvant éprouver des difficultés avec la capacité décisionnelle.

Engagement de la CODP :

E26. La CODP poursuivra sa collaboration avec les tribunaux administratifs ontariens pour offrir une formation sur les droits de la personne, notamment sur l’obligation d’accommodement, dans la mesure où ils s’appliquent aux services aux personnes ayant des troubles psychiques et des dépendances, ainsi qu’aux autres groupes protégés aux termes du Code.

14.1. Intervention

Quand j’ai vu mon médecin, il ne savait pas quoi me dire. Sa première réaction a été de répondre : « Eh bien, je suis un médecin et je sais ce que je fais. » Rares sont les personnes capables de dire au médecin de faire ses recherches. Il vous faut un intervenant. Les personnes ayant des troubles mentaux doivent avoir quelqu’un pour les défendre.

– Participant(e) à la table ronde de North Bay

Un nombre considérable de participants à la consultation ont dit qu’ils ont eu beaucoup de difficulté à avoir un accès équitable à un logement locatif, aux hôpitaux psychiatriques, au POSPH, aux prestations d’assurance, aux tribunaux administratifs et aux autres services, sans l’aide de quelqu’un pour intervenir en leur nom, surtout s’ils n’étaient pas en bonne santé. Beaucoup de gens ont également identifié la nécessité de soutien humain, d’intervenants et de services d’intervention pour les aider à s’y retrouver dans les systèmes, à accroître leur connaissance de leurs droits et de ceux des autres, à lutter contre la discrimination et à formuler des plaintes.

Les services d’intervention peuvent être considérés comme une forme importante de soutien humain et une méthode d’adaptation aux besoins des gens. Parallèlement, le recours tous azimuts aux intervenants est indicateur de la nécessité pour les organisations et services de dispenser leurs services de manière inclusive, sans exercer de discrimination, et d’éliminer les obstacles qui empêchent les gens d’agir en leur propre nom. (Voir la section 13.2 pour plus d’informations sur l’élaboration de services inclusifs.)

Je trouve frustrant pour les usagers qu’ils ne puissent pas obtenir eux-mêmes des services. L’usager est de bonne foi et tente sa chance, puis il se bute contre un obstacle. On ne retourne aucun de ses appels. Je prends le téléphone, je parle à quelqu’un et les choses sont faites sans problème. Mes clients sont soulagés, mais frustrés. Pourquoi faut-il une autre personne pour obtenir des résultats? Mon client perd son indépendance. Il ne devrait pas avoir à sauter dans des cerceaux et à surmonter des obstacles. – Participant(e) à la table ronde de North Bay 

Le rôle d’intervenant peut être joué par de nombreuses personnes différentes dans des contextes différents. Par exemple, le soutien par les pairs est perçu comme une forme positive d’intervention. Dans les hôpitaux psychiatriques, l’intervention au nom des personnes et des groupes de personnes ayant des troubles psychiques est faite par des conseils de patients et de familles et par le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques (BIPEP), qui dispose également du mandat conféré par la loi de fournir aux patients des conseils sur leurs droits.

Les personnes consultées ont souligné combien le statut socioéconomique peut avoir des répercussions sur l’accès des gens aux services. Elles nous ont dit que les personnes ayant un revenu plus élevé sont plus en mesure d’accéder aux services que celles ayant un faible revenu, parce que les premières sont plus enclines à avoir quelqu’un pour les aider.

Les groupes d’usagers/survivants et d’autres organisations ont insisté sur l’importance des services d’intervention indépendants pour les usagers/survivants, qui peuvent trouver très difficile de se plaindre, en particulier lorsque des obstacles risquent de creuser les écarts de pouvoir réels ou perçus entre les fournisseurs et les utilisateurs de services. L’ATTSO et d’autres nous ont dit que les gens font face à un risque considérable de perdre leurs services, leur logement ou leur emploi à la suite d’une plainte de discrimination, en particulier s’ils dépendent de ces systèmes pour avoir accès à ces services fondamentaux pour leur santé. Cela peut rendre particulièrement difficile de se plaindre quand différentes ressources sont directement liées les unes aux autres, par exemple lorsqu’un propriétaire fournit également des services de soutien à une personne ayant des troubles mentaux dans un environnement des logements supervisés[181].

Certaines personnes ont adopté des approches différentes aux concepts d’intervention et d’auto-assistance. Par exemple, nous avons entendu qu’il faut défendre la capacité des gens d’intervenir en leur propre nom. Tel qu’indiqué précédemment, le fait de collaborer avec des intervenants ne soustrait pas l’organisation à son obligation de concevoir ses services de manière inclusive, d’éliminer les obstacles ou d’évaluer et éliminer la discrimination systémique.

Recommandation :

54. Le gouvernement de l’Ontario et les organisations répondant aux besoins des personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances doivent donner leur soutien actif aux services d’intervention au nom des personnes aux prises avec des troubles mentaux et collaborer avec ces services pour que ces personnes réalisent leurs droits auprès des services de logement et des hôpitaux en santé mentale. L’indépendance des services d’intervention doit être considérée comme un facteur assurant que les gens sont en mesure de faire valoir leurs droits sans crainte de conflit d’intérêts. Les organisations qui forment des intervenants doivent offrir une formation aux droits de la personne, notamment à ceux que protège le Code.


[179] Lorsque les questions de justice ont trait à un trouble mental ou à une dépendance, les gens peuvent être enclins à recourir à un tribunal administratif comme le Tribunal de l’aide sociale, la Commission du consentement et de la capacité, la Commission de la location immobilière, le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario et la Commission des affaires municipales de l’Ontario. Ces tribunaux ont la capacité de faire appliquer le Code et devraient le faire dans les cas soulevant des questions de droits de la personne; Tranchemontagne c. Directeur (Programme de soutien aux personnes handicapées), [2006] 1 R.C.S. 513, à 23 – 24; il en est ainsi parce que le Code est une loi fondamentale quasi-constitutionnelle. On doit non seulement l’interpréter dans un sens large, mais assurer l’accessibilité de son application.

[180] Tess Sheldon et Ivana Petricone, Access to Administrative Justice for Persons with Disabilities. Addressing the Capacity of Parties before Ontario’s Administrative Tribunals: Promoting Autonomy and Preserving Fairness, Toronto, ARCH, 2009, p. ii-iii.

[181] Le Code assure une protection contre les représailles pour avoir fait une plainte relative aux droits de la personne (article 8).

 

Discrimination Type: 
Organizational responsibility: 

Annexe 1 : Index des recommandations et engagements de la CODP

Vous trouverez ci-après une liste des recommandations et engagements de la CODP qui sont présentés à la fin de chaque section du rapport.

Recommandations

Recommandations générales :

1. Le gouvernement de l’Ontario doit s’acquitter intégralement de ses obligations aux termes de la Convention relative aux droits des personnes handicapées de promouvoir les droits de la personne et les libertés fondamentales pour toutes les personnes ayant un handicap psychosocial. Cela inclut la promotion active d’un environnement où les personnes ayant un handicap psychosocial peuvent être encouragées, et le sont, à jouer un rôle entier dans la conduite des affaires publiques (article 29).

2. Le gouvernement de l’Ontario doit mesurer et faire état au public ontarien des iniquités qui créent les conditions propices à la discrimination contre les personnes ayant un trouble mental ou une dépendance (comme le chômage et un faible revenu) ainsi que sur ses démarches visant à enrayer ces conditions. Un tel rapport doit être soumis au gouvernement fédéral en réponse à ses exigences en matière de reddition de comptes aux termes de l’article 35 de la CRDPH.

3. Les organisations et citoyens des quatre coins de l’Ontario devraient collaborer à l’amélioration des efforts de remise en question des stéréotypes à propos des troubles mentaux et des dépendances en mettant en œuvre des campagnes d’éducation et de lutte contre la stigmatisation, et en prenant activement part à ces campagnes.

4. Dès qu’il envisage d’adopter des mesures budgétaires restrictives qui auront une incidence négative sur les services, le logement et l’emploi des personnes à faible revenu, le gouvernement de l’Ontario devrait tenir particulièrement compte des objectifs énoncés dans la Stratégie de réduction de la pauvreté et des besoins des personnes aux prises avec des troubles psychiques, des personnes vivant dans la pauvreté et des autres groupes protégés aux termes du Code.

5. Le gouvernement de l’Ontario devrait bonifier et améliorer l’aide sociale, ce qui comprend la révision et l’amélioration des prestations offertes, pour veiller à ce que la population puisse se procurer les articles de première nécessité dont elle a besoin, comme de la nourriture, des vêtements et un toit adéquat.

6. Le gouvernement de l’Ontario et les organisations fournissant des services aux personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances doivent cerner et éliminer la discrimination fondée sur le handicap dans leurs services, de même que la discrimination fondée sur l’âge, le sexe, la race et les motifs connexes, l’identité sexuelle, l’orientation sexuelle et les autres motifs prévus au Code. Cela peut exiger un processus d’examen des politiques, pratiques et processus décisionnels et l’élimination des obstacles qui mènent à la discrimination à l’endroit des groupes protégés aux termes du Code (voir les directives de la CODP concernant l’élaboration de politiques et de procédures en matière de droits de la personne pour plus d’informations).

7. La Direction générale de l’accessibilité pour l’Ontario devrait consulter les personnes ayant des handicaps psychosociaux et groupes de personnes handicapées pour évaluer les normes actuelles établies aux termes de la LAPHO et déterminer dans quelle mesure elles tiennent compte des besoins des personnes ayant des handicaps psychosociaux. Ces normes devraient être modifiées à la lumière des commentaires  des personnes consultées afin d’inclure toute exigence additionnelle requise en matière d’accessibilité.

8. La Direction générale de l’accessibilité pour l’Ontario devrait élaborer et promouvoir du matériel d’éducation supplémentaire indiquant comment la LAPHO s’applique spécifiquement aux personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances afin que les organisations puissent comprendre leurs responsabilités à l’égard des personnes ayant des handicaps psychosociaux.

Logement :

9. Le gouvernement de l’Ontario devrait lier l’aide sociale, notamment l’allocation de logement, au coût réel du logement locatif dans les différentes régions de l’Ontario.

10. Le gouvernement devrait proposer de nouvelles options en matière de logement social et de nouveaux types de subventions au logement, comme une allocation de logement transférable, pour accroître les possibilités qui s'offrent aux personnes à faible revenu sur le marché locatif privé et leur donner plus de flexibilité sur le plan du choix du lieu de vie.

11. Étant donné que les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances ont – de façon disproportionnée – tendance à avoir des besoins sur le plan du logement, le gouvernement de l’Ontario et les municipalités devraient envisager d’adopter des mesures inclusives de zonage, c’est-à-dire des lois et règlements municipaux qui obligent les promoteurs et municipalités à réserver un pourcentage des nouvelles unités au logement abordable ou aux personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et de dépendances.

La province devrait mettre en œuvre les recommandations formulées par la CODP dans Le droit au logementy compris :

12. Que le gouvernement du Canada adopte une stratégie nationale en matière de logement, en consultation avec les gouvernements provinciaux, territoriaux et municipaux, laquelle comprend des cibles mesurables et la fourniture de fonds suffisants pour accélérer le mouvement visant à éliminer l’itinérance et à assurer l’accès de tous les Canadiennes et Canadiens, y compris ceux dont le revenu est limité, à un logement convenable.

13. Que le gouvernement de l’Ontario améliore sa Stratégie de logement abordable en octroyant des fonds suffisants pour accélérer le mouvement visant à éliminer l’itinérance et à assurer l’accès de tous les Ontariennes et Ontariens, y compris ceux dont le revenu est limité, à un logement convenable, et ce, sans discrimination aucune.

14. Que le gouvernement de l’Ontario révise et améliore les taux de financement, les programmes, les lois et les règlements de l’Ontario pour s’assurer que les locataires à faible revenu sont en mesure de s’offrir un loyer moyen, de se nourrir et de satisfaire leurs autres besoins fondamentaux. Une attention spéciale doit être accordée aux mesures suivantes :

  • veiller à ce que le salaire minimum soit indexé au coût de la vie et permette au travailleur à plein temps de vivre au-dessus du seuil de pauvreté
  • évaluer les incidences liées aux mécanismes de contrôle des loyers et à la suppression des mécanismes de contrôle des vacances
  • aborder les mesures de récupération du revenu prévues dans la Loi de 2011 sur les services de logement et par les programmes d’aide sociale.

15. Les fournisseurs de logements avec services de soutien qui travaillent auprès de personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances, ou les deux, devraient examiner leur processus de demande pour veiller à ce que l’information recueillie soit nécessaire et qu’elle ne crée pas, par inadvertance, d’obstacles pour les personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances, ni qu’elle viole les droits à la vie privée des personnes. Avant de rejeter une personne, chaque fournisseur de logements doit considérer ses obligations aux termes du Code pour évaluer les besoins individuels de la personne et lui offrir les mesures d’adaptation nécessaires jusqu’au point de préjudice injustifié.

16. Comme l’indiquent les commentaires de la CODP au ministère des Affaires municipales et du Logement, le gouvernement de l’Ontario devrait modifier la Déclaration de principes provinciale qui oriente les efforts en matière d’aménagement du territoire, de façon à : 

  • renforcer l’engagement envers les droits de la personne
  • énoncer clairement que les municipalités doivent examiner et éliminer les obstacles à la création de logements abordables susceptibles de causer de la discrimination contre les groupes protégés aux termes du Code des droits de la personne
  • énoncer des mécanismes de responsabilisation en vue d’éliminer les obstacles discriminatoires à l'aménagement de logements abordables
  • encourager clairement les municipalités à augmenter le nombre de logements abordables dans leurs collectivités.

17. Les municipalités de l’ensemble de la province devraient passer en revue leurs règlements de zonage et règlements sur les permis autorisant les logements locatifs pour éliminer les obstacles au logement et aux services qu’utilisent les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances (comme les foyers de groupes ou centres de traitement des dépendances). Les municipalités devraient éliminer toutes les exigences qui ne sont pas légitimes ou de bonne foi et qui s’appliquent aux logements ou services utilisés par les personnes ayant des handicaps psychosociaux, mais non aux autres logements de même envergure ou services similaires.

18. Le gouvernement de l’Ontario devrait appuyer les fournisseurs de logements sociaux, coopératifs et privés pour veiller à ce qu’ils respectent leur obligation d’accommodement. Cela pourrait inclure le fait d’assurer qu’assez de tierces parties sont disponibles pour aider à combler les besoins des locataires en matière d’accommodement.

19. Les fournisseurs de logements sociaux, coopératifs et à but lucratif devraient se doter d’une expertise en matière de droits de la personne afin de pouvoir procurer des conseils en matière de droits liés au logement, enquêter sur les plaintes et agir à titre de médiateurs lorsque cela est approprié, et vérifier que leurs politiques et procédures ne créent pas d’obstacles.

Emploi :

20. L’OACP et d’autres organisations devraient promouvoir activement la mise en œuvre de la directive sur la vérification du casier judiciaire de l’OACP dans tous les services de police et organismes du secteur des personnes vulnérables, et parmi les autres employeurs y compris le gouvernement de l’Ontario.

21. La Commission de la santé mentale du Canada et l’Association canadienne des chefs de police devraient promouvoir les principes de la directive de l’OACP sur la vérification du casier judiciaire auprès des services de police et organismes du secteur des personnes vulnérables dans les autres provinces canadiennes.

22. Le Collège de police de l’Ontario et l’OACP devraient organiser de nouvelles formations et améliorer les formations existantes sur la directive relative à la vérification du casier judiciaire. L’OACP devrait superviser l’évaluation de la directive, en collaboration avec des intervenants communautaires et des groupes de personnes handicapées. Une fois que la directive sera évaluée, le gouvernement de l’Ontario devrait déterminer s’il est nécessaire d’apporter des modifications législatives pour en accroître l’efficacité.

23. Le gouvernement de l’Ontario, le secteur privé et le secteur sans but lucratif devraient créer de nouvelles possibilités d’emplois particuliers, d’assistance en emploi, d’entreprises parallèles, de pratiques d’équité en matière d’emploi et d’autres programmes spéciaux en matière d’emploi pour les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances.

24.Les organisations qui financent les programmes spéciaux en matière d’emploi et programmes d’assistance en matière d’emploi et les organisations qui offrent des emplois particuliers ou ont recours aux programmes d’assistance en matière d’emploi devraient passer en revue leurs politiques de financement et d’emploi pour éliminer toutes formes d’inégalité qui exposent les personnes ayant des handicaps psychosociaux à des conditions d’emploi différentes de celles dont bénéficient les employés qui font un travail comparable sans participer à de tels programmes.

25. Le gouvernement de l’Ontario, le secteur privé et le secteur sans but lucratif devraient passer en revue leurs politiques d’embauche, d’avancement, de maintien en poste, de discipline, d’accommodement et de congédiement pour y éliminer tout effet discriminatoire sur les personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances, et leur assurer l’égalité des chances à ces personnes.

26. Le gouvernement de l’Ontario et la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail devraient modifier la LSPAAT et les dispositions stratégiques régissant les prestations d’invalidité de travail pour y tenir compte des récentes décisions juridiques. Ils devraient s’assurer que les personnes ayant subi des préjudices mentaux aient droit aux mêmes prestations que celles qui ont subi des préjudices physiques

27. Tous les employeurs devraient élaborer des politiques et procédures de respect des droits de la personne qui énoncent les obligations de l’organisation aux termes du Code des droits de la personne, y compris l’obligation d’accommodement des personnes ayant des handicaps psychosociaux jusqu’au point de préjudice injustifié. Les employeurs devraient veiller à ce que leurs politiques en matière de droits de la personne indiquent que les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances sont protégées sur la base du handicap et éliminent les obstacles systémiques en milieu de travail (par exemple au sein de leur culture organisationnelle) qui pourraient exclure ou pénaliser ces personnes.

28. Tous les employeurs devraient offrir une formation à leurs employés et gestionnaires sur leurs responsabilités aux termes du Code relativement aux droits fondamentaux des personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances. Cette formation devrait porter sur la prévention de la discrimination et du harcèlement, l’intervention dans ce domaine, les questions systémiques touchant les personnes ayant des handicaps psychosociaux et l’obligation d’accommodement.

Services :

29. Le gouvernement de l’Ontario devrait cerner et éliminer les inégalités en matière de soins de santé, services de réadaptation et autres services de soutien auxquelles se heurtent les personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances, comparativement à la population générale.

30. Aux termes de la LAPHO et du Code, les organismes de services devraient passer en revue leurs politiques, pratiques, formulaires de demande et procédures de prise de décisions en collaboration avec des groupes d’usagers/de survivants et des experts en matière d’accessibilité de façon à cerner et à éliminer les obstacles pouvant mener au traitement inéquitable des personnes ayant des handicaps psychosociaux ou des dépendances.

30. Aux termes de la LAPHO et du Code, les organismes de services devraient passer en revue leurs politiques, pratiques, formulaires de demande et procédures de prise de décisions en collaboration avec des groupes d’usagers/de survivants et des experts en matière d’accessibilité de façon à cerner et à éliminer les obstacles pouvant mener au traitement inéquitable des personnes ayant des handicaps psychosociaux ou des dépendances.

32. L’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario (OMCO) et le ministère de la Santé et des Soins de longue durée devraient consulter la CODP et des groupes de personnes handicapées pour accroître la conformité à la politique de l’OMCO régissant l’admission de nouveaux patients.

33. L’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario devrait revoir ses politiques et procédures régissant les plaintes et éliminer les obstacles qui peuvent rendre le dépôt de plaintes relatives aux pratiques professionnelles plus difficiles pour les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances.

34. L’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario, l’Ontario Medical Association, l’Association des hôpitaux de l’Ontario et le ministère de la Santé et des Soins de longue durée devraient sensibiliser les médecins et étudiants en médecine à leurs obligations aux termes du Code de ne pas refuser des patients sur la base d’un motif interdit par le Code.

35. Compte tenu des mesures de soutien requises aux termes de la Convention relative aux droits des personnes handicapées et du libellé des articles 12 et 14, le gouvernement de l’Ontario devrait examiner et évaluer toutes les lois, politiques et normes relatives à la santé mentale en consultation avec des groupes de personnes handicapées et autres intervenants, de façon à assurer le traitement équitable des personnes ayant des troubles psychiques ou des dépendances. Cet examen devrait s’étendre au système de tutelle de l’Ontario et à ses critères d’admission forcée.

36. Le gouvernement de l’Ontario devrait mettre en œuvre des règles provinciales et des mécanismes de surveillance pour assurer le recours uniforme à la contention auprès des personnes aux prises avec des troubles mentaux ou dépendances, avec pour objectif d’utiliser la contention en dernier recours seulement.

37. Le Bureau du coroner en chef de l’Ontario devrait mener une enquête dès qu’un patient meurt dans un hôpital ou établissement psychiatrique pendant qu’il faisait l’objet d’une contention chimique ou environnementale (isolement).

38. Tous les hôpitaux devraient passer en revue et surveiller le système de privilèges en collaboration avec des groupes de personnes handicapées et le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques, afin de veiller à ce que les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale soient traitées équitablement et avec dignité en ce qui a trait aux motifs prévus dans le Code, et qu’aucune autre violation des droits de la personne ne survienne.

39. Les hôpitaux abritant des unités psychiatriques devraient déterminer comment recueillir des données relatives aux motifs prévus dans le Code si des membres des groupes protégés aux termes du Code sont traités différemment que les autres patients en matière d’isolement et de contention, à la suite de leur décès ou en ce qui a trait à d’autres questions de santé pertinentes touchant les personnes ayant des problèmes de santé mentale, de concert avec la CODP, le ministère de la Santé et des Soins de longue durée, le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques, des groupes d’usagers/de survivants et d’autres intervenants appropriés. Le guide de la CODP, Comptez-moi! Collecte de données relatives aux droits de la personne, peut être utile à ce chapitre. Les mesures de collecte de données doivent respecter la dignité des gens et protéger le caractère privé de leurs renseignements.

40. Comme l’exige la LAPHO, tous les hôpitaux devraient élaborer des politiques en matière de droits de la personne et d’accommodement, et des procédures de dépôt de plaintes régissant l’offre de services aux personnes ayant des handicaps psychosociaux et autres membres de groupes protégés aux termes du Code, et l’embauche de ces personnes.

41. Les hôpitaux devraient régulièrement promouvoir les politiques sur les droits de la personne et offrir au personnel et aux patients une formation sur ces politiques de façon à ce que tout le monde comprenne ses droits et responsabilités.

42. Les hôpitaux devraient collaborer avec les patients, les groupes de patients et le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques afin de cerner et d’éliminer les obstacles au dépôt de plaintes internes en milieu hospitalier.

43. Le gouvernement de l’Ontario et tous les hôpitaux abritant des unités de santé mentale devraient créer un système de protection du citoyen indépendant qui peut recevoir les plaintes relatives à de la discrimination ou autres questions plus générales de droits fondamentaux des personnes évoluant au sein du système psychiatrique, faire enquête sur ces plaintes et émettre des conclusions.

44. Les hôpitaux devraient faire en sorte qu’aucune personne compétente ne soit forcée de suivre un traitement psychiatrique, conformément à la Loi sur le consentement aux soins de santé et à la CRDPH.

45. Le Collège de police de l’Ontario et les services de police devraient offrir aux nouvelles recrues et agents chevronnés une formation sur les droits de la personne et l’obligation d’accommodement des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances. Tous les agents de police, y compris les nouvelles recrues et agents chevronnés, devraient aussi suivre une formation sur les techniques de désamorçage des situations de crise utilisées par les équipes d’intervention d’urgence.

46. Les services de police devraient mettre sur pied des comités communautaires, dont des usagers/survivants et des personnes aux prises avec des dépendances, pour leur fournir des conseils sur des questions en lien avec la santé mentale et la prestation de services policiers.

47. Les services de police devraient élaborer des politiques et protocoles de maintien de l’ordre qui abordent les questions liées aux droits fondamentaux des personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances.

48. Les services de police devraient recueillir des données de façon à cerner tout cas de traitement inéquitable des personnes ayant des troubles mentaux ou des dépendances déclarés ou perçus, comparativement aux autres personnes.

49. Le Conseil canadien de la magistrature et l’Institut national de la magistrature devraient offrir une formation à tous les juges en matière de droits de la personne et d’accommodement des personnes ayant des handicaps psychosociaux durant le processus d’audience.

50. Le ministère du Procureur général, le Barreau du Haut-Canada et l’Association du Barreau de l’Ontario devraient planifier des formations pour les juristes et le personnel des tribunaux en matière de droits de la personne et d’accommodement des personnes ayant des handicaps psychosociaux durant le processus d’audience.

51. Le ministère du Procureur général et Aide juridique Ontario devraient examiner leurs politiques, processus et pratiques, y retirer les obstacles à l’accès et y améliorer les mesures d’adaptation offertes aux usagers aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances.

52. La Society of Ontario Adjudicators and Regulators (SOAR) et le SOAR Administrative and Management Network (SAMN) doivent continuer de s’assurer que les nouveaux arbitres, arbitres existants et membres du personnel reçoivent une formation sur le Code, notamment sur les mesures d’adaptation à offrir aux personnes ayant des problèmes de santé mentale ou des dépendances durant le processus du tribunal.

53. Les tribunaux administratifs et autres organismes de traitement des plaintes et instances décisionnelles doivent examiner leurs politiques et procédures afin de repérer et d’éliminer les obstacles qui empêchent les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou des dépendances d’accéder à ces services. Dans le cadre de ce processus, les décideurs doivent utiliser des approches qui maximisent la participation et s’adaptent aux besoins des personnes pouvant éprouver des difficultés avec la capacité décisionnelle.

54. Le gouvernement de l’Ontario et les organisations répondant aux besoins des personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances doivent donner leur soutien actif aux services d’intervention au nom des personnes aux prises avec des troubles mentaux et collaborer avec ces services pour que ces personnes réalisent leurs droits auprès des services de logement et des hôpitaux en santé mentale. L’indépendance des services d’intervention doit être considérée comme un facteur assurant que les gens sont en mesure de faire valoir leurs droits sans crainte de conflit d’intérêts. Les organisations qui forment des intervenants doivent offrir une formation aux droits de la personne, notamment à ceux que protège le Code.

Engagements de la CODP

Engagements généraux :

E1. La CODP informera les organisations des recommandations qu’elle aura faites, et leur offrira de les aider à les mettre en œuvre, lorsque cela sera possible.

E2. La CODP collaborera avec les intervenants de la collectivité pour améliorer l’éducation publique sur les droits de la personne et la santé mentale.

E3. La CODP offrira de la formation sur sa politique régissant la maladie mentale et les dépendances dans l’ensemble de la province, aux usagers/survivants, personnes aux prises avec des dépendances, administrations publiques et organisations des secteurs public et privé.

E4. Dans ses travaux sur ses priorités stratégiques (p. ex., la police et l’antiracisme, les droits fondamentaux des Autochtones, la situation de famille, les handicaps et l’éducation), la CODP focalisera sur les droits de la personne, la santé mentale et les dépendances.

E5. La CODP continuera d’examiner la question du niveau de conseils sur les droits fournis aux personnes âgées en soins de longue durée qui sont jugées incapables de prendre des décisions concernant leur traitement. Si cela viole potentiellement le Code, la CODP soulèvera, le cas échéant, ses préoccupations auprès des parties responsables, tiendra des enquêtes d’intérêt public, interviendra dans les affaires judiciaires ou procédera à des demandes à l’initiative de la Commission.

E6. La CODP élaborera une politique régissant les droits de la personne, la santé mentale et les dépendances qui s’inspirera de sa Politique et directives concernant le handicap et l’obligation d’accommodement. Le contenu de la politique inclura des conseils et exemples sur la façon dont les organisations peuvent respecter leur obligation d’offrir des mesures d’adaptation aux personnes ayant des handicaps psychosociaux en milieu de travail et en matière de logement et de services. Cette discussion prendra en considération les préoccupations soulevées durant la consultation, les responsabilités des personnes et des organisations au cours du processus d’accommodement, ainsi que les limites de l’accommodement (préjudice injustifié).

E7. La CODP sensibilisera davantage l’Ontario Medical Association, l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario et d’autres intervenants pertinents au soutien que peut procurer le milieu médical aux personnes qui demandent des mesures d’adaptation lorsque l’accommodement de ces personnes exige la vérification médicale de leurs incapacités et besoins.

E8. La CODP surveillera les enjeux émergents en matière de maladie mentale et de dépendances tout au long des interventions juridiques qu’elle mène à la demande de la collectivité et de ses activités de réseautage avec des organisations communautaires et le COAJDP, dans les médias et au moyen d’autres approches. Elle envisagera d’aborder ces questions dans le contexte de son mandat, le cas échéant, au moyen d’éducation publique, de l’élaboration de politiques, d’enquêtes d’intérêt public, d’interventions juridiques, de requêtes devant le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario, ou d’une combinaison de ces mesures.

E9. Dans sa politique régissant les droits de la personne, la maladie mentale et les dépendances, la CODP procurera des conseils sur la façon de distinguer l’obligation d’accommodement de la prestation de traitements ou de soins aux personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou de dépendances. La politique abordera aussi la question de l’application du Code dans le cas ou une organisation refuserait d’offrir des services ou un logement à des personnes ayant des handicaps psychosociaux.

Logement :

E10. La CODP continuera de promouvoir son guide, Dans la zone : Logement, droits de la personne et planification municipale et de sensibiliser les conseils et planificateurs municipaux, cliniques juridiques, promoteurs, associations de quartier, associations de locataires et autres intervenants avec leurs droits et responsabilités aux termes du Code, de façon à prévenir l’opposition discriminatoire au logement abordable.

E11. Conformément aux engagements qu’elle a pris dans Le droit au logement, la CODP demeurera à la disposition des organisations communautaires, des municipalités/associations municipales et du gouvernement de l’Ontario pour aider à élaborer et à mettre en œuvre une stratégie à l’échelle de la province visant à prévenir et à régler les situations d’opposition discriminatoire de type « pas dans ma cour ».

E12. La CODP continuera de se prévaloir de son mandat pour contester activement les cas d’opposition discriminatoire de type « pas dans ma cour » par l’entremise de collaborations avec les conseils municipaux, d’enquêtes d’intérêt public, de contestations juridiques et d’autres initiatives, selon la situation.

E13. La CODP examinera la question de l’imposition d’exigences de traitement obligatoire dans les secteurs du logement social, des logements avec services de soutien et des logements privés dans le cadre de sa politique régissant la maladie mentale et les dépendances, et fournira des conseils supplémentaires aux locateurs et fournisseurs de logements.

E14. La CODP continuera de sensibiliser les locataires, locateurs, fournisseurs de logements et autres intervenants aux droits de la personne en matière de logement et plus particulièrement aux droits de la personne, à la maladie mentale et aux dépendances.

Emploi :

E15. La CODP soulèvera la question de la divulgation d’information sur la santé mentale empêchant les gens d’entrer aux États-Unis auprès de la Commission canadienne des droits de la personne.

E16. La CODP et le ministère du Travail discuteront des répercussions des exigences en matière de divulgation prévues dans la LSST sur les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale, et examineront les façons possibles de suivre et d’aborder la question.

E17. La CODP collaborera avec l’Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario et tout autre intervenant pertinent dans le but d’éliminer les obstacles qui empêchent le personnel infirmier aux prises avec des troubles mentaux de bénéficier d’un emploi. Pour y parvenir, la CODP envisagera de se prévaloir de son mandat, lequel peut inclure l’établissement de partenariats, la conduite d’enquêtes d’intérêt public, l’intervention dans le cadre de litiges et l’initiation de contestations juridiques.

E18. La CODP continuera de sensibiliser les employeurs, employés et syndicats aux droits de la personne en milieu de travail, notamment en ce qui a trait à la maladie mentale et aux dépendances.

Services :

E19. La CODP examinera davantage les politiques et processus relatifs à la suspension des permis de conduire, à la protection de l’enfance ou aux assurances, et consultera les intervenants et ministères gouvernementaux appropriés pour déterminer s’ils contreviennent au Code. Dans le cas de possibles violations du Code, la CODP utilisera les moyens prévus par son mandat pour régler les sources de préoccupations.

E20. La CODP sera à la disposition de l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario et du ministère de la Santé et des Soins de longue durée pour discuter du respect accru de la politique de l’OMCO relative à l’acceptation de nouveaux patients.

E21. Le cas échéant, la CODP mènera des enquêtes d’intérêt public, cherchera à intervenir dans le cadre d’affaires ou déposera des requêtes pour contester des cas de refus par des médecins de fournir des services à des personnes en raison de troubles mentaux ou de dépendances, ou prendra une combinaison de ces mesures, en conformité avec son mandat.

E22. La CODP invitera un établissement psychiatrique provincial et d’autres partenaires possédant de l’expertise en matière de droits de la personne en lien avec la santé mentale, y compris des organisations d’usagers/survivants à entreprendre un processus de changement organisationnel d’envergure visant à aborder les questions de droits de la personne soulevées durant la prestation de services aux personnes aux prises avec des troubles mentaux et des dépendances et membres d’autres groupes protégés aux termes du Code. Entre autres, un tel processus pourrait inclure un examen des politiques et pratiques internes de façon à cerner et à éliminer tout obstacle discriminatoire.

E23. La CODP collaborera avec les hôpitaux, le MSSLD, des groupes d’usagers/de survivants et d’autres intervenants appropriés pour déterminer comment recueillir des données en lien avec les droits de la personne de façon à mesurer les disparités entre les groupes protégés aux termes du Code en ce qui a trait à l’isolement, à l’usage de contention et à d’autres questions de santé pertinentes. Les mesures de collecte de données adoptées doivent respecter la dignité des gens et protéger le caractère privé de leurs renseignements.

E24. Dans son travail auprès des services de police de l’Ontario, la CODP soulèvera des questions de discrimination à l’endroit des personnes aux prises avec des troubles mentaux ou des dépendances en matière de prestation de services, et collaborera avec les services de police pour créer la capacité requise pour régler ces questions.

E25. Dans le cadre de son travail en matière de droits de la personne auprès du ministère de la Sécurité communautaire et des Services correctionnels (MSCSC), la CODP inclura au nombre des questions prioritaires le manque de mesures d’adaptation offertes aux personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances, surtout en cas d’intersection avec d’autres motifs de discrimination interdits par le Code, dont la race et les motifs connexes, d’autres formes de handicap et le sexe.

E26. La CODP poursuivra sa collaboration avec les tribunaux administratifs ontariens pour offrir une formation sur les droits de la personne, notamment sur l’obligation d’accommodement, dans la mesure où ils s’appliquent aux services aux personnes ayant des troubles psychiques et des dépendances, ainsi qu’aux autres groupes protégés aux termes du Code.

Activity Type: 

Annexe 2 : Liste d’organisations ayant soumis un mémoire écrit

Advocacy Centre for the Elderly (ACE)

ARCH Disability Law Centre (ARCH) 

Association canadienne des compagnies d’assurances de personnes

Association canadienne pour la santé mentale – Ontario (ACSM – Ontario)

Association des hôpitaux de l’Ontario (OHA)

Association des infirmières et infirmiers autorisés de l’Ontario (AIIAO)

Association des infirmières et des infirmiers de l’Ontario

Association des travailleuses et travailleurs sociaux de l’Ontario

Association du logement sans but lucratif de l’Ontario (ALSBLO)

Association ontarienne des troubles de l’apprentissage (AOTA)

Bureau de Kawartha Lakes de l’Association canadienne pour la santé mentale

Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques (BIPEP)

Bureau des conseillers des travailleurs

Bureau des droits de la personne de l’Université de Guelph

Bureau de Sudbury-Manitoulin de l’Association canadienne pour la santé mentale

Centre de toxicomanie et de santé mentale (CAMH)

Centre hospitalier pour enfants de l’est de l’Ontario (CHEO)

Centre ontarien de défense des droits des locataires (CODDL)

Clinique juridique communautaire de Nipissing

Comité consultatif de l’éducation spéciale du conseil scolaire de district Lakehead

Comité provincial de coordination des services à la personne et des services juridiques   (CSPSJ)

Empowerment Council  

Fédération des enseignantes et des enseignants des écoles secondaires de l’Ontario (OSSTF/FEESO)

Fédération du travail de l’Ontario

Federation of Rental Housing Providers of Ontario (FRPO)

Fonction publique de l’Ontario – RHOntario (FPO)

Horizons Renaissance

Landlord’s Self-Help Centre

Mary Ann Baynton and Associates Consulting

Metro Toronto Chinese and Southeast Asian Legal Clinic (MTCSALC) 

Municipality of Chatham-Kent Health and Family Services

New Mennonite Centre

Ontario Federation of Indian Friendship Centres (OFIFC) 

Ontario Restaurant Hotel and Motel Association

Ontario Shores Centre for Mental Health Sciences (Ontario Shores)

Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario (OMCO)

People Advocating for Change through Empowerment (PACE) 

Réseau des services en français de l’Est de l’Ontario (RSSFEO)

Services de logement et de soutien en santé mentale de Nipissing

Services de santé Royal Ottawa

Syndicat des travailleurs et travailleuses de l’automobile (TCA)

Toronto Community Housing Corporation Anti-Ableism Committee

York Support Services Network et service régional de police de York