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Énoncé de politique sur l’adoption d’une approche de gestion de la pandémie de COVID 19 fondée sur les droits de la personne

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Aux termes du Code des droits de la personne de l’Ontario (Code), la Commission ontarienne des droits de la personne (CODP) a pour mandat d’élaborer des politiques offrant des indications sur les obligations en matière de droits de la personne prévues au Code et de formuler des recommandations visant à favoriser le respect des droits de la personne durant des périodes de tension ou de conflit.

Cet énoncé de politique fournit à tous les paliers de gouvernement des indications sur les principes qui sous-tendent l’adoption d’une approche de gestion de la pandémie de COVID‑19 fondée sur les droits de la personne. Il offre des conseils de haut niveau applicables à un éventail de mesures stratégiques, juridiques, réglementaires, d’urgence et de santé publique qui pourraient être adoptées en réponse à la pandémie de COVID‑19.

Cet énoncé de politique a été conçu pour accompagner le document de la CODP intitulé Mesures reposant sur une approche de gestion de la pandémie de COVID‑19 fondée sur les droits de la personne, qui propose une série de mesures gouvernementales tirées d’une variété d’organismes de droits de la personne. Ces mesures reposent sur une approche de gestion de la pandémie de COVID‑19 fondée sur les droits de la personne et sur les principes mis de l’avant dans le présent énoncé de politique.

 

Généralités et contexte

D’une façon ou d’une autre, la pandémie de COVID‑19 qui sévit a eu un impact sur chacun des 7,8 milliards d’habitants de la planète. Elle a obligé le gouvernement de l'Ontario et les autres gouvernements du pays et du monde entier à adopter des mesures novatrices, souvent sans précédent, pour réagir à la situation. La mise en œuvre de campagnes de santé publique d’envergure, les restrictions imposées à la liberté de mouvement et aux interactions sociales, et l’adoption de plans d’intervention économique ciblés en sont des exemples.

Cependant, les mesures adoptées pour protéger la santé publique et le droit des personnes à la santé peuvent avoir des effets négatifs sur le droit à la santé de certains ou sur d’autres droits de la personne, comme la liberté de mouvement et d’association et les droits relatifs à l’éducation, à l’emploi et à la non-discrimination.

Les mesures prises pour gérer la pandémie de COVID‑19 doivent se conformer aux traités internationaux relatifs aux droits de la personne desquels le Canada est signataire, aux lois du pays relatives aux droits de la personne et à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Les lois ontariennes et fédérales traitant de la déclaration de situations d’urgence reconnaissent expressément l’importance de maintenir les protections existantes en matière de droits de la personne, même en situation d’urgence.

La pandémie offre également l’occasion, sur le plan générationnel, d’assurer plus efficacement l’exercice des droits protégés par le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. De nombreux groupes sont particulièrement vulnérables aux répercussions négatives de la COVID‑19, précisément parce que leurs droits économiques, sociaux et culturels, leurs droits à l’égalité et leurs droits en tant que personnes autochtones n’ont pas été protégés ou exercés de façon efficace en Ontario et au Canada depuis de nombreuses décennies.

La mise en œuvre de programmes et de politiques qui respectent le présent énoncé de politique aidera à protéger la santé publique et les droits de la personne durant la pandémie de COVID‑19. La gestion de la pandémie selon une approche fondée sur les droits de la personne offre aux gouvernements une occasion unique d’aider tout un chacun, y compris les groupes vulnérables, durant la crise et pendant des générations.

 

Répercussions de la pandémie de COVID‑19 sur les droits de la personne des groupes vulnérables

Les groupes les plus vulnérables de la société canadienne subissent de façon disproportionnée les contrecoups de la pandémie de COVID‑19. Les personnes ayant des identités multiples et croisées (p. ex. femmes et filles autochtones, personnes âgées de l’Asie de l’Est) pourraient être particulièrement vulnérables. Dans cet énoncé de politique, le terme « groupes vulnérables » revêt un sens large, qui inclut les personnes suivantes :

  • membres des Premières Nations et des peuples et communautés inuites et métisses, y compris les communautés urbaines, rurales, éloignées et du Nord
  • personnes de l’Asie de l’Est et autres communautés racialisées
  • travailleurs à statut précaire et travailleurs étrangers temporaires
  • personnes en situation de pauvreté, qui vivent dans des refuges, sont sans-abri ou risquent de le devenir
  • femmes et enfants en situation de violence conjugale et (ou) de violence à l’égard des enfants
  • parents seuls
  • personnes ayant des handicaps ou des besoins en matière de santé mentale et (ou) de dépendance
  • membres des communautés LGBTQ2+
  • personnes âgées
  • personnes vivant seules ou dans des établissements gouvernementaux
  • prisonniers.

Les répercussions de la COVID‑19 sur les droits de la personne des groupes vulnérables incluent ce qui suit :

  • risques supérieurs de contracter la COVID‑19 en raison de la situation sociale
  • gestes haineux, racisme, discrimination et (ou) harcèlement
  • perte d’emploi menant à la perte du revenu du ménage et à une plus grande pauvreté
  • perte de logement
  • interruption des études
  • violence familiale et menaces à la sécurité et au bien-être
  • séparation des fournisseurs de soins
  • intervention possible des services de bien-être de l’enfance
  • répercussions négatives sur le traitement ou la gestion de handicaps préexistants ou de dépendances, ou sur la satisfaction de besoins en matière de santé mentale
  • accès restreint à des services de soutien médical ou autres
  • application discriminatoire éventuelle de mesures d’urgence ou de mesures relatives à la santé publique
  • risque de renvoi (refoulement) de réfugiés, qui sont déportés ou interdits d’entrée au Canada
  • exclusion sociale.

En l’absence d’une approche de gestion de la COVID‑19 délibérément fondée sur les droits de la personne, qui inclut des mesures de surveillance par un organisme indépendant, la pandémie ne fera qu’exacerber les inégalités actuelles dont sont victimes les groupes vulnérables. Conformément au rapport final de la Commission de vérité et réconciliation, les gouvernements doivent également reconnaître que les communautés autochtones figurent parmi les groupes les plus vulnérables, en grande partie en raison des effets préexistants et permanents du colonialisme et du racisme.

 

Principes d’une approche de gestion de la pandémie de COVID‑19 fondée sur les droits de la personne

  1. Reconnaissance du fait que la prévention et la gestion de la COVID‑19 constituent une obligation en matière de droits de la personne

    1. Reconnaître que la pandémie de COVID‑19 fait intervenir le droit à la santé et à la vie aux termes des instruments internationaux et lois relatives aux droits de la personne du Canada.

    2. Reconnaître que tous les paliers de gouvernement ont, aux termes de la loi, l’obligation de prendre des mesures préventives pour empêcher la propagation de la COVID‑19 et de traiter les personnes atteintes du virus, sans discrimination. Cela pourrait obliger les gouvernements à prendre les mesures additionnelles nécessaires pour prévenir et traiter la COVID‑19 chez les groupes vulnérables.

    3. Reconnaître que les lois relatives aux droits de la personne exigent l’atténuation des répercussions possibles sur les droits autres que les droits à la santé et à la vie, y compris les droits relatifs à l’alimentation, au logement, à l’emploi, à l’éducation, à l’égalité, à la vie privée, à l’accès à l’information, et à la liberté d’association, d’expression et de mouvement, ainsi que le droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.\

    4. Reconnaître que les lois canadiennes et les instruments internationaux relatifs aux droits de la personne interdisent l’adoption de mesures discriminatoires, y compris le harcèlement, à l’endroit de personnes ou de communautés quelconque en raison d’une association présumée ou réelle à la COVID‑19.

 

  1. Respect des droits des membres des Premières Nations et des peuples inuits et métis (peuples autochtones)

    1. Prévoir des engagements et des partenariats respectueux, nation à nation, avec une variété d’administrations, de communautés, d’organisations et de gardiens du savoir autochtones pour veiller à ce qu’on réagisse à la pandémie de COVID‑19 d’une façon sécuritaire et appropriée sur le plan culturel.
    2. Reconnaître que les effets négatifs permanents du colonialisme sur les communautés autochtones viendront exacerber les répercussions de la COVID‑19, qui se feront particulièrement sentir chez les femmes et enfants, personnes handicapées, personnes aux prises avec des dépendances et personnes âgées membres des communautés autochtones.
    3. Adopter des mesures additionnelles et offrir un financement dans le but de protéger la santé et les droits des personnes autochtones, ce qui comprend l’octroi de fonds en vue d’assurer l’accès à :
      • un logement adéquat
      • des soins de santé et de santé mentale sécuritaires sur le plan culturel
      • de l’eau salubre et des installations sanitaires sécuritaires
      • des services de soutien aux femmes et enfants, personnes handicapées, personnes aux prises avec des dépendances et personnes âgées
      • tous les autres services essentiels à LA résolution de la pandémie de la COVID‑19.
    4. Fournir un financement conforme au Principe de Jordan lorsqu’il y a un risque de conflit relatif à la compétence des différents paliers de gouvernement.
    5. Obtenir le « consentement préalable libre et éclairé » des peuples autochtones touchés avant d’adopter et de mettre en œuvre quelque mesure législative, administrative, stratégique, budgétaire ou réglementaire que ce soit en réponse à la COVID‑19 qui pourrait avoir une incidence sur leur vie, conformément à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.
    6. Respecter le droit des peuples autochtones à l’autonomie gouvernementale et permettre aux peuples autochtones de continuer de se gouverner durant la pandémie de COVID‑19. Cela inclut le fait de respecter l’autorité des communautés autochtones en matière de restriction de l’accès à leurs communautés dans le but de prévenir la propagation de la COVID‑19 à leurs résidents.
    7. En consultation et en coopération avec les peuples autochtones, prendre des mesures efficaces pour veiller à ce que les peuples autochtones qui vivent de part et d’autre de frontières nationales ou internationales soient en mesure d’entretenir et de développer leurs contacts, leurs relations et leurs liens de coopération, conformément à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

 

  1. Limitation rigoureuse des mesures qui violent les  

    1. Veiller à ce que toutes les mesures d’urgence ou de santé publique qui sont jugées nécessaires pour prévenir la propagation de la COVID‑19, mais qui restreignent l’exercice des droits, soient assorties de délais et soumises à des examens réguliers.
    2. Reconnaître que la Charte des droits et libertés et les obligations nationales et internationales du Canada en matière de droits de la personne exigent qu’on puisse démontrer que toute mesure adoptée qui restreint l’exercice des droits est nécessaire, légitime et proportionnelle.
    3. Reconnaître que toutes les mesures restrictives qui privent les personnes de leur droit à la liberté doivent être appliquées conformément à la loi dans le respect des droits fondamentaux. Cela inclut sans s’y limiter les mesures relatives aux :
      • prisonniers
      • personnes faisant l’objet d’une détention liée à l’immigration
      • personnes détenues dans des établissements de santé mentale
      • jeunes en détention
      • enfants pris en charge
      • personnes âgées logées dans des foyers de soins de longue durée
      • travailleurs étrangers temporaires qui doivent habiter sur place, à leur lieu de travail.
    4. Veiller à ce que des protections juridiques fondées sur les droits de la personne régissent l’utilisation et la manipulation appropriées des renseignements personnels sur la santé. 

 

  1. Protection des groupes vulnérables

    1. Anticiper et évaluer les répercussions disproportionnées de la COVID‑19 et des restrictions connexes sur les groupes vulnérables qui font déjà l’objet disproportionné de violations des droits de la personne, et prendre des mesures pour limiter ces répercussions.
    2. Assurer l’accès équitable des groupes vulnérables aux soins de santé et aux autres mesures adoptées pour enrayer la COVID‑19, y compris l’aide financière et autre accordée.
    3. Prendre ses décisions après consultation des groupes vulnérables et autres communautés les plus touchées.
    4. Prendre des mesures pour atténuer les répercussions sexospécifiques et faire en sorte que les mesures prises pour enrayer la COVID‑19 ne favorisent pas le maintien des inégalités hommes-femmes.
    5. Veiller à ce que les mesures d’urgence et de santé publique tiennent compte des besoins en matière d’accessibilité et autres des personnes handicapées qui affichent une susceptibilité accrue à la COVID‑19 et pourraient relever des défis additionnels lorsqu’il s’agit d’obtenir des services, des fournitures et des aliments, et de satisfaire d’autres besoins en raison des mesures restrictives en place.
    6. Protéger et tenir compte des besoins des personnes aux prises avec des dépendances à l’alcool et aux drogues, qui sont déjà plus vulnérables aux maladies et aux répercussions graves sur la santé de la COVID‑19, entre autres en adoptant une approche de gestion de la dépendance à l’alcool et aux drogues fondée sur les principes de santé publique (p. ex. assurer l’accès à des sites de consommation sécuritaires, instaurer un moratoire sur les arrestations et poursuites pour infractions liées aux stupéfiants).
    7. Veiller à ce que toutes les activités policières d’application des mesures d’urgence ou de santé publique ne visent ou ne criminalisent pas de façon disproportionnée les peuples autochtones, les communautés racialisées, les personnes en situation de précarité de logement, les personnes qui ne peuvent pas s’isoler ou les personnes aux prises avec des troubles mentaux et (ou) des dépendances.

 

  1. Réaction au racisme, à l’âgisme, au capacitisme et aux autres formes de discrimination

    1. ​Veiller à ce que les mesures prises en réponse à la COVID‑19 soient fondées sur des éléments de preuve et qu’elles remettent en question, rejettent et réfutent délibérément les stéréotypes.
    2. Anticiper et prendre en compte la possibilité que certaines communautés se heurtent à davantage de racisme, d’âgisme et de capacitisme en raison de la réaction du gouvernement à la pandémie de COVID‑19.
    3. En collaboration et en coopération avec les groupes vulnérables, prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger de façon proactive les personnes et communautés contre la haine, le racisme, l’âgisme, le capacitisme et la discrimination faite par des particuliers.
    4. Surveiller et divulguer toute tendance sur le plan de la haine et de la discrimination associée à la COVID‑19, et appliquer les sanctions appropriées, y compris toute poursuite appropriée au criminel.

 

  1. Renforcement de la responsabilisation et de la surveillance en matière de droits de la personne

    1. Consulter les organismes et experts des droits de la personne, les dirigeants autochtones et les gardiens du savoir, les groupes vulnérables, ainsi que les personnes et communautés touchées par la COVID‑19 au moment de prendre des décisions ou des mesures, et d’octroyer des ressources.
    2. Créer des fonctions consultatives officielles pour les gardiens du savoir autochtones et les représentants des commissions des droits de la personne au sein des groupes d’études et de travail et comités spéciaux sur la COVID‑19 du gouvernement.
    3. Adopter une approche délibérée et exhaustive de responsabilisation et de surveillance en matière de droits de la personne, qui est coordonnée avec les autres paliers de gouvernement et qui anticipe, prévient et atténue dès le début les violations aux droits de la personne.
    4. Recueillir des données relatives au droit à la santé et aux autres droits de la personne qui sont désagrégées par motifs du Code, soit l’ascendance autochtone, la race, l’origine ethnique, le lieu d’origine, la citoyenneté, l’âge, le handicap, l’orientation sexuelle, l’identité sexuelle, la condition sociale et autres, et qui ont trait aux mesures adoptées en réaction à la pandémie de COVID‑19.
    5. À intervalles réguliers, surveiller les répercussions de la pandémie de COVID‑19 et de sa gestion sur les droits de la personne, y compris les inégalités et autres résultats observés, et en faire rapport.