Il est possible de résoudre rapidement de nombreuses situations de droits contradictoires par l’entremise d’un processus non structuré d’une ou deux rencontres, au plus. Dans un premier temps, les organisations devraient déterminer si la situation convient à l’adoption d’un processus non structuré et accéléré. Par exemple, les faits entourant l’affaire et la délimitation de chacune des revendications pourraient être simples et incontestés. Les parties pourraient déjà connaître clairement leurs revendications, droits et obligations mutuels. Elles pourraient avoir fait preuve de respect envers leurs intérêts mutuels et être prêtes à entamer sans délai des discussions à propos de solutions. Lorsqu’on entreprend un processus accéléré, on analyse généralement rapidement la situation avec les deux parties. Ici, le but n’est pas tant de procéder à une analyse précise des droits en cause, mais de trouver des solutions qui conviennent à toutes les parties et respectent les droits de la personne.
Exemple : Un centre communautaire prévoit célébrer la Journée nationale des Autochtones le 21 juin. Il s’associe avec le centre culturel autochtone local pour organiser une journée complète d’activités sur les programmes et services offerts et sur le riche héritage des peuples autochtones. La journée débutera par une cérémonie de purification. Des avis sont envoyés pour encourager le personnel et les clients à prendre part aux activités. Un membre du personnel soulève des inquiétudes à propos de son asthme et de la présence de fumée. Les deux parties reconnaissent la légitimité et l’importance des intérêts des chacun. L’employée veut que la cérémonie ait lieu et le centre autochtone veut que l’employée y participe. Ils collaborent à une solution : la cérémonie aura lieu à l’extérieur et la fumée sera redirigée dans la direction inverse de l’employée et de l’auditoire.
Si le processus non structuré accéléré ne résout pas la situation, l’organisation peut alors décider d’entreprendre un processus plus structuré complet. Cependant, il est important d’envisager dans un premier temps un processus de résolution rapide de la situation. La raison première est que, selon l’expérience de la CODP, il n’est habituellement pas nécessaire d’entreprendre un processus structuré de longue haleine. Dans la plupart des cas, il est possible de trouver des solutions relativement rapides aux situations de droits contradictoires.
Dans le cadre du processus plus structuré et complet, on applique plus rigoureusement le cadre analytique durant la première phase pour déterminer s’il existe bel et bien une situation de droits de la personne contradictoires. Les études de cas fournies à l’Annexe D peuvent aider les organisations à franchir cette partie du processus. Les études de cas sont présentées sous forme de tableau d’analyse pour aider les organisations à bien délimiter les questions d’intérêt et à en évaluer tous les aspects pertinents. Pour obtenir des renseignements détaillés sur le règlement de différents types de situations de droits contradictoires, consultez le document de la CODP intitulé L’ombre de la loi : Survol de la jurisprudence relative à la conciliation de droits contradictoires.[91]
Si, après avoir franchi la première phase, l’organisation conclut qu’on assiste bel et bien à une situation de droits de la personne contradictoires, la deuxième phase l’aidera à effectuer la conciliation des droits contradictoires. Cette politique met de l’avant un modèle de règlement extrajudiciaire des différends (RED) pour aider les organisations à mener l’analyse en trois étapes.
Type 1: Négociation
Processus volontaire de règlement des différends qui n’inclut pas la participation d’un facilitateur indépendant.
Éléments fondamentaux :
Quand l’utiliser :
Pourquoi l’utiliser :
Type 2: Conciliation (aussi appelée « médiation »)
Une tierce partie impartiale facilite la communication constructive et la résolution des problèmes dans le but de concilier les droits contradictoires des requérants.
Éléments fondamentaux :
Quand l’utiliser :
Pourquoi l’utiliser :
Le RED suit le modèle de médiation axée sur une combinaison de droits et d’intérêts souvent utilisé pour régler des revendications de droits de la personne. Dans le cadre de ce modèle, des médiateurs aident les parties à délimiter leur position dans un premier temps, puis à comprendre les droits de chacun avant d’entreprendre avec eux un processus de médiation structuré. Ce processus s’articule autour de la recherche de solutions négociées qui tiennent compte des considérations pertinentes.
Le RED axé sur une combinaison de droits et d’intérêts convient particulièrement à la résolution des situations de droits de la personne contradictoires dans le cadre desquelles aucune partie individuelle ne peut prétendre être la seule à faire l’objet d’un préjudice. Le RED exige le déploiement d’efforts créatifs et coopératifs en vue de s’entendre sur les solutions à adopter. Ces efforts sont plus susceptibles de mener à des solutions relativement durables et harmonieuses que toute intervention devant les tribunaux. Quand des parties collaborent pour résoudre un différend, chaque partie a le sentiment que la solution lui appartient, ce qui favorise l’engagement envers cette solution, la bonne volonté et le respect mutuel. Les experts du domaine des RED indiquent ce qui suit :
La considération des différents demandeurs comme étant des concitoyens, et la considération empathique de ces citoyens, offre (sic) beaucoup plus de potentiel qu’un processus adversaire dans lequel on ne trouve que des gagnants et des perdants.[93]
Une fois que l’organisation détermine qu’il est approprié d’entreprendre un processus de RED, et que les requérants acceptent d’y participer, vient le temps de choisir le type de RED qui convient le mieux à la nature du conflit. Si deux parties ou plus revendiquent des droits contradictoires, une approche conciliatoire peut constituer la meilleure option. La conciliation est un autre terme utilisé pour décrire la médiation, que l’on définit comme une négociation facilitée par une tierce partie indépendante ou impartiale. Le terme « conciliation » est plus approprié dans le présent contexte étant donné qu’il traduit mieux l’idée de « conciliation » de droits de la personne contradictoires reconnus à la première phase du processus.
Même si une seule partie a déposé une requête relativement à des droits de la personne, l’organisation pourrait déterminer que la situation peut porter préjudice aux droits d’autres parties. Dans un tel cas, l’organisation pourrait devoir « remplir deux rôles » et représenter les droits d’autres personnes ou groupes à qui la situation pourrait porter préjudice au moment de négocier avec la partie requérante. L’organisation pourrait aussi choisir de faire participer ces personnes ou ces groupes au processus.
Dans certains cas, il peut ne pas être prudent de la part de l’organisation d’assumer le rôle de médiateur, particulièrement quand une ou plusieurs des parties croient que l’organisation a contribué à l’apparition ou à l’aggravation du problème. Parfois, le recours aux services d’un conciliateur externe pourrait s’avérer utile et assurer une plus grande satisfaction des parties. Par exemple, l’organisation devrait faire appel à un conciliateur externe si elle a exprimé un point de vue ou un intérêt qui pourrait donner l’impression de partialité.
Malgré tous les efforts des organisations, la méthode de RED ne pourra pas régler toutes les situations de droits contradictoires. Certaines parties pourraient ne pas vouloir faire de concessions, ou respecter ou reconnaître la dignité de la ou des autres parties. Elles pourraient croire, avec raison ou à tort, qu’elles obtiendront un règlement « plus favorable » devant un tribunal judiciaire ou administratif. Dans certains cas, la saisie d’un tribunal sera inévitable. Lorsqu’une situation de droits contradictoires se retrouve devant les tribunaux, la politique et l’approche de la CODP peuvent aider les décisionnaires à résoudre la situation dans le cadre d’instances judiciaires officielles.
[91] Supra, note 7.
[92] La CODP aimerait remercier Desmond Ellis, Lesley Jacobs, Lorne Foster et Robin Smith du York Centre for Public Policy and Law pour leurs perspectives et contributions à cette section.
[93] Lorne Foster et Lesley Jacobs, « Le contexte de la citoyenneté partagée dans les revendications concurrentes de droits de la personne : vers un cadre de politique sociale », Diversité canadienne, volume 8, no 3, été 2010, p. 13.