Il est temps d'agir : Faire respecter les droits des personnes âgées en Ontario

Résumé

Il est temps d'agir : Faire respecter les droits des personnes âgées en Ontario est le titre du rapport final issu de la recherche approfondie et des vastes consultations de la Commission ontarienne des droits de la personne sur les questions de droits de la personne intéressant les personnes âgées.

Environ 1,5 million de personnes âgées vivent actuellement en Ontario. D'ici 2021, l'Ontario comptera plus de trois millions de personnes de 65 ans et plus. Comme le révèle ce rapport, cette proportion considérable et grandissante de la population doit affronter des obstacles importants attribuables à l'âgisme et à la discrimination fondée sur l'âge. Il est grandement temps d'agir et d'éliminer les obstacles afin que les personnes âgées puissent participer pleinement aux activités de nos collectivités, jouir des mêmes droits que les autres citoyens et vivre leur vieillesse dans la dignité. Il faut adopter à l’égard du vieillissement une attitude qui valorise la dignité et la richesse des aînés, qui leur assure une autonomie, une sécurité, une participation à part entière dans la société et qui leur permette de s’épanouir pleinement.

Le rapport fait l'aperçu des commentaires que la Commission a reçu de plus d'une centaine d'organismes et de personnes à l’échelle de la province. Il décrit brièvement les mesures gouvernementales et collectives recommandées qui s’inspirent des suggestions des personnes et organismes consultés ainsi que les «Engagements de la Commission», qui sont des mesures que la Commission prendra pour éliminer l'âgisme et la discrimination fondée sur l'âge en Ontario.

Dignité, autonomie, participation, justice et sécurité

La dignité, l'autonomie, la participation, la justice et la sécurité ont été constamment mentionnées à titre de principes directeurs guidant l’étude des questions touchant les personnes âgées. Ces principes reprennent le texte du préambule du Code des droits de la personne de l'Ontario le «Code» et représentent l'intention de ses mécanismes de protection des droits de la personne. Le rapport souligne que la Commission d'inspirera de ces principes dans ses futurs travaux en matière de politique sur le vieillissement et il recommande que ces principes soient intégrés aux politiques et aux programmes des organismes privés et publics.

Âgisme

Si l'âgisme peut provoquer des actes discriminatoires chez les particuliers, il peut aussi avoir un impact plus large en influant sur les politiques, programmes et lois qui touchent divers secteurs de la société. Le rapport souligne que les obstacles que doivent surmonter les personnes âgées sont souvent de «stéréotypes sociaux», c'est-à-dire qu'ils ne sont pas attribuables au vieillissement, mais plutôt à la réaction de la société à l’égard de celui-ci. De plus, le fait de ne pas répondre aux besoins des personnes âgées et de concevoir des systèmes et des structures qui ne tiennent pas compte d'elles est également une forme d'âgisme.

Les recommandations du rapport soulignent la nécessité d'évaluer les politiques et les programmes de manière à garantir qu'ils ne soient pas fondés sur des stéréotypes sur l'âge et qu’ils ne les encouragent pas, et le besoin d'une éducation à tous les niveaux afin de créer une perception positive des personnes âgées et un milieu qui leur offre un soutien. Le rapport souligne également que la Commission créera et lancera une campagne de sensibilisation d'envergure sur l'âgisme et la discrimination fondée sur l'âge.

Âge et intersectionnalité

Le rapport souligne les effets uniques ou combinés du vieillissement sur certains groupes tels que les femmes âgées, les personnes âgées handicapées, les personnes âgées homosexuelles et les personnes âgées ayant des antécédents linguistiques, religieux, ethniques ou raciaux divers. Il fait des recommandations aux partenaires de la collectivité et du gouvernement afin de les aider à s’assurer que leurs politiques et leurs programmes n'entraînent ni marginalisation, ni discrimination, ni désavantages particuliers pour ces groupes.

Emploi

L'emploi est essentiel à la participation égale et à l'égalité des chances dans la société ainsi qu'au sentiment de dignité et d'estime de soi d'une personne. Le rapport souligne que, dans le monde du travail, la discrimination fondée sur l'âge, en particulier sous forme de retraite obligatoire, ainsi que sur des suppositions et des stéréotypes négatifs envers les travailleurs âgés, constitue un problème assez grave. Le rapport cite des cas de discrimination âgiste dans le monde du travail pouvant entraîner des difficultés financières, des troubles psychologiques et émotifs et un sentiment de perte et d'injustice.

Le rapport souligne que la retraite obligatoire est discriminatoire. Il recommande de modifier le Code afin d'éliminer la défense de la retraite obligatoire à 65 ans et de mettre en place des mesures de protection contre la discrimination fondée sur l'âge pour les travailleurs de plus de 65 ans. De plus, le rapport demande aux employeurs de garantir que le lieu de travail soit exempt de stéréotypes âgistes et offre une chance égale et que les politiques et les procédures de travail n'aient pas de répercussions négatives sur les travailleurs âgés. Enfin, il souligne que la Commission entreprendra des activités de sensibilisation du public afin de communiquer aux employeurs et aux employés leurs droits et leurs responsabilités en vertu du Code et de favoriser des milieux de travail positifs pour les travailleurs âgés.

Logement

Un logement abordable et accessible et la possibilité de vieillir dans le milieu désiré sont essentiels à la qualité de vie des personnes âgées. Le rapport traite en détail du manque actuel d'options en ce qui concerne les logements accessibles et abordables et les logements sociaux en Ontario. De plus, on souligne que le principe du «vieillissement chez soi» constitue une option de logement capitale pour les personnes âgées.

Le rapport recommande donc que tous les paliers de gouvernement collaborent afin d’élaborer une stratégie relative aux logements abordables pour les personnes âgées, d’assurer que le parc de logements sociaux de l’Ontario réponde aux besoins existants et futurs des personnes âgées et des autres personnes vulnérables de l'Ontario, et que le gouvernement provincial modifie la Loi de 1992 sur le code du bâtiment de l’Ontario afin d’y incorporer les meilleurs principes de l’aménagement pour accès facile et que les promoteurs et les constructeurs conçoivent et mettent en œuvre des logements à accès facile. Le rapport souligne également que la Commission traitera des problèmes de droits de la personne qui touchent les personnes âgées dans ses futurs travaux sur le logement et les droits de la personne.

Soins, établissements et services de santé

Les obstacles aux soins, aux établissements et aux services de santé ont des répercussions négatives sur la dignité, l'estime de soi, l'autonomie et la pleine participation des personnes âgées. On a donné un aperçu des préoccupations concernant le système de santé actuel, notamment l’insuffisance de fonds, donc l’insuffisance de soins de santé communautaires, le manque de professionnels des soins, et plusieurs préoccupations concernant les établissements de soins de longue durée. On a également traité des obstacles physiques, tels que l’accessibilité aux édifices, et des obstacles sociaux, tels que les mesures restrictives au sein du système de santé. De plus, on a traité des obstacles dans le domaine des services généraux et dans celui des services de transport en particulier.

Le rapport recommande donc que les établissements, les installations et les services de santé soient accessibles pour toutes les personnes âgées, en particulier celles qui sont handicapées ; que le gouvernement provincial prenne d'autres mesures pour réglementer les maisons de repos et les foyers pour personnes âgées, et que les écoles de médecine et les centres de formation liés à la santé fassent en sorte que leurs diplômés reçoivent une formation adéquate sur les besoins des personnes âgées. De plus, il souligne que la Commission collaborera avec les facultés de médecine et les autres programmes qui forment les professionnels travaillant avec les personnes âgées afin d’assurer qu'un enseignement sur l'âgisme et la discrimination fondée sur l'âge soit compris dans leur programme d'études, et que la Commission continue de collaborer avec les fournisseurs de service afin de promouvoir l'accessibilité dans l'ensemble de la province.

Mauvais traitements à l'égard des personnes âgées

Les mauvais traitements à l'égard des personnes âgées constituent un problème relatif aux droits de la personne et exigent une réponse efficace du gouvernement et des collectivités de l'Ontario. Le rapport donne un aperçu des nombreuses formes de mauvais traitements à l'égard des personnes âgées et cite l'âgisme, la vulnérabilité socio-économique, le stress chez les soignants, le manque de réglementation dans les établissements de soins, le manque de lits de soins de longue durée et le manque de logements accessibles et abordables comme des facteurs contribuant aux mauvais traitements à l'égard des personnes âgées.

Le rapport recommande que les mécanismes actuellement en place pour traiter les autres formes de violence familiale soient élargis pour comprendre les mauvais traitements à l'égard des personnes âgées et que le gouvernement provincial et l'administration municipale prennent des mesures afin d'appuyer les programmes spéciaux, dont les refuges, pour les personnes âgées victimes de mauvais traitement. Le rapport mentionne également que la Commission continuera de surveiller les résultats de la Table ronde sur la Stratégie ontarienne de prévention des mauvais traitements à l'égard des personnes âgées.

Soins des personnes âgées

Le soin des personnes âgées est un besoin de plus en plus grand qui demande des réponses créatives de la part du gouvernement. Les soignants, pour la plupart des femmes, jouent un rôle sociétal essentiel et ne doivent pas assumer seuls cette responsabilité. Le rapport soutient que les lois, les programmes, le financement et l'engagement des employeurs envers la souplesse dans le milieu de travail sont nécessaires pour permettre aux soignants d'équilibrer les exigences des soins et celles de leur emploi.

Dans ces conditions, le rapport recommande que le ministère du Travail étende les nouvelles dispositions sur les congés (stipulées dans la Loi de 2000 sur les normes d’emploi) pour leur permettre d’englober les très petites entreprises, notamment celles qui comptent moins de 50 employés, et que tous les paliers de gouvernement et tous les employeurs songent à offrir diverses formes de soutien aux soignants dans le milieu de travail. Il souligne également que la Commission poursuivra ses travaux sur la question des soins aux personnes âgées et qu'elle examinera les plaintes des employés qui font l'objet d'une discrimination en raison de leur « situation familiale », de leur « état matrimonial » ou de leur « relation homosexuelle » lorsqu'ils prennent soin de parents ou d'un conjoint ou partenaire du même sexe âgés ou malades.

Conclusion

Les problèmes relevés dans ce rapport soulèvent des questions importantes en matière de droit de la personne auxquelles la Commission et la société en général doivent répondre. La Commission est très heureuse de collaborer avec le gouvernement et les partenaires de la collectivité afin de garantir que ces mesures et celles qu'on prendra dans l'avenir offriront aux personnes âgées de cette province une existence exempte de discrimination où elles pourront vivre dans la dignité et en toute sécurité, mener une vie pleine et indépendante. C'est dans cet esprit que la Commission soumet respectueusement ce rapport à l'examen de tous les Ontariens.

Code Grounds: 
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Introduction

«...dans un monde régi par les droits, nous devons nous interroger sur les services que nous, en tant que citoyens ontariens, devrions nous attendre à recevoir lorsque nous serons vieux [et] sur ceux que les personnes âgées devraient maintenant recevoir.»
(CASC de Chatham-Kent)

En 1999, Année internationale des personnes âgées, la Commission ontarienne des droits de la personne (la Commission) a entrepris une étude portant sur les droits des personnes âgées en Ontario. La première étape consistait, entre autres, à étudier les questions essentielles. Le fruit de cette réflexion est le document de discussion intitulé La Discrimination et l'Âge : Problèmes relatifs aux droits de la personne vécus par les personnes âgées en Ontario, publié en juillet 2000. Ce document a cerné un certain nombre de problèmes qui sont, semble-t-il, d'intérêt public. Ces problèmes ont également été étudiés dans d'autres documents, notamment The Changing Face of Ontario: Discrimination and our Aging Population, rapport publié en septembre 2000 qui a lancé un processus de consultation approfondie à la grandeur de la province.

Les réactions enthousiastes que nous avons reçues prouvent l'importance de cette question pour tous les Ontariens.
Les renseignements sur notre processus de consultation ont été envoyés à plus de 400 intervenants, dont le nom a été affiché sur le site Web de la Commission et annoncé dans les journaux. Nous avons reçu les commentaires écrits de plus de 100 personnes. Une commission présidée par le commissaire en chef a tenu des séances de consultation publique à London, à Toronto, à Ottawa et à Sudbury. Ce rapport est le fruit de nos recherches et reflète les opinions de la population. Nous remercions tous ceux qui ont pris le temps d'assister aux séances de consultation publique, de téléphoner ou de nous écrire. Leurs commentaires éclairés et détaillés nous ont été fort utiles.

Les réactions enthousiastes que nous avons reçues prouvent l'importance de cette question pour tous les Ontariens. Une chose ressort clairement de l'étude : nous devons changer d'attitude envers le vieillissement. En effet, d'ici l'an 2021, l'Ontario comptera trois millions de personnes âgées, soit deux fois la population de 1998. En tant que société, nous ne pouvons plus nous permettre de ne pas considérer la discrimination basée sur l'âge comme une atteinte grave à la dignité et à la valeur des personnes qui y sont exposées. Il faut adopter une nouvelle attitude : une attitude qui favorise la dignité et la valeur des personnes âgées et permette l'autonomie, la sécurité, la pleine participation et l'épanouissement. Nous devons nous assurer que nous traitons les personnes âgées d'aujourd'hui comme nous aimerions être traités à leur âge. Il est temps d'agir et de changer nos attitudes, nos politiques et nos pratiques, sinon les Ontariens de tous les âges en souffriront. La Commission espère que ce document esquissera une politique qui servira de point de départ au changement.

Envergure du rapport

Ce rapport vise à étudier dans toute leur étendue les problèmes pouvant affecter la dignité et la valeur des personnes âgées, ainsi que l'égalité de leurs droits et de leurs chances.

Le mandat de la Commission est décrit dans le Code des droits de la personne de l'Ontario (le «Code»), loi ontarienne qui interdit la discrimination et le harcèlement dans cinq domaines : 1) l'emploi, 2) le logement, 3) les biens, services et installations, 4) les contrats et 5) l'appartenance à des associations commerciales ou professionnelles. Le préambule du Code énonce clairement ses objectifs :

ATTENDU que la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde et est conforme à la Déclaration universelle des droits de l'homme proclamée par les Nations Unies;

ATTENDU que l'Ontario a pour principe de reconnaître la dignité et la valeur de toute personne et d'assurer à tous les mêmes droits et les mêmes chances, sans discrimination contraire à la loi, et que la province vise à créer un climat de compréhension et de respect mutuel de la dignité et de la valeur de toute personne de façon que chacun se sente partie intégrante de la collectivité et apte à contribuer pleinement à l'avancement et au bien-être de la collectivité et de la province;...

La Commission exécute son mandat et tente de réaliser les objectifs énoncés dans le préambule du Code de deux façons principales : d'une part, par la réception des plaintes portant sur les infractions aux règlements sur les droits de la personne et par l'application de la loi à ce sujet et, d'autre part, en favorisant les droits de la personne et en éduquant la population. Pour ce qui est de cette deuxième façon, la Commission exerce les fonctions suivantes :

  • favoriser les droits de la personne;
  • promouvoir la compréhension, l'acceptation et le respect du Code;
  • informer la population, l'éduquer et effectuer des études destinées à éliminer la discrimination;
  • examiner et revoir les lois, règlements, programmes et lignes de conduite, et faire des recommandations sur une disposition, un programme ou une ligne de conduite qui peut être incompatible avec le Code;
  • enquêter sur des problèmes susceptibles de surgir, favoriser et coordonner des projets, des programmes et des activités propres à éviter ou à atténuer ces problèmes; promouvoir, aider et encourager la participation de personnes, de groupes ou d'organismes privés, municipaux ou publics à des programmes visant à atténuer les tensions et les conflits dus à l'identification de personnes par un motif illicite de discrimination;
  • encourager la participation d'organismes publics et privés à des programmes visant à atténuer la discrimination. (article 29 du Code).

C'est sur le fondement de ces pouvoirs que la Commission a entrepris cette étude.

Ce rapport vise à étudier dans toute leur étendue les problèmes pouvant affecter la dignité et la valeur des personnes âgées, ainsi que l'égalité de leurs droits et de leurs chances.

Le rapport commence par établir la nécessité de considérer la dignité, l'autonomie, la participation, l'équité et la sécurité comme des valeurs de base dans l'étude des problèmes des personnes âgées. De plus, il introduit le concept d'âgisme et son rôle central dans la discrimination basée sur l'âge. Le rapport fait le point sur les désavantages subis par certains groupes de personnes âgées, compte tenu de l'âge et d'autres aspects identitaires. Enfin, le rapport décrit en détail ce que la Commission a entendu durant ses consultations en ce qui concerne l'emploi, le logement, les soins de santé, les institutions et les services, la violence et la négligence à l'égard des aînés, et les soins donnés aux personnes âgées.

Ce document sera à la base des futures politiques de la Commission. Les exposés de principes de la Commission expliquent comment la Commission interprète les dispositions du Code. Ces exposés sont importants parce que la population a le droit de s'attendre à ce que la Commission respecte les politiques qu'elle a publiées. Ils établissent également des normes sur les comportements que les particuliers, les employeurs, les fournisseurs de services et les décideurs doivent adopter afin de s’assurer que tous les Ontariens soient traités équitablement.

Bien que la Commission ait l'intention d'appliquer sans plus tarder les engagements qu'elle a pris dans ce rapport, c’est-à-dire, d'en faire davantage pour favoriser les droits des personnes âgées en Ontario, elle reconnaît que ces mesures ne sont pas suffisantes. Il faut que tous les paliers de gouvernement, le secteur privé, les organismes à but non lucratif et particulièrement tous ceux qui travaillent auprès des aînés fassent des efforts concertés. Les décideurs et les législateurs de la province doivent prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que les Ontariens de tout âge soient traités équitablement.

Aussi ce rapport fait-il des recommandations sur l'élimination des pratiques et des attitudes qui limitent la capacité des aînés à participer pleinement à la vie sociale. Les soumissions ont donné à la Commission un grand nombre de recommandations sur les manières de combattre la discrimination basée sur l'âge. Les Recommandations pratiques destinées au gouvernement et à la société présentées dans chaque section de ce rapport sont inspirées des suggestions reçues portant particulièrement sur les problèmes de droits de la personne intrinsèques à la discrimination basée sur l'âge. Elles servent à suggérer au gouvernement et à ses partenaires communautaires dans toute la province les premières mesures à adopter pour combattre la discrimination basée sur l'âge et ses effets.

De plus, chaque section énonce les Engagements de la Commission, qui sont les mesures que prendra la Commission pour combattre la discrimination. La Commission a hâte de travailler avec le gouvernement, avec tous les secteurs et tous les partenaires communautaires à l'application des recommandations faites dans ce document.

Il faut que tous les paliers de gouvernement, le secteur privé, les organismes à but non lucratif et particulièrement tous ceux qui travaillent auprès des aînés fassent des efforts concertés. Les décideurs et les législateurs de la province doivent prendre les mesures nécessaires pour assurer l'égalité des Ontariens de tout âge.

 

Dignité, autonomie, participation, équité et sécurité

Dans le cadre du processus de consultation, presque tous les citoyens et les groupes ont affirmé que certains principes centraux méritent une attention spéciale. Des organismes nationaux et internationaux ont mentionné les mêmes principes. En particulier, le Cadre national sur le vieillissement[1] du Canada, élaboré par les ministres du fédéral, des gouvernements provinciaux (à l'exception de celui du Québec) et territoriaux responsables des personnes âgées en vue de mieux répondre aux besoins de la population vieillissante au Canada, accorde une importance particulière aux cinq principes suivants :

«Pour beaucoup, la dignité humaine se vit et s'exprime avant tout par le travail. En tant qu'animal social, l'homme a besoin de se sentir valorisé et maître de sa destinée. Pour y arriver, il doit savoir qu'il est utile à la société ...un grand nombre de retraités ont l'impression d'être inutiles et de ne plus rien valoir.»
(Dee Stewart)

Dignité : Être traité avec respect, quelle que soit la situation, et avoir une bonne estime de soi; être accepté comme on est, peu importe notre âge, notre état de santé, etc.; être apprécié pour nos réussites; être respecté pour le rôle qu'on joue au sein de notre famille, auprès de nos amis et dans la société; être traité comme un être humain à part entière et un membre utile de la société.

Autonomie : Être maître de sa destinée, être le plus autonome possible et faire ses propres choix, c.-à-d. prendre des décisions sur les petits problèmes de tous les jours; être responsable, dans la mesure du possible, de ce qui nous touche; avoir la liberté de décider comment on vivra sa vie; pouvoir accéder à un système de soutien qui favorise la liberté de choix et l'autodétermination.

«Les moyens de transport doivent être économiques, accessibles et flexibles afin que nos clients puissent arriver chez le médecin à l'heure et sans problème, faire leurs courses (épicerie, banque, etc.) et sortir de leur isolement en sortant et en visitant leur famille et leurs amis.»
(KFL&A Community Care Access Centre)

Équité : Faire en sorte que les besoins réels des aînés, dans toute leur diversité, soient considérés comme des besoins égaux à ceux des autres Canadiens, c.-à-d., leur permettre un accès équitable (sur le plan social, économique et politique) aux ressources et aux services; faire en sorte qu’ils ne soient pas victimes de discrimination en raison de leur âge; les traiter de façon à ce qu'ils ne se sentent pas rejetés.

Participation : Participer à la vie sociale, demeurer actif, être consulté par le gouvernement et faire entendre ses opinions au gouvernement, c.-à-d. participer à toutes les facettes de la vie (sociale, économique et politique); jouer un rôle important dans la vie de tous les jours; jouir des petits plaisirs de la vie; participer aux programmes et aux services; participer aux activités quotidiennes (décisions/initiatives dans tous les domaines, et non pas seulement ceux destinés aux aînés).

Sécurité : Disposer d'un revenu suffisant et être bien entouré dans un milieu sans danger (avoir assez d'argent pour s'acheter ce dont on a besoin tous les jours); être à l'abri des dangers physiques (bonnes conditions de vie, sentiment de protection contre le crime, etc.); pouvoir visiter sa famille et ses amis; établir des liens étroits sur les plans personnel et social; être soutenu.

«Nous ne voulons pas seulement que les plus jeunes s'occupent de nous, nous voulons aussi participer pleinement à la construction et au maintien d'une société juste et civilisée.»
(Corporation Canadienne des Retraités intéressés)

Ces principes reflètent la lettre du préambule du Code, ainsi que son esprit, axé sur la protection des droits de la personne. Ils seront donc très utiles à l'élaboration des politiques de la Commission sur le vieillissement. De plus, l'application de ces principes ira au-delà de l'élaboration des politiques de la Commission. Le gouvernement, les secteurs privés et publics et les autres intervenants peuvent les appliquer en les adaptant à l'élaboration, à l'analyse et à l'évaluation de toute politique ou de tout programme, nouveau ou existant, pouvant affecter les personnes âgées. Le Cadre national sur le vieillissement est un outil essentiel de ce processus. Reconnaissant l'importance de cette analyse et le caractère crucial de cet outil, la Commission propose les recommandations suivantes :

Recommandation pratique destinée au gouvernement et aux groupes communautaires

  1. QUE les cinq principes du Cadre national sur le vieillissement soient intégrés aux politiques et aux programmes des organismes publics et privés.

[1] Le Cadre national sur le vieillissement se trouve sur le site Web de Santé Canada, Direction générale de la promotion et des programmes de la santé, Division du vieillissement et des aînés à http://www.hc-sc.gc.ca/seniors-aines/nfa-cnv/.

Âgisme

Au cours de la consultation, la Commission a entendu parler constamment de l'âgisme et de ses effets. Si l'âgisme peut provoquer des actes discriminatoires chez les particuliers, il peut aussi avoir un impact plus large en influant sur les politiques, programmes et lois qui touchent divers secteurs de la société. Aux fins de ce rapport, le terme «âgisme» se rapporte à deux types de comportements ayant un effet négatif sur les aînés. Le premier est une interprétation fautive des effets du vieillissement, faite de préjugés et de stéréotypes à l'endroit des personnes âgées. Le second est une tendance à vouloir structurer la société selon la présupposition que tout le monde est jeune, de sorte que l’on n’arrive pas à répondre adéquatement aux besoins réels des personnes âgées.

Attitudes négatives et stéréotypes

La consultation a insisté sur le fait qu'une grande partie des problèmes rencontrés par les personnes âgées proviennent de l'attitude des gens. La plupart des symptômes apparents du vieillissement sont en fait des stéréotypes sociaux. Autrement dit, ils ne font pas vraiment partie du processus de vieillissement, mais plutôt de l'image qu'en a la société.

...l'aspect physique du vieillissement compte peut-être pour 25 p. 100 de ce phénomène dans la société américaine. Les autres soixante-quinze pour cent concernent un autre type de vieillissement qui n'a rien à voir avec l'aspect physique, mais qui vient plutôt du rôle que l’on a imposé «aux personnes âgées» par notre folklore, nos préjugés et nos idées fausses sur l'âge[2].

«...On m'a mis à la retraite à l'âge de 58 ans après plus de 24 ans de service sous prétexte que ''après 50 ans, les employés ne peuvent plus être formés''.» (un Ontarien)

«Il existe un mythe selon lequel, arrivés à l'âge de 65 ans, les employés se mettent soudainement à tomber malades, à devenir fous, à perdre leur autonomie et à recourir à l’aide sociale.»
(Corporation Canadienne des Retraités intéressés)

«...On blâme de plus en plus les personnes âgées pour... la hausse des coûts des soins de santé et les difficultés qu'on éprouve à accéder à...ces services....[Cette façon de penser] est souvent évidente dans la façon dont la population et les médias discutent du réseau de santé... [On dit que] les aînés ''monopolisent'' les lits...» (Association des travailleuses et travailleurs sociaux de l'Ontario)

«Les stéréotypes et les attitudes négatives... sont le thème prédominant que nous observons dans l'exercice de nos fonctions. Selon nous, il est tout à fait vrai d'affirmer que ce sont les stéréotypes sur le vieillissement et les capacités des aînés qui causent la discrimination à leur endroit.» (Advocacy Centre for the Elderly)

La Commission a été informée de plusieurs exemples d'attitudes négatives et de stéréotypes :

Le Code fournit lui-même ce qui est peut-être l'un des exemples d'âgisme les plus éloquents qui soient. En effet, l'article 10(1) stipule :
La définition restrictive de l'âge dans les lois sur les droits de la personne, qui permet aux employeurs d'imposer la retraite obligatoire à 65 ans, prouve à quel point l'âgisme est enraciné dans notre culture.

«âge» Dix-huit ans ou plus, sauf au paragraphe 5(1), où le terme «âge» s'entend de dix-huit ans ou plus et de moins de soixante-cinq ans;

Le paragraphe 5(1) interdit la discrimination dans l'emploi. Autrement dit, toute personne de plus de 65 ans ne peut pas se plaindre d'être victime de discrimination basée sur son âge après s'être fait mettre à la retraite. Cette clause autorise les employeurs à imposer la retraite obligatoire à 65 ans et empêche les employés de se plaindre de discrimination lorsqu'on les force à prendre leur retraite à 65 ans.

La définition restrictive de l'âge dans le Code prouve à quel point l'âgisme est enraciné dans notre culture. Certains ont remarqué que cette mesure perpétue l'âgisme en faisant croire que les travailleurs de plus de 65 ans n'ont pas le droit de recevoir un traitement équitable en raison de leur âge.

L'âgisme et ses effets ne se limitent pas à la retraite obligatoire. La Commission a aussi entendu dire que l'âgisme contribue à la violence et à la négligence à l'égard des aînés et qu'il joue un rôle important dans les difficultés rencontrées par les personnes âgées dans les domaines du logement, des soins de santé, des services et des institutions. Les personnes consultées ont confié à la Commission que l'âgisme s'exprime par l’attitude des fournisseurs de soins de santé et de services à l’égard des aînés et par la façon dont les options de logement pour personnes âgées sont formulées en Ontario. L'âgisme, dans toutes ses manifestations, a pour effet de paralyser les aînés dans ces aspects pourtant très importants de leur vie.

Ne pas tenir compte des besoins des personnes âgées en Ontario

«Les attitudes âgistes persistent chez de nombreux médecins (“À quoi vous attendez-vous à votre âge ?” ...surtout si le patient souffre d'un trouble mental.»
(Association canadienne pour la santé mentale – direction de Windsor-Essex)

La Commission a entendu plusieurs exemples de la deuxième forme d'âgisme, notamment notre façon de ne pas tenir compte des besoins réels des personnes âgées et de ne pas mettre en place des services et systèmes qui leur conviennent. En voici quelques-uns :

  • traiter certains maux comme la perte d'ouïe ou la dépression comme s'ils faisaient partie intégrante du processus de vieillissement et, partant, ne pas offrir d'évaluation ou de traitement approprié;
  • synchroniser les feux pour piétons en fonction du temps qu’il faudrait à une personne adulte, jeune et valide pour traverser la rue, sans tenir compte du temps que prendrait une personne âgée, surtout si elle est invalide;
  • consacrer le gros des dépenses en matière de santé aux soins intensifs en oubliant les soins à long terme, les soins chroniques;
  • mettre l'accent sur la rapidité et l'«efficacité» des services au détriment du temps passé auprès des aînés.

Notre société devrait être conçue de façon à inclure tout le monde. Il faut tenir compte de tous les besoins, y compris ceux des personnes âgées, afin d'éliminer les obstacles physiques, systémiques et comportementaux. Le fait de présumer que tout le monde est jeune et bien portant et de concevoir les programmes et les installations dans cette optique est une forme d'âgisme que la société doit combattre. La Commission a entendu dire que certains paliers de gouvernement se sont mis à faire des études selon le sexe. Le gouvernement devrait en faire de même pour l'âge et analyser l'impact des lois, des politiques et des programmes sur toutes les catégories d'âges.

Mesures destinées à combattre l'âgisme

Pourcentages de personnes âgées participant à des activités de bénévolat, 1997. Bénoévolat structure: Hommes=24, Femmes=21.8, Total=22.8. Bénévolat informel: Hommes=58.9, Femme= 57, Total= 57.8. Source: Statistiques Canada

Reconnaître le rôle des personnes âgées[3]

On a dit à la Commission qu'on devrait reconnaître davantage le rôle joué par les personnes âgées. En effet, celles-ci offrent à la société leur sagesse et leur expérience, comme on peut le constater par le grand nombre de juges, de politiciens, d'entrepreneurs et d'employeurs qui sont avancés en âge. Les aînés sont des consommateurs et des investisseurs; ils jouent aussi un rôle essentiel en tant que soignants et bénévoles. Ne serait-ce que pour ces raisons, la société devrait peindre un portrait plus flatteur de ses aînés.

Comme l'a remarqué un groupe : «Il faudrait songer à reconnaître le rôle joué par les aînés, non seulement en leur qualité de travailleurs, de bénévoles et de citoyens... riches de l'expérience de toute une vie, mais aussi dans la création des politiques publiques qui touchent tout un chacun dans notre société.» (Corporation Canadienne des Retraités intéressés)

Campagnes de sensibilisation et médias

Les participants ont suggéré à la Commission de lancer des campagnes de sensibilisation à la radio, à la télévision, dans les journaux, les revues et ailleurs, comme dans le métro et les autobus, pour dissiper les mythes et stéréotypes sur les personnes âgées. Ces campagnes devraient représenter les aînés sous un jour flatteur en les montrant comme des membres actifs et utiles de notre société. Un groupe a remarqué que ces campagnes ne servent pas seulement à combattre l'âgisme mais qu’elles aident aussi ses victimes à reconnaître l'âgisme et à y réagir. En plus de sensibiliser la population par des campagnes médiatiques, on a suggéré d'étudier l'image des aînés dans les médias pour s'assurer qu'elle soit objective et qu'elle ne contribue aux attitudes négatives.

Initiatives au sein du réseau d'éducation

«D'après notre expérience, les activités et programmes intéressants qui rassemblent les membres de différentes générations dissipent les stéréotypes et les mythes, et établissent un climat d'entraide et de partage.»
(Générations unies Ontario)

Les participants ont souligné à quel point il est important de changer d'attitude à l’égard des aînés, et ce, dès le plus jeune âge. Comme l'a remarqué un groupe : «On adopte ses attitudes dès l'enfance. Les images négatives des personnes âgées peuvent provoquer une attitude âgiste dès les premières années. Si ces mythes et stéréotypes ne sont pas combattus, ils deviendront des croyances établies et la société aura produit un autre âgiste confirmé.» (Générations unies Ontario)

C'est pour ces raisons qu'il faut lancer dans les écoles publiques et secondaires des initiatives de sensibilisation sur le vieillissement et l'âgisme sous toutes ses formes. Un groupe a suggéré que les programmes intergénérationnels sont

particulièrement efficaces lorsqu'on veut créer des ponts entre les générations et lutter contre l'âgisme. Un programme intergénérationnel est une interaction, prévue et voulue, entre différentes catégories d'âges, des bébés aux personnes âgées, dans une variété de situations permettant une communication étroite, le partage des sentiments et des idées et la coopération à des tâches intéressantes. Si ces programmes servent à favoriser la santé et le bien-être des aînés, ils sont également bénéfiques pour la société tout entière[4].

Beaucoup de soumissions ont mis l'accent sur le besoin en initiatives éducatives dans les collèges et universités et dans la formation à certains emplois. En particulier, les employés qui travaillent auprès de la population devraient recevoir une formation qui dissipe les préjugés et les attitudes négatives, et qui les sensibilise aux besoins des personnes âgées. Les initiatives éducatives devraient comporter une formation enrichie en gérontologie, en soins, en techniques de communication et en éducation tenant compte de la détérioration cognitive causée par les démences (maladie d'Alzheimer, etc.). La Commission a entendu dire que l'amélioration de la formation donnée aux médecins, aux infirmières, aux autres spécialistes de la santé, à la police, aux avocats, aux journalistes, aux travailleurs sociaux, aux décideurs et à tous ceux qui travaillent auprès des aînés serait un bon point de départ.

«La formation des employés [du transport en commun] devrait inclure la sensibilisation aux problèmes vécus par les personnes âgées ou handicapées.» (Coalition des organismes d'aînés et d'aînées de l'Ontario)

«Il faut donner une formation spécialisée aux soignants et aux employés des foyers pour personnes âgées.» (Société canadienne de l'ouïe)

«À mesure que la population vieillira et que l'espérance de vie allongera, les médecins devront se familiariser avec le vieillissement et les besoins médicaux des aînés. Or, à l'heure actuelle, les cinq écoles de médecine de l'Ontario consacrent un pourcentage infime de leur programme scolaire au vieillissement ou à la démence... Les médecins de famille étant souvent la première personne que consulte le malade, il est important de leur donner une formation plus approfondie.» (Société Alzheimer de l'Ontario)

Les conseillers ont confié à la Commission que les personnes âgées doivent aussi se faire éduquer, de façon à reconnaître l'âgisme et à savoir quoi faire pour le combattre.

Mesures supplémentaires

Autres mesures suggérées :

  • communication régulière avec la population, surtout les groupes de l'âge d'or, pour identifier l'âgisme, en discuter et apprendre à le combattre;
  • distribution pan-ontarienne de documents sur l'âgisme, de préférence écrits ou audiovisuels;
  • forums de sensibilisation dans toute la province;
  • éducation sur l'âgisme au travail;
  • la révision de toutes les lois, de toutes les politiques gouvernementales et de tous les programmes gouvernementaux pour vérifier s'ils sont conformes aux besoins des aînés en Ontario.

La Commission trouve inacceptable que l'âgisme ne provoque pas le même sentiment d'indignation que d'autres formes de discrimination. Reconnaissant que l'âgisme est ancré dans les structures et les attitudes sociales et qu'il est à la racine de la discrimination envers les aînés, la Commission recommande de prendre les mesures suivantes pour combattre les deux formes d'âgisme.

Recommandations pratiques destinées au gouvernement et aux groupes communautaires

2. QUE tous les paliers de gouvernement vérifient si les lois, politiques et programmes sont exempts de préjugés et de stéréotypes âgistes et s'ils reflètent les besoins des personnes âgées.

3. QUE le ministère de l'Éducation, les conseils scolaires et les écoles élaborent des programmes et des activités qui encourageront une meilleure compréhension et une perception plus positive des personnes âgées. Les programmes intergénérationnels entre étudiants et personnes âgées font partie de ce programme éducatif.

4. QUE les facultés socio-médicales comme les facultés de médecine, de sciences infirmières, de travail social et des sciences de la nutrition devraient mieux préparer les étudiants à montrer plus d'empathie lorsqu'ils travaillent auprès des personnes âgées et à se défaire de leurs stéréotypes et de leurs préjugés.

5. QUE les ordres professionnels réglementés et les associations professionnelles bénévoles prennent des mesures pour sensibiliser leurs membres à l'âgisme et fournissent une éducation permanente dans le domaine, par exemple en donnant des cours et en distribuant des publications.

Engagements de la Commission

1. La Commission élaborera en 2001-2002 un énoncé de politique sur la discrimination basée sur l’âge.

2. La Commission doit créer et lancer une campagne de sensibilisation d'envergure sur l'âgisme et la discrimination basée sur l’âge.


[2] A. Comfort, « Age Prejudice in America ». (1976) Social Policy, p. 4, tel que cité dans l'étude intitulée Programmation intergénérationnelle : de l'action instrumentale à l'impératif social et à une vision de la société civique (étude demandée par l'Institut Vanier de la famille, août 1996) de M. Shipman p. 6.
[3] Pourcentage de personnes âgées participant à des activités bénévoles formelles et informelles, 1997 de Santé Canada, Division du vieillissement et des aînés, Fiche statistique n° 20 : Participation dans la collectivité, en ligne à Santé Canada, Division du vieillissement et des aînés à http://www.hc-sc.gc.ca/seniors-aines/pubs/factoids/fr/factoid.htm.
[4] Pour de plus amples détails sur la programmation intergénérationnelle, voir Shipman, supra note 2.

Âge et intersectionnalité

La Commission reconnaît que les certaines personnes peuvent souffrir de désavantages multiples en raison de l'intersection de leur âge avec d'autres aspects de leur identité. Au cours des consultations, la Commission a entendu dire que certains groupes d'aînés souffrent de problèmes particuliers en raison non seulement de leur âge mais aussi de leur sexe, de leurs invalidités, de leur orientation sexuelle, de leur race, de leur origine ethnique, de leur religion, de leur culture et de leur langue.

Âge et sexe

«Les femmes souffrent davantage, car elles subissent le poids de la coutume et des traditions.» (Corporation Canadienne des Retraités intéressés)

Bien que les hommes âgés éprouvent des problèmes en raison de leur âge, un grand nombre de soumissions ont souligné le double désavantage auquel les femmes plus âgées doivent faire face.

Le statut socio-économique est l'un des problèmes les plus graves pour les femmes âgées. En raison d'un certain nombre de facteurs (prolongation de l'espérance de vie, moindre participation à la main-d'oeuvre, inégalité salariale, programmes sociaux conçus avant tout pour les hommes ou, du moins, pas spécialement pensés en fonction des femmes), les femmes âgées risquent davantage de connaître la pauvreté comparativement aux hommes du même âge[5].

Pourcentages de personnes âgées à faible revenue, Ontario, 1996/1997

De plus, comme l'a remarqué une organisation, «la plupart des personnes âgées sont des femmes et les femmes sont de plus en plus nombreuses à mesure qu'on monte dans la pyramide des âges. Parmi les gens de plus de 65 ans, 58 % sont des femmes et, au-dessus de 85 ans, on compte plus 75 % de femmes.» (Association des travailleuses et travailleurs sociaux de l'Ontario). Les femmes sont surreprésentées dans le groupe des personnes âgées vulnérables et ayant besoin de services et de soutien.

«Les femmes âgées connaissent des problèmes particuliers. Dans la région d'Ottawa-Carleton, par exemple, il y aurait quelque 33 000 personnes de 75 ans ou plus, selon le recensement de 1996, dont près de deux tiers sont des femmes. Parmi ces femmes, la moitié disposaient d'un revenu annuel de 16 000 $ ou moins et la moitié vivaient seules. Ces faits, selon nous, sont responsables de la vulnérabilité de cette population aux problèmes de discrimination et de mauvais traitements. Le gouvernement devrait y réagir d'une manière plus proactive.» (Conseil sur le vieillissement – Ottawa-Carleton)

Compte tenu de ces facteurs, les problèmes soulevés dans le présent rapport à l’égard des personnes âgés pourraient être plus critiques pour les femmes. Les domaines suivants sont particulièrement inquiétants :

Soins de santé, soins à domicile et établissements : On a affirmé que les soins de la santé sont parmi les soins les plus pressants chez les aînées. Les femmes âgées sont moins portées que les hommes du même âge à considérer leur santé comme bonne, très bonne ou excellente et plus portées à la considérer comme passable ou mauvaise. Ce sont aussi elles qui ont les plus longs séjours à l'hôpital. De plus, avec l'âge, elles ont un plus grand besoin d'aide domestique que les hommes[6]. Ces statistiques et d'autres statistiques suggèrent que les problèmes de soins de santé et de services à domicile mentionnés dans le présent rapport pourraient toucher les femmes davantage.

La majorité des personnes âgées vivent chez elles. Cependant, parmi les personnes âgées qui vivent en établissement (maisons de soins infirmiers, logements pour personnes âgées et installations de soins de longue durée), les femmes représentent un plus grand nombre. En 1996, 38 % de toutes les femmes de 85 ans ou plus vivaient en établissement, ce chiffre étant de 24 % pour les hommes de 85 ans ou plus[7]. Autrement dit, les questions de réglementation visant ces installations sont d'une importance capitale pour les femmes.

«Les femmes âgées risquent de plus en plus de se retrouver sans abri. »
(Older Women’s Network)

Logement et société : On a confié à la Commission que les souffrances des aînées sont dues à un manque de logement convenable à bas prix. On s'est plaint du manque du contrôle des loyers, de l'inaccessibilité physique du logement pour les personnes âgées, des faiblesses du logement social et du manque d'options permettant de vieillir chez soi. Les femmes ayant une espérance de vie plus longue et le nombre de veuves étant supérieur au nombre de veufs, beaucoup des problèmes mentionnés touchent les femmes de façon disproportionnée par rapport aux hommes.

Transport : Afin d'accéder aux services dont elles ont besoin et de participer à la vie sociale, les femmes âgées doivent disposer d'un réseau de transport en commun accessible et abordable.

Prestation des soins : La grande majorité des soignants rémunérés ou bénévoles sont des femmes. On a dit à la Commission que ce sont surtout les épouses, soeurs, filles et brus qui s'occupent bénévolement des aînés en Ontario. La dévaluation du rôle de soignant et le manque de soutien social à son endroit ont un plus grand impact sur les femmes de tout âge que sur les hommes.

Mauvais traitements et négligence à l’égard des aînés : Parmi les problèmes mentionnés, notons les mauvais traitements, la violence physique, les sévices sexuels, la violence psychologique, la négligence ou l'exploitation financière, par la famille ou des professionnels, signalés comme des problèmes graves. Aussi bien les hommes que les femmes risquent de se faire maltraiter ou de souffrir de négligence. Les femmes âgées étant en général plus frêles que les hommes du même âge, elles sont plus exposées à certaines formes de mauvais traitements. Elles sont aussi plus exposées que les hommes aux mauvais traitements de la part du conjoint. Les femmes de 65 ans ou plus se font agresser par les membres de leur famille plus souvent que les hommes[8]. En conclusion, les personnes âgées des deux sexes se font maltraiter, mais on doit reconnaître que les femmes âgées sont particulièrement vulnérables.

Emploi : Pour ce qui est de l'emploi et des régimes de retraite, beaucoup des systèmes en cours ont été conçus pour une main-d'oeuvre avant tout masculine et reposaient sur le principe que l'homme subvenait aux besoins de la femme. C'est pour cette raison que les femmes souffrent de double discrimination dans le domaine de l'emploi. En revanche, la retraite obligatoire a un effet particulièrement dur pour les femmes. La section sur l'emploi explique ces problèmes en détail.

Hommes âgés

Beaucoup des questions soulevées dans le présent rapport touchent aussi les hommes, et les hommes âgées ont leurs propres problèmes.

Les organismes consultés ont confié à la Commission qu’en raison de la division du travail d'après le sexe, vécue par beaucoup de personnes âgées, il arrive que certains hommes âgés n’arrivent pas à se débrouiller par eux-mêmes après le décès de leur conjoint ou du membre de la famille qui préparait leurs repas, faisait leur lessive ou effectuait toute autre tâche ménagère. De plus, on a signalé à la Commission que ces hommes auraient des difficultés à accéder aux services communautaires. Voici ce que la Commission a entendu :

«Les veufs d'un certain âge, qui ont vécu la majeure partie de leur vie avec leur conjointe et doivent maintenant habiter seuls, constituent aussi un groupe ayant des besoins particuliers, car la plupart d'entre eux n'ont jamais fait la cuisine, ni magasiné, ni fait la lessive, ni effectué toute autre tâche ménagère.» (Diététistes du Canada)

«Un homme dont la femme s'occupait beaucoup de lui... elle a fait une chute à domicile. Elle est tombée dans le coma en route pour l'hôpital. Il n'arrivait pas à préparer ses propres repas, est devenu toxicomane et s'est retrouvé seul et solitaire dans sa maison...Il ne pouvait pas accéder aux services.» (Senior Link)

En outre, les taux de suicide sont élevés chez les hommes, surtout après 85 ans[9].
Eu égard aux commentaires sur l'intersection âge-sexe, la Commission fait les recommandations suivantes :

Recommandation pratique destinée au gouvernement et à la société

6. QUE le gouvernement et les secteurs publics et privés tiennent compte de l'«effet intersectionnel» de l'âge et du sexe dans leurs politiques et programmes, notamment des désavantages multiples subis par les femmes âgées.

Âge et Handicap

Un grand nombre de personnes âgées sont actives, en santé et en forme. Le préjugé selon lequel les aînés seraient faibles et frêles n'est pas conforme à la réalité puisque la majorité des personnes de plus de 65 ans se considèrent elles-mêmes en santé[10]. De plus, beaucoup de ceux qui souffrent d'une maladie ou d'une invalidité chronique continuent à mener une existence satisfaisante.

Handicap permanent, selon l’ âge, selon le sexe, Ontario, 1996/1997. 45-64: Hommes (12%), Femmes (12%); 65-74: Hommes (18%) Femmes (17%); 75+: Hommes (27%) Femmes (28%)

Il est néanmoins important de reconnaître que la prévalence des invalidités et des troubles chroniques augmente avec l'âge, afin d'assurer l'existence de services appropriés répondant aux besoins de la population vieillissante. Comme on en a discuté ailleurs dans ce rapport, il faut donner une formation suffisante en gériatrie, en gérontopsychiatrie et en nursing gérontologique aux spécialistes de la santé et aux autres fournisseurs de services.

Pour les personnes handicapées, le vieillissement peut être lourd de conséquences ou créer une double discrimination. En outre, les invalidités multiples peuvent provoquer une réaction en chaîne.

Pour les personnes handicapées, le vieillissement aggrave la pauvreté et la discrimination chroniques. Ceux qui deviennent invalides à un âge avancé vivent parfois des bouleversements dans leur mode et niveau de vie. Il arrive que le vieillissement ait pour conséquence des formes de discrimination aiguës ou uniques en leur genre. De plus, les handicaps multiples peuvent rendre encore plus difficile la pleine participation à la vie sociale. La Commission a appris que les personnes âgées souffrant d'isolement (par exemple, celles habitant à la campagne ou dans le Nord) sont encore plus seules lorsqu'elles sont handicapées. Voici un bref résumé des problèmes les plus importants liés au vieillissement et à l'invalidité.

Soins de santé, soins à domicile et établissements : Comme on l'a mentionné à la section sur les Soins de santé, établissements et services il faut s'assurer que les services de soins de santé et de soins à domicile soient adaptés aux handicaps associés au vieillissement. L'octroi de fonds suffisants aux soins communautaires et de longue durée est l'une des manières de régler ce problème. Les fournisseurs de soins de santé doivent aussi avoir reçu une formation suffisante sur les invalidités associées au vieillissement (la perte d'ouïe et les troubles cognitifs, par exemple). Les installations de soins de santé doivent être conçues de façon à optimiser la sécurité, l'intégration et le confort. Elles doivent être physiquement accessibles (rampes, ATS, etc.) et les services doivent être adaptés aux besoins des personnes invalides (p. ex., interprétation gestuelle).

La conception de demeures à accès facile permet de vieillir chez soi et coûte moins cher que d'installer une rampe après coup lorsque le locataire ou propriétaire du domicile devient invalide.

Logement : Les logements doivent être adaptés aux besoins des personnes souffrant d’handicaps associés au vieillissement. Les organismes consultés ont confié à la Commission que les logements doivent non seulement être conçus en fonction des problèmes actuels mais être assez flexibles pour s'adapter aux invalidités futures. La conception de demeures à accès facile permet de vieillir chez soi et coûte moins cher que d'installer une rampe après coup lorsque le locataire ou propriétaire du domicile devient invalide. Vous trouverez à la section sur le Logement des suggestions sur des particularités architecturales adaptées aux besoins des personnes âgées handicapées.

La Commission a aussi appris qu'il faudrait plus de logements spécialisés, comme le Bob Rumball Centre for the Deaf, destinés aux aînés sourds de naissance, devenus sourds ou durs d'oreille, ou aux autres aînés souffrant d'invalidités particulières. De plus, il faut que le gouvernement s'engage à faire construire des logements sociaux pour les personnes âgées handicapées. Les organismes consultés ont confié à la Commission qu'il faut en Ontario des logements qui offrent une gamme étendue de soins capables de répondre aux besoins des personnes âgées handicapées à mesure qu'elles vieillissent. Enfin, on a confié à la Commission que le concept «vieillir à domicile» est une option de logement des plus importantes pour les personnes âgées handicapées.

Transport : Le réseau de transport en commun est essentiel à l'autonomie des aînés et à leur participation à la vie sociale. En février 2000, la Commission a publié son Document de travail sur les services accessibles de transport en commun en Ontario[11], qui soutient que les systèmes réguliers de transport doivent assurer une accessibilité maximale et qu'il faut fournir des services parallèles de transport adaptés aux personnes qui ne peuvent pas utiliser le système régulier, aussi intégré soit-il. Au cours de la consultation, les organismes et particuliers consultés ont répété la même chose. On s'est demandé si les critères de détermination de l'admissibilité aux services parallèles de transport adapté n'étaient pas trop rigoureux. Les organismes consultés ont proposé des améliorations à l'accessibilité des systèmes de transport en commun. Une discussion plus détaillée des problèmes de transport figure à la section sur les Soins de santé, établissements et services.

«Depuis quelques années, beaucoup de gouvernements et de compagnies ont ''dégraissé'' leurs effectifs et ont mis à pied un grand nombre de sourds de 45 ans ou plus. Il arrive parfois, ou plutôt souvent, que ces employés, qui ont occupé le même poste 10 ans, voire 20 ans, après être sortis de l'école secondaire, se trouvent soudainement sans emploi. Ils n'ont pas eu la chance de se perfectionner. Ils ne sont pas prêts pour le marché actuel de l'emploi.»
(Société canadienne de l'ouïe – Ottawa)

Emploi : Un sondage de 1998 portant sur environ 1000 Canadiens sourds illustre par des statistiques les désavantages particuliers dont souffrent les aînés invalides sur le marché de l'emploi. Selon l’étude Emploi et employabilité des sourds canadiens, chez les 52-64 ans, 30 % des sourds ont un emploi, 27 % sont sous-employés[12] et
43 % sont au chômage. Entre 52 et 64 ans, 17 % des sourds perdent leur emploi, chiffre bien supérieur à la moyenne canadienne[13]. Il ne s’agit pas là de retraite anticipée volontaire mais plutôt du fait que les personnes n’ont plus les aptitudes requises par leur poste[14].

On a confié à la Commission que les travailleurs âgés invalides risquent, plus que les autres employés, de perdre leur emploi au cours d'une restructuration de l'entreprise, car ils ont moins d'occasions de se perfectionner ou parce que leur employeur croit que leur invalidité les rend plus difficiles à placer ailleurs dans l'organisation.

De plus, l'âge et l'invalidité constituent tous deux des difficultés lors de la quête d'un emploi. Aussi, comme le marché favorise les jeunes, la personne âgée invalide éprouve souvent des difficultés à se trouver un emploi. Comme le dit l'un des groupes, les préjugés fondés sur l'âge et l'invalidité constituent un double désavantage pour les aînés invalides (Société canadienne de l'ouïe – London).

Problème supplémentaire : la Loi sur le code du bâtiment : La Commission était très mécontente d'apprendre qu'il arrive souvent que les normes d'aménagement à accès facile visées par la Loi de 1992 sur le code du bâtiment[15] ne sont respectées ni par les bâtisseurs ni par les inspecteurs. Par exemple, certains ont confié à la Commission qu'on respecte rarement l'article 3.8.3.7 des règlements de l'Ontario 403/97 en vertu de la Loi de 1992 sur le code du bâtiment, stipulant que les salles de classe, les auditoriums, les salles de conférence et les amphithéâtres doivent avoir la sonorisation assistée. On pourrait améliorer la Loi de 1992 sur le code du bâtiment elle-même en appliquant les normes d'aménagement à accès facile à d'autres éléments architecturaux.

La Commission vient de publier ses nouvelles Politiques et directives concernant le handicap et l'obligation d'accommodement[16]. Ces Politiques expliquent clairement que les employeurs, propriétaires, fournisseurs de services et prestataires de programmes sont censés prendre des mesures proactives assurant que les personnes invalides puissent être des citoyens aux droits égaux. Elles soulignent que la nécessité de l'accommodement et de la satisfaction des besoins des personnes invalides n’est pas facultative, mais qu’elle constitue une obligation juridique allant jusqu'au préjudice indu. La Commission a confirmé que le préjudice indu est élevé dans ce cas. Comme on l'a remarqué dans le Document de travail, ces principes s'appliquent également aux aînés invalides.

Recommandations pratiques destinées au gouvernement et aux groupes communautaires

7. QUE le gouvernement provincial adopte des lois imposant des normes minimales d'accessibilité pour les personnes invalides, sans oublier les aînés.
8. QUE le gouvernement et les secteurs publics et privés tiennent compte de l'«effet intersectionnel» de l'âge et de l'invalidité dans leurs politiques et programmes, notamment des désavantages multiples subis par les personnes âgées invalides.

«Les hommes et femmes homosexuels et bisexuels sont victimes d'âgisme dans le milieu gay et d'homophobie dans les cercles traditionnels de l'âge d'or.»
(AIDS Committee of Toronto)

Âge et orientation sexuelle

La Commission a entendu des cas d'exclusion d'homosexuels et de bisexuels âgés dans le milieu gay et le grand public. On a aussi discuté de cas d'homophobie et de discrimination dans l'emploi et les installations de soins communautaires et de longue durée. On a beaucoup insisté sur les cas de double discrimination des homosexuels âgés. On est parvenu à la conclusion qu'il faudrait absolument, dans les futurs travaux sur les mauvais traitements subis par les personnes âgées, faire une analyse intersectionnelle qui tienne compte de l'orientation sexuelle.

«Nous avons tous des grands-mères lesbiennes, des oncles gay, des cousins bisexuels ! Ce qui a surtout changé, c'est le nombre de gens qui sont prêts à affirmer leur homosexualité ou leur bisexualité.»
(Coalition pour les droits des lesbiennes et personnes gaies en Ontario)

On a confié à la Commission que le milieu gay favorise la jeunesse, ce qui conduit parfois à la marginalisation des hommes âgés. «La plupart des bars et des organisations sont conçus en fonction des jeunes» (AIDS Committee of Toronto [ACT]). Selon le stéréotype, tous les gays, lesbiennes et bisexuels seraient tous jeunes. On croit souvent qu'il n'y a guère de gays, de lesbiennes et de bisexuels parmi les générations précédentes, sinon pas du tout. C'est pour ces raisons qu'il arrive parfois qu'on oublie l'existence des gays, lesbiennes et bisexuels d'âge mûr et de leur conjoint, ce qui a de graves conséquences sur leur traitement dans les services, soins de santé et établissements. D'après la Coalition pour les droits des lesbiennes et personnes gaies en Ontario (CLGRO), «il y a des lesbiennes, des gays et des bisexuels au sein du système – dans les foyers, se prévalant du réseau de soins de santé et des services sociaux... beaucoup ne se déclarent pas comme tels. En fermant systématique les yeux sur leurs besoins [et] l'homophobie qu'ils subissent, on risque de les convaincre qu'ils ont eu raison de rester dans le “placard”. On devine aisément comment ces problèmes peuvent miner les droits à la dignité, à la pleine participation à la vie sociale, à l'épanouissement et à la confiance en soi de ces personnes âgées.

Emploi : Un groupe a remarqué que, si les gays, lesbiennes et bisexuels d'âge mûr font face aux mêmes difficultés que les autres travailleurs âgés, l'homophobie empire leurs problèmes. La CLGRO a dit à la Commission que «les lesbiennes, gays et les bisexuels risquent plus que les hétérosexuels de se faire imposer une retraite anticipée lorsque leur employeur ne veut pas d'eux». Dans cette atmosphère d'homophobie, l’employé homosexuel peut souhaiter son départ même si celui-ci n’est pas favorable. Les lesbiennes et les bisexuelles font face aux mêmes désavantages économiques que les hétérosexuelles, compte tenu du fait que, en règle générale, les femmes continuent à gagner moins que les hommes. En outre, dans les milieux de travail homophobes où pratiquement seuls les hétérosexuels montent en grade, les lesbiennes et bisexuelles âgées sont doublement désavantagées.

Soins des aînés : Les gouvernements transfèrent de plus en plus la responsabilité du soin des aînés à la famille et aux amis. Or, ce n'est pas toujours possible dans le cas des gays, des lesbiennes et des bisexuels. ACT a déclaré à la Commission que «beaucoup de gays et lesbiennes d'âge mûr n'ont pas le soutien familial dont jouissent les aînés hétérosexuels. Il arrive qu'ils n'aient aucune famille qui puisse leur donner le soutien affectif, financier ou pratique dont ils ont besoin.» De plus, comme beaucoup d'hommes âgés ont vu tous leurs amis mourir du SIDA, ils n'ont plus de «bâtons de vieillesse». Notre réseau de services sociaux et de santé est basé sur des notions traditionnelles de la famille et des relations sociales qui, souvent, ne s'appliquent pas aux gays, lesbiennes et bisexuels d'âge mûr.

Soins de santé, établissements et services : Un des principaux problèmes discutés était l'homophobie du réseau des soins de santé. La CLGRO a déclaré devant la Commission que les études sur les obstacles structurels au sein des réseaux sociaux et de santé en Ontario ont diagnostiqué «une homophobie pandémique à tous les niveaux, dont les effets vont de la négligence bénigne aux erreurs de traitement médical17 ACT a confié à la Commission que l'homophobie des employés des établissements de soins envers leurs bénéficiaires «est une réalité effarante pour beaucoup de gays et lesbiennes d'âge mûr... Ils ont peur d'être agressés, physiquement, verbalement et affectivement». Les spécialistes de la santé devraient être plus sensibles aux besoins des lesbiennes, des gays et des bisexuels, et en savoir plus long à leur sujet. Dans le domaine des soins communautaires, il est particulièrement important d'éduquer les bénévoles et de réglementer leur travail.

«Les gays d'âge mûr se demandent où ils vont loger lorsqu'ils ne seront plus autonomes. Ils craignent que, dans les foyers pour personnes âgées, on ne respectera pas leur identité sexuelle et leur vécu. Les couples âgés ont peur d’être séparés à la fin de leur vie parce qu'il n'existe pas d'endroit où on les respectera en tant que couple.»
(Aids Committee of Toronto)

La Commission a entendu dire que les conjoints de même sexe ne sont pas toujours reconnus comme tels dans les foyers pour personnes âgées. Comme l'a déclaré la CLGRO, «nous devons encore nous battre pour persuader les médecins, soignants et les autres spécialistes que notre partenaire sexuel est notre conjoint... quelque chose d'aussi simple que de placer la photo du conjoint sur la table de chevet peut avoir des répercussions insoupçonnées». Aussi les couples gay craignent-ils de se faire séparer à la fin de leur vie à cause de ce préjugé. De plus, les gays, lesbiennes et bisexuels craignent qu'on ne respectera pas leur identité sexuelle et leur vécu dans les foyers pour personnes âgées.

Recommandations pratiques destinées au gouvernement et aux groupes communautaires

9. QUE le gouvernement et les secteurs public et privé tiennent compte de l'«effet intersectionnel» de l'âge et de l'orientation sexuelle dans leurs politiques et programmes, notamment des désavantages multiples subis par les gays, lesbiennes et bisexuels d'âge mûr.
10. QUE les fournisseurs de soins de santé et de services sociaux reçoivent une formation leur permettant de répondre aux besoins des gays, lesbiennes, bisexuels et transgenres d'âge mûr.
11. QUE les foyers veillent à ce que leurs résidents gay, lesbiennes, bisexuels et transgenres soient à l'abri de l'homophobie et reçoivent les même droits, à titre d'individus ou de couples, que les autres résidents.

Âge et citoyenneté, religion, langue, groupe ethnique et race

L'intersection de l'âge d'une part et, d'autre part, de la citoyenneté, de la religion, de la langue et du groupe ethnique a des répercussions sur les soins de santé, les services et les établissements :

Soins de santé, établissements et services : Les groupes ont déclaré devant la Commission qu'on reconnaît peu la diversité de la population d'âge mûr en Ontario. On a confié à la Commission que le statut d'immigrant de la personne âgée peut limiter son accès aux services de santé. Les participants ont remarqué qu'il arrive que les allophones n'aient pas en main certains renseignements essentiels étant donné que les renseignements sur les soins de santé sont donnés uniquement en anglais et en français. On a aussi remarqué qu'il n'y a pas assez de services en français. En 1999, la majorité des immigrants de 65 ans ou plus en Ontario ne parlaient aucune des deux langues officielles[17]:

Immigrants âgées (65+) arrivant en Ontario en 1999, selon leur connaissance des langues officielles. Anglais: Hommes (37.4%) Femmes (33.7%); Anglais-Français: Hommes (0.9%) Femmes (0.6); Français Hommes (1.1%) Femmes (1.3%); Aucuene: Hommes (60.7%) Femmes (64.4%)

Selon les statistiques du recensement de 1996, parmi les autochtones ontariens âgés, 57,7 % parlaient couramment l'anglais, 7,4 % le français et 34,8 %, une langue autochtone ou étrangère[18]. Ces statistiques prouvent qu'il faut que les fournisseurs de services de santé et d'autres services prodiguent des soins adaptés aux multiples groupes linguistiques représentés dans la population croissante des Ontariens d'âge mûr.

On s'inquiète aussi de la manière dont les fournisseurs de services répondent aux besoins des différents groupes d'aînés dans les installations de soins de longue durée. Les repas et les activités sociales et récréatives qui s'y donnent peuvent ne pas être adaptés aux besoins culturels et religieux de certains pensionnaires. Les fournisseurs de services de tous les secteurs doivent respecter l'identité et la dignité de tous et être sensibles à la diversité culturelle, religieuse ethnique et raciale de la population du troisième âge.

On a déclaré devant la Commission qu'il faut consulter davantage les personnes âgées pour mieux connaître les obstacles auxquels elles sont confrontées en raison de leur âge, de leur groupe ethnique, de leur citoyenneté, religion, race et langue.

Recommandation pratique destinée au gouvernement et aux groupes communautaires

12. QUE les fournisseurs de soins de santé et d'autres services trouvent des façons d'adapter ces services à la diversité ethnique, culturelle, raciale, linguistique et religieuse de leurs clients.


[5] Statistique Canada, Pourcentage de personnes âgées ayant un faible revenu, Ontario, 1996/97 du site intranet de Third Age Ontario : www.mczcr.gov.on.ca/thirdage/.
[6] Ibid et Santé Canada, Division du vieillissement et des aînés, Fiche statistique n° 47 : L'hospitalisation des aînés, supra note 3.
[7] Santé Canada, Division du vieillissement et des aînés, Fiche statistique no 12 : La vie en établissement, supra note 3.
[8] Statistique Canada, La violence familiale au Canada : un profil statistique (Ottawa, ministre de l'Industrie, juin 1999), p. 23-4.
[9] Du site intranet de Third Age Ontario, supra note 5.
[10] Statistique Canada, Auto-évaluation de l'état de santé des gens de 65+ et de 75+, par sexe, Ontario, du site intranet de Third Age Ontario, supra note 5.
[11] Commission ontarienne des droits de la personne, Document de travail sur les services accessibles de transport en commun en Ontario (février 2001) disponible en ligne à www.ohr.on.ca
[12] Le terme « sous-employé » s'applique aux gens insatisfaits de leur emploi qui vivent des problèmes d'insécurité d'emploi ou souffrent d'un manque d'accessibilité ; citant J. Root et D. Kerr, infra note 13, p. 15.
[13] C. Kenopic, Maintenir les mains en mouvement (Association des Sourds du Canada, 2000) citant J. Root et D. Kerr, Emploi et employabilité des sourds canadiens (Association des Sourds du Canada 1998), p. 6.
[14] Root et Kerr, ibid p. 36
[15] Loi sur le code du bâtiment, L.O. 1992, c. 23.
[16] Commission ontarienne des droits de la personne, Politique et directives concernant le handicap et l'obligation d'accommodement (mars 2001) disponible en ligne à www.ohrc.on.ca
[17] Citoyenneté et Immigration Canada, Senior Immigrants (65+) Landing in Ontario in 1999, by Official Language Ability, trouvé dans Aging Quiz, site Web de Third Age Ontario, supra note 5.
[18] Statistique Canada, Mother Tongue of Aboriginal Seniors, Ontario, 1996, document en ligne sur le site Web intranet de Third Age Ontario, supra note 5.

Code Grounds: 

Emploi

Le fait d'avoir un emploi est essentiel à l'égalité de sa participation et de ses chances dans la société. Le travail a un effet direct sur la situation économique, pendant la vie active comme pendant la retraite. C'est pourquoi toute étude de l'âgisme dans le monde du travail doit tenir compte des effets que les pratiques et politiques ont sur l'employé, et ce, aussi bien pendant la retraite qu'en cours d'emploi. Elle doit aussi prendre en considération l'effet sur l'ensemble de la société.

L'emploi n'est pas lié à la situation financière seulement. Pour beaucoup de gens, l'emploi est essentiel à leur sens de dignité et d’estime de soi. Il favorise l'autonomie, la sécurité, le respect de soi et le sentiment de participer à la vie sociale. La discrimination au travail et la retraite anticipée involontaire ont donc un effet qui ne se limite pas au domaine financier.

La plupart des particuliers et des organismes ayant participé à la consultation se sont inquiétés de l'âgisme sur le marché du travail. Beaucoup ont déclaré avoir été victimes d'âgisme au travail, directement ou indirectement, au sein de leur famille ou de leurs amis. Ils ont décrit la douleur et le sentiment de perte qui accompagne le fait d'être exclus du marché du travail en raison de son âge. Les autres se sont indignés du fait qu'on force des travailleurs à prendre leur retraite à 65 ans et que ceux qui continuent à travailler perdent toute protection normalement garantie par la Charte contre la discrimination basée sur l'âge.

Retraite obligatoire et manque de protection des travailleurs de plus de 65 ans

...la politique publique justifie amplement le réexamen de la retraite obligatoire. Il faut établir si les arguments basés sur l'utilité sociale devraient continuer à justifier ce qui constitue après tout une pratique discriminatoire.

La retraite obligatoire est une forme d'âgisme. Le fait de prendre une décision uniquement en fonction de l'âge du travailleur et non de sa capacité à exécuter ses fonctions essentielles est une forme de discrimination. Notre société trouverait inacceptable de congédier qui que ce soit pour des raisons de race, de sexe ou d'invalidité, ou pour tout autre motif visé par le Code. La politique publique justifie amplement le réexamen de la retraite obligatoire. Il faut établir si les arguments basés sur l'utilité sociale devraient continuer à justifier ce qui constitue après tout une pratique discriminatoire.

Aspect juridique

Aucune loi ontarienne n'oblige les travailleurs à prendre leur retraite à un âge particulier. En théorie, les employés peuvent travailler jusqu'à ce qu'ils décident de prendre leur retraite ou qu'ils deviennent incapables d'exécuter leurs fonctions. Toutefois, un grand nombre d'entreprises ont imposé des politiques qui forcent tous les employés à prendre leur retraite à 65 ans. Ces politiques peuvent être le fruit de conventions collectives ou le résultat des politiques des ressources humaines. Pour les raisons discutées ci-dessous, les employés qui ne veulent pas prendre leur retraite à 65 ans n'ont aucun moyen juridique de contester la convention collective ou la politique des ressources humaines. Autrement dit, l'employeur peut imposer la retraite obligatoire à 65 ans.

Le Code des droits de la personne de l'Ontario définit l'âge comme suit :

paragr. 10(1) «âge» Dix-huit ans ou plus, sauf au paragraphe 5 (1), où le terme «âge» s'entend de dix-huit ans ou plus et de moins de soixante-cinq ans.

En raison de cette définition restrictive de l'âge, la Commission ne peut pas entendre les plaintes des employés de 65 ans et plus sur la discrimination professionnelle basée sur l'âge. Autrement dit, il n'est pas contraire au Code que l'employeur oblige ses employés à prendre leur retraite à l'âge de 65 ans (ou plus tard), et les employés ne peuvent pas contester cette pratique. De même, les travailleurs qui continuent à travailler ne peuvent pas se plaindre si leur employeur les traite moins équitablement (rémunération, avantages, horaire, vacances, etc.) en raison de leur âge.

Les définitions restrictives de l'âge, et toute autre exception des lois sur les droits de la personne qui permettent la retraite obligatoire à 65 ans, ont souvent été contestées en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés. Dans toutes les causes entendues, la Cour suprême du Canada a confirmé la retraite obligatoire. Dans l'une de ces causes, la Cour suprême a étudié la définition de l'âge dans le Code ontarien et a arrêté que, si la retraite obligatoire constitue bel et bien un cas de discrimination basée sur l'âge, elle est une limite raisonnable aux droits de personnes âgées (McKinney c. University of Guelph [1990][19]).

La contestation devant les tribunaux n'ayant pas porté fruit, il faut amender le Code pour interdire la retraite obligatoire. Or, seule l'Assemblée législative de l'Ontario peut le faire. Dans un rapport publié en 1977, Life Together: A Report on Human Rights in Ontario[20], la Commission a recommandé que la définition de l'âge soit amendée de telle sorte que la limite supérieure disparaisse. Ainsi, les capacités professionnelles de l'employé deviendraient le seul critère permettant d'établir s'il doit garder ou non son emploi. L'Assemblée législative n'a pas encore donné suite à cette demande.

Impact de la retraite obligatoire

Beaucoup de particuliers et d'organismes ont dit à la Commission que la retraite obligatoire a d'importantes répercussions financières. Les gens ont peur de perdre leur maison, de voir leur niveau de vie baisser considérablement, voire de tomber dans la misère. Les personnes et les organismes consultés ont remarqué que les aînés ont des personnes à charge : membres de la famille invalides, enfants d'âge universitaire, etc., et qu'ils ne pourront plus subvenir à leurs besoins après leur retraite. Ils s'inquiètent beaucoup des conséquences que leur retraite aura sur leurs proches.

Une femme a décrit comment elle est retournée sur le marché du travail lorsqu'elle était dans la cinquantaine, après avoir élevé sa famille et s'être séparée de son mari. Même si la retraite n'était pas obligatoire dans son entreprise lorsqu'elle est arrivée, l'employeur a décidé d'en imposer une peu avant qu'elle atteigne l'âge de 65 ans. En prenant sa retraite, elle a reçu une pension insuffisante pour ses besoins et on a refusé de la laisser continuer de travailler dans un contexte qui lui permettrait d’accumuler un fonds de pension plus adéquat. Cependant, après avoir pris sa retraite, elle est retournée travailler à contrat pour le même employeur. Elle ne peut plus cotiser au régime de pensions, n'a plus droit aux avantages sociaux, n'a plus de vacances payées et n'a plus de sécurité d'emploi.

La retraite obligatoire peut avoir des répercussions financières incalculables pour certaines personnes. Traditionnellement, c'étaient les femmes qui restaient à la maison pour élever les enfants ou s'occuper de la famille. De plus, les femmes travaillent souvent dans des secteurs sans régimes de retraite et elles risquent plus que les hommes d'avoir un emploi temporaire ou à temps partiel et leur salaire est beaucoup moins élevé. Les femmes souffrent d'un double désavantage par les années qu'elles passent à la maison, car elles n'ont pas de revenu et ne cotisent pas au Régime de pensions du Canada (RPC), et par les années où elles travaillent, car elles ne peuvent pas accumuler des fonds suffisants dans leur RPC, REÉR ou régime de pensions privé pour avoir un niveau de vie convenable après leur retraite. Elles risquent donc de tomber dans la pauvreté après avoir pris leur retraite obligatoire (voir les statistiques sur les Taux de faibles revenus chez les aînés selon le sexe dans la section Âge et sexe). Qui plus est, les femmes qui quittent leur emploi temporairement pour s'occuper de leur famille risquent d'être obligées de prendre leur retraite au moment même où leur carrière prend son essor.

Les nouveaux immigrants connaissent les mêmes difficultés : ils n'ont pas beaucoup de

«Cette année, [notre fils] a terminé son baccalauréat et a commencé ses études de deuxième cycle en pharmacie. Je devrai prendre ma retraite le 22 juin 2002. À cause de cela, mon fils sera forcé de s'endetter encore plus et je devrai puiser dans mes économies pour l’aider à payer ses deux dernières années.» (Alfred J. Herman)

«... Je n'aurai que 24 ans dans ma caisse de retraite, ce qui est insuffisant. À l'heure actuelle, j'ai une fille qui vient de finir l'université, une autre encore à l'université et un fils qui commence le collège communautaire. Avec tout ça, il est extrêmement difficile pour moi d'économiser en vue de la retraite.» (James G. Watson)

«Si je ne peux trouver à l’avenir un emploi rémunéré pour la seule raison que j'ai plus de 65 ans, je ne pourrai pas garder ma maison.» (Don Pelz)

temps pour accumuler leur pension. Tout comme les membres de minorités visibles et les autochtones, ils reçoivent souvent des salaires peu élevés et ont souvent des difficultés à accéder au marché du travail[21]. De même, les invalides se retrouvent plus souvent chômeurs que les autres travailleurs et gagnent souvent moins.

D'autres raisons peuvent rendre la retraite difficile. Le gens qui ont des enfants sur le tard ou qui fondent une deuxième famille risquent d'avoir des enfants à charge à 65 ans. La hausse des droits de scolarité oblige souvent les parents à aider financièrement leurs enfants à payer le collège et l'université. Beaucoup d'employés ont besoin de préserver leur revenu au cours de cette période, et au-delà, s'ils veulent vivre raisonnablement bien après leur retraite.

Voici quelques exemples des répercussions financières de la retraite :

S’entendre dire qu'on n'a plus de valeur en tant qu'employé pour la simple raison qu'on a atteint un certain âge a de profondes répercussions psychologiques et affectives. Plusieurs ont déclaré avoir perdu beaucoup d'intérêt pour les plaisirs de la vie après leur retraite obligatoire ou ont affirmé avoir observé un phénomène similaire chez les autres.

«L'élément le plus important de la santé mentale d'un être humain est son travail ou son occupation. On peut soutenir sans peine qu'en forçant les gens à prendre leur retraite à un certain âge, on nuit directement à leur santé, problème qui est au cœur des débats sur les droits de la personne.» (Ken Shields)

Voici quelques propos des personnes ou organismes consultés qui illustrent bien les séquelles sur la dignité humaines :

«Vous êtes-vous jamais sentis comme une vieille paire de chaussures ? Eh bien ! ça peut arriver à tout le monde. On se sent rejeté et on a l'impression de ne plus rien valoir sur le marché du travail ou au sein de la société.» (Mervyn Morley)

«Mon nouveau revenu garanti et mon sentiment d'être inutile sur le plan professionnel m'ont montré une chose : comment la société perçoit et traite les vieux.» (Grace Watson)

«Le traumatisme psychologique associé à la retraite obligatoire pourrait être facilement évité si on nous donnait le choix.» (Michael Nippalow)

Beaucoup ont remarqué l'illogisme de la pratique sociale qui veut qu'on considère un bon employé comme un incompétent le jour où il parvient à l'âge de 65 ans : «Déclarer qu'on peut travailler à 64 ans mais qu'on ne le peut plus à 65 est ridicule et discriminatoire.» (Raymond Carter)

Réexamen de la retraite obligatoire

Pour démontrer à quel point la retraite obligatoire à 65 ans est arbitraire, un participant a raconté l'anecdote suivante :
«Le comte Bismarck, à qui l'on avait demandé de créer une pension pour les fonctionnaires à la retraite, demanda à quel âge la plupart d'entre eux mouraient. On lui répondit : «à 65 ans», ce à quoi il rétorqua : «la retraite se prendra donc à 65 ans»
(Pr Irwin Pressman)

En plus de l'impact négatif de la retraite obligatoire sur les travailleurs et des facteurs associés aux droits de la personne, il existe d'autres raisons importantes de réexaminer la retraite obligatoire. En fait, nous devons sérieusement nous demander s’il est sage de forcer à la retraite des gens qui ne demandent qu'à travailler.

Population vieillissante : Au fur et à mesure que vieillit la génération du baby-boom, il y aura de plus en plus de gens au début de la soixantaine. De plus, l'espérance de vie étant plus longue, les gens dépassent souvent l'âge de 65 ans (pour atteindre 85 ans en moyenne). Autrement dit, il faut remettre en question la pertinence de la retraite obligatoire à 65 ans, conçue à une époque où les gens dépassaient rarement cet âge. Dans 30 ans, près d'un quart de la population canadienne aura 65 ans ou plus (PC.T. Gillin et Pr Thomas R. Klassen). La conjonction d'un nombre de travailleurs moins élevé et du rallongement de la retraite aura des répercussions majeures sur l'économie.

Facteurs économiques : On a répété à la Commission qu'on devrait écouter le gros bon sens et que la société ferait mieux de récolter les bénéfices du labeur de ses citoyens âgés, notamment les recettes fiscales produites par leur travail, que de les faire vivre par l'État.

Pénuries de main-d'oeuvre : Certains secteurs (santé, éducation et construction) connaissent présentement une pénurie de main-d'oeuvre. Or, selon les prévisions, la situation va encore empirer après que les baby-boomers auront pris leur retraite. Par exemple, on a confié à la Commission : «[Nous] ne pouvons pas trouver de professeurs d'université qualifiés... il y a une grave pénurie de personnel qualifié et, à ce moment, nous les forçons à prendre leur retraite» (Faculty Group, Carleton University). D'après un article de journal paru récemment, on essaierait de persuader les retraités de retourner au travail pour résoudre le problème de la pénurie du personnel qualifié[22].

L'exode des cerveaux est un problème connexe. On a déclaré devant la Commission que les travailleurs âgés très qualifiés émigreraient aux États-Unis pour éviter la retraite obligatoire. Résultat : une perte considérable pour le marché du travail, les hôpitaux, les université et l'ensemble de la société (Faculty Group, Carleton University). L'Ontario doit réexaminer les politiques qui, comme la retraite obligatoire, poussent les travailleurs qualifiés d'expérience à déménager.

Tendances aux États-Unis et ailleurs : Certains pays, notamment les États-Unis, la Nouvelle-Zélande et l'Australie, ont éliminé la retraite obligatoire sans conséquence néfaste majeure. On a dit à la Commission que la plus grande productivité et le taux de chômage moins élevé des États-Unis peuvent être attribués à une plus grande flexibilité en matière de réglementation du marché du travail (Pr C.T. Gillin et Pr Thomas R. Klassen). L'expérience faite dans les autres pays prouve que l'élimination de la retraite obligatoire en Ontario n'entraînera pas les problèmes que certains prédisent.

Les Nations Unies ont déclaré que les États signataires du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels[23] devraient accélérer la tendance à l'élimination de la retraite obligatoire. Les leaders du Groupe des Huit ont remarqué qu'il faut favoriser la participation économique des aînés[24]. Étant donné que le Canada a signé le Pacte et qu’il est un membre du Groupe des Huit, il devrait faire preuve de leadership et appliquer ces recommandations.

Favoriser l'équité : En plus de l'iniquité inhérente au fait d'exclure des travailleurs en raison de leur âge, les personnes et organismes consultés ont remarqué d'autres problèmes d'iniquité. Certains employeurs permettent aux travailleurs de rester après 65 ans tandis que d'autres imposent la retraite obligatoire. C'est pourquoi deux personnes occupant le même poste dans deux compagnies différentes peuvent suivre des politiques de retraite entièrement différentes. Dans certains cas, l'entreprise réengage l'employé et lui fait occuper le même poste mais sans lui accorder la plupart des avantages auxquels ont droit les employés réguliers à temps plein. Qui plus est, beaucoup ont remarqué que, pendant la majeure partie de leur période d'affectation, il n'y avait pas de retraite obligatoire. Ils ont trouvé injuste que leur employeur et, dans certains cas, leur syndicat puissent imposer un changement aussi considérable aux conditions d'emploi au moment même où ils approchaient de l'âge de 65 ans.

Beaucoup de personnes et d'organisations ont trouvé ironique que certaines des personnes les plus puissantes, les plus respectées et les plus influentes au Canada, dont le premiers ministre, les autres hommes d'État, les juges et les sénateurs, ne soient pas tenus de prendre leur retraite à 65 ans. Nombre d'entre eux ont plus de 65 ans et sont respectés pour leurs années d'expérience. Beaucoup considèrent qu'on applique deux poids deux mesures.

Justifications de la retraite obligatoire

Il est nécessaire d'examiner les justifications habituelles de la retraite obligatoire pour voir si elles sont assez fortes pour avoir la priorité sur les droits de la personne.

Pour faciliter la planification : Certains soutiennent que la retraite obligatoire est nécessaire à la planification de la dotation en personnel. Or, la Commission est d'avis que cet argument n'est pas vraiment valide dans notre société actuelle étant donné le dynamisme extrême du marché du travail. La société a adopté la retraite obligatoire à 65 ans à une époque où les employés avaient tendance à travailler à temps plein pour le même employeur pendant des années. De nos jours, les travailleurs sont très mobiles. Les congés de maternité, de maladie et de perfectionnement professionnel sont chose commune. De plus, en dépit de la retraite obligatoire à 65 ans, beaucoup préfèrent prendre leur retraite prématurément à un âge qui varie d'une personne à l'autre. Comme l'a remarqué un auteur :

...l'incertitude est inhérente au fonctionnement de la plupart des organisations. Pour ce qui est des ressources humaines en particulier, le roulement de personnel, l'absentéisme, l'invalidité et le décès sont des probabilités dont les entreprises doivent tenir compte. Les méthodes et les techniques générales employées pour calculer les probabilités peuvent être adaptées pour prévoir les retraites différées résultant des politiques de retraite flexibles[25].

Par conséquent, il ne semble pas que cet argument soit assez solide pour justifier la retraite obligatoire.

Pour favoriser l'emploi chez les jeunes : Cet argument repose largement sur notre perception des faits plutôt que sur leur réalité. Autrement dit, on suppose que la retraite obligatoire facilitera l'embauche et la promotion des jeunes. Or, cette hypothèse n'est pas conforme à la réalité. Un auteur remarque qu'aucune étude n'appuie l'hypothèse selon laquelle la retraite obligatoire serait la cause directe de l'embauche des jeunes[26].

Dans les entreprises et les États qui n'ont pas de retraite obligatoire, très peu de travailleurs décident de rester après 65 ans et ceux qui le font prennent leur retraite à 66 ou 67 ans. Qui plus est, cet argument repose sur le sophisme du bloc forfaitaire de travail, soit qu'il existe un nombre fixe d'emplois à distribuer entre les travailleurs et qu’un emploi donné à un aîné est un emploi enlevé à un jeune. Le marché ne fonctionne pas ainsi et les postes occupés par les aînés sont rarement ceux que cherchent les jeunes. En outre, il existe des débouchés pour les jeunes. Dans plusieurs domaines, il y a des pénuries de travailleurs et les employeurs sont incapables de remplir certains postes. Ce sujet sera abordé en détail dans la prochaine section.

Enfin, comme beaucoup l’ont fait remarquer, prétendre que la discrimination envers un groupe est acceptable si elle en favorise un autre est une notion qui porte atteinte aux principes des droits de la personne. La société n'accepte plus cet argument dans d'autres contextes (par exemple, l’ancien raisonnement selon lequel un emploi occupé par une femme serait un emploi de moins pour un homme). Étant donné que l'âgisme peut avoir les mêmes séquelles financières, psychologiques et affectives que les autres types de discrimination, il ne devrait pas servir à justifier cette forme de discrimination.

Pour s'assurer que les travailleurs prennent leur retraite avec dignité : Les représentants du patronat ont déclaré à la Commission que la retraite obligatoire permet aux travailleurs de quitter leur emploi avec dignité. Si la retraite obligatoire est abolie, les employeurs seront obligés de surveiller le rendement des travailleurs âgés qui éprouvent des difficultés à remplir leurs tâches, voire de les mettre à pied. Selon cet argument, l'absence de retraite obligatoire créerait des problèmes pour l'employeur et pour l'employé. Selon cet argument, la retraite obligatoire permet aux employés moins productifs de quitter leur emploi d'une manière socialement acceptable tout en conservant un revenu suffisant. On a confié à la Commission que les employeurs préféreraient avoir l’option d’offrir à l'employé âgé le choix de travailler après 65 ans, si l’entreprise a encore besoin de lui et si l'employé peut encore exercer ses fonctions.

On a aussi confié à la Commission que la retraite obligatoire ne devrait pas remplacer les politiques pertinentes de gestion du personnel comme la gestion progressive du rendement. Même si cela peut donner plus de travail à l'employeur, ce dernier doit résoudre les problèmes de rendement des travailleurs approchant de l'âge de la retraite de la même façon que ceux des autres employés. Pour favoriser la dignité des aînés, il faut les traiter comme leurs collègues plus jeunes et les évaluer en fonction de leur rendement, plutôt que selon leur âge. Vu le petit nombre d'employés qui choisissent de travailler après 65 ans, il est probable que les employeurs auront rarement à prendre des mesures visant à mettre ces employés à la porte.

Tous les employés devraient avoir la même chance de garder leur emploi. Or, les lois actuelles permettent aux employeurs de réengager les employés qu'ils ont mis à la retraite en leur offrant des conditions moins favorables. Cette faille législative risque de créer une catégorie d'employés de deuxième classe. D'ailleurs, la Commission trouve fort troublant le fait que les travailleurs qui restent après 65 ans ne puissent pas déposer de plainte de discrimination en raison de l'âge lorsque leurs conditions d'emploi sont inéquitables.

Pour contrôler les coûts : Certains s'inquiètent des effets de l'abolition de la retraite obligatoire. Selon eux, les employeurs paieront beaucoup plus en invalidité de longue durée, en assurance-vie collective et en cotisations au régime de rentes. D'autres soutiennent que, si l'employeur ne peut pas se prévaloir de la retraite obligatoire et qu’il doive congédier un employé incapable de faire son travail, il en résultera certains coûts, par exemple l'indemnité de départ et les frais juridiques associés aux poursuites pour congédiement injustifié. On a aussi remarqué qu’en raison d’un certain nombre de programmes et de systèmes qui considèrent 65 ans comme l’âge de la retraite, il faudra faire un examen général de certaines lois et politiques à cet égard.

La Commission concède que ces questions demanderont une longue période de réflexion et que la révision de plusieurs lois et programmes sera peut-être nécessaire. Néanmoins, ces difficultés ne devraient pas représenter un obstacle au réexamen de la retraite obligatoire. Le problème de la hausse des coûts pour l'employeur est un problème qui peut être réglé. Par exemple, le Code et la Loi sur les normes d'emploi permet certaines distinctions en fonction de l'âge quant aux pensions et aux régimes d'assurance collective.

Options quant à la retraite obligatoire

On a confié à la Commission que les employés désirent avoir le choix et que la retraite ne doit pas être une proposition où l'on doive choisir entre tout ou rien. Il faut plutôt mettre en oeuvre une retraite flexible ou graduelle. En d'autres termes, il faut des politiques de travail à temps partiel, de partage d'emploi ou de désignation à d'autres postes (consultant, formateur), ou assigner de nouvelles responsabilités à l'employé âgé.

Les employeurs ne seront pas tenus de garder les employés incapables de remplir leurs fonctions essentielles. Cependant, les employés qui veulent – et peuvent – continuer à travailler doivent pouvoir le faire, quel que soit leur âge. Les employeurs devraient adopter des programmes de gestion du rendement et appliquer la gestion progressive du rendement à tous les employés quel que soit leur âge. Ceux qui désirent avoir une politique de retraite générale à un certain âge seront tenus de prouver que cette politique repose sur des exigences professionnelles de bonne foi (par exemple dans le cas des politiques actuelles qui stipulent que les pompiers doivent prendre leur retraite à 60 ans).

Certains ont suggéré qu'il ne devrait pas y avoir de limite supérieure à l'emploi et que le seul critère d'évaluation devrait être le rendement et non l'âge. D'autres ont proposé que l'âge de la retraite soit de 67, 70 ou 75 ans. Cependant, selon la Commission, la retraite obligatoire à n'importe quel âge suscite les mêmes questions de droits de la personne et de politique publique que la retraite obligatoire à 65 ans. Étant donné que la longévité augmente, que l'être humain est en meilleure santé et que les facultés intellectuelles et physiques varient grandement d'une personne à l'autre, il semble que les critères de retraite basés sur l'âge seront difficiles à justifier.

L'abolition de la retraite obligatoire ne doit pas avoir d'effets négatifs sur les employés qui choisissent de prendre leur retraite avant 65 ans. La révision de la retraite obligatoire n'a pas pour but de faire travailler les gens plus longtemps. En fait, elle permet à ceux qui veulent continuer à travailler de le faire.

Manque de protection des travailleurs de plus de 65 ans

La Commission trouve inacceptable que les employés qui ne sont pas assujettis à la retraite obligatoire et qui continuent de travailler après 65 ans ne puissent pas se plaindre de discrimination basée sur l'âge dans le milieu du travail. À la lumière des tendances démographiques et des pénuries de main-d'œuvre, on peut affirmer qu’un plus grand nombre de personnes risquent de se retrouver dans cette situation, et que cette conjoncture touchera de plus en plus de gens. Selon la Commission, il est impossible que la Législature ait délibérément soustrait cette catégorie de travailleurs des dispositions protégeant les droits de la personne, et il faudrait prendre des mesures pour redresser cette situation anormale.

Recommandations pratiques destinées au gouvernement et aux groupes communautaires

13. QU'on amende le Code en éliminant la défense globale de la retraite obligatoire à 65 ans et qu'on amplifie la protection contre la discrimination basée sur l'âge de sorte à inclure les travailleurs de plus de 65 ans. Il faudrait pour cela enlever la limite supérieure de 65 dans la définition de l'âge du paragraphe 10(1). Les employeurs qui désirent avoir une politique de retraite générale pour tous les âges seront tenus de prouver que cette politique repose sur des exigences professionnelles de bonne foi. Il faut également réviser les lois et programmes exigeant des corrections corrélatives.

14. QUE le Code soit amendé ou non, il faut que le patronat et les syndicats réfléchissent à l'utilité et à la nécessité des politiques obligeant les employés à prendre leur retraite à 65 ans et qu'ils révisent leurs politiques de retraite et leurs conventions collectives afin de promouvoir la flexibilité et le choix.

Discrimination basée sur l'âge en milieu de travail

Les commentaires reçus sur la discrimination basée sur l'âge en milieu de travail ont servi à confirmer les problèmes mentionnés dans le Document de travail de la Commission. En particulier, beaucoup se sont plaints que les stéréotypes et les attitudes négatives envers les travailleurs âgés (dès l'âge de 45 ans !) sont monnaie courante dans le monde du travail. En effet, certains croient que les aînés sont moins ambitieux et dynamiques, plus paresseux et incapables d'assimiler de nouvelles connaissances. Certaines personnes âgées se sont plaintes de s'être vu refuser des occasions de perfectionnement ou d'avancement et d’avoir été mises à pied à cause de leur âge. D'autres ont signalé les difficultés qu’elles ont eues à trouver de l'emploi à leur âge. D'autres encore se sont teint les cheveux et ont falsifié leur âge sur leur curriculum vitae afin de paraître plus jeunes.

Beaucoup ont déclaré que ce sont les aînés qui souffrent davantage de la réorganisation de l'entreprise et de ses licenciements massifs. D'autres ont remarqué qu'en demandant à l'employé s'il désire prendre sa retraite, on peut lui donner l'impression qu'on le force à prendre une décision (Association des Sourds du Canada).

Au cours du processus de consultation, la Commission a entendu dire que les aînés aimeraient avoir les mêmes chances que leurs collègues de prouver leur valeur et être considérés comme des membres utiles de l'organisation, et ce, sans stéréotypes âgistes. Ils voudraient être engagés, formés et promus au même rythme que leurs collègues.

Plusieurs personnes et organisations consultées ont insisté sur la nécessité, pour la Commission, d’éduquer la population et les employeurs sur les mythes et réalités touchant les travailleurs âgés. Cette mesure est nécessaire non seulement pour aider les employeurs mais aussi pour s'assurer que les employés traitent leurs collègues plus âgés avec respect. Voici des exemples de mythes et de réalités[27]:

Mythe : Le rendement au travail décline avec l'âge.
Réalité : Le rendement décroît dans certains types d'emploi, mais pas dans tous. Dans certaines entreprises, les études démontrent que les travailleurs âgés sont plus productifs que leurs collègues plus jeunes. En général, l'âge chronologique compte pour peu dans le rendement au travail.

Mythe : La forme physique des travailleurs décline avec l'âge.
Réalité : Même si la forme physique des travailleurs décline quelque peu avec l'âge, un milieu de travail offrant un soutien adéquat peut remédier aux effets du vieillissement; par ailleurs, l'âge n'est pas nécessairement un facteur limitatif pour les tâches physiquement exigeantes, même pour les travailleurs ayant atteint la soixantaine.
Réalité : Ce que les travailleurs âgés perdent en vitesse de réaction et en cadence au travail, ils le compensent en manifestant des compétences égales ou supérieures dans les domaines suivants : créativité, flexibilité, traitement de l'information, taux d'accidents, absentéisme et roulement.

Mythe : Les travailleurs âgés n'arrivent pas à assimiler de nouvelles connaissances.
Réalité : Avec des méthodes de formation et un environnement appropriés, ils peuvent généralement apprendre aussi bien que les jeunes travailleurs.

On a aussi suggéré d'encourager les employeurs à rendre la vie plus facile aux 45 ans et plus et de féliciter les employeurs qui tiennent compte de cette recommandation. Il faut souligner les avantages qu'il y a à engager des personnes plus âgées. Par exemple, les aînés déménagent moins souvent, gardent plus longtemps le même emploi, ont souvent moins de problèmes familiaux parce que leurs enfants sont maintenant adultes et sont parfois plus ouverts au travail à temps partiel ou au partage d'emploi (Halton Region’s Elderly Services Advisory Committee).

Pour ce qui est des enquêtes sur les plaintes portant sur les droits de la personne, on a recommandé plusieurs outils permettant de faire la différence entre l'âgisme et les décisions légitimes fondées sur des motifs non discriminatoires : évaluer le rapport des employés 45+ sur le total des employés; connaître le nombre d'employés qui sont au service de la compagnie depuis plus de 15, 20, 25 ou 30 ans; étudier le nombre d'employés 45+ engagés et vérifier si les curriculums des candidats 45+ reçoivent autant d'attention que les autres candidats (Diana Ward, Award Personnel).

Plusieurs organismes et personnes consultés ont remarqué que les employés eux-mêmes doivent se renseigner sur l'âgisme et sur leurs droits et les recours en cas de discrimination : «Les travailleurs âgés peuvent ne pas reconnaître la discrimination dont ils sont victimes. Il arrive qu'ils ne connaissent rien sur l'âgisme.» (Wendy Draper)

La Commission remercie les participants de leurs suggestions qu'elle étudiera en élaborant son énoncé de politique sur l'âgisme.

Recommandations pratiques destinées au gouvernement et aux groupes communautaires

15. QUE les employeurs prennent des mesures visant à assurer que leurs politiques et procédures n'aient pas d'effets négatifs sur les travailleurs âgés. Les politiques de l'entreprise portant sur les droits de la personne et les programmes éducatifs doivent aussi traiter de la discrimination basée sur l'âge et du harcèlement des aînés.
16. QUE le milieu de travail soit exempt de préjugés et de stéréotypes âgistes. Les employeurs devraient également s’assurer que les employés âgés aient les mêmes chances que leurs jeunes collègues. On devrait reconnaître la valeur des travailleurs âgés.

Engagement de la Commission

3. La Commission lancera des activités de sensibilisation visant à éduquer le patronat et les travailleurs sur les droits et responsabilités, aux termes du Code, à dissiper les mythes souvent associés aux travailleurs âgés et à encourager les employeurs à avoir une opinion plus positive des travailleurs âgés.


[19] [1990] 3 S.C.R. 229.
[20] Commission ontarienne des droits de la personne, Life Together: A Report on Human Rights in Ontario, (Toronto: Commission ontarienne des droits de la personne, juillet 1977).
[21] Voir la Fondation canadienne des relations raciales, Inégalité d'accès : profil des différences entre les groupes ethnoculturels canadiens dans les domaines de l'emploi, du revenu et de l'éducation (rapport préparé pour la Fondation canadienne des relations raciales par le Conseil canadien de développement social, 2000).
[22] A. Lawlor, « Retired but in demand », St. Catharines Standard (30 avril 2001).
[23] En particulier, « General Comment No 6: The Economic, Social and Cultural Rights of Older Persons », United Nations Committee on Economic, Social and Cultural Rights, E/C. 12/1995/16/Rév. 1.
[24] Réunion au sommet Kyushu-Okinawa, 2000, communiqué G 8, 23 juillet 2000 cité en soumission par le professeur D. Gorham, Faculty Group, université Carleton.
[25] N.C. Agarwal, La retraite obligatoire et la Loi canadienne sur les droits de la personne (préparé pour le Comité de révision de la Loi canadienne sur les droits de la personne, octobre 1999), page 19. Reproduit avec la permission de l'auteur.
[26] Ibid, page 21.
[27] Agarwal, supra note 25 et soumission fournie par Diana Ward, Award Personnel.

Social Areas: 

Logement

«Le gouvernement ne reconnaît pas le logement comme un droit de la personne»
(Older Women’s Network)

Au cours du processus de consultation, la Commission a entendu des préoccupations concernant le besoin de logements plus accessibles et plus abordables et de logements adaptés pour les personnes âgées, notamment les sans-abri. Les soumissions soulignaient également que le principe du «vieillissement chez soi» est essentiel à toute discussion et à tout effort relatifs aux politiques ou aux programmes concernant le logement des personnes âgées.

Logement abordable

«Les sans-abri comptent de nombreuses personnes âgées...
le manque de logements accessibles à faible prix et l’élimination du contrôle des loyers fait vivre les aînés dans la crainte d'être expulsés. Il n’existe aucun recours.»
(Corporation Canadienne des Retraités Intéressés)

Options de logement inadéquates : Presque toutes les soumissions qui portaient sur le logement ont souligné le besoin essentiel de logements plus abordables pour les aînés. Le ministère des Affaires municipales et du Logement (MAML) a déclaré à la Commission avoir lancé plusieurs programmes pour régler la question du logement abordable. Le MAML a élargi le Programme de supplément au loyer, un programme qui fournit des subventions au logement et aux personnes qui habitent dans des logements locatifs privés. De plus, le gouvernement s’est engagé à verser 50 millions de dollars par année pour aider les personnes et les familles à faible revenu de l’Ontario, notamment les personnes âgées. Le MAML a également introduit des crédits d’impôt pour favoriser la construction de nouveaux logements locatifs multirésidentiels abordables.

Malgré ces élargissements et ces investissements, on a affirmé à la Commission que la démarche actuelle quant aux logements abordables pour les personnes âgées est inadéquate. Le fait que la Société canadienne d'hypothèques et de logement et le MAML ne garantissent plus les nouvelles hypothèques ainsi que le transfert des responsabilités du logement aux municipalités signifient qu’il existe peu de logements abordables. À cela s’ajoute le fait que les augmentations du revenu de pension ne correspondent pas aux augmentations de loyer, ce qui rend les aînés particulièrement vulnérables. Comme l’a souligné un groupe, il existe certaines options actuelles de logement pour les personnes âgées, mais seulement pour celles qui peuvent se le permettre (Diététistes du Canada). Pour combler cette lacune, il faut un plus grand nombre de logements abordables à loyer fixe ou des augmentations plus importantes du revenu de pension (Elderly Services Advisory Committee (ESAC)).

Loi de 1997 sur la protection des locataires : La Commission a entendu de nombreux commentaires au sujet des répercussions de la Loi de 1997 sur la protection des locataires[28] sur les personnes âgées. Le MAML a déclaré à la Commission que cette loi fournit certains mécanismes de protection, en particulier aux personnes âgées fragiles et à celles qui vivent dans des établissements de soins. De plus, le MAML a souligné que la Loi interdit la discrimination fondée sur l’âge, entre autres motifs, pour le logement (logements locatifs).

«Nombre de locataires ne la considèrent pas comme une loi sur la protection des locataires; ils ne se sentent pas protégés.»
(Senior Link)

 

Malgré cela, la Commission a appris de la part d’organismes et de particuliers que la Loi a servi à éliminer plusieurs mécanismes de protection véritable pour les aînés. L’élimination du contrôle des loyers a eu des répercussions générales sur la disponibilité de logements abordables, un problème particulier pour les femmes et les aînés à revenu fixe. Par conséquent, les personnes âgées peuvent ne pas disposer d’un revenu suffisant pour habiter là où elles le veulent. Par exemple, on a dit à la Commission que les veuves doivent surmonter des obstacles pour obtenir des résidences plus petites et plus pratiques, car les propriétaires peuvent augmenter le loyer pour les nouveaux baux.

«Les logements subventionnés pourraient diminuer les chances qu’une personne âgée vive dans une pauvreté alarmante, qu’elle doive recourir à une banque d’alimentation ou devienne sans abri et n’ait pas assez à manger.»
(Coalition des organismes d'aînés et d'aînées de l'Ontario)

La Commission a également appris que la Loi inquiète particulièrement les personnes âgées qui risquent d’être sans abri. Comme l’a laissé entendre l’organisme Senior Link, les personnes âgées constituent probablement l’un des groupes de sans-abri qui augmente le plus rapidement, car elles sont vulnérables sur le plan socio-économique. Le Older Women’s Network a ajouté que c’est particulièrement le cas des femmes âgées, qui font l’objet d’un désavantage socio-économique démesuré. La Loi augmente cette vulnérabilité en permettant aux propriétaires d’expulser les gens plus facilement.

Les sans-abri : Pour les sans-abri, la question de l’abordabilité est encore plus cruciale. Sans revenu ni adresse permanente, les personnes âgées sans abri doivent surmonter des obstacles encore plus grands lorsqu’elles cherchent un logement stable. Dans le contexte d’un marché de l’habitation offrant peu ou pas de logements abordables, les organismes consultés ont affirmé à la Commission que ce groupe de personnes âgées est encore plus vulnérable.

Options pour régler la question de l’abordabilité

Pour régler cette question, plusieurs soumissions suggéraient que le gouvernement provincial prenne des mesures afin de garantir la disponibilité générale de logements abordables. Il faut de nouvelles initiatives créatives pour le logement, dont des options de logement créées grâce à des partenariats avec des organismes à but lucratif ou non lucratif. On devrait songer à accorder des subventions aux personnes âgées à faible revenu pour les logements locatifs. Les organismes consultés ont suggéré des subventions au logement par le biais du Supplément au revenu annuel garanti pour les personnes âgées à faible revenu qui louent un logement dans des appartements, des maisons de soins infirmiers et des foyers pour personnes âgées (CARP). De plus, certaines soumissions laissaient entendre que les établissements de soins devraient proposer un éventail d’options quant aux logements locatifs en offrant quelques appartements à loyer économique et certains à tarif subventionné.

Enfin, on a souligné le besoin d’allocations-logement semblables à des programmes tels que le Section 8 Voucher Program des États-Unis ou le programme S.A.F.E.R. (allocation aux locataires âgés pour le logement) du Manitoba (Fair Rental Policy Organization of Ontario (FRPO)). On a également suggéré le rétablissement du contrôle des loyers et des incitatifs et des subventions aux municipalités quant aux logements subventionnés pour les personnes âgées.

Logements sociaux

Il existe trois types de logements sociaux en Ontario : les logements sans but lucratif, les logements publics et les coopératives de logement. Ils visent à fournir des logements abordables à ceux qui font face à des obstacles sur le marché des logements locatifs en raison de leur revenu, de leur âge ou de leurs besoins sociaux ou de santé[29]. Le MAML a laissé entendre que la nouvelle Loi de 2000 sur la réforme du logement social comprend un mécanisme qui permet au gouvernement provincial de mettre en application des normes afin de protéger le parc de logements pour les gens qui ont des besoins spéciaux, notamment les personnes âgées fragiles. La nouvelle loi comprend des dispositions qui exigent que les organismes municipaux de prestation de services conservent un nombre suffisant d’unités pour les personnes ayant des besoins spéciaux et donnent un accès prioritaire obligatoire aux logements sociaux aux personnes ayant des besoins spéciaux.

Malgré cette loi, les organismes consultés ont exprimé de fortes craintes quant à l’accès aux logements sociaux adéquats. La Commission a appris qu’une personne ayant besoin d’un logement social à Toronto doit actuellement attendre sept ans (Coalition des organismes d'aînés et d'aînées de l'Ontario). De plus, un groupe a souligné que dans le parc existant de logements locatifs, on ne peut pas donner accès aux édifices de manière sûre et économique. On devrait donc concentrer les efforts sur la construction de nouveaux logements adaptés (FRPO).

Le Older Women’s Network a une fois de plus recommandé que le gouvernement provincial participe à la construction et au maintien de logements sociaux abordables. Il a souligné que, comme il n’y a aucune mesure pour inciter les constructeurs à bâtir des logements sociaux, le seul moyen de les rendre disponibles est d’obtenir des investissements des divers paliers de gouvernement.

Logements accessibles

Un environnement accessible à tous ne doit pas être simplemnent un «objectif» mais plutôt une norme que devraient atteindre tous les établissements.
(ARCH)

Au cours du processus de consultation, la Commission a appris que le parc de logements actuel (y compris dans les établissements de soins) pour les aînés n’est pas accessible pour nombre de groupes de personnes âgées. Les organismes consultés ont souligné que les logements pour les personnes âgées, qu’il s’agisse ou non de résidences privées, doivent être équipés et accessibles afin que les résidents puissent jouir d’une vie caractérisée par la dignité, l’autonomie, la participation, l'équité et la sécurité.

«Les promoteurs et les constructeurs doivent concevoir des logements adaptés aux besoins des aînés et des personnes handicapées. Cette expertise existe.
Au besoin, il faut modifier le Code du bâtiment de l’Ontario
(Alliance of Seniors to Protect Canada’s Social Programs)

Aménagement pour accès facile : La Commission a appris que la conception des logements pour personnes âgées, des sorties de secours, des entrées et des espaces vitaux généraux doit permettre un accès facile et que des rampes doivent être en place pour les personnes qui ne peuvent pas emprunter les escaliers. L’accessibilité signifie également que les corridors et les entrées de porte doivent être plus larges pour laisser passer les déambulateurs et les fauteuils roulants, que les comptoirs doivent être plus bas pour l’utilisation possible par des personnes en fauteuil roulant dans l’avenir et que les salles de bains doivent être dotées de barres d’appui et être accessibles en fauteuil roulant (United Senior Citizens of Ontario). D’autres ont déclaré que les planchers ne doivent pas être glissants, que les fenêtres doivent êtres plus basses et que l’éclairage doit être vif, que les poignées de portes et autres accessoires fixes doivent être choisis en fonction des besoins des arthritiques et que les logements doivent comprendre assez d’espace de rangement pour les fauteuils roulants, les déambulateurs et les réservoirs d’oxygène. La conception inclusive qui prend en compte les besoins particuliers des personnes âgées, qui changent à mesure qu’elles vieillissent, est essentielle.

La Commission a découvert les obstacles que doivent surmonter les personnes âgées sourdes, devenues sourdes, malentendantes ou ayant une déficience visuelle; ces obstacles proviennent des normes actuelles de conception des bâtiments. Comme l’a souligné la Société canadienne de l’ouïe, nombre d’édifices où habitent les personnes âgées sourdes, devenues sourdes ou malentendantes ne comportent pas de mécanismes de soutien adéquats, ce qui donne lieu à des risques possibles pour la sécurité, par exemple dans les cas d’urgence, ou si la personne vit dans un endroit isolé. Pour répondre aux besoins des personnes sourdes, devenues sourdes ou malentendantes, les édifices doivent comporter des planchers qui sont assez souples pour permettre de taper du pied pour attirer l’attention, des affiches et des indicateurs visuels clairs tels que des alarmes, des téléphones et des sonnettes de porte à clignotants, des téléscripteurs et des décodeurs de sous-titrage. De plus, il devrait y avoir une isolation supplémentaire entre les appartements, car il se peut que les personnes âgées malentendantes mettent le volume de leur téléviseur ou de leur radio plus fort. Enfin, la Commission a appris que, parmi les besoins des personnes ayant une déficience visuelle en matière de conception des bâtiments, on compte des espaces ouverts, des coins arrondis, un éclairage clair et doux, du papier peint et de la peinture aux tons paisibles et des signes en Braille.

Les organismes consultés ont souligné que le besoin de sensibiliser le public à la nécessité d’un aménagement pour accès facile et de logements adaptables est une priorité importante pour les concepteurs et les constructeurs de logements pour personnes âgées. De plus, on a laissé entendre que le gouvernement provincial devrait offrir des subventions aux municipalités pour la construction de logements subventionnés à accès facile et des stimulants financiers pour encourager les constructeurs à répondre aux besoins en matière de logement pour personnes âgées (CARP et ESAC). En ce qui concerne particulièrement les personnes sourdes, l’Association des Sourds du Canada a souligné que tous les paliers de gouvernement doivent collaborer avec elles afin d’élaborer des stratégies qui garantissent que les maisons de soins infirmiers, les foyers pour personnes âgées et les autres options en matière de logement sont accessibles aux aînés sourds.

Les options des personnes âgées quant au logement doivent prendre en compte le désir d’être en contact avec la société et permettre l’autonomie et la participation au processus.

Accès communautaire : La Commission a appris que, en plus de l’accès physique, les logements pour les aînés doivent également favoriser l’accès communautaire. Les logements et les établissements de soins pour personnes âgées doivent être situés près des installations de biens et services telles que les magasins et le transport en commun et près d’autres personnes. Comme l’a souligné un groupe, les femmes âgées «veulent vraiment vivre à un endroit central afin de pouvoir aller à l’église, au bureau de poste, faire quelques emplettes, aller toutes seules à la pharmacie, pourvu qu’elles puissent se déplacer. C’est ça qu’elles veulent» (Older Women’s Network). Les options des aînés en matière de logement doivent être conçues de façon à favoriser la vie sociale et les échanges entre les personnes âgées et les jeunes (Générations unies Ontario).

Logements adaptables : Les options des personnes âgées en matière de logement doivent également être conçues de manière à pouvoir s’adapter aux besoins changeants des personnes qui vieillissent. Ces options devraient être disponibles selon une séquence de soins afin que les personnes âgées ne soient pas constamment obligées de déménager à mesure que leurs capacités physiques ou mentales diminuent (Diététistes du Canada). La Commission a appris que l’option idéale quant au logement pour les aînés sont les constructions domiciliaires reliées qui comprendraient des logements avec services de soutien, des maisons de soins infirmiers, des logements subventionnés pour personnes âgées seulement et certaines options à loyer économique, ainsi que des commodités telles que des cliniques de soins et des programmes récréatifs et éducatifs (United Senior Citizens of Ontario). Plusieurs groupes ont souligné que ces logements devraient être offerts dans les régions rurales et urbaines afin que, peu importe où une personne âgée habite, elle puisse décider de demeurer dans le même quartier ou le même village.

Vieillir chez soi

«Il est important que chaque personne puisse vivre là où elle le veut; [les décisions concernant] les conditions de logement [ne doivent pas] reposer sur le fait que la personne ait un déficit auditif ou qu’elle vieillisse.»
(Société canadienne de l’ouïe)

Nombre des groupes ont souligné que le fait de «vieillir chez soi» est essentiel à la promotion de l’autonomie chez les aînés. La Commission a appris que la plupart des personnes âgées veulent continuer de vivre dans leur propre maison et le concept du vieillissement chez soi est essentiel à la réalisation de ce souhait. Comme l’a fait remarquer la Société canadienne de l’ouïe et l’Ontario Association of Non-Profit Homes and Services for Seniors, il est important que chaque personne puisse vivre là où elle le veut et que les décisions concernant les conditions de logement ne doivent pas reposer sur le fait que la personne vieillisse ou qu’elle ait un handicap. L’Association canadienne pour la santé mentale a déclaré à la Commission que des recherches universitaires favorisent le «vieillissement chez soi» à titre d’élément essentiel de la santé des aînés et de stratégie de logement économique qui réponde aux besoins des contribuables. À ce titre, ce concept doit constituer la principale composante de toute stratégie d’élaboration d’options relatives au logement pour les personnes âgées.

Pour que le «vieillissement chez soi» soit possible pour les personnes âgées, des options de logement abordables et accessibles et des services de soutien à domicile doivent être disponibles (CASC de Chatham-Kent). Une personne a fait remarquer que les aînés peuvent avoir peu ou pas de choix quant à l’endroit où ils habitent parce qu'ils n’ont ni les moyens, ni le soutien familial pour vivre seuls dans leur propre village ou quartier. Plusieurs groupes ont souligné que, à l’heure actuelle, peu de services de soutien à domicile sont disponibles ou n’existent pas. Comme l’a déclaré l'organisme Over 55 (London) Inc. à la Commission, il faut appuyer les services communautaires qui peuvent permettre aux aînés de «vieillir chez eux», comme les services d’aides familiales et d’entretien ménager et l’offre de repas nutritifs.

Les organismes consultés ont souligné que, à titre d’options de logement, les pavillons-jardins (logements indépendants construits sur la propriété de membres de la famille) pourraient permettre aux aînés de rester chez eux. Les règlements municipaux qui régissent la construction de pavillons-jardins précisent que ces logements peuvent seulement être construits sur la propriété d’un parent. Un groupe a laissé entendre que ces règlements devraient être modifiés afin de permettre aux personnes âgées d’habiter dans des pavillons-jardins situés sur des propriétés appartenant à des personnes autres que des parents. Ce genre d’entente permettrait à des personnes autres que les parents d’offrir un appui aux personnes âgées lorsque la famille est absente ou n’existe pas (ESAC). De plus, nombre de groupes ont suggéré des «maisons-jardins» et des appartements au sous-sol dans les maisons des membres de la famille; cependant, certains groupes ont averti la Commission que, dans certains cas, ces conditions de logement peuvent favoriser la violence et l’isolement plutôt que l’autonomie, la dignité et la participation.

Recommandations pratiques destinées au gouvernement et aux groupes communautaires

17. QUE l’administration municipale et les gouvernements provincial et fédéral collaborent afin d’élaborer une stratégie relative aux logements abordables pour les personnes âgées de l’Ontario. Les options à l’étude comprendraient les subventions locatives, les allocations pour le logement et des mécanismes de protection du coût de location pour les personnes âgées. Le concept du «vieillissement chez soi» doit être l’un des principaux points à l’étude.
18. QUE tous les paliers de gouvernement fassent des efforts pour garantir que le parc de logements sociaux de l’Ontario réponde aux besoins existants et futurs des personnes âgées et des autres groupes de personnes vulnérables.
19. QUE la Loi de 1992 sur le code du bâtiment de l’Ontario soit modifiée afin de comprendre les meilleurs principes de l’aménagement pour accès facile.
20. QUE les promoteurs et les constructeurs conçoivent et mettent en œuvre des logements à accès facile qui répondent aux besoins particuliers des personnes âgées, notamment celles qui sont handicapées.

Engagement de la Commission

4. La Commission préparera un document de travail sur le logement et les droits de la personne qui traite des questions relatives aux personnes âgées.


[28] Loi de 1997 sur la protection des locataires, L.O. 1997, ch. 24.
[29] Unité de planification sociale, Service des services communautaires, Municipalité régionale de Niagara, Social Housing Niagara - Social Housing Newsletter, vol.1, no1, octobre 1999, p. 1.

Social Areas: 

Soins de santé, établissements et services

«Les soins de santé de base sont un fondement de notre société et les différences ne sont jamais justifiables. Les besoins des aînés sont réels et il est incontestable qu’ils méritent un accès facile aux soins de santé, tout comme les autres groupes de l'Ontario.»
(CASC de Chatham-Kent)

Les soumissions qu’a reçues la Commission mentionnaient de manière uniforme les obstacles que doivent surmonter les personnes âgées quant aux soins, aux établissements et aux services de santé. La Commission a découvert les inquiétudes envers le système de santé actuel, notamment l’insuffisance des fonds et partant l’insuffisance des soins de santé communautaires, le manque de professionnels des soins, et plusieurs inquiétudes concernant les établissements de soins de longue durée. Les soumissions mentionnaient les obstacles physiques, tels que l’accessibilité des édifices, et les obstacles sociaux, tels que des mesures restrictives au sein du système de santé, comme principaux obstacles pour les personnes âgées. Dans le même ordre d’idées, la Commission a appris qu’il existe des obstacles physiques et sociaux quant aux services généraux, et plusieurs ont souligné qu’il existe des obstacles propres au transport. Le message des participants au cours du processus de consultation était clair : les obstacles quant aux soins, aux établissements et aux services de santé ont des répercussions négatives sur la dignité, l’estime de soi, l’autonomie et la participation des personnes âgées de l’Ontario.

Soins communautaires : manque de fonds et de services

On a souligné que l’un des principaux obstacles pour les personnes âgées qui cherchent à accéder au système de santé est le manque de fonds pour les soins communautaires. Le ministère de la Santé et des Soins de longue durée (MSSLD) a déclaré à la Commission que «d’importants investissements ont été faits quant à l’élargissement des services communautaires de soins de longue durée afin d’aider les gens à demeurer chez eux aussi longtemps que possible.» La Commission a été enchantée d’apprendre que le ministère s’est engagé à investir 1,6 milliard de dollars dans les services communautaires de soins de longue durée pour l’exercice 2000-2001, dont 1,1 milliard de dollars est réservé aux centres d’accès aux soins communautaires (CASC). Une autre somme de 448 millions de dollars, faisant partie de cet investissement, vise les autres services communautaires de soins de longue durée comme les programmes de jour pour adultes et les services d’auxiliaires.

«Le ministère reconnaît que le système de services de soins de longue durée est une composante essentielle d’un système de services de santé intégré et s’est engagé à garantir un système de services de soins de longue durée communautaires et en établissement de qualité.»
(Ministère de la Santé et des Soins de longue durée)

Malgré ces investissements, la Commission a entendu des préoccupations concernant le manque de fonds pour les services communautaires, qui diminuent la capacité de répondre adéquatement aux besoins des personnes âgées en matière de soins de santé. Le CASC de Chatham-Kent a souligné que plus de la moitié de la population qu’il sert est constituée d’aînés. Cependant, le manque chronique de fonds des CASC limite fortement leur capacité de répondre aux besoins particuliers des personnes âgées en matière de soins. Ils ont souligné qu’en raison de l’accent sur la compression des coûts, ils ont dû réduire le nombre de cas traités chaque jour de 3 000 à 2 600, ce qui se traduit par environ 200 personnes âgées de moins par jour qui reçoivent des soins. Sans financement adéquat, les CASC ont déclaré à la Commission qu’il est difficile de répondre à la demande actuelle de services.

«Nombre de personnes âgées n’ont pas accès à un médecin parce qu’il existe une pénurie grave de médecins et, comme les personnes âgées qui ont des problèmes de santé exigent une période et une attention supérieures à la moyenne, les médecins disponibles n’acceptent pas volontiers les aînés comme patients.»
(CASC du Témiscamingue)

Les soins de santé pour les aînés sont particuliers et exigent une démarche qui tienne compte du fait que les besoins changent avec l'âge. Plusieurs groupes ont dit à la Commission que les besoins des aînés en matière de soins exigent souvent plus de temps des professionnels des soins. Cependant, le système de soins de l’Ontario n’est pas financé de manière à permettre aux soignants de consacrer le temps adéquat à leurs soins de santé particuliers. L'Advocacy Centre for the Elderly a souligné ce point en déclarant : «il existe des limites maximum quant aux services,... des limites rigoureuses quant au nombre d’heures [de soins] qu’on peut obtenir... [ils ne] répondent absolument pas aux besoins de nombreux aînés... c’est ce que nous constatons pour nombre de services... Le système même, la structure ont des répercussions négatives sur les personnes âgées parce qu’il n’y a pas assez d’heures, pas assez de temps pour traiter les personnes âgées.»

À ce sujet, le CASC de Chatham-Kent a souligné qu’en raison du manque de fonds, il a été obligé de diminuer la période de soutien à domicile, qui était de 12 à 16 heures par semaine, à moins de huit heures par semaine. Le CASC d’Ottawa-Carleton a ajouté que la Loi de 1994 sur les soins de longue durée[30] établit des limites quant à la quantité de services que peuvent offrir les CASC à une personne âgée. Ils ont fait remarquer que, par conséquent, le niveau de soins communautaires peut parfois ne pas suffire à répondre aux besoins des personnes âgées en matière de soins. Dans le contexte des congés précoces et du manque de lits pour les soins aux convalescents, ils ont déclaré que, souvent, on laisse les personnes âgées retourner à la maison trop tôt et sans plan de soins complet. Pour les personnes âgées qui ont besoin d’une période de convalescence plus longue, cette situation peut se traduire par un risque pour leur vie.

Plusieurs soumissions ont également souligné que le manque de fonds pour les services communautaires empêche les personnes âgées de «vieillir chez elles». Comme l’a souligné le CASC d’Ottawa-Carleton, pour que les personnes âgées puissent demeurer chez elles, les soins actuellement offerts par les CASC et les établissements de soins pour bénéficiaires internes subventionnés par le gouvernement doivent être élargis. Étant donné le manque de fonds, plusieurs groupes ont déclaré que cela est difficile à réaliser.

«Si nous voulons que les gens sortent de l’hôpital et retournent à la maison, il faut trouver des fonds. Lorsqu’on manque de lits et qu’on donne congé aux gens après une brève période, ils sont très fragiles lorsqu’ils rentrent chez eux et ont encore un grand besoin d’aide à domicile... comme pour tout le monde, le manque de services médicaux est néfaste pour eux, mais encore plus parce qu’ils sont vulnérables.» (Association des travailleuses et travailleurs sociaux de l’Ontario)

Le Older Women’s Network et l’Association des travailleuses et travailleurs sociaux de l’Ontario ont souligné que la Commission ne doit pas oublier les personnes âgées qui sont le plus marginalisées dans le système actuel de soins communautaires. Les femmes âgées handicapées, pauvres, de diverses origines raciales ou ethniques ou qui sont lesbiennes ou transgenres doivent surmonter un «double obstacle» dans le contexte des soins communautaires. La discrimination basée sur l’âge et l’exclusion en raison d’autres caractéristiques personnelles signifient que les services communautaires essentiels sont beaucoup plus difficiles d’accès pour elles.

En réponse à ces préoccupations, plusieurs organismes consultés ont recommandé que des fonds soient fournis, de manière que les CASC et les autres organismes offrant des soins aux aînés puissent, en termes de ressources et de temps, fournir les meilleurs soins possibles. On devrait accorder une attention adéquate, en matière de financement, aux services multidisciplinaires, notamment les soins communautaires, la réadaptation, les soins aux malades chroniques ainsi que les soins continus complexes et les mécanismes de soutien tels que les soins infirmiers, les services de soutien à domicile, les thérapies et les services de gestion des cas. L’Association des travailleuses et travailleurs sociaux de l’Ontario a recommandé que les initiatives de la Commission en matière de politiques liées à l’âge «favorisent l’accès égal à un éventail complet de services et de mécanismes de soutien communautaires, peu importe l’âge ou les autres attributs.»

Obstacles et préoccupations concernat les établissements de soins de longue durée

«Nous savons que les personnes âgées et leurs familles veulent être certaines que les soins offerts par un établissement de soins de longue durée seront disponibles lorsque les soins à domicile ou les soins communautaires ne seront plus possibles. Le ministère vise particulièrement à augmenter et à réaménager le nombre de lits dans les établissements de soins de longue durée (maisons de soins infirmiers et foyers de bienfaisance).» (Ministère de la Santé et des Soins de longue durée)

Le Ministère de la Santé et des Soins de longue durée (MSSLD) a affirmé à la Commission qu’il reconnaît l’importance des soins de longue durée à titre d’élément essentiel du système de santé de l’Ontario et qu’il s’est engagé à investir dans les services de longue durée communautaires et en établissement. Il a déclaré à la Commission que : «En 1998, pour répondre aux besoins d’une population âgée grandissante, le gouvernement a annoncé un soutien pour la construction de 20 000 nouveaux lits dans les établissements de soins de longue durée et le réaménagement d’environ 16 000 lits existants. Cet investissement dans les lits des soins de longue durée se chiffre à 602,4 millions de dollars.» Reconnaissant que les résidents des établissements de soins de longue durée ont des besoins de plus en plus complexes, le ministère a également lancé de nouvelles normes et directives de conception pour les établissements de soins de longue durée en 1998. Ces normes et ces directives s’appliqueront aux 20 000 nouveaux lits et aux 16 000 lits dont la rénovation devrait être terminée en 2004.

De plus, le MAML a déclaré à la Commission que, grâce aux mécanismes de protection fournis par la Loi sur la protection des locataires, il joue toujours un rôle dans la réglementation des établissements de soins. Le MAML a déclaré que les mécanismes de protection comprennent la possibilité pour les locataires des maisons de santé de mettre fin à leur location en donnant un avis de 30 jours; l’exigence que les soignants fournissent aux locataires une entente de location écrite qui décrit les services de soins et de repas qui seront fournis; et l’exigence que les fournisseurs de soins donnent aux locataires des trousses d’information sur le coût et la disponibilité des services de repas et de soins et des services d’urgence.

Quoi qu’il en soit, plusieurs soumissions ont soulevé des préoccupations concernant les établissements de soins de longue durée en Ontario. L’Association canadienne pour la santé mentale a souligné un manque de lits de soins de longue durée. Elle a déclaré à la Commission que cette situation a parfois entraîné le placement inopportun de personnes âgées qui ont des problèmes de santé mentale, un groupe d’aînés particulièrement vulnérable.

L’organisme Senior Link et plusieurs autres groupes ont exprimé leur inquiétude quant au manque de réglementation pour les maisons de repos et de retraite. On a déclaré à la Commission que le manque de réglementation dans ces établissements donne lieu à des soins inférieurs et à des mauvais traitements (Coalition des organismes d’aînés et d’aînées de l’Ontario et Corporation Canadienne des Retraités Intéressés). Le groupe ARCH, centre de ressources juridiques pour les personnes handicapées, a signalé ses inquiétudes en ce qui concerne «l’utilisation de contraintes physiques dans les établissements pour personnes âgées et pour personnes souffrant de troubles psychologiques». Comme l’a fait remarquer un groupe : «Les personnes âgées à faible revenu sont désavantagées, car elles doivent accepter ce qu’elles peuvent se permettre dans une maison de retraite, ce qui peut être de qualité inférieure.» (Alliance of Seniors to Protect Canada’s Social Programs) Plusieurs groupes ont souligné à la Commission le besoin de surveillance, de normes et de lois qui garantiront des soins adéquats et une sécurité aux aînés qui vivent dans les foyers pour personnes âgées. On a souligné le besoin d’une déclaration des droits des résidents. CARP a particulièrement recommandé que le gouvernement provincial se charge d’élaborer la loi et les normes nécessaires.

D’autre part, le CASC de Chatham-Kent a laissé entendre que le MSSLD devrait donner plus de pouvoir à l'Ontario Residential Care Association (ORCA) afin de lui permettre d’autoréglementer le secteur. La soumission du MSSLD a donné un aperçu des mesures gouvernementales sur cette question. Elle soulignait que «avec l'aide financière du gouvernement, l’Ontario Residential Care Association (ORCA) élargit son programme d’autoréglementation pour les foyers pour personnes âgées [de manière à inclure] un système d’enquête sur les plaintes des consommateurs et l’élaboration d’une liste de vérification afin que les consommateurs sachent ce qu’ils doivent rechercher sur un contrat de location dans une maison de retraite.» L'ORCA n’a pas fourni de détails sur l’évolution de cet élargissement.

Plusieurs groupes ont exprimé des inquiétudes quant aux besoins culturels, linguistiques et religieux des personnes âgées dans les établissements de soins de longue durée. Un groupe a fait remarquer que ces établissements ne répondent pas également aux besoins de tous ces groupes ethniques. Les Diététistes du Canada ont affirmé que l’on doit considérer les besoins culturels, linguistiques et religieux de manière égale. L’organisme a suggéré que le gouvernement provincial appuie la création de trousses éducatives qui serviraient dans les établissements de soins de longue durée afin d’aider le personnel à fournir des soins adéquats et respectueux (par exemple, l’offre de nourriture, la célébration des fêtes religieuses et des activités socioculturelles particulières).

L’Association des Sourds du Canada et l’Association canadienne de l’ouïe se sont dites très inquiètes du traitement des personnes âgées sourdes dans les établissements de soins de longue durée et les foyers pour personnes âgées. Le manque de systèmes de téléscripteurs, d’alarmes visuelles dans les chambres à coucher, les corridors et les salles de bains et d’alarmes de réveil vibrantes signifie que les personnes sourdes courent des risques et sont exclues de leurs propres lieux de séjour. Il faut absolument qu'il y ait un plus grand nombre de résidences conçues pour les personnes âgées sourdes, étant donné qu’il n’en existe actuellement qu’une (Le Bob Rumball Centre for the Deaf) dans l’ensemble de la province. Plusieurs groupes ont souligné que cette situation est encore plus grave pour les personnes qui vivent dans des régions rurales, où les programmes pour les personnes sourdes peuvent ne pas exister du tout. On a recommandé que tous les paliers de gouvernement, en collaboration avec la population sourde, s’efforcent de garantir que les maisons de soins infirmiers et les foyers pour personnes âgées sont accessibles aux personnes âgées sourdes (Association des Sourds du Canada).

«Les pratiques actuelles tendent à généraliser et à considérer toutes les personnes de plus de 65 ans comme identiques... cela peut injustement limiter l’accès aux services nécessaires pour les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, ce qui, en fin de compte, menace l’autonomie et la dignité de ce segment croissant de la population.»
(Société Alzheimer de l'Ontario)

La Société Alzheimer de l'Ontario a soulevé des préoccupations particulières concernant le traitement des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer pendant leur séjour dans des établissements de soins de longue durée. Le MSSLD a déclaré à la Commission que «la moitié des résidents des établissements ont la maladie d’Alzheimer ou une démence connexe.». La Société Alzheimer de l'Ontario a souligné que ce groupe possède des besoins particuliers mais que, cependant, «les pratiques actuelles tendent à généraliser et à considérer toutes les personnes de plus de 65 ans comme identiques ... cela peut injustement limiter l’accès aux services nécessaires pour les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, ce qui, en fin de compte, menace l’autonomie et la dignité de ce segment croissant de la population.» De plus, le calcul du niveau de financement pour les établissements de soins de longue durée ne tient pas compte des besoins cognitifs et comportementaux des gens qui ont la maladie d’Alzheimer. Cela influe sur la capacité des établissements de soins à répondre adéquatement aux besoins de ce groupe de personnes âgées, dont le nombre va croissant.

D’autres ont exprimé des préoccupations quant à l’autonomie de certains groupes d’aînés dans les établissements de soins. L’Association canadienne pour la santé mentale a souligné que, parfois, il se produit un conflit quant aux droits, par exemple lorsque le droit d’une personne âgée de prendre des risques entre en conflit avec les droits des soignants d’intervenir. Le CASC d’Ottawa-Carleton CCAC a déclaré que le personnel des établissements doit connaître le droit d’une personne âgée de refuser un traitement ou des soins, un droit qui doit être respecté même s’il met la personne âgée en danger. L’Association des travailleuses et travailleurs sociaux de l’Ontario a souligné que ceux qui prennent des décisions en matière de santé dans les établissements de soins de longue durée doivent prendre au sérieux et appuyer les souhaits et les décisions des personnes âgées soignées. En ce qui concerne les décisions en fin de vie, la Société Alzheimer de l'Ontario a ajouté que «chaque personne a le droit de pouvoir prendre des décisions concernant la fin de sa vie et de faire respecter ces décisions. En Ontario, il existe une loi qui protège ce droit, mais on ne la respecte pas toujours, par exemple, lorsque la famille s’oppose fortement à une directive préalable ou à la décision de la personne qui prend des décisions au nom de la personnes âgée.»

Enfin, nombre d’organismes ont fait des commentaires sur les obstacles que doivent surmonter les aînés une fois qu’ils habitent dans un établissement de soins. Les Diététistes du Canada ont souligné que les couples âgés peuvent avoir du mal à loger dans la même chambre, ce qui peut entraîner la «séparation forcée» du couple. L’inquiétude et la solitude peuvent s’ensuivre, ce qui peut avoir des répercussions négatives sur la santé et le bien-être du couple âgé. La séparation peut également être attribuable à des niveaux de soins différents exigés par le couple. On a laissé entendre que des établissements à plusieurs niveaux de soins qui peuvent répondre aux besoins variés de soins permettraient de garantir que les couples âgés ne soient pas obligés de vivre séparément. Comme on l’a souligné auparavant, l’ACT et la CLGRO ont ajouté que les couples de gays et de lesbiennes doivent surmonter des obstacles considérables dans les établissements de soins étant donné que, dès le départ, leurs relations ne sont souvent ni reconnues ni validées.

Soins actifs comme point de mire

«Les soins pour les personnes âgées passent après d’autres aspects du système de santé. Par comparaison, les dépenses pour les soins communautaires et les soins de longue durée, qui visent principalement les personnes âgées, représentent une fraction des dépenses pour les soins actifs.»
(CASC de Chatham-Kent)

Nombre de soumissions soulignaient une concentration de l’attention sur les soins actifs, ce qui détourne l’attention des besoins des personnes âgées en matière de soins de longue durée. L’organisme Senior Link a déclaré à la Commission que «dans le processus de restructuration des hôpitaux, nous avons constaté que les soins communautaires sont devenus des soins actifs... les soins de longue durée ont été mis au rancart...». La Société Alzheimer de l'Ontario a souligné que la concentration de l’attention sur les soins actifs signifie que «les personnes âgées, en particulier celles qui sont atteintes de maladies chroniques comme la maladie d’Alzheimer ou des démences connexes, sont incapables d’obtenir des services adéquats et, dans certains cas, n'obtiennent aucun service.»

Manque de professionnels de la santé bien informés

Les organismes consultés ont également fait remarquer que l’accès à des professionnels de la santé qui connaissent bien le processus de vieillissement est une source de grande inquiétude, surtout devant la croissance de la population de personnes âgées en Ontario. La Société Alzheimer a dit à la Commission que, d'après ses recherches, on consacre très peu de temps d’enseignement aux questions du vieillissement et de la démence dans les écoles de médecine de l’Ontario. Comme elle et d’autres organismes l’ont souligné, «[le] manque de formation dans ces domaines entraînera des obstacles pour les personnes âgées qui ont besoin d’utiliser le système de santé et compromettra la qualité des soins ou l’accès à des soins adéquats.» (Société Alzheimer de l'Ontario)

La Commission a également appris qu’étant donné cette situation, il est très difficile pour les personnes âgées qui n’ont pas de médecin d’en trouver un (CASC de Kingston, Lennox et Addington). Le CASC du Témiscamingue a déclaré à la Commission que l’accès aux soins de santé est limité par le manque de médecins dans l’ensemble de l’Ontario. Pour régler ce problème, il a suggéré «d’offrir des incitatifs aux médecins afin qu’ils se spécialisent en gériatrie». On a souligné que, comme les médecins ne font plus de visites à domicile, l’accessibilité aux médecins est limitée pour certains aînés. La Commission a appris que ce problème est encore plus grave dans les régions rurales, où l’accès aux médecins, en particulier aux spécialistes, «n’existe pratiquement pas». Comme le nombre de personnes âgées augmente, ces problèmes s’intensifieront. Le chapitre de Windsor-Essex de la Société canadienne pour la santé mentale a ajouté que le manque de médecins, de personnel infirmier et de personnel de soutien personnel peut entraîner des soins inadéquats et inopportuns.

Pour remédier au manque de médecins dans la province, le MSSLD a déclaré à la Commission qu’il a mis en œuvre un «Programme de services aux régions insuffisamment desservies» afin d’attirer et de garder des fournisseurs de soins de santé dans les régions du Nord, les régions rurales et les régions éloignées de la province. Le programme comprend «des incitatifs financiers pour les médecins qui acceptent de déménager dans ces régions insuffisamment desservies, des initiatives de recrutement, des mécanismes de soutien de l’exercice et des améliorations de l’accès aux services médicaux pour les régions touchées.»

Obstacles aux renseignements sur les soins de santé

La Commission a appris que nombre de groupes de personnes âgées ne reçoivent pas de renseignements sur les services de soins de santé, ce qui limite leur accès à ces derniers. Ils ont souligné que, bien que les CASC aient des services à offrir, nombre de personnes âgées ne savent pas que ces derniers existent et ne savent pas que des services sont disponibles ou hésitent à demander des renseignements sur eux. De plus, on a dit à la Commission que les communications sur l'Internet ne constituent pas un bon moyen de joindre les personnes âgées. Les organismes consultés ont souligné le besoin d'efforts de sensibilisation afin que les personnes âgées de l'ensemble de l'Ontario soient au courant des services disponibles. Les CASC ont indiqué qu'avec un financement supplémentaire, ils seraient plus en mesure de faire ces efforts.

On a parlé à la Commission d'obstacles à l'information sur la santé qui dépassent la question de l'éducation du public. Les questions telles que la langue et le statut de citoyen représentent des obstacles particuliers pour certains groupes de personnes âgées :

«Nous avons souvent constaté qu'une famille sera réunie au Canada et que la [personne âgée] n'aura pas le statut de citoyenne, ce qui la rend très vulnérable, car elle n'a pas accès au système de soins de santé.» (Senior Link)

L'Association des travailleuses et travailleurs sociaux de l’Ontario a souligné que les fournisseurs de services de santé et d'autres services doivent garantir la disponibilité de services dans les langues adéquates : «il est bien entendu essentiel de fournir des services dans la langue que parle la personne âgée... [les fournisseurs de services devraient] adopter comme politique d'employer des gens qui parlent la langue des personnes [qu'ils] servent.» De plus, elle a souligné que les CASC devraient s'assurer que leur matériel est publié dans diverses langues.

«Les fournisseurs de services de soins de santé, de soins de longue durée, de soins aux personnes âgées et de santé mentale employés par les secteurs public et privé doivent obtenir une formation en cours d'emploi afin de mieux comprendre... l'utilisation des stratégies de communication pour les personnes sourdes, devenues sourdes ou malentendantes.»
(Société canadienne de l'ouïe)

La Société canadienne de l'ouïe a souligné que les personnes sourdes, devenues sourdes et malentendantes doivent surmonter des obstacles à la communication dans le contexte des services de santé. Elle a déclaré à la Commission que le personnel du système de santé est incapable de communiquer avec les personnes qui ont un déficit auditif. Le jugement de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Eldridge c. Colombie-Britannique (Procureur général)[31] a confirmé qu'il faut fournir une interprétation gestuelle si elle est nécessaire pour obtenir un accès égal aux soins de santé. Quoi qu'il en soit, les organismes consultés ont déclaré que, bien que ce jugement représente un point tournant essentiel, son application a été lente.

La Commission estime que les fournisseurs de soins de santé de l'Ontario doivent respecter le jugement Eldridge en fournissant une interprétation gestuelle afin de répondre aux besoins des personnes sourdes. Comme l'ont souligné les organismes consultés, il semble que les fournisseurs de services de santé et d'autres services devraient recevoir une formation en techniques de communication adéquates qui répondent aux besoins des personnes sourdes, devenues sourdes ou malentendantes.

Coûts à titre d'obstacles à l'accès

La consultation a révélé que l'un des principaux obstacles pour les aînés est l'accès limité aux prestations pour soins de santé. Nombre des programmes de médicaments des employeurs prennent fin à la retraite ou à la cessation d'emploi. Ceux qui sont trop jeunes pour avoir droit au Programme de médicaments gratuits de l'Ontario ou ceux qui se retrouvent entre deux garanties privées doivent souvent payer les produits et services de santé. Certaines personnes âgées peuvent être dans l’incapacité de se le permettre.

«De plus en plus d'aînés doivent recourir aux banques d'alimentation parce qu'ils ne peuvent pas acheter de la nourriture et les médicaments très chers qui sont souvent prescrits mais exclus de la liste de médicaments couverts par le programme de santé provincial (Programme de médicaments gratuits de l'Ontario) ... l'autre choix est de se passer de médicaments.»
(Corporation Canadienne des Retraités Intéressés)

La Corporation Canadienne des Retraités Intéressés a souligné que le coût est un obstacle bien réel aux services de santé pour les personnes âgées. Elle a dit à la Commission que le coût des ordonnances peut obliger les personnes âgées à choisir entre l’achat de médicaments et les nécessités de la vie, ce qui peut les mettre en danger. La Société Alzheimer de l'Ontario a ajouté que les médicaments pour traiter la maladie d'Alzheimer coûtent environ 5 $ par jour, ce qui représente une somme considérable pour les personnes âgées qui ne possèdent pas de régime de soins médicaux ou ne sont pas couvertes par le Programme de médicaments gratuits de l'Ontario (PMGO). Comme elle le fait remarquer, «sans garantie, nombre d'adultes n'ont pas accès à des interventions opportunes qui peuvent maximiser leur qualité de vie et minimiser leur stress, leur inquiétude et le fardeau sur les soignants.» Les Diététistes du Canada ont ajouté que «la garantie des suppléments alimentaires [par le PMGO] ne suffit pas. De nombreuses personnes âgées ontariennes, qu'elles vivent à la maison, dans des foyers pour personnes âgées ou des établissements de soins de longue durée, subissent les complications de la malnutrition.» On a dit à la Commission que, pour régler ce problème, le MSSLD doit s'efforcer d'élargir les types de médicaments d'ordonnance et de médecines douces qui seront couverts pour les personnes âgées par l'Assurance-santé de l'Ontario.

Les aînés qui sont handicapés ou le deviennent doivent également surmonter des obstacles en raison du coût et de la disponibilité des appareils et accessoires fonctionnels. Le coût de ces derniers représente un obstacle de taille, en particulier parce que les personnes qui en ont le plus besoin peuvent être celles qui peuvent le moins se les permettre.

Même lorsqu'il existe des programmes d'appareils et accessoires fonctionnels financés par l'État, ils peuvent payer seulement une partie des coûts ou seulement les appareils et accessoires de base au lieu de meilleurs appareils et accessoires qui amélioreraient la qualité de vie d'une personne. De plus, les limites d'âge dans la prestation de ces programmes constituent un autre obstacle et on s'est élevé contre eux à titre de forme de discrimination fondée sur l'âge. Par exemple, dans le cas opposant la Commission ontarienne des droits de la personne au ministère de la Santé de l'Ontario[32], la Cour d'appel a découvert que le Programme d'appareils et accessoires fonctionnels du ministère de la Santé de l'Ontario ne pouvait se limiter à fournir une télévisionneuse en circuit fermé sevlement aux personnes de moins de 25 ans. On avait refusé cette aide visuelle à un homme de 71 ans. De plus, la Commission a récemment déposé une plainte contre le MSSLD et l'entreprise West Park Healthcare Centre au sujet de l'utilisation de critères basés sur l'âge pour fournir des appareils et accessoires fonctionnels. En vertu du programme, l'accès aux accessoires pour l'incontinence est limité aux personnes nées après le 1er juillet 1963, ce qui exclut les personnes âgées.

Les organismes consultés ont également affirmé que les coûts liés aux soins dentaires sont un obstacle important pour les gens du troisième âge. Le CASC de la région de Halton a souligné que «l'Ontario ne possède pas de programme de soins dentaires universel pour les personnes âgées [et]... la plupart des personnes âgées ne possèdent pas de régime de soins dentaires.» Il a dit à la Commission que, sans régime de soins dentaires et avec un revenu limité, les personnes âgées n'ont pas accès à des soins dentaires réguliers. Cela peut entraîner une mauvaise santé bucco-dentaire et mener à «des problèmes physiques, psychologiques et sociaux». Les Diététistes du Canada et le CASC de Halton ont souligné l'importance de bons soins bucco-dentaires afin que les personnes âgées maintiennent leur poids et évitent «des problèmes de santé systémiques». On a souligné que le besoin d'une couverture dentaire abordable et accessible pour les aînés constitue un aspect essentiel des efforts visant à répondre aux besoins des personnes âgées de l'Ontario en matière de santé. (Halton Health Department)

Obstacles sociaux à l'accès

Au cours de la consultation, la Commission a été informée des obstacles sociaux à l'accès aux soins et aux établissements de santé que rencontrent les personnes âgées. L'Association des travailleuses et travailleurs sociaux de l’Ontario a déclaré à la Commission «qu'on caractérise souvent les personnes âgées comme des membres qui ne contribuent pas à la société et [l'on] présente leur besoin de services comme une perte des rares ressources publiques.» La Coalition des organismes d'aînés et d'aînées de l'Ontario et d'autres organismes ont déclaré à la Commission qu'on considère souvent les personnes âgées comme des «malades monopolisant un lit». L'Association des travailleuses et travailleurs sociaux de l’Ontario a ajouté que ce catalogage des personnes âgées «laisse entendre que les patients qui ont vraiment besoin de lits de soins de longue durée sont en partie responsables du manque de lits dans les salles d'urgence... [et] détourne l'attention du débat public essentiel sur les priorités et le financement du gouvernement à l'égard de notre système de soins de santé.»

«Le système de santé a tendance à donner priorité aux personnes jeunes et aux travailleurs... si on est âgé, la personne plus jeune a la première place... il s'agit d'une discrimination fondée sur l'âge.»
(Corporation Canadienne des Retraités Intéressés)

Plusieurs organismes ont parlé à la Commission des répercussions des hypothèses âgistes sur le soin des aînés. La Corporation Canadienne des Retraités Intéressés a déclaré à la Commission qu'on considère les personnes âgées de l'Ontario en dernier en matière de services de santé. La Société canadienne de la santé mentale a donné à la Commission un exemple de cette situation pour les personnes âgées. Elle a raconté à la Commission que les aînés, en particulier ceux qui ont des problèmes de santé mentale, entendent souvent des commentaires du genre «à quoi vous attendez-vous à votre âge?» lorsqu'ils rencontrent des professionnels de la santé. Plusieurs groupes ont ajouté que certains médecins «normalisent» les problèmes des personnes âgées, les liant souvent au processus de vieillissement, donc offrant une évaluation et un suivi insuffisants.

La Coalition des organismes d'aînés et d'aînées de l'Ontario a souligné qu'on accorde souvent une moins grande priorité aux personnes âgées quant aux interventions chirurgicales et qu'on leur prescrit souvent trop de médicaments. De plus, quelques organismes ont exprimé des inquiétudes concernant le fait que les pouvoirs conférés par la Loi canadienne sur la santé pourraient permettre aux fournisseurs de soins de santé de limiter l'accès aux interventions relatives aux soins de santé selon l'âge. Plusieurs organismes consultés, notamment le CASC de Chatham-Kent, ont affirmé avoir entendu des anecdotes où les médecins limitaient le nombre d'actes médicaux offerts aux personnes âgées et restreignaient l'accès de celles-ci à leur cabinet. Comme l'a indiqué à la Commission l'Elderly Services Advisory Committee (ESAC), le système de santé de l'Ontario doit fournir aux personnes âgées les mêmes soins et la même attention qu'aux personnes plus jeunes.

Le chapitre de Windsor-Essex de l'Association canadienne pour la santé mentale a affirmé à la Commission que les hypothèses âgistes continuent d'aggraver la marginalisation des personnes âgées qui ont des problèmes de santé mentale au sein du système de santé. Ce genre d'attitude entraîne une attention insuffisante aux besoins des personnes âgées en matière de santé mentale. Il a dit à la Commission que cela donne souvent lieu à l'utilisation de contraintes chimiques ou physiques qui, selon des recherches, entraînent une détérioration accrue. La Coalition des organismes d'aînés et d'aînées de l'Ontario a fait remarquer que les fournisseurs de soins de santé infantilisent souvent les personnes âgées et que, lorsqu'une personne âgée doit être admise à l'hôpital, elle fait souvent face à une résistance, surtout si elle a également des problèmes de santé mentale. Karen Henderson a souligné qu'en réponse à ce genre de traitement, «il existe un besoin essentiel de formation pour les fournisseurs de soins de santé afin qu'ils soient en mesure de répondre aux besoins des personnes âgées en matière de santé de manière efficace et respectueuse de la dignité humaine.»

«Il existe un besoin essentiel de formation pour les fournisseurs de soins de santé afin qu'ils soient en mesure de répondre aux besoins des personnes âgées en matière de santé de manière efficace et respectueuse de la dignité humaine.»
(Karen Henderson)

Services généraux

«La Société canadienne de l'ouïe recommande que vous, la Commission ontarienne des droits de la personne, demandiez avec insistance au secrétaire du Cabinet et au sous-ministre du Secrétariat du Conseil de gestion de s'assurer que les ministères de l'Ontario savent que le Code des droits de la personne de l'Ontario exige que leurs services, y compris les services prévus dans les ententes, soient accessibles aux personnes âgées handicapées.»
(Société canadienne de l'ouïe)

Plusieurs organismes consultés ont déclaré que l'âgisme et la discrimination fondée sur l'âge se produisent non seulement dans les services de santé, mais également dans d'autres domaines de prestation de services. Le Canadian Centre for Activity and Aging a déclaré à la Commission qu'on soumet les personnes âgées à une «discrimination polie» en vertu du fait que de nombreux édifices et installations publics ne leur sont pas accessibles. Comme l'a fait remarquer le Golden Years Club of Lakefield, l'accès des personnes âgées aux édifices, en particulier pour celles qui sont handicapées, constitue toujours un problème d'accès aux services. Il a dit à la Commission que les municipalités devraient s'assurer que les édifices municipaux sont accessibles. La Corporation Canadienne des Retraités Intéressés et d'autres organismes ont souligné qu'il existe un grand besoin de loi sur les handicaps et de code du bâtiment [révisé] en Ontario qui exigeraient que les édifices et les services des fournisseurs de services de santé soient entièrement accessibles. L'Advocacy Centre for the Elderly a souligné que «l'incidence de ce type de loi, si on oblige à la respecter et si on l'applique à tous les secteurs (et non pas seulement au gouvernement), pourrait permettre d'améliorer les services et les systèmes pour les aînés.»

Plusieurs organismes ont affirmé à la Commission que les personnes âgées sourdes, devenues sourdes ou malentendantes doivent surmonter des obstacles supplémentaires quant aux services en raison de l'exclusion systémique qu'elles connaissent toute leur vie. L'Association des Sourds du Canada a appris à la Commission que les principaux obstacles tendent à être la discrimination systémique et économique. La Société canadienne de l'ouïe a dit à la Commission que le manque de personnes compétentes pouvant assurer une interprétation constitue un grand obstacle pour les personnes âgées sourdes. L'Association des Sourds du Canada a ajouté que les obstacles se créent lorsqu'une personne entendante refuse de payer des services d'interprétation ou lorsqu'il n'y a pas de fonds pour payer les coûts liés à l'interprétation et à d'autres formes d'adaptation. De plus, elles ont déclaré que les personnes âgées font face à des problèmes de communication lorsque les personnes plus jeunes ne reconnaissent ou ne comprennent pas les signes qu'elles utilisent. Cela peut les frustrer et leur faire croire que les renseignements sont mal reçus par les autres. La Commission a appris que, lorsque les bons mécanismes de soutien, comme les interprètes, sont disponibles et accessibles pour les personnes âgées sourdes, elles jouissent d'un meilleur équilibre des pouvoirs et d'un encouragement à l'autodétermination, car elles peuvent exprimer leurs besoins et leurs préoccupations dans leur première langue.

D'autres ont rapporté que les personnes âgées font également l'objet d'attitudes négatives qui posent des obstacles dans le domaine des services. L'Advocacy Centre for the Elderly a déclaré à la Commission qu'il reçoit des plaintes sur le paternalisme envers les personnes âgées par les fournisseurs de services. On a souligné que les personnes âgées sont souvent jugées comme des clients «difficiles à servir». D'autres fois, on les traite comme si elles sont incapables et, lorsqu'il faut prendre des décisions importantes, les fournisseurs de services consultent souvent la famille plutôt que la personne âgée elle-même. L'organisme a expliqué à la Commission que, «en fin de compte, cette attitude a un effet discriminatoire sur la personne âgée parce qu'elle ne participe pas elle-même à la prestation des services. .. cela exacerbe la situation et diminue le contact qu'elle a avec le fournisseur de service.» Ces pratiques sont manifestement contraires aux principes de la dignité, de l'autonomie et la participation des personnes âgées dans ces cas.

«Le paternalisme que nous constatons dans la prestation des services... nous recevons des plaintes de personnes âgées qui affirment qu'on ne traite pas avec elles en matière de services... mais plutôt avec leur famille... [les personnes âgées] ne sont pas traitées comme celles qui prennent les décisions ou sont considérées comme incapables.»
(Advocacy Centre for the Elderly)

Services de transport

De nombreuses soumissions ont soulevé les mêmes préoccupations que celles que la Commission a relevées dans son récent Document de travail sur les services accessibles de transports en commun en Ontario. Senior Link a dit à la Commission que «nombre de personnes âgées qui ont besoin d'aide pour se rendre chez le médecin ou à l'hôpital n'ont accès ni au système de transport de commun ni au service Wheel-Trans... ces services doivent être appuyés afin que les personnes âgées aient accès aux programmes... dans la campagne ontarienne, ce problème est amplifié par l'isolement et le manque de services de transport en commun.» La Corporation Canadienne des Retraités Intéressés a exprimé la même préoccupation et a déclaré à la Commission que, pour les personnes âgées, en particulier celles qui sont atteintes de handicaps moteurs, les services de transport sont très limités, ce qui les isole de leur famille, de la société et des activités générales de la vie quotidienne. Un groupe a dit à la Commission que «pour les personnes âgées de la campagne, les déplacements pour aller chez le médecin, le dentiste ou au magasin sont très difficiles... si elles ne conduisent pas ou s'il n'existe pas de service de transport en commun, elles doivent dépendre de leur famille ou des services de soutien à domicile.» (Council on Aging for Renfrew County). Comme la Commission a entendu parler des limites quant aux mécanismes de soutien communautaires et à la disponibilité des médecins, le manque d'accès aux services de transport en commun aggrave les obstacles aux services de santé et aux autres services pour les aînés.

«La population de nombreux villages comprend une forte proportion de personnes âgées. Ces villages ne possèdent pas et n'ont jamais possédé de service de transport en commun. Ceci limite l'accès des personnes âgées aux services de santé, aux services sociaux et aux services commerciaux des grands centres. Il faut reconnaître que toute initiative en matière de politique aura un effet différent dans les régions rurales du Nord que, par exemple, à Toronto, à Ottawa ou à Sudbury.»
(CASC du Témiscamingue)

Nombre d'organismes ont fortement souligné le besoin de services de transport plus accessibles. Les rampes, les ascenseurs, les escaliers roulants ainsi que les autobus à plancher surbaissé ou dotés d'appareils de levage sont essentiels pour assurer la participation égale des personnes âgées handicapées. L'éclairage vif, des matériaux contrastants sur le sol et des annonces sonores rendent l'utilisation du transport en commun plus facile pour les personnes à faible vision. Les téléphones à téléscripteur et les annonces écrites améliorent l'accès pour les personnes sourdes, devenues sourdes ou malentendantes. Comme l'a fait remarquer le chapitre de London de la Société canadienne de l'ouïe, souvent, les édifices de transport en commun ne sont pas dotés d'un nombre suffisant de téléscripteurs ou de systèmes de sonorisation adéquats. D'autres ont remarqué qu'en plus des obstacles physiques, les personnes âgées sont «maltraitées» par les employés des transports en commun, ce qui signale le besoin de séances de sensibilisation pour éliminer ces obstacles sociaux (Coalition des organismes d'aînés et d'aînées de l'Ontario).

Pour les personnes qui n'ont pas accès à un système conventionnel bien intégré, il faut des services de transport semi-collectif parallèles. Cependant, la Commission a appris que les critères d'admissibilité pour de nombreux services de transport semi-collectif peuvent ne pas admettre les personnes âgées ayant certains types de handicaps, comme les handicaps attribuables à des problèmes respiratoires ou cardiaques, des troubles cognitifs causés par des ACV, la démence ou des tumeurs au cerveau ou des déficiences sensorielles. Les organismes consultés ont également souligné que les personnes admissibles constatent que les services de transport semi-collectif ne suffisent pas à leur fournir un accès égal au transport en commun.

La Commission a appris que, bien qu'il y ait eu quelques améliorations au cours des dernières années, le transport en Ontario n'est toujours pas suffisamment financé. La Coalition des organismes d'aînés et d'aînées de l'Ontario a souligné qu'il existe des preuves du manque de fonds dans le domaine des services d'accompagnement bénévole fournis par le MSSLD. L'organisme a dit à la Commission que ces services sont disponibles seulement pour les rendez-vous médicaux et que le transport qui permettrait aux personnes âgées de participer aux activités sociales et récréatives est soit non disponible, soit limité. L'Elderly Services Advisory Committee (ESAC) a recommandé la mise en œuvre de solutions créatives pour régler le problème du transport pour les personnes âgées des régions urbaines et rurales. Il a suggéré un programme de taxis subventionné, tandis que Senior Link a recommandé des réseaux communautaires de bénévoles au sein des organismes locaux qui pourraient offrir des services de transport aux personnes âgées pour leurs divers rendez-vous. Les Diététistes du Canada ont déclaré que «les municipalités, les conseils régionaux de santé et le ministère de la Santé et des Soins de longue durée doivent appuyer l'élaboration de systèmes de transport en commun subventionnés et examiner l'admissibilité afin que toutes les personnes qui ont besoin du transport en commun y aient accès». Le Older Women's Network a tout simplement laissé entendre que, pour régler les problèmes de transport concernant les personnes âgées, tous les paliers de gouvernement doivent fournir des subventions et investir des sommes appropriées de manière à ce qu'un système de transport adéquat soit disponible.

 

Recommandations pratiques destinées au gouvernement et aux groupes communautaires

21. QUE les écoles de médecine et les centres de formation pour les professionnels de la santé et les autres professionnels qui travaillent avec les personnes âgées améliorent l'enseignement sur les besoins des personnes âgées.

22. QUE les établissements, les installations et les services de santé soient accessibles pour toutes les personnes âgées, en particulier celles qui sont handicapées.

23. QUE le gouvernement fasse preuve de prudence quant à l'utilisation de critères fondés sur l'âge dans les programmes de santé tels que les programmes d'appareils et d'accessoires fonctionnels, de médicaments d'ordonnance et de soins dentaires.

24. Conformément au jugement Eldridge, que les fournisseurs de services offrent des services d'interprétation gestuelle au besoin afin de donner un accès égal aux personnes sourdes, devenues sourdes ou malentendantes.

25. QUE le gouvernement provincial prenne d'autres mesures pour réglementer les maisons de repos et les foyers pour personnes âgées. Les questions à régler pourraient comprendre une déclaration des droits des patients et des normes sur l'utilisation des contraintes et les décisions de fin de vie.

Engagements de la Commission

5. La Commission communiquera avec l'Ordre des médecins et chirurgiens de l'Ontario, l'Ontario Medical Association, l'Association médicale canadienne et d'autres organismes adéquats afin de les informer que l'inégalité de l'accès aux traitements médicaux et aux autres services de santé en raison de l'âge ou d'un handicap peut représenter un cas de discrimination.

6. La Commission entrera en communication et organisera des rencontres avec des représentants des facultés universitaires telles que les facultés de médecine, sciences infirmières, dentisterie, nutrition, travail social pour discuter de l’urgence d’inclure au curriculum une formation exhaustive sur la discrimination fondée sur l’âge.

7. La Commission continuera de prendre des mesures pour promouvoir l'accessibilité chez les fournisseurs de services de l'Ontario.


[30] Loi de 1994 sur les soins de longue durée, L.O., 1994, ch. 24.
[31] Affaire Eldridge c. Colombie-Britannique (Procureur général), [1997] 3 S.C.R. 624, par. 96.
[32] (1989), 10 C.H.R.R. D/6353 (Ont. Bd. Inq.), aff’d 14 C.H.R.R. D/1 (Cour divisionnaire de l'Ontario), rév. 21 C.H.R.R. D/259 (C.A.).

Mauvais traitements et négligence à l'égard des personnes âgées

«Les mauvais traitements et la négligence à l'égard des aînés
devraient être considérés comme des violations des droits de la personne.»
(Canada’s Association for the Fifty-Plus (CARP))

Nombre de personnes et d'organismes ont apporté des commentaires sur les mauvais traitements à l'égard des aînés. Les soumissions ont également souligné que ces derniers sont un problème relatif aux droits de la personne qui exige une réponse efficace du gouvernement et de la société de l'Ontario. La Commission a appris que toute mesure concernant les mauvais traitements à l'égard des aînés prise par le gouvernement, les organismes communautaires ou les soignants particuliers doit être fondée sur le respect de la dignité, de l'autonomie, de la participation et de la sécurité des personnes âgées. Les pages qui suivent donnent un aperçu des commentaires apportés à la Commission au cours du processus de consultation.

On ne s'entend pas tout à fait sur ce qu'il faut comprendre par «les mauvais traitements à l'égard des personnes âgées»; pour Santé Canada, toutefois, cette expression désigne habituellement «les mauvais traitements physiques, psychologiques ou matériels infligés à un aîné»[33]. La violence physique comprend l'agression physique, les traitements physiques brutaux, l'exploitation sexuelle ou le refus de fournir de la nourriture, des soins personnels, des soins hygiéniques ou des soins médicaux. La violence psychosociale comprend l'agression verbale, l'isolement social, le refus de donner de l'affection et le refus de faire participer l'aîné aux prises de décision qui le concernent. L'exploitation matérielle désigne l'usage abusif de l'argent ou de la propriété de l'aîné, y compris la fraude[34]. Cependant, un rapport de 1999 de l'Assemblée législative de l'Ontario ajoute à ces mauvais traitements une liste de plusieurs autres formes de mauvais traitements à l'égard des personnes âgées, comme l'usage préjudiciable de médicaments (c.-à-d. le mauvais usage ou le refus de fournir des médicaments), le refus des droits et libertés fondamentaux, l'abandon et la négligence de soi[35].

L'exploitation matérielle a tendance à être la plus courante (62,5 %); la violence physique et la violence psychosociale viennent ensuite (35 % et 12,5 % respectivement), puis la négligence (10 %)[36]. Les soumissions qu’a reçues la Commission soulignaient que la violence et la négligence à l'égard des personnes âgées peuvent se produire dans tous les contextes : à domicile, à l'hôpital, dans les établissements de soins de longue durée et dans les foyers pour personnes âgées.

Sous-déclaration de la violence à l'égard des personnes âgées

La Commission a appris qu'environ 4 % ou 60 000 personnes âgées sur les 1,5 million qui habitent en Ontario sont victimes de violence[37]. Cependant, nombre de personnes âgées ne veulent pas signaler les mauvais traitements qu'elles subissent en raison du stigmate social qui y est lié parce que les répercussions d'un rapport sur un être cher les inquiètent. Par conséquent, ce pourcentage pourrait être sous-estimé[38].

Plusieurs soumissions ont souligné la complexité des mauvais traitements à l'égard des personnes âgées. Comme l'a raconté un groupe à la Commission, la dépendance des personnes âgées envers leurs soignants signifie qu'il est plus difficile de régler la question des mauvais traitements infligés par un soignant. La gêne que connaissent les personnes âgées que les membres de leur famille les soumettent à de mauvais traitements fait de ces derniers une «forme cachée de violence familiale». (Association des travailleuses et travailleurs sociaux de l’Ontario). Les personnes âgées qui subissent des mauvais traitements doivent souvent décider entre le fait de signaler leur agresseur, ce qui pourrait signifier qu'elles n'auraient plus de soignant; cela rend donc leur décision encore plus difficile (Centre d'accès aux soins communautaires de Chatham-Kent). D'autres ont révélé à la Commission le grave dilemme dans lequel se trouvent les personnes âgées qui subissent des mauvais traitements de la part des personnes dont elles prennent elles-mêmes soin; le désir de la personne âgée de prendre soin de cette personne entre donc en conflit avec son propre besoin de sécurité.

CARP a soulevé la question des mauvais traitements à l'égard des personnes âgées dans le contexte des établissements de soins. Elle a souligné que, pour les personnes qui subissent des mauvais traitements dans les établissements de soins, la peur peut constituer un puissant élément dissuasif quant à la déclaration des mauvais traitements. Plusieurs organismes consultés ont raconté à la Commission que les familles peuvent également avoir peur de porter plainte sur les mauvais traitements infligés à leurs parents âgés par peur de rétribution contre les êtres qui leur sont chers sous forme de soins de moins bonne qualité ou d'autres mauvais traitements (ARCH et Karen Henderson). Comme l'a souligné le Council on Aging, le problème des mauvais traitements infligés aux personnes âgées ressemble beaucoup à la violence familiale et exige une démarche systémique afin de garantir que les personnes âgées qui sont victimes de mauvais traitements ne soient pas victimisées davantage dans le processus de recherche d'un recours et de défense de leurs droits.

Mauvais traitements à l'égard des personnes âgées sourdes et «plus que sourdes»

Plusieurs organismes consultés ont raconté à la Commission l'expérience particulière des mauvais traitements que subissent les personnes âgées sourdes, devenues sourdes ou malentendantes. Bien que les personnes sourdes subissent les mêmes formes de mauvais traitements que les autres personnes âgées (p. ex. exploitation matérielle, violence physique, violence psychologique, etc.), elles sont également victimes de mauvais traitements en matière de communication. Les obstacles de communication que doivent surmonter les personnes âgées sourdes rendent ce groupe particulièrement vulnérable à diverses autres formes de mauvais traitements (Société canadienne de l'ouïe). La Société canadienne de l'ouïe a fourni à la Commission plusieurs anecdotes sur des situations de mauvais traitements en matière de communication :

«Une cliente qui est allée à l'hôpital porte des appareils auditifs et lit sur les lèvres. Elle avait besoin que l'infirmière la renseigne sur son état. L'infirmière a refusé d'allumer la lumière afin que la cliente puisse lire sur ses lèvres, même si la cliente le lui avait demandé et lui en avait donné la raison.»

«On a discuté de l'état d'un client avec un tiers sans consulter le client.»

«L'un de mes collègues avait un client faussement diagnostiqué comme souffrant de démence qui avait été hospitalisé. Il a fallu un an à mon collègue pour faire sortir le client de l'aile psychiatrique et le renvoyer chez lui... on l'avait soumis à des tests sans qu'il porte ses appareils auditifs.»

La vulnérabilité qui se produit dans le contexte des mauvais traitements à l'égard des personnes âgées est encore plus grande chez les personnes âgées «plus que sourdes», c'est-à-dire celles qui ont une déficience auditive et d'autres handicaps comme la cécité, la paralysie cérébrale ou des déficiences intellectuelles. Il est souvent plus facile de faire subir des mauvais traitements à ce groupe de personnes âgées, car elles sont vulnérables et ne signaleront probablement pas les mauvais traitements (Association des Sourds du Canada). L’ Association des Sourds du Canada, souvent, «les gens qui ont cette vulnérabilité particulière ne savent ni où se tourner, ni comment demander de l'aide, alors ils supportent les mauvais traitements comme s'ils étaient presque un droit des personnes entendantes "supérieures"»[39].

Dans un rapport intitulé «L'importance du langage gestuel»[40], l’Association des Sourds du Canada souligne les obstacles que doivent surmonter les personnes âgées «plus que sourdes» en matière de communications. Pour les personnes dont les doigts ou les mains sont atteints d'arthrite, la possibilité de communiquer par langage gestuel ou par écrit est limitée. Étant donné l'importance de la vue pour les personnes sourdes dans la communication, si une personne a une déficience visuelle, les obstacles à la communication sont encore plus grands. Ces obstacles exacerbent davantage la vulnérabilité d'une personne âgée dans une situation de violence.

Au cours des consultations, les organismes ont souligné le besoin d'éduquer et de sensibiliser le public en général sur les mauvais traitements et la négligence à l'égard des personnes âgées. D'autres organismes ont laissé entendre qu'il faut cibler l'enseignement et l'adapter aux professionnels qui travaillent régulièrement avec les aînés (médecins, infirmières, travailleurs sociaux, etc.). De plus, plusieurs organismes consultés ont demandé que les soignants reçoivent un meilleur enseignement et de meilleurs mécanismes de soutien.

En ce qui concerne les personnes âgées sourdes et plus que sourdes, l'Association des sourds du Canada a laissé entendre qu'un réseau de porte-parole devrait être créé afin d'aider les personnes âgées sourdes pour les questions de mauvais traitements et de négligence, de protéger les personnes âgées sourdes contre les mauvais traitements et de garantir qu'elles connaissent leurs droits. D'autres ont donné à penser qu'on devrait fournir plus de fonds et élaborer des programmes éducatifs qui sensibiliseraient les personnes âgées sourdes et plus que sourdes aux questions de mauvais traitements et de négligence à l'égard des personnes âgées, à leurs droits et aux mécanismes de recours possibles.

Causes et facteurs qui contribuent aux mauvais traitements à l'égard des personnes âgées

«À moins que les personnes âgées ne soient entièrement reconnues comme des personnes ayant les mêmes droits... que les autres citoyens, les mauvais traitements à leur égard continueront d'exister, que ce soit à domicile, dans la société ou en établissement.»
(Association des travailleuses et travailleurs sociaux de l’Ontario)

La Commission a appris que les causes et les facteurs qui contribuent aux mauvais traitements à l'égard des personnes âgées sont variés et nombreux. Nombre de soumissions ont souligné que l'âgisme et une attitude généralement négative envers les personnes âgées sont deux des principaux facteurs sous-entendus qui contribuent à ces mauvais traitements. L'Elderly Services Advisory Committee (ESAC) a dit à la Commission que les mauvais traitements infligés aux aînés sont liés à un manque de services, au manque de lits de soins de longue durée et au manque de logements abordables et accessibles. D'autres organismes semblaient dire que la vulnérabilité socio-économique des personnes âgées contribue aux mauvais traitements.

La Coalition des organismes d'aînés et d'aînées de l'Ontario a déclaré à la Commission que les mauvais traitements se produisent souvent lorsque les principaux soignants sont «épuisés ou très tendus». Cela comprend les soignants professionnels qui s'occupent d'un nombre de plus en plus grand de cas et qui doivent assumer des responsabilités de plus en plus complexes en matière de soins dans le contexte d'un système de services où il n'y a pas suffisamment de fonds. Cela touche également les soignants des familles qui sont censés prendre soin de leurs parents vieillissants dans le contexte des services et des mécanismes de soutien gouvernementaux de plus en plus rares. Des rapports présentés par Santé Canada et le gouvernement de la Nouvelle-Écosse renforcent également cette notion. Les deux organismes signalent que des mauvais traitements à l'égard des personnes âgées peuvent se produire lorsque le stress des soignants est exacerbé par le manque d'information et de ressources sur les soins à apporter à une personne qui vieillit. De plus, les propres problèmes du soignant, tels que le chômage, l'abus d'intoxicants, des problèmes dans leurs relations personnelles ou un conflit familial non résolu peuvent contribuer à la présence de mauvais traitements à l'égard des personnes âgées[41].

Certaines soumissions ont fait remarquer que nombre d'enfants adultes ou d'autres soignants bien intentionnés veulent prendre des décisions au nom des personnes âgées, surtout s'ils perçoivent qu'une personne âgée ne peut pas prendre de décisions elle-même. Cependant, nombre d'organismes ont souligné que les aînés perdent souvent leurs droits à l'autodétermination, à l'autonomie et à la dignité au cours de ce processus (Association des travailleuses et travailleurs sociaux de l’Ontario et Association canadienne pour la santé mentale). Comme les travaux de Santé Canada sur les mauvais traitements à l'égard des personnes âgées le soulignent, le refus de donner l'occasion à une personne âgée de prendre des décisions concernant sa propre vie ou d'y prendre part peut constituer une forme de violence psychosociale. L'Association canadienne pour la santé mentale a laissé entendre que, pour garantir que les droits à l'autonomie et à la dignité d'une personne âgée demeurent intacts, il faut éduquer le public en général.

On a également souligné le fait que l'absence de réglementation sur les établissements de soins privés contribue à la vulnérabilité des personnes âgées aux mauvais traitements. On a abordé la question du besoin de réglementer les établissements de soins privés et de normes pour tous les établissements de ce genre en Ontario dans la section Soins de santé, établissements et services.

Le manque de refuges pour les aînés qui ont été victimes de mauvais traitements a également été mentionné comme facteur qui contribue à ces mauvais traitements. Le CASC d'Ottawa-Carleton a déclaré à la Commission que les refuges existants sont souvent pleins et ont tendance à se pencher sur les besoins des femmes plus jeunes et des enfants. Ces établissements ne conviennent pas aux aînés et les personnes qui subissent des mauvais traitements aux mains de leurs soignants n'ont pas beaucoup d'options. D'autres organismes ont affirmé à la Commission que, parmi les obstacles à l'accès aux refuges, on compte le manque de connaissances général de la part des personnes âgées sur la manière d'accéder à ces refuges. De plus, il existe des obstacles linguistiques et culturels qui limitent davantage l'accessibilité à ces établissements. L'Elderly Services Advisory Committee (ESAC) a suggéré d'établir des refuges temporaires pour aider les personnes âgées et les personnes handicapées à passer d'une situation de violence à un environnement sûr. Le CASC d'Ottawa-Carleton a laissé entendre qu'il devrait exister des refuges pour les hommes et les femmes, accessibles en déambulateur et en fauteuil roulant, où le personnel est en mesure de répondre aux besoins complexes des personnes âgées.

Programmes de lutte contre les mauvais traitements à l'égard des personnes âgées

Nombre d'organismes ont parlé à la Commission de programmes de lutte contre les mauvais traitements à l'égard des personnes âgées. L'un de ces programmes est le projet Phone Busters, mis en œuvre par la Police provinciale de l'Ontario, où l'on accepte les appels de personnes âgées de l'ensemble de l'Amérique du Nord qui ont été victimes de fraude par télémarketing. Des représentants du projet ont dit à la Commission que «80 % des gens qui téléphonent au projet Phone Busters sont des personnes âgées qui ont perdu de l'argent en raison de la fraude par télémarketing.» D'autres ont ajouté que les femmes âgées seules sont particulièrement vulnérables aux escroqueries financières comme la fraude par télémarketing. Comme pour les autres formes de mauvais traitements, l'exploitation matérielle des personnes âgées n'est souvent pas déclarée. Selon les responsables du projet Phone Busters, «un pour cent seulement des pertes sont en fait signalées en raison de la gêne et de la honte chez la victime.»

«Nous leur enseignons à [rebâtir] leur dignité car de nombreuses [personnes âgées] sont gênées et ne parlent pas aux membres de leur famille... Si on perd [de l'argent], la dernière chose que l'on veut faire est de le dire à ses enfants...»
(Police provinciale de l'Ontario, projet Phone Busters)

Les statistiques du projet Phone Busters illustrent qu'il a réussi à diminuer les sommes que perdent les personnes âgées qui sont susceptibles d'exploitation matérielle. Par conséquent, le groupe a cherché à élaborer de nouveaux mécanismes qui permettent de sensibiliser davantage les aînés. Cela a donné lieu à un partenariat entre le Centre d'accès aux soins communautaires du Nord proche et le projet Phone Busters afin de mettre en œuvre un projet pilote de ligne d'urgence pour les mauvais traitements à l'égard des personnes âgées. Ce projet pilote vise à traiter des mauvais traitements systémiques, de la négligence et de la violence physique et psychosociale dont sont victimes les personnes âgées. La Commission a appris que le projet pilote de six mois s'est terminé au début de l'année et que le Secrétariat aux affaires des personnes âgées du ministère des Affaires civiques, cernera les prochaines étapes du programme.

Recommandations pratiques destinées au gouvernement et aux groupes communautaires

26. QUE les mécanismes actuellement en place pour traiter des autres formes de violence familiale soient élargis pour comprendre les mauvais traitements à l'égard des personnes âgées.

27. QUE le gouvernement provincial et l'administration municipale prennent des mesures afin d'appuyer les programmes spéciaux, dont les refuges, pour les victimes de mauvais traitements à l'égard des personnes âgées.

Engagement de la Commission

8. La Commission continuera de surveiller les résultats du plan provincial de la Table ronde sur la Stratégie ontarienne de prévention des mauvais traitements à l'égard des personnes âgées qui relèvent de son mandat.


[33] Santé Canada, Centre national d'information sur la violence dans la famille, Les mauvais traitements à l'égard des personnes âgées, p. 1, document en ligne trouvé à l'adresse suivante :
http://www.hc-sc.gc.ca/hppb/violencefamiliale/html/elderfre.html 
[34] Ibid
[35] Andrew McNaught pour la bibliothèque de l'Assemblée législative de l'Ontario, Service de recherches de l'Assemblée législative, Elder Abuse Prevention Laws, Bureau de l'Assemblée législative de l'Ontario, Toronto, 1999, p. 2.
[36] Ibid, p. 2.
[37] Ceci est appuyé par l'étude de la bibliothèque de l'Assemblée législative de l'Ontario d'août 1999, supra note 35, p. 2.
[38] Le Secrétariat aux affaires des personnes âgées du ministère des Affaires civiques souligne que 10 p. 100 des 1,5 million de personnes âgées de l'Ontario subissent des mauvais traitements. Consultez, en ligne, le document intitulé « Mettons fin aux mauvais traitements à l'égard des personnes âgées » à l'adresse suivante : http://www.gov.on.ca/mczcr/seniors/french/elder-abuse-update.htm
[39] Kenopic, supra note 13, p. 27.
[40] Ibid, p. 10.
[41] Gouvernement de la Nouvelle-Écosse, Ministry of Community Services, Fact Sheet 7: Elder Abuse, Document en ligne se trouvant à l'adresse suivante : www.gov.ns.ca/coms/facts7.htm (anglais uniquement).

Soins des personnes âgées

La Commission a appris que les soins des personnes âgées sont un besoin de plus en plus grand, qui est surtout assuré par les membres de la famille. De plus, on a souligné la nature des soins aux aînés, divisés d'après le sexe, et le fardeau démesuré que doivent porter les femmes dans le soin des parents âgés. Les organismes consultés ont décrit le stress engendré par les soins des personnes âgées et le besoin d'efforts pour régler la question du stress chez les soignants. Enfin, la Commission a appris que les problèmes liés aux soins des personnes âgées exigent des réponses créatives de la part du gouvernement en termes de législation, de programmes et de financement, et des employeurs en termes de polyvalence du lieu de travail afin de garantir que les soignants reçoivent un appui dans la prestation des soins. Le message présenté à la Commission est que les soignants jouent un rôle sociétal essentiel et ne devraient pas assumer seuls cette responsabilité. La société devrait appuyer leurs efforts.

Restrictions dans les soins des personnes âgées

«Les soignants non professionnels sont... les victimes silencieuses d'un système silencieux... ils ont hérité d'un fardeau et d'une responsabilité injustes sans appui suffisant dans le transfert des responsabilités [en raison de] la fermeture des hôpitaux.»
(Canada’s Association for the Fifty-Plus (CARP))

Plusieurs organismes ont déclaré à la Commission que la pression dans le domaine des soins des personnes âgées est de plus en plus forte; à mesure que la population vieillit, les hôpitaux continuent de donner congé aux patients plus vite et les fournisseurs de soins communautaires ne disposent pas de fonds provinciaux suffisants. En raison de ces facteurs, il est difficile pour les fournisseurs de soins à domicile de fournir des soins adéquats (The Council of Aging). Cela signifie que les familles devront de plus en plus assurer les soins de leurs parents âgés. Les soumissions du Council on Aging et d'autres organismes ont souligné que, dans ce contexte, les personnes âgées elles-mêmes deviendront les victimes d'un système qui ne suffit pas à la tâche, en particulier les personnes âgées qui n'ont pas de famille ou ne peuvent pas accéder à des soins privés.

Division des soins aux aînés d'après le sexe

Un rapport présenté par CARP révèle qu'en 1999, 46 % des Canadiens au travail fournissaient des soins généraux à des personnes âgées[42]. Le Older Women’s Network a déclaré à la Commission que ce sont les femmes qui assurent souvent le soin aux personnes âgées;
90 % des soignants salariés sont des femmes et une grande proportion des soignants non professionnels sont également des femmes. Ce fait est confirmé par un rapport récent de l'Association ontarienne de soutien communautair[43]. La Corporation Canadienne des Retraités Intéressés a dit à la Commission que le rôle des femmes à titre de principaux soignants constitue une «norme» dans la société, ce qui exige que les femmes fassent passer les responsabilités liées aux soins des personnes âgées avant leurs propres aspirations. L'organisme a fait remarquer que «en raison des responsabilités familiales, des salaires moins élevés et des débouchés moins nombreux quant à l'éducation et à l'avancement, [les femmes] ont été incapables d'amasser un revenu de retraite suffisant par le biais des pensions et d'économies». La nature des soins aux personnes âgées, divisés selon le sexe, a donc des répercussions sur les femmes dans d'autres domaines et durent jusqu'à plus tard dans leur vie.

Stress chez les soignants

On a également relevé que le stress chez les soignants constitue un problème bien réel et de plus en plus important, car le nombre d'aînés qui ont besoin de soins augmente. Une personne a raconté à la Commission que les soins représentent un fardeau important pour les familles, en particulier lorsque les membres de la famille ne possèdent pas la formation nécessaire pour fournir les soins adéquats à leur parent âgé. Le CASC de Chatham-Kent a souligné qu'il faut une expertise particulière pour les soins des personnes âgées, étant donné que ce type de soins exige souvent des notions de polypharmacie et des connaissances sur les maladies liées au vieillissement, ainsi qu'un savoir-faire pour régler les problèmes de consentement et de capacité. Sans cette expertise, le stress peut s'aggraver. Plusieurs soumissions ont souligné que le fardeau que connaît la famille peut également se traduire par un stress pour la personne âgée, car elle peut lui donner l'impression d'être un fardeau. Le CASC d'Ottawa-Carleton et d'autres organismes ont affirmé que, pour les personnes âgées qui en prennent soin d'une autre, ce fardeau peut être exacerbé par leurs propres besoins en matière de soins.

Facilitation de la prestation des soins

Le document de consultation demandait des commentaires sur l'ampleur des efforts des employeurs pour faciliter la tâche aux employés qui prennent soin de personnes âgées. Plusieurs organismes ont apporté des suggestions créatives qui pourraient s'appliquer au lieu de travail et à d'autres situations. L'Elderly Services Advisory Committee (ESAC) a déclaré à la Commission qu'un appui à la prestation de soins sous forme de souplesse de l'emploi est nécessaire. Il a affirmé que le congé spécial de dix jours pour le soin des membres de la famille prescrit dans le paragraphe 50(5) de la Loi de 2000 sur les normes d'emploi [44] ne suffit pas dans la plupart des cas. L'ESAC a suggéré que le congé pour prendre soin des membres de la famille soit souple, tout comme les dispositions actuelles pour le congé de maternité. Le CASC d'Ottawa-Carleton a laissé entendre que les congés temporaires et les réaffectations sont des options possibles pour aider les employés à remplir leurs obligations en matière de prestation de soins. La Société Alzheimer de l'Ontario a ajouté que «les employeurs doivent offrir des dispositions telles que des congés, des avantages sociaux et d'autres mécanismes de soutien aux personnes qui prennent soin d'un membre de leur famille atteint de la maladie d'Alzheimer qui sont au moins comparables aux avantages qui existent pour répondre aux besoins des enfants en matière de soin». Bien que nombre d'organismes consultés reconnaissent que les employeurs ne disposent pas de ressources illimitées, ils ont déclaré que les employeurs devraient accommoder volontiers les demandes raisonnables de congé pour la prestation de soins.

Le fait que les coûts importants liés au soin des personnes âgées n'aient pas été officiellement reconnus dans les politiques actuelles entraîne des difficultés financières pour de nombreux soignants... Il faut examiner les politiques connexes afin de garantir qu'on accorde aux soins des personnes âgées une valeur aussi grande qu'aux soins des adultes et des enfants handicapés et offrir une aide financière aux soignants afin qu'ils puissent assurer le genre de soutien dont ont besoin les personnes âgées.
(Société Alzheimer de l'Ontario)

Plusieurs recommandations concrètes ont été offertes quant à la manière dont les gouvernements peuvent répondre aux besoins des soignants en Ontario. Le CASC d'Ottawa-Carleton a souligné qu'il faut une loi afin de garantir que les personnes qui fournissent des soins reçoivent un appui et ne soient pas punies. CARP a recommandé qu'un soutien soit offert aux soignants non professionnels sous forme de prestations du RPC et de programmes de recyclage. La Société Alzheimer de l'Ontario a souligné qu'on devrait offrir aux soignants un «crédit d'impôt pour les soignants» semblable aux crédits disponibles pour ceux qui prennent soin des personnes handicapées. De plus, des prestations de maladie élargies, comme celles qui sont disponibles pour les enfants à charge, devraient être disponibles pour les adultes à charge. L'Union culturelle des Franco-Ontariennes a déclaré à la Commission qu'une rémunération garantie devrait être disponible pour les personnes qui restent à la maison pour prendre soin de membres de la famille malades.

Autres options quant aux soins

La Commission a appris que, pour diminuer le stress chez les soignants, ces derniers doivent faire des pauses dans leur devoir. On a discuté des programmes de soins de jour, de relève et de soins à domicile. Le CASC de Chatham-Kent a fait remarquer que les programmes de soins de jour et les lits de courte durée sont des options quant à l'aide aux soignants mais que leur valeur est limitée. Ils sont utiles, car ils permettent aux soignants de faire une pause, mais ils peuvent être difficiles d'accès en raison de problèmes de transport du domicile aux programmes et vice-versa. En ce qui concerne les services de relève, on a dit à la Commission que plusieurs des formes de relève ne sont pas assez polyvalentes pour répondre aux besoins divers des soignants. On a laissé entendre que les services de relève à domicile constituent souvent une meilleure option pour les familles. La Coalition des organismes d'aînés et d'aînées de l'Ontario a dit à la Commission que des services universels tels que les établissements de soins de longue durée et les programmes de soins à domicile devraient être en place et être suffisamment financés pour garantir qu'il existe de véritables solutions de rechange aux soins assurés par la famille.

Recommandations pratiques destinées au gouvernement et aux groupes communautaires

28. QUE le ministère du Travail inclue les petits lieux de travail (notamment ceux qui comptent moins de 50 employés) dans les nouvelles dispositions liées aux congés de la Loi de 2000 sur les normes d'emploi.

29. QUE tous les paliers de gouvernement et tous les employeurs songent à offrir diverses formes de soutien aux soignants. Parmi les options à examiner, on compte des programmes (p. ex. des programmes de relève pour les soignants), un soutien financier (p. ex. des crédits d'impôt) et des options souples quant à l'emploi.

Engagements de la Commission

9. La Commission élaborera un énoncé de politique sur les soins aux personnes âgées qui cerne les droits de la personne connexes.

10. La Commission examinera les plaintes où des employés qui prennent soin de parents ou d'un conjoint ou partenaire du même sexe, âgé ou malade, font l'objet d'une discrimination en raison de leur «situation de famille», de leur «état matrimonial» ou de leur «relation homosexuelle».


[42] Canada’s Association for the Fifty-Plus (CARP), Putting a Face on Homecare: CARP’s National Forum on Homecare – Focussing on the Informal Caregiver (Toronto, CARP, juin 1999), p. 2.
[43] Association ontarienne de soutien communautaire, In 20 Short Years: A Discussion Paper on Demographics and Aging, Association ontarienne de soutien communautaire, Toronto, février 2001, p. 9.
[44] Loi de 2000 sur les normes d'emploi, L.O. 2000, ch. 41.

Conclusion

Le contenu de ce rapport confirme que la démarche actuelle quant aux problèmes de droits de la personne liés aux personnes âgées de l'Ontario est insoutenable. Les personnes âgées de la province font toujours face à un large éventail d'obstacles qui représentent un grave affront à leur dignité humaine ainsi qu'à leur autonomie, leur sécurité, leur participation et à l'équité. Les problèmes relevés dans ce rapport soulèvent de grandes inquiétudes en matière de droits de la personne que doivent régler la Commission et la société en général. De plus, les répercussions de l'âgisme, lorsqu'elles sont aggravées par la discrimination pour d'autres motifs (handicap, sexe, orientation sexuelle, origine ethnique, etc.) rendent plus urgent le besoin d'agir.

La Commission a l'intention de prendre les premières mesures pour faire respecter les droits des personnes âgées de l'Ontario en mettant en œuvre les Engagements de la Commission que contient ce rapport, dans l'espoir que ces efforts serviront de catalyste nécessaire au changement quant aux attitudes, aux politiques et aux pratiques si besoin est.

Cependant, nombre des recommandations présentées dans ce rapport ne peuvent être concrétisées que par le gouvernement et les partenaires communautaires. Il existe un rôle essentiel dans ce processus pour d'autres acteurs afin de faire de ce changement une réalité. Les recommandations présentées dans ce rapport constituent donc une invitation au gouvernement ainsi qu'aux secteurs privé et public à passer à l'action et à garantir que la dignité, l'autonomie, la sécurité, la participation et l'équité ainsi que, en fin de compte, les droits à l'égalité des personnes âgées soient protégés et respectés.

 

Annexe A : Résumé des recommandations pratiques destinées au gouvernement et à la société

  1. QUE les cinq principes du Cadre national sur le vieillissement soient intégrés aux politiques et aux programmes des organismes publics et privés.
  2. QUE tous les paliers de gouvernement vérifient si les lois, politiques et programmes sont exempts de préjugés et de stéréotypes âgistes et s'ils reflètent les besoins des personnes âgées.
  3. QUE le ministère de l'Éducation, les conseils scolaires et les écoles élaborent des programmes et des activités qui encourageront une meilleure compréhension et une perception plus positive des personnes âgées. Les programmes intergénérationnels entre étudiants et personnes âgées font partie de ce programme éducatif.
  4. QUE les facultés socio-médicales comme les facultés de médecine, de sciences infirmières, de travail social et des sciences de la nutrition devraient mieux préparer les étudiants à montrer plus d'empathie lorsqu'ils travaillent auprès des personnes âgées et à se défaire de leurs stéréotypes et de leurs préjugés.
  5. QUE les ordres professionnels réglementés et les associations professionnelles bénévoles prennent des mesures pour sensibiliser leurs membres à l'âgisme et fournissent une éducation permanente dans le domaine, par exemple en donnant des cours et en distribuant des publications.
  6. QUE le gouvernement et les secteurs publics et privés tiennent compte de l'«effet intersectionnel» de l'âge et du sexe dans leurs politiques et programmes, notamment des désavantages multiples subis par les femmes âgées.
  7. QUE le gouvernement provincial adopte des lois imposant des normes minimales d'accessibilité pour les personnes invalides, sans oublier les aînés.
  8. QUE le gouvernement et les secteurs publics et privés tiennent compte de l'«effet intersectionnel» de l'âge et de l'invalidité dans leurs politiques et programmes, notamment des désavantages multiples subis par les personnes âgées invalides.
  9. QUE le gouvernement et les secteurs public et privé tiennent compte de l'«effet intersectionnel» de l'âge et de l'orientation sexuelle dans leurs politiques et programmes, notamment des désavantages multiples subis par les gays, lesbiennes et bisexuels d'âge mûr.
  10. QUE les fournisseurs de soins de santé et de services sociaux reçoivent une formation leur permettant de répondre aux besoins des gays, lesbiennes, bisexuels et transgenres d'âge mûr.
  11. QUE les foyers veillent à ce que leurs résidents gay, lesbiennes, bisexuels et transgenres soient à l'abri de l'homophobie et reçoivent les même droits, à titre d'individus ou de couples, que les autres résidents.
  12. QUE les fournisseurs de soins de santé et d'autres services trouvent des façons d'adapter ces services à la diversité ethnique, culturelle, raciale, linguistique et religieuse de leurs clients.
  13. QU'on amende le Code en éliminant la défense globale de la retraite obligatoire à 65 ans et qu'on amplifie la protection contre la discrimination basée sur l'âge de sorte à inclure les travailleurs de plus de 65 ans. Il faudrait pour cela enlever la limite supérieure de 65 dans la définition de l'âge du paragraphe 10(1). Les employeurs qui désirent avoir une politique de retraite générale pour tous les âges seront tenus de prouver que cette politique repose sur des exigences professionnelles de bonne foi. Il faut également réviser les lois et programmes exigeant des corrections corrélatives.
  14. QUE le Code soit amendé ou non, il faut que le patronat et les syndicats réfléchissent à l'utilité et à la nécessité des politiques obligeant les employés à prendre leur retraite à 65 ans et qu'ils révisent leurs politiques de retraite et leurs conventions collectives afin de promouvoir la flexibilité et le choix.
  15. QUE les employeurs prennent des mesures visant à assurer que leurs politiques et procédures n'aient pas d'effets négatifs sur les travailleurs âgés. Les politiques de l'entreprise portant sur les droits de la personne et les programmes éducatifs doivent aussi traiter de la discrimination basée sur l'âge et du harcèlement des aînés.
  16. QUE le milieu de travail soit exempt de préjugés et de stéréotypes âgistes. Les employeurs devraient également s’assurer que les employés âgés aient les mêmes chances que leurs jeunes collègues. On devrait reconnaître la valeur des travailleurs âgés.
  17. QUE l’administration municipale et les gouvernements provincial et fédéral collaborent afin d’élaborer une stratégie relative aux logements abordables pour les personnes âgées de l’Ontario. Les options à l’étude comprendraient les subventions locatives, les allocations pour le logement et des mécanismes de protection du coût de location pour les personnes âgées. Le concept du «vieillissement chez soi» doit être l’un des principaux points à l’étude.
  18. QUE tous les paliers de gouvernement fassent des efforts pour garantir que le parc de logements sociaux de l’Ontario réponde aux besoins existants et futurs des personnes âgées et des autres groupes de personnes vulnérables.
  19. QUE la Loi de 1992 sur le code du bâtiment de l’Ontario soit modifiée afin de comprendre les meilleurs principes de l’aménagement pour accès facile.
  20. QUE les promoteurs et les constructeurs conçoivent et mettent en œuvre des logements à accès facile qui répondent aux besoins particuliers des personnes âgées, notamment celles qui sont handicapées.
  21. QUE les écoles de médecine et les centres de formation pour les professionnels de la santé et les autres professionnels qui travaillent avec les personnes âgées améliorent l'enseignement sur les besoins des personnes âgées.
  22. QUE les établissements, les installations et les services de santé soient accessibles pour toutes les personnes âgées, en particulier celles qui sont handicapées.
  23. QUE le gouvernement fasse preuve de prudence quant à l'utilisation de critères fondés sur l'âge dans les programmes de santé tels que les programmes d'appareils et d'accessoires fonctionnels, de médicaments d'ordonnance et de soins dentaires.
  24. Conformément au jugement Eldridge, que les fournisseurs de services offrent des services d'interprétation gestuelle au besoin afin de donner un accès égal aux personnes sourdes, devenues sourdes ou malentendantes.
  25. QUE le gouvernement provincial prenne d'autres mesures pour réglementer les maisons de repos et les foyers pour personnes âgées. Les questions à régler pourraient comprendre une déclaration des droits des patients et des normes sur l'utilisation des contraintes et les décisions de fin de vie.
  26. QUE les mécanismes actuellement en place pour traiter des autres formes de violence familiale soient élargis pour comprendre les mauvais traitements à l'égard des personnes âgées.
  27. QUE le gouvernement provincial et l'administration municipale prennent des mesures afin d'appuyer les programmes spéciaux, dont les refuges, pour les victimes de mauvais traitements à l'égard des personnes âgées.
  28. QUE le ministère du Travail inclue les petits lieux de travail (notamment ceux qui comptent moins de 50 employés) dans les nouvelles dispositions liées aux congés de la Loi de 2000 sur les normes d'emploi.
  29. QUE tous les paliers de gouvernement et tous les employeurs songent à offrir diverses formes de soutien aux soignants. Parmi les options à examiner, on compte des programmes (p. ex. des programmes de relève pour les soignants), un soutien financier
    (p. ex. des crédits d'impôt) et des options souples quant à l'emploi.
Activity Type: 

Annexe B : Résumé des engagements de la Commission

  1. La Commission élaborera en 2001-2002 un énoncé de politique sur la discrimination basée sur l’âge.
  2. La Commission doit créer et lancer une campagne de sensibilisation d'envergure sur l'âgisme et la discrimination basée sur l’âge.
  3. La Commission lancera des activités de sensibilisation visant à éduquer le patronat et les travailleurs sur les droits et responsabilités, aux termes du Code, à dissiper les mythes souvent associés aux travailleurs âgés et à encourager les employeurs à avoir une opinion plus positive des travailleurs âgés.
  4. La Commission préparera un document de travail sur le logement et les droits de la personne qui traite des questions relatives aux personnes âgées.
  5. La Commission communiquera avec l'Ordre des médecins et chirurgiens de l'Ontario, l'Ontario Medical Association, l'Association médicale canadienne et d'autres organismes adéquats afin de les informer que l'inégalité de l'accès aux traitements médicaux et aux autres services de santé en raison de l'âge ou d'un handicap peut représenter un cas de discrimination.
  6. La Commission entrera en communication et organisera des rencontres avec des représentants des facultés universitaires telles que les facultés de médecine, sciences infirmières, dentisterie, nutrition, travail social pour discuter de l’urgence d’inclure au curriculum une formation exhaustive sur la discrimination fondée sur l’âge.
  7. La Commission continuera de prendre des mesures pour promouvoir l'accessibilité chez les fournisseurs de services de l'Ontario.
  8. La Commission continuera de surveiller les résultats du plan provincial de la Table ronde sur la Stratégie ontarienne de prévention des mauvais traitements à l'égard des personnes âgées qui relèvent de son mandat.
  9. La Commission élaborera un énoncé de politique sur les soins aux personnes âgées qui cerne les droits de la personne connexes.
  10. La Commission examinera les plaintes où des employés qui prennent soin de parents ou d'un conjoint ou partenaire du même sexe, âgé ou malade, font l'objet d'une discrimination leur «situation de famille», de leur «état matrimonial» ou de leur «relation homosexuelle».
Activity Type: 

Annexe C : Organismes ayant fait part de leurs commentaires


Advocacy Centre for the Elderly
AIDS Committee of Toronto
ARCH
Association canadienne pour la santé mentale – Windsor Essex
Association des Sourds du Canada
Association des travailleuses et travailleurs sociaux de l'Ontario
Award Personnel
C.A.R.P. (Canada’s Association for the Fifty-Plus)
T.C.A. Travailleurs Canadiens de l’automobile
Canadian Centre for Activity and Aging
Centre d'accès aux soins communautaires de Chatham/Kent
Centre d'accès aux soins communautaires de Halton
Centre d'accès aux soins communautaires de Scarborough
Centre d'accès aux soins communautaires d'Ottawa Carleton
Centre d'accès aux soins communautaires Timiskaming
Coalition des organismes d'aînés et d'aînées de l'Ontario
Coalition pour les droits des lesbiennes et personnes gaies en Ontario
Comité directeur pour la justice sociale
Commission des droits de la personne de la Nouvelle-Écosse
Conseil local de formation et d'adaptation de la main-d'oeuvre de Muskoka, Nipissing et Parry Sound
Conseil régional de santé du Nord-Ouest de l'Ontario
Corporation Canadienne des Retraités intéressés
Council on Aging – Frontenac/Kingston
Council on Aging – Ottawa-Carleton
Council on Aging for Renfrew County
Diététistes du Canada
Division des foyers pour personnes âgées de la Ville de Toronto
Elderly Services Advisory Committee (ESAC) de la région de Halton
Faculty Group: Carleton University
Fair Rental Policy Organization of Ontario
Finnish Social Counselling Service of Toronto Inc.
Générations unies Ontario
Golden Years Club
Halton Health Department, Community Health Services Department
KFL&A Community Care Access Centre
Manufacturiers et Exportateurs du Canada (division de l'Ontario)
Ministère de la Santé et des Soins de longue durée
Ministère des Affaires municipales et du Logement
Ministère du Travail
Older Women’s Network
Ontario Association of Non-Profit Homes and Services for Seniors
Organisation nationale anti-pauvreté
Over 55 (London) Inc.
Phone Busters (Police provinciale de l'Ontario)
Registered Practical Nurses Association of Ontario
Senior Link
Société Alzheimer de l'Ontario
Société canadienne de l'ouïe (London)
Société canadienne de l'ouïe (Ottawa)
Société canadienne de l'ouïe (Sudbury)
Société canadienne de l'ouïe (Toronto)
Société canadienne d'hypothèques et de logement
The Alliance of Seniors to Protect Canada’s Social Programs
The Toronto Board of Trade
Union culturelle des Franco-Ontariennes
United Senior Citizens of Ontario

De nombreux particuliers nous ont également fait part de leurs suggestions lors de la consultation. Par souci de respect de leur vie privée, la Commission a choisi de ne pas publier leur nom. La Commission leur est très reconnaissante.