Compte tenu du fait que le handicap constitue le principal motif de plaintes en droits de la personne, la CODP poursuit son travail en vue d’apporter des changements systémiques au bénéfice des personnes handicapées de l’ensemble de l’Ontario. Nous n’aurons réussi que lorsque tout le monde pourra mettre ses habiletés à profit, plutôt que de traîner de l’arrière en raison d’un handicap. Au cours de la dernière année, nous avons posé une variété de gestes, du fait de critiquer des règlements gouvernementaux à celui d’intervenir devant la Cour Suprême du Canada, en passant par la sensibilisation des employeurs, fournisseurs de services et membres du public.
Dans le cadre de son travail de mise en œuvre de la Loi de 2005 sur l’accessibilité pour les personnes handicapées de l’Ontario (LAPHO), le gouvernement de l’Ontario propose de modifier les exigences du Code du bâtiment de l’Ontario en matière d’accessibilité. Les modifications touchent un certain nombre de domaines dont les rénovations, les voies de déplacement, l’accès à la verticale, l’aménagement et la construction adaptables, les alarmes incendie visuelles, les toilettes, ainsi que l’utilisation du matériel et des ressources d’éducation.
Au fil des ans, chaque nouvelle édition du Code du bâtiment a accru l’accessibilité, tendance que poursuit cette version. Dans son mémoire de mars 2013 au ministère des Affaires municipales et du Logement sur les changements proposés, la CODP faisait part de préoccupations persistantes et émettait des recommandations en vue de promouvoir davantage l’accessibilité.
Les points saillants des recommandations incluent ce qui suit :
Chaque jour, les personnes handicapées sont confrontées à d’énormes obstacles systémiques. Si on en avait tenu compte lorsque le système de communication, le bâtiment ou encore les systèmes d’emploi ont été mis en place, on aurait pu y remédier à faible coût. Mais comme on ne s’est pas du tout penché sur l’inclusion des personnes handicapées au stade de la planification, on se retrouve subitement avec un bâtiment qui n’est accessible que par une volée d’escalier, par le quai de chargement situé à l’arrière où l’on trouve aussi les poubelles, etc.
- David Baker, associé principal de Bakerlaw
Confrontés à l'exclusion et à des obstacles au quotidien
En octobre 2012, nous avons transmis au ministère des Services sociaux et communautaires un mémoire sur les changements proposés aux Normes d’accessibilité intégrées (NAI) prévues aux termes de la LAPHO.
Ces changements incluent la modification des normes existantes et l’introduction de nouvelles normes d’accessibilité au milieu bâti pour la conception des espaces publics extérieurs (sentiers récréatifs, voies accessibles menant à une plage, escaliers, rampes de bordure, signalisation piétonnière, aires de jeu, stationnements, comptoirs de service et autres).
Nous avons constaté des lacunes importantes et formulé des recommandations. Par exemple :
Trop souvent, des obstacles physiques empêchent les gens de voter, de se prononcer sur leurs gouvernements et d’y jouer un rôle. Depuis plusieurs années, la CODP a fait pression pour que des changements soient apportés au processus électoral de l’Ontario, pour le rendre plus accessible aux personnes handicapées. Nous avons poursuivi ce travail en 2012, en rencontrant les responsables d’Élections Ontario et en les conseillant sur les méthodes de vote de rechange par Internet ou téléphone.
Dans un mémoire de décembre, nous nous sommes prononcés en faveur de ces méthodes de vote accessibles et des huit principes électoraux établis par Élections Ontario : accessibilité, un électeur/un vote, authentification des électeurs et autorisation du vote, prise en compte des suffrages exprimés par des électeurs admissibles uniquement, vérifiabilité au cas par cas, confidentialité, validation des résultats et disponibilité du service.
Le principe électoral d’« accessibilité » reconnaît que les personnes handicapées devraient être capables de voter sans assistance. Ce principe devrait également englober les principes suivants de droits de la personne : conception inclusive, respect de la dignité et prise en compte des besoins individuels. La conception inclusive signifie que l’objectif idéal devrait être de permettre à autant de personnes que possible, handicapées ou non, d’utiliser la même technologie de vote et les mêmes procédures (sur place ou à distance), tout en reconnaissant que certaines personnes handicapées pourraient tout de même avoir besoin de mesures d’adaptation différentes.
Nous avons également discuté du fait que les autres principes électoraux ont des répercussions sur les personnes handicapées. Par exemple, les mécanismes et procédures de vote doivent permettre aux électeurs handicapés de vérifier leur choix de vote eux-mêmes et en toute confidentialité. La disponibilité des services et leur facilité d’utilisation devraient également être les mêmes pour les personnes handicapées. Ces électeurs devraient être en mesure de voter en utilisant un équipement facile d’accès le jour des élections, pas seulement lors du vote par anticipation. Dans un monde idéal, les personnes handicapées auraient également la possibilité d’utiliser une technologie de vote à distance le jour des élections.
Parmi nos autres recommandations à Élections Ontario figurent :
La CODP continuera de fournir des conseils et d’encourager la création d’un processus électoral plus accessible pour les Ontariennes et Ontariens handicapés.
Les personnes handicapées font également face à d’importants obstacles d’ordre économique. La CODP est intervenue dans une affaire devant le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario, dans le cadre de laquelle on demandait que soit réexaminée une décision de ne pas accorder de compensation salariale à une femme. Atteinte de déficience intellectuelle, la femme travaillait en compagnie de collègues qui n’avaient pas de déficience, et faisaient le même emploi. Or, ces personnes gagnaient le salaire minimum, tandis qu’elle ne touchait que 1 $/h. Dans un premier temps, le TDPO avait jugé que la mise à pied de la plaignante était discriminatoire, mais n’avait pas pris en compte sa perte de salaire parce qu’il n’était pas d’avis qu’elle avait subi de discrimination soutenue sur le plan salarial. Le TDPO a accepté de réexaminer l’affaire, et devrait rendre une décision sur l’allégation de discrimination relative au salaire.
Dans le cadre de cette cause, portée devant la Cour suprême du Canada, un élève atteint d’une dyslexie grave alléguait qu’il avait été victime de discrimination en matière de services éducatifs parce qu’il n’avait pas reçu les mesures d’adaptation appropriées pour compenser sa dyslexie grave. Nous sommes intervenus pour plaider que, dans les codes des droits de la personne, la catégorie des « services » devrait être interprétée libéralement et que, pour démontrer qu’il y a eu discrimination, les personnes qui requièrent des mesures d’adaptation en raison d’un handicap ne doivent pas être tenues de démontrer qu’elles ont reçu un traitement moins favorable que d’autres personnes nécessitant des mesures d’adaptation.
Dans sa décision de novembre 2012, la Cour a adopté nos arguments et jugé que Jeffrey Moore avait droit à un accès véritable à la même éducation que l’ensemble des élèves. Pour démontrer qu’il s’agissait de discrimination, le plaignant a pu comparer les services qu’il avait reçus à ceux auxquels tous les élèves avaient eu droit, et non aux services reçus par d’autres étudiants handicapés. La Cour a confirmé l’obligation d’accommodement jusqu’au point de préjudice injustifié. Elle a déterminé que Jeffrey Moore n’avait pas eu droit à des mesures d’adaptation suffisantes pour lui donner un accès égal au système d’éducation. Puisqu’il n’avait pas examiné comment gérer ses finances tout en fournissant des mesures d’adaptation aux élèves handicapés, le conseil scolaire n’a pas pu démontrer que son manque d’accommodement était justifiable. Nous travaillons avec les personnes handicapées pour utiliser cette décision afin de favoriser l’éducation inclusive.